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PARIS, IMPRIMERIE DE COSSON, RUE S.-GERMAIN-DES-PRÉS, No 9.

SYNONYMIQUE

DE

LA LANGUE FRANÇAISE,

CONTENANT

1° LES MOTS ET LES LOCUTIONS DE CETTE LANGUE QUI ONT QUELQUES RAPPORTS DE RESSEMBLANCE
POUR LE SENS; 2° L'EXPLICATION DE CES RAPPORTS, AVEC DES EXEMPLES TIRÉS DES AUTEURS
CLASSIQUES; 3° L'INDICATION DU CHOIX QU'ON DOIT FAIRE DES UNS ET DES AUTRES DANS LES
DIFFÉRENTES CIRCONSTANCES; 4° LA CRITIQUE D'UN GRAND NOMBRE D'EXPLICATIONS SYNONY-
MIQUES DONNÉES PAR LES PRINCIPAUX SYNONYMISTES, etc., etc.

PAR J.-CH. LAVEAUX,

AUTEUR DU GRAND DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE, ET DU
DICTIONNAIRE DES DIFFICULTÉS DE CETTE LANGUE.

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A. THOISNIER-DESPLACES, RUE DE SEINE, No 29;

NEW-YORCK,

MÊME MAISON DE COMMERCE, WILLIAM-STREET, N° 105.

M DCCC XXVI.

A

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EBAHI, ÉBAUBI, ÉMERVEILLÉ, STU-1

PEFAIT. Ces termes sont familiers; ébaubi est même populaire et vieux.

Nous sommes ébahis par la surprise qui nous fait tenir la bouche béante, comme il arrive aux enfans et aux badauds, avec l'air de l'enfance ou de l'ignorance prompte à admirer. Nous sommes ébaubis par une surprise qui nous étourdit, nous déconcerte, nous laisse à peine balbutier, et nous tient comme suspendus dans le doute. Nous sommes émerveillés par une surprise qui nous attache avec une espèce de charme, ou une vive satisfaction, à la considération d'un objet qui nous paraît merveilleux, supérieur à notre intelligence. Nous sommes stupéfaits par une surprise qui nous rend immobiles et semble nous ôter l'usage de l'esprit et des sens, comme si nous étions stupides.

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ÉBAUBI. V. EBAHI.

ÉBAUCHE, ESQUISSE. Ces deux mots consacrés aux arts du dessin, se disent d'un premier travail qui donne l'idée d'un ouvrage conçu par le génie ou commencé par l'art.

L'esquisse est le tracé rapide de la pensée d'un sujet. Un peintre qui a imaginé un sujet et qui veut l'exécuter, est partagé d'abord entre une multitude de formes qui se présentent à son imagination. Enfin il en choisit une qui lui paraît préférable à toutes les autres, il s'y attache avec ardeur, et, pour n'en pas perdre le souvenir, il la fixe avec empressement sur le papier par un dessin où, négligeant toutes les parties de l'art qui ne concourent pas à son but, il ne représente que ce qui peut donner une idée vive de son sujet et de la manière dont il le conçoit. C'est ce dessin sans ombre et formé de simples traits que l'on appelle esquisse.

Les badauds, dit-on, sont ébahis dès qu'ils voient quelque chose de nouveau. Une per- L'ébauche est un ouvrage commencé. Si le sonne qui voit arriver un évènement tout-à-peintre, après avoir donné à son esquisse toute fait contraire à son attente et qu'elle ne peut pas croire, dira:

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la perfection possible, le prend pour modèle d'un tableau où il distingue les différentes parties de son sujet par les différentes couleurs qu'il a dessein de leur donner, il fait une ébauche.

Dans une esquisse, on reconnaît le genre de l'artiste, on voit les mouvemens de son ame, le feu dont il a été animé dans la distribution de ses figures et l'ensemble de sa composition. Par une ébauche, on juge de la manière dont

l'ouvrage sera exécuté. L'esquisse indique le génie de l'artiste, l'ébauche son habileté.

L'esquisse indique plus sûrement le génie de l'artiste, que l'ébauche n'indique son habileté; car dans l'esquisse tout l'esprit du sujet est marqué distinctement; et dans l'ébauche, la manière de faire, quoiqu'indiquée d'une manière précise, par le commencement de l'exécution, ne peut former qu'une prévention favorable pour le mérite de la continuation, et non établir une connaissance positive comme l'esquisse.

