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ett e négligence aimable, cette finesse d'un courtisan ingénieux et délicat, que l'art tenteroit en vain d'imiter: mais elles ont aussi les défauts de la nature livrée à ellemême; le style en est incorrect et sans précision. La Fare fut intimement lié avec l'abbé de Chaulieu. Ces deux hommes étoient faits l'un pour l'autre; mêmes inclinations, même goût pour le plaisir, même façon de penser, même génie. On a encore du marquis de la Fare des mémoires et des réflexions sur les principaux événemens du règne de Louis XIV. Ils sont écrits avec beaucoup de liberté, mais cette liberté est quelquefois poussée trop loin. Son ouvrage n'est souvent qu'une satire très-injuste. LAFITAU (Pierre-François) né à Bordeaux en 1685, et mort au château de Lurs en 1764. Admis de bonne heure chez les jésuites, il s'y adonna au ministère de la parole évangélique. Ayant été envoyé à Rome pour entrer dans les négociations au sujet des querelles suscitées en France pour la bulle unigenitus, il plut par ses bonsmots à Clement X, qui ne pouvoit se passer de lui. Sa conversation vive et aisée, son esprit fécond en saillies, amusoient ce pontife, et Lafitau en profita pour obtenir quelque dignité. Il sortit des jésuites et fut nommé à l'évêché de Sisteron. Il avoit toujours porté jusqu'au fanatisme sa haine contre les jansenistes; mais la vieillesse, en calmant ses passions, le ramena à une façon de penser plus douce et plus pacifique. Il nous reste de lui différens ouvrages dont les principaux sont son histoire du Jansénisme, et ses sermons. Le premier est écrit avec assez de légèreté, mais avec une partialité qui révolte: il y défigure tous les portraits des ennemis de cette constitution. Ses sermons, qui lui avoient fait un nom par l'art avec lequel il les débitoit, perdirent tout leur prix à l'impression: et en effet on n'y trouve ni connoissance de l'écriture et des pères, ni preuves solides: les grandes vérités de la religion n'y portent sur rien. En général tous ses ouvrages ne sont que de petites phrases sans pensées..

LALLY-TOLENDAL (Trophime-Gérard, conite de) né en 1751. Curateur à la mémoire de son père, décapité en 1766, il a rempli cette triste fonction avec un zèle et des talens qui lui ont attiré l'estime et l'admiration. Nommé aux états généraux, il se retira après l'horrible attentat du 5 et 6 d'Octobre, prévoyant, dès ce moment, toutes les horreurs et tous les crimes dont ces deux jours n'étoient que les avant-cou

reurs.

LAINEZ (Alexandre) né à Chimay dans le Hainaut en 1650, et mort à Paris en 1719. Né avec une grande passion pour les voyages, Lainez parcourut la Grèce, P'Asie-Mineure, l'Egypte, la Sicile, l'Italie et la Suisse. De retour chez lui, il se trouva dans la misère. Il y menoit une vie obs

cure, mais gaie. Soupçonné d'être l'auteur de quelques libelles qui s'introduisoient par les frontières de Flandres, l'abbé Fautrier descendit chez lui par ordre de Louvois, avec une garde de 50 hommes; mais au lieu de libelles, il n'y trouva que de jolis vers et des mémoires sur ses voyages. 11 l'emmena à Paris, où il plut par son enjouement. Il faisoit les délices des meilleures tables, où il étoit tous les jours retenu, pour ses propos ingénieux, ses saillies et ses vers qu'il faisoit sur le champ. Presque toutes les pièces qui nous restent de lui ne sont que des impromptus, dont la morale est un épicurisme ratiné.

