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Apprenez un mot de Regnier,
Notre célebre devancier :

« Corsaires attaquant corsaires
«Ne font pas, dit-il, leurs affaires. »

XXIX. Réplique à une epigramme faite an nom des mémes journalistes.

NON, pour montrer que Dieu veut être aimé de nous, Je n'ai rien emprunté de Perse ni d'Horace,

Et je n'ai point suivi Juvénal à la trace.

Car, bien qu'en leurs écrits ces auteurs, mieux que

Vcus,

Attaquent les erreurs dont nos ames sont ivres,
La nécessité d'aimer Dieu

Ne s'y trouve jamais prêchée en aucun lieu,
Mes Peres, non plus qu'en vos livres.

XXX. Sur le livre des Flagellants, composé par mon frere le docteur de Sorbonne. AUX MEME S.

NON, le livre des Flagellants

N'a jamais condamné, lisez-le bien, mes Peres,
Ces rigidités salutaires

Que, pour ravir le ciel, saintement violents, Exercent sur leurs corps tant de chrétiens austeres. me seulement cet abus odieux

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D'étaler et d'offrir aux yeux

que leur doit toujours cacher la bienséance; Et combat vivement la fausse piété

Qui, sous couleur d'éteindre en nous la volupté,
Par l'austérité même et par la pénitence

Sait allumer le feu de la lubricité.

STANCES A M. DE MOLIERE,

Sursa comédie de l'Ecole des femmes, que plusieurs gens frondoient.

En vain mille jaloux esprits,

Moliere, osent avec mépris
Censurer ton plus bel ouvrage :
Sa charmante naïveté

S'en va pour jamais, d'âge en âge,
Divertir la postérité.

Que tu ris agréablement !
Que tu badines savamment!
Celui qui sut vaincre Numance (1),
Qui mit Carthage sous sa loi,
Jadis sous le nom de Térence,
Sut-il mieux badiner que toi?

Ta muse avec utilité

Dit plaisamment la vérité;
Chacun profite à ton Ecole :
Tout en est beau, tout en est bon;
Et ta plus burlesque parole

Est souvent un docte sermon.

(1) Scipion.

Laisse gronder tes envieux:
Ils ont beau crier en tous lieux
Qu'en vain tu charmes le vulgaire,
Que tes vers n'ont rien de plaisant.
Si tu savois un peu moins plaire,
Tu ne leur déplairois pas tant.

Sonnet sur une de mes parentes qui mourut toute jeune entre les mains d'un charlatan.

NOURRI dès le berceau près de la jeune Orante,
Et non moins par le cœur que par le sang lié,
A ses jeux innocents enfant associé,

Je goûtois les douceurs d'une amitié charmante:

Quand un faux Esculape, à cervelle ignorante,
A la fin d'un long mal vainement pallié,
Rompant de ses beaux jours le fil trop délié,
Pour jamais me ravit mon aimable parente.

Oh! qu'un si rude coup me fit verser de pleurs!
Bientôt, la plume en main, signalant mes douleurs,
Je demandai raison d'un acte si perfide.

Oui, j'en fis dès quinze ans ma plainte à l'univers;
Et l'ardeur de venger ce barbare homicide
Fut le premier démon qui m'inspira des vers.

Autre sonnet sur le même sujet.

PARMI les doux transports d'une amitié fidele,
Je voyois près d'Iris couler mes heureux jours:
Iris que j'aime encore, et que j'aimai toujours,
Brûloit des mêmes feux dont je brûlois pour elle :

Quand, par l'ordre du ciel, une fievre cruelle
M'enleva cet objet de mes tendres amours;

Et, de tous mes plaisirs interrompant le cours, Me laissa de regrets une suite éternelle.

Ah! qu'un si rude conp étonna mes esprits!
Que je versai de pleurs! que je poussai de cris!
De combien de douleurs ma douleur fut suivie !

Iris, tu fus alors moins à plaindre que moi :
Et, bien qu'un triste sort t'ait fait perdre la vie,
Hélas! en te perdant j'ai perdu plus que toi.

FABLE D'ESO PE.

Le Bucheron et la Mort.

LE dos chargé de bois, et le corps tout en eau,
Un pauvre bûcheron, dans l'extrême vieillesse,
Marchoit en håletant de peine et de détresse.
Enfin, las de souffrir, jetant là son fardeau,
Plutôt que de s'en voir accablé de nouveau,
Il souhaite la Mort, et cent fois il l'appelle.
La Mort vint à la fin : Que veux-tu ? cria-t-elle.
Qui? moi! dit-il alors prompt à se corriger :
Que tu m'aides à me charger.

Le Débiteur reconnoissant.

Je l'assistai dans l'indigence;
Il ne me rendit jamais rien.

Mais, quoiqu'il me dût tout son bien,
Sans peine il souffroit ma présence.
Oh! la rare reconnoissance!

Enigme.

Du repos des humains implacable ennemie (1),
J'ai rendu mille amants envieux de mon sort.
Je me repais de sang, et je trouve ma vie
Dans les bras de celui qui recherche ma mort.

Vers pour mettre au-devant de la Macarise, roman allégorique de l'abbé d'Aubignac, où l'on expliquoit toute la morale des Štoïciens. LACHES partisans d'Epicure,

Qui, brülant d'une flamme impure,

Du portique (2) fameux fuyez l'austérité,
Souffrez qu'enfin la raison vous éclaire.
Ce roman plein de vérité

Dans la vertu la plus sévere

Vous peut faire aujourd'hui trouver la volupté.

Sur un portrait de Rossinante, cheval de Don Quichotte.

TEL fut ce roi des bons chevaux,

Rossinante, la fleur des coursiers d'Ibérie,
Qui, trottant jour et nuit et par monts et par vaux,
Galopa, dit l'histoire, une fois en sa vie.

Vers à mettre en chant.

Voici les lieux charmants où mon ame ravie
Passoit à contempler Sylvie

Ces tranquilles moments si doucement perdus.
Que je l'aimois alors! que je la trouvois belle!
Mon cœur, vous soupirez au nom de l'infidele:
Avez-vous oublié que vous ne l'aimez plus?

(1) Une puce.

(2) L'école de Zénon.

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