On dit dans l'Encyclopédie que l'esquisse est toujours moins que l'ébauche; cela est vrai si l'on ne considère que l'avancement de l'ouvrage; cela est faux si l'on considère ses qualités essentielles qui émanent particulièrement de celles du sujet. L'invention et la composition sont les principales parties d'un tableau, et l'esquisse en donne l'idée; les couleurs viennent ensuite, et elles sont indiquées par l'ébauche. Assurément un tableau ébauché est plus avancé que l'esquisse où le sujet de ce tableau est simplement esquissé; mais l'esquisse qui donne l'idée essentielle du sujet et fait connaître le génie du peintre est plus importante que l'ébauche qui n'indique que les qualités relatives aux couleurs.

Celui qui est ébloui est dans l'admiration; celui qui est fasciné est dans l'illusion et l'en chantement.

S'ÉBOULER, S'ÉCROULER. L'idée commune de ces deux mots est de tomber par parties ou par morceaux, en roulant ou en s'affaissant les unes sur les autres.

Les choses légères amoncelées sans aucun appui ni soutien s'éboulent, c'est-à-dire tombent par parties en roulant du haut en bas les unes sur les autres. Les choses solides et assujetties les unes sur les autres, ou les unes à côté des autres, s'écroulent, c'est-à-dire tombent avec précipitation et fracas les unes sur les autres, lorsque leurs appuis on leurs liaisons viennent à manquer par vétusté ou autrement.

Les terres sèches et légères, les sables amon

celés, s'éboulent. Les édifices s'écroulent, lorsque les fondemens ou quelque partie essentielle à leur soutien vient à manquer. Un bas

tion de terre sablonneuse s'éboule de lui-même. Pour qu'un bastion solide et revêtu de pierres s'écroule, il faut que le temps ou le canon ait désuni ses principales parties. Ceux qui creuvelis par des éboulemens. Lorsque le ciel d'une sent sous terre courent risque d'y être ensecarrière s'écroule, il écrase les ouvriers qui y

travaillent.

ÉBRANLEMENT, SECOUSSE, COMMOTION. La secousse est un mouvement subit et prompt, qui se fait sentir en même temps dans toutes les parties d'un corps. La secousse tend au déplacement des parties solidement unies dont le corps est composé, et sous ce

ÉBAUCHER, COMMENCER. Ébaucher, dans le sens propre, signifie mettre sur les murs un enduit qu'on appelle banche. Dans l'usage ordinaire, c'est commencer un ouvrage, tracer grossièrement quelque ouvrage en attendant, jeter les premières pensées sur le pa-point de vue, c'est l'ébranlement. pier.

ÉBLOUIR, FASCINER. Ces deux mots marquent au propre des effets opérés sur les yeux, qui les empêchent de regarder fixement les objets ou de les distinguer et de les voir tels qu'ils sont. Mais éblouir vient d'une lumière trop vive et trop éclatante; et fasciner de quelque corps étranger, de quelque illusion qui fait voir les objets autrement qu'ils ne sont. Au figuré, éblouir c'est surprendre l'esprit par quelque chose de vif, de brillant, de spécieux. On éblouit par l'appât des honneurs,

des richesses.

Fasciner dit plus qu'éblouir; il suppose dans les choses qui éblouissent, un certain charme secret, mais faux et trompeur, et dans ceux qui sont éblouis une exaltation, une exagération qui leur fait paraître les choses autres qu'elles ne sont.

La commotion est une agitation confuse et indéterminée par la continuité d'un mouvement quelconque, qui agit sur les plus petites parties du corps, sans tendre à les diviser.

On éprouve une secousse de tremblement de terre. La secousse d'un tremblement de terre produit l'ébranlement des édifices. La commotion se fait sentir bien loin au-delà des parties ébranlées.

ÉBRASER, ÉLARGIR. Élargir, c'est, en général, rendre une chose plus large, lui donner plus d'étendue en largeur. Ébraser est un terme d'architecture qui se dit de l'action d'élargir en dedans la baie d'une porte ou d'une croisée.

ÉBROUEMENT, ÉTERNUEMENT. Ce que l'on nomme éternuement chez l'homme se nomme ébrouement chez le cheval.

ÉBRUITER, DIVULGUER. Ces deux mots On est ébloui par l'éclat des richesses; on ont rapport à la connaissance que l'on donne est fasciné par des complaisances perfides, par aux autres d'une chose secrète. On ébruite de fausses caresses. Ce qui éblouit a un éclat par indiscrétion, par imprudence, par légè réel¿ ce qui fascine a un charme trompeur. [reté; on divulgue de dessein prémédité, dans

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