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Je communiquai les premières à quelques amis qui, comme moi, furent frappés de la richesse et de l'énergie de notre jargon ( peut-être trop décrié), mais sur-tout de son étonnante flexibilité à toutes les mesures de vers, à tous les genres de styles.

On voulut en tirer des copies; je les laissai prendre. On me parla de l'impression : je m'y refusai. L'inutilité, au moins, et peut-être l'inconvénient d'alimenter un jargon que le Gouvernement allait, sansdoute, faire disparaître du sol de l'Empire français, furent alors furent alors, les motifs de

mon refus.

Aujourd'hui, MESSIEURS, ces deux motifs me paraissent n'avoir plus le même poids; puisque le Gouvernement luimême a fait insérer dans la statistique de ce Département, la chanson patoise que je fis sur la conscription de 1808, et que la morale des Fables parvenant à la connaissance des cultivateurs, peut contribuer à les rendre meilleurs, et par conséquent contribuer à augmenter la masse du bonheur social.

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Vous savez aussi bien qué moi, MESSIEURS, què les Fables du bon LA FONTAINE sont un traité complet de morale; que nos devoirs envers Dieu, envers le prochain, envers nous-mêmes, y sont tracés avec les caractères d'une' naïveté inimitable; que toutes les vertus y brillent de l'éclat qui est propre à chacune d'elles, dans quelqu'état qu'elle se montre; enfin que tous les vices y sont châtiés, sans acception de personnes, avec la verge salutaire du ridicule si difficile à manier.

J'ai donc pensé qu'un pareil tableau mis sous les yeux de l'habitant de nos campagnes ne pouvait que hâter les progrès de son instruction, et j'ai déjà quelques données pour pouvoir espérer d'obtenir cet heureux résultat.

Pendant mon séjour à la campagne, durant la belle saison, j'ai fait réciter, le soir à la veillée, quelques-unes de mes Fables, dans les réunions de ces braves gens, qui se faisaient habituellement chez moi. L'impression faite sur eux, en excitant ma surprise, a été une jouissance

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viij bien douce pour mon cœur. Ils ont dit à la jeune personne qui les récitait : moun-dïü! domoueizélo coumo qu'ey bravé! visas, dirias qué qu'ey de las conférénças. Et ils la prièrent d'en faire apprendre quelques-unes par cœur à leurs enfans. Ce qu'elle fit.

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1 Voilà, MESSIEURS, ce qui m'a décidé à livrer à l'impression, un travail que je n'avais entrepris que pour moi. Je vous prie d'en accepter la Dédicace. Je sais bien qu'en vous l'offrant, je ne fais qu'acquitter une bien petite partie de ma dette mais je sais aussi qu'une Société d'Agriculture aliache toujours du prix à tout ce qui peut intéresser le bonheur des agriculteurs.

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C'est dans cette confiance que je vous prie de permettre que mon travail leur soit présenté sous vos auspices. L'accueil que le public va faire à cette production d'un genre extraordinaire et tout nouveau,. est, sans doute bien incertain; il ne le serait plus s'il était précédé du vôtre.

J. FOUCAUD.

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SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE.

Séance du 7 décembre 1808.

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MONSIEUR FOUCAUD offre à la Société la Dédicace de quelques Fables de LA FONTAINE, qu'il a mises vers patois. Après la lecture de son épître dédicatoire, il communique deux de ces Fables dont la versification facile et piquante, confirme l'assemblée dans la haute idée qu'elle avait des talens de l'auteur et prouve, comme il le dit luimême, que le patois Limousin est d'une telle flexibilité, qu'il se prête à toutes les mesures de vers, à tous les genres de style.

L'assemblée, après avoir témoigné sa gratitude à M. FOUCAUD, par l'organe de son Président, arrêté que ses Fables seront renvoyées à une commission char gée d'en faire un rapport : elle nomme pour la composer, MM. Dumas, JugeSt.-Martin et Brigueil.

Séance du 11 décembre:

MESSIEURS,'

NOTRE collègue, M. FoUĆAUD, ayant manifesté l'intention de vous dédier une traduction en vers patois de quelques Fables qu'il a choisies parmi celles de LA FONTAINE, Vous avez nommé une commission pour vous rendre compte de son ouvrage. Elle a reconnu, à sa lecture, que M. FOUCAUD avait excellé dans le choix du sujet en entreprenant de parodier les Fables d'un Poëte qui a été surnommé le Poëte de la nature, et qui, ayant su réunir la finesse à la naïveté, a attrapé le point de perfection dans le genre de l'apologue.

Votre commission a retrouvé dans la traduction de M. FOUCAUD les mêmes charmes de l'expression et du badinage, et cette molle négligence qui décelait dans son modèle le grand-maître et l'écrivain original : même aisance, même vivacité dans les réflexions morales que

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