LAMBERT (Anne-Thérèse de Marquenat de Courcelles, marquise de) née à Paris et morte à Paris en 1733 à 86 ans. Elève de l'ingénieux Bachaumont que sa mère avoit épousé, mde. de Lambert montra de bonne heure les talens qu'elle avoit reçus de la nature et qu'une éducation soignée avoit développés. Elle parut avec éclat dans le monde. Après la mort de son mari, elle essuya de longs et cruels procès, où il s'agissoit de toute sa fortune. Elle les conduisit et les termina avec toute la capacité d'une personne qui n'auroit point eu d'autre talent. Libre enfin et maîtresse d'un bien considérable, elle établit à Paris une maison où il étoit honorable d'être admis, et dont elle faisoit les charmes par la finesse et les graces de son esprit. On a de mde. de Lambert les avis d'une mère à son fils, et d'une mère à sa fille. Ce ne sont point des leçons sèches, qui sentent l'autorité d'une mère; ce sont des préceptes donnés par une amie et qui partent du cœur. Tout ce qu'elle prescrit porte l'empreinte d'une âme noble et délicate, qui possède sans faste et sans effort les qualités qu'elle exige dans les autres. On sent partout cette chaleur du cœur, qui seule donne le prix aux produc tions de l'esprit. Les autres ouvrages de cette femme aimable sont de nouvelles réflexions sur les femmes, le traité de l'amitié, celui de la vieillesse, et le petit roman la femme hermile, dans lesquels on trouve le même esprit, le même goût, la même nuance: mais il y a quelquefois, quoique rarement, du précieux, et un peu trop de prétention à l'esprit.

LANGUET (Jean-Joseph) né à Dijon, et mort en 1753, à l'âge de 76. Languet se signala de bonne heure par son zèle contre le Jansénisme, qui contribua autant que ses talens et ses vertus, à lui procurer le siége épiscopal de Soissons, et ensuite celui de Sens. Chaque année de son épiscopat fut marquée par des mandemens et des écrits contre les ennemis de la constitution, ouvrages dictés par la prévention, et qui furent quelque temps après supprimés par un arrêt du conseil. Sa vie de Marie Alacoque est trop ridicule pour qu'on en parle. Ses discours qu'on trouve dans les recueils

de l'académie Françoise prouvent qu'il n'était pas dépourvu de talent. Lestyle, à la vérité, en est dius: mais il est clair, nature!, élégant et assez noble.

LATTAIGNANT (Gabrict-Charles de) ne Faris et mort dans la même ville en 177* chez les pères de la doctor chrétienne où il s'étoit retiré. I cultiva la littérature dont il ne prit que la fleur, et s'attacha à la poésie légère." II faisoit les délices des repas par sa facilité à composer et à chanter des complets, toujours agreables pour les personnes qui en étoient le sujet ou l'occaOn a recueilli les poésies de l'abbé Lattaignant en plusieurs volumes in-12. Tout ce que ce poëte a véritablement de bon se réduit à une douzaine de madrigaux ou de chansons que peu de personnes auront la patience d'aller chercher dans le recueil de

ses ceuvres.

LEVIZAC (Jean-Pons-Victor de) né à Alby en Languedoc. Occupé dès sa jeu nesse des matières ecclésiastiques dont la connoissance lui étoit nécessaire, il ne s'étoit livré que par délassement a la littérature. Mais forcé par la révolution à fuir sa patrie, et à chercher un asile dans les pays étrangers, il a trouvé dans la culture des lettres une consolation dans le malheur, et un moyen honnête de subsistance. Arrivé en Angleterre en 1795 après l'évacuation de la tiollande, il a profité du calme dont il y a joui sous un gouvernement juste, éclairé el protected, pour composer sa grammaire Littéraire et philosophique, qui paroît avoir quien les stirages du public; sa granmaire théorique et pratique, son choix de Sezigué, se le ons de Fénélon, sa belle édition de Baleau, et cette seconde édition de la bibliothèque portative, à laqu. He il a cu la principale part, à cause de l'absence de M. Moysant. Demeux si par ces ouvrages, qui ne peuvent qu'être utiles aux jeunes personnes dont on veut former le cœur, Pesprit et le goût, il donne à la nation Angloise une preuve durable de sa sensibilité et de sa reconnoissance

LILLE (Jacques de) né en 17** à Clermont, en Auvergne. La traduction des Georgiques de Virgile, fut une espèce de phénomène littéraire: elles avoient été, jusqu'à lui, l'écueiloù tous les talens avoient échoué; il a eu la gloire d'y réussir et de nous donner la meilleure traduction en vers que nous avons dans notre langue. En ef fet, on y trouve tout le talent de M. l'abbé de Lille, à maitriser le vers Alexandrin par de travail des constructions et des tournures, et à lui donner un mouvement aussi diversifé qu'il soit possible. Il est dans cette partie égal à Racine, s'il ne lui est pas supériem. Aussi cette traduction, où il avoit à Jutter contre Virgile, le plus parfait des modèles, est-elle son chef-d'œuvre. Il ne l'a ni surpassée ni même égalée dans les trois ouvrages qu'il a publiés depuis, les jardins,

les Géorgiques Françoises et le poëme du malheur et de la pitié, quoiqu'on y trouve le même talent de versification, des morceaux d'une beauté achevée, des descriptions d'une vérité frappante, des périodes poétiques qui n'appartiennent qu'à lui seul, et dont on ne trouvera nulle part aucun exemple; des rapprochemens et des contrastes uniques, en un mot un degré de perfection, qui, sans pouvoir être mise en parallèle avec celle des Géorgiques de Virgile, auroit placé M. Pabbé de Lille parini les premiers poetes François. A ce talent pour la poésie il joint tous les agrémens qui font l'homme aimable. La fable rapportée p. 243 du 2 vol. de poésie de cette collection est de M. le chevalier de Lille, capitaine de dragons.

LINGUET (Simon-Nicolas Henri) né à Rheims en 1736, et mort pendant les preinières années de la révolution. Linguet se fit un nom par différens mémoires qu'il publia comine avocat, et par un journal qui étoit très-répandu. Mais naturellement inquiet, et satirique, il se fit des affaires qui troublèrent sa tranquillité. Grand admirateur de Voltaire, il n'a pas partagé ses erretrs. Dans ses écrits, Linguet a toujours respecté la religion et les mœurs.

Lovis (Dauphin de France) fils de Louis XV. né à Versailles en 1729, et mort en 1765. Voyez son article § 344 du second livre de cette collection.

Louis XVI (roi de France) fils du précé deat, mort en 1793, voyez son article § 345 du second livre de cette collection.

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LUXEMBOURG (François-Henri de Montmorençi duc de) nå en 1628, et mort en 1695. Le maréchal de Luxembourg a été un des plus grands généraux François: ayant fait ses premières campagnes sous le grand Condé, il choisit ce héros pour modele, et en eut plusieurs qualités, un génie ardent, une exécution prompte, un coupd'œil juste, un esprit avide de connoissances. Sa carrière militaire ne fut presque qu'un enchainement de victoires, et sa mort fut le terme des prospérités de Louis XIV, La haine que Louvois lui portoit le fit accuser d'avoir trempé dans l'affaire des poisons en 1680. Il se rendit de lui-même à la Bastille, où Louvois le poursuivit avec fureur, et où il ne fut pas traité avec les égards qu'on devoit à un grand homme, à un maréchal de France et à un pair du royaume. Il sortit de la Bastille sans que jamais il y eût de jugement prononcé ni pour mi contre lui. I continua de faire à la cour les fonctions de capitaine des gardes, sans voir Louvois son persécuteur, et sans que le roi lui parlât de l'étrange procès qu'il venoit d'essuyer.

MABLY (Gabriel Bonnot de) né à Grenoble en 1709, et mort à Paris en 1785. Transporté de bonne heure de la province à Paris, il se fit une réputation sans le se

cours des prôneurs et des intriguans, par des ouvrages où l'on trouve des vues utiles et souvent profondes. Tout occupé de ses études, et de la composition de ses écrits, il passa la plus grande partie de sa vie dans la retraite. Sa conduite le rendit aussi estimable que ses travaux. Ses principaux ouvrages ont l'histoire pour objet. On lira avec autant d'utilité que de plaisir son parallèle des Romains et des François, ses observatious sur les Grecs, celles sur les Romains, et ses entretiens de Phocion sur le rapport de la morale avec la politique, ouvrage qui passe pour le meilleur de ceux qu'il a publiés, et dans lequel il donne avec précision et même avec agrément, des idées saines et lumineuses de la vertu patriotique, et des devoirs qui attachent l'état aux citoyens et les citoyens à l'état. On trouve dans tous ces ouvrages des principes hardis qui ne conviennent qu'à des états libres, et dont on a étrangement abusé en voulant les appliquer aux gouvernemens modernes de l'Europe. Mais si l'abbé de Mably s'est trompé en parlant de liberté, il n'auroit vu qu'avec horreur les crimes auxquels les fausses notions qu'on s'en est faites dans ces derniers temps ont donné lieu. Dans ses entretiens sur l'histoire, il a trop déprimé les historiens modernes. L'abbé de Mably étoit frère de l'abbé de Condillac.

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MABOUL (Jacques) né à Paris, et mort en 1723 à Aleth dont il étoit évêque. Quoique ses oraisons funèbres ne puissent en aucune manière être comparées à celles de Bossuet et de Fléchier, elles ont cependant un caractère à elles qui les distingue. On y trouve partout cette douceur de style, cette noblesse de sentimens, cette élévation, cette onction, cette simplicité touchante, ce goût pur, qui sont le cachet d'une belle âme, et d'un vrai bel esprit. Ses vertus égaloient ses talens, Il laissa en mourant une mémoire respectable.

MAINTENON (Françoise d'Aubigné, · marquise de) née en 1635 dans une prison de Niort et morte à Saint-Cyr en 1719. Françoise d'Aubigné étoit destinée à éprouver toutes les vicissitudes de la fortune. Née dans une prison, menée à l'âge de trois ans en Amérique, prête à être dévorée par un serpent, sur le rivage où un domestique l'avoit laissée par négligence; ramenée orpheline à l'âge de douze ans, élevée chez une parente qui pour la forcer à changer de religion, lui faisoit garder des dindons, forcée par la misère à épouser Scarron, perclus de tous ses membres, et replongée dans la misère après la mort de ce mari, telles furent les différentes circonstances de la vie de cette dame illustre avant qu'elle fût nommée -gouvernante des enfans de madame de -Montespan. Dans cette place elle se con-duisit avec tant de prudence et d'habileté -que les préventions que Louis XIV avoit contre elle se dissipèrent, et firent place à

la confiance. et enfin à l'amour. Te roi, à ce qu'on croit, l'épousa vers la fin de 1785. Depuis cette époque, madame de Mainte non mena une vie très-retirée à la cour, où elle resta jusqu'à la mort du roi. On a recueilli après sa mort les différentes lettres qu'elle a écrites avant et après son élévation. Le style en général en est froid, précis et austère : c'est presque toujours celui d'un bon auteur; rarement celui d'une femine. On voit qu'elle avoit prévu, en les écrivant, qu'elles seroient un jour publiques.

MALFILATRE (Jacques-Charles-Louis) né à Caen en 1732 et mort à Paris en 1769. Né véritablement avec du génie pour la poésie, Malfilâtre suivit cette carrière et vécut dans la plus grande indigence. il publia de temps en temps des vers qui lui faisoient honneur. Mais l'ouvrage dans lequel il a déployé le plus de talent, c'est dans son poëme de Narcisse, sujet tiré des métamor phoses d'Ovide. Quoique le fonds en sojt peu intéressant, il a eu l'art de faire oublier ce vice radical, par des tableaux de la plus grande beauté, et dignes des maîtres les plus célèbres. Si une mort prématurée ne l'eût pas enlevé, il n'est pas douteux qu'il n'eût été placé au premier rang des poëtes François.

MALHERBE (François de) né à Caen en 1556 et mort à Paris en 1621. Un génie éle vé, noble et porté au sublime, une oreille juste, délicafe et sensible, et un goût pur bien au-dessus de son siècle, voilà les dons que Malherbe avoit reçus de la nature, et dont il tira le plus grand avantage. Marot avoit créé la poésie légère; il créa le vers noble dont il n'existoit pas de modèle, et fit entendre pour la première fois des vers parfaits par leur coupe, leur beauté et leur harmonie. Pour connoître ce que la poẻsie doit à Malherbe, il faut voir le point où l'avoient laissée Ronsard et Dubartas qui avoient écrit dans le même genre, peu de temps avant lui. On peut lire son éloge dans le second livre de cette collection 119. On ne peut pas dire autant de bien du caractère de Malherbe que de ses talens. L'humeur le dominoit absolument, et cetie humeur étoit brusque et violente: saps complaisance et sans égards, il se brouilloit pour des riens avec ses meilleurs amis. Il sacrifioit tout au plaisir de dire un bon met. Sa franchise rustique ne le quitta pas même à la cour. Louis XIII étant dauphin écrivit à Henri IV. Sa lettre étoit signée Loys, suivant l'ancienne orthographe. Le roi la fit voir à Malherbe qui ne s'arrêta qu'à la signature, et demanda au roi, si M. le Dau-phin ne s'appeloit pas Louis? Sans doute,répondit fienri IV. Et pourquoi donc, reprit Malherbe, le fait-on signer Loys. Il plaide toute sa vie contre ses parens et porta l'avarice au point de n'avoir point de chaises dans son appartement.

MALLEVILLE, (Claude de) né à Paris

cas écrits dans le même esprit, mais plus adroitement caché, eurent encore plus de succès; mais ce succès dù aux intrigues des philosophes, et à l'engouement de quelques femmes, ne fut qu'éphémère : ils furent appréciés à leur juste valeur et mis au rang des productions médiocres. Aussi aucun de ces ouvrages ne lui auroit-il fa't une réputation durable. Ce qui assure à Marmontel un rang distingue parmi les littéra

et mort dans la même ville en 1647. gé d'environ 50 ans. Malleville avoit de l'esprit, et assez de talens pour la poésie, mais sa paresse l'empêchoit de mettre la dernié re main à ses vers. Le sonnet est le genre de poésie auquel il s'est principalement adonné, et avec le plus de succès. Ce poëte remporta le prix sur plusieurs beaux esprits, et sur Voiture même, qui travaille rent au sonnet proposé sur la belle miati neuse. Le sien lui donna beaucoup de cêteurs qui font honneur à la France, ce sont Jébrité. 66 On ne parleroit pas aujourd'hui ses premiers contes, où l'on trouve une d'un pareil qurrage, dit Voltaire; mais peinture vraie, vive et légère du siècle et le bon en tout genre étoit alors aussi rare, surtout du grand monde; ses élémens de litqu'il est devenu commun depuis". De térature, Pouvrage le plus parfait qu'il y toutes ses poésies on auroit de la peine à en ait sur ce sujet dans notre langue, et ses extraire six bonnes pages. différens articles de l'encyclopédie, où il a eu l'art de joindre la profondeur des vues à la clarté et à la précision, et qu'on doit regarder comine une rétractation des paradoxes de sa poétique, publiée dans sa jeunesse. Les horreurs dont il a été témoin dans sa vieillesse lui ont ouvert les yeux sur le danger du philosophisme, et l'ont porté à rétracter ses anciennes erreurs.

MARETS DE SAINT SORLIN (Jean des) né à Paris en 1595 et mort dans la même ville en 1676,, à 81 ans. Desmarêts s'attacha de bonne heure au Cardinal de Richelieu qu'il aida dans la composition de ses tragédies. Né avec une imagination ardente, il composa beaucoup de poemes, et même un poëme épique, tous également dépourvus de jugement, d'expression et de génie. On ne connoît plus de lui que le char mant quatrain sur la violette, pour la guirlande de Julie de Rambouillet. Les dernières années de sa vie ne ressemblèrent pas à celles de sa jeunesse : il tomba dans une folie sombre et mélancolique, s'érigea en prophète, et dans son deis du Saint-Esprit un roi, il annonça qu'il leveroit une armée de 144 mille hommes pour faire la guerre aux impies et aux jansenistes, et dont ce prince comme fils aîné de l'église, seroit le général. H prédit également au roi, qu'à fui étoit réservée la gloire de détruire le Mahomestime. Ainsi fauteur de la comédie des visionnaires devint le plus fanatique et le plus fou de tous.

MARMONTEL (Jean-Frangois) né à N* en Limousin et mort à Paris en 1800. Mármontel commença sa carrière littéraire par des pièces de vers qui furent couronnées à Pacadémie des jeux-Floraux de Toulouse dont il sulvoit l'université. Ces succès précoces le firent connoître de Voltaire qui lui reconnut du talent, et Pencouragea. Arrivé quelques temps après à Paris, il y eat bientôt des protecteurs et des amis par ses ouvrages et surtout par ses contes moraux. Quoique aucune de ses trois tragédies n'eût réussi, elles ajoutèrent à sa réputation. Enfin son épitre aux poëtes, couronnée à l'académie malgré les faux jugemens qu'elle renferme, le fit admettre dans ce corps illustre. I dut à l'influence de d'Alembert et de Voltaire la préférence qu'il obtint sur ses rivaux. Pour marquer sa reconnoissance au parti philosophique, il publia son Bélisaire, où il y a des morceaux bien vus et sagement écrits, mais dont la fin est une déclamation aussi indécente que ridicule contre la religion et ses ministres. Les In

MAROT (Clément) né à Cahors en Querci l'an 1495, et mort à Turin en 1544. Marot dominé par une imagination bouillante ne dut attribuer qu'à lur seul la cause de ses malheurs. Page de Marguerite de France, femme du duc d'Alençon, et valet de chambre de François f, il avoit acquis de la fortune, et s'étoit fait des protecteurs généreux, mais toujours fougueux et toijours imprudent, il fut force de chercher un asile à Genève, où il ne se conduisit pas mieux. Chassé encore de cette ville, il se retira à Turin où il mourut dans la misère. Marot qui tenoit de son père son goût pour la poésie, eut in talent bien supérieur à toat ce qui l'avoît précédé et même à tout ce qui l'a suivi jusqu'à Malherbe.Il a en ef fet un tour d'esprit qui lui est propre. nature lui avoit donné ce qu'on n'acquiert point, la grâce. Son style á du charme, et ce charme tient à une naïveté de tournure et d'expression, qui se joint à la délicatesse des idées et des sentimens. Personne n'a mieux connu que lui, même de nós jours, le ton qui convient à l'épigramme et au madrigal. Il n'a pas moins réussi dans l'épître familière et badine: celle à François I, sur la manière dont il a été volé par son valet, est un chef-d'œuvre. On sera pentêtre étonné de trouver si peu de chose de Marot dans la bibliothèque portative: mais la quantité de vieux mots, et d'anciens tours dont ses poésies sont pleines, a em pêché l'insertion de beaucoup de pièces, d'ailleurs charmantes sous d'autres rapports.

MASCARON (Jules) né à Marseilles en 1634 et mort à Agen en 1703. Fils d'un célèbre avocat au parlement d'Aix, Masca roti ne reçut de son père pour tout héritage que son talent pour l'éloquence. Hentra fort jeune dans la congregation del'o

toire, cù ses dispositions extraordinaires ur la chaire lui firent bientôt une grande putation. Le jeune orateur après avoir ru avec éclat dans les plus grandes villes la province se montra dans la capitale, ensuite à la cour où il n'obtint pas de ccès moins brillans. Il prêchoit avec une berté évangélique: les courtisans en fint malignement l'observation au roi, qui ur ferma la bouche en disant, il a fait u devoir, faisons le nôtre. L'évêché de ulle fut la récompense de ses travaux, où 7 ans après il passa à celui d'Agen. Il lifia ces deux diocèses par ses vertus. uelque réputation qu'aient eu les oraisons nèbres de Mascaron dans son temps, elles nt bien au-dessous de celles de Bossuet et = Fléchier: il n'a ni l'élévation du premier, - l'élégance du second." Quelquefois, t Thomas, " son âme s'élève; mais quand il veut être grand, il trouve rare ment l'expression simple. Sa grandeur est plus dans les mots que dans les idées. trop souvent il retombe dans la métaphysique de l'esprit, qui paroît une espèce de luxe; mais un luxe faux, qui annonce plus de pauvreté que de richesse. On lui trouve aussi des raisonnemens vagues et subtils; et l'on sait combien ce langa ge est opposé à celui de la véritable élaquence. Son oraison funèbre de Tuenne est ce qu'il a fait de meilleur. Madame de Sévigné ne croyoit pas qu'elle pût tre égalée: et néanmoins celle de Fléchier e tarda pas à léclipser. Voyez l'article le Mascaron § 228 du 2 livre de cette colection.

MASSILLON (Jean-Baptiste) né à Hières a Provence l'an 1662, et mort à Clermont in 1742, à l'âge de 79 ans. Entré dans la conrégation de l'oratoire, ses grands talens lui irent des jaloux et l'exposèrent à bien des lésagrémens. Il débuta dans l'art oratoire ar foraison funèbre de Henri de Villars, irchevêque de Vienne. Le succès qu'elle ut, engagea le père de la Tour, alors gééral de sa congrégation, de l'appeler à Pais. Il s'y fit bientôt un genre lui seul. I parut à la cour où il prêcha l'aveut. Louis XIV après l'avoir entendu, lui dit ces paroles némorables: mon père, quand j'ai entenlu les autres prédicateurs, j'ai été trèscontent d'eux. Pour vous, toutes les fois que je vous ai entendu, j'ai été très-mécontent de moi-même. Ce qui frappoit le plus dans les sermons de Massillon, c'étoient ces peintures du monde, si saillantes, si fines, si ressemblantes. On lui demanda où un homme consacré comme lui à la retraite, avoit pu les prendre. Dans le cœur humain, répondit-il; pour peu qu'on le sonde, on y découvrira le germe de toutes les passions. Après la mort de Louis XIV, le régent le nomma à l'évêché de Clermont, et le destina à prêcher le carème l'année suivante devant Louis XV âgé de neuf ans. Il comT. III, p. 4.

posa en six semaines les dix discours conhus sous les nom de petit carême. On a dit que ce petit carême étoit le chef-d'œuvre de Massillon et de l'art oratoire. C'est certainement un chef-d'œuvre, mais bine des personnes trouveront, si elles se donnent la peine d'examiner, que plusieurs de ses autres discours sont d'une éloquence, plus mâle et plus majestueuse. Quant au vrai caractère de son éloquence, on le trouvera dans son article § 231 du second livre de cette collection.

MAUCROIX (François de) né à Noyonen 1619 et mort en 1708. Maucroix suivit d'abord le barreau; mais il s'en degouta et embrassa l'état ecclésiastique. Il aima et cultiva les lettres. Il ne tarda pas à se faire une grande réputation par ses écrits et par ses vers. Quoique la postérité ait conservé peu de chose de lui, ses liaisons avec Racine, Despréaux et la Fontaine prouvent qu'il n'étoit pas un homme ordinaire. II conserva jusqu'à la fin de ses jours son enjouement et sa tranquillité. Sa vieillesse fut celle d'un philosophe chrétien, qui jouit des biens que lui accorde la providence, et supporte les maux en attendant avec pa tience un sort meilleur.

MAURY (Jean Suffreix) né dans le comtat Venaissain en 1746. L'Abbé Maury s'étoit fait un nom par ses panégyriques de Saint-Augustin et de Saint-Louis, et par d'autres discours où l'on retrouvoit l'éloquence de Bossuet, lorsque la révolution vint ouvrir une autre carrière à ses talens et le mettre à sa place. A l'éloquence d'un Chrysostome il fit succéder celle d'un Démosthène, et si la raison revêtue de tous les avantages que Ini donnoient la justice, la vérité et le sentiment avoit pu l'emporter sur le déchaînement de toutes les passions, seul il eût sauvé la monarchie. Le pape Pie VI, en l'élevant au cardinalat, récompensa moins ses talens qu'il n'honora la pourpre ro maine.

MAYNARD (Fraçois) né à Toulouse en 1582 et mort dans la même ville ne 1646. Maynard fut secrétaire de la reine Margue rite et plut à la cour de cette princesse par son esprit et son enjouement. Etant allé à Rome à la suite d'un ambassade, le pape Urbain VIII goûta beaucoup la douceur et les charmes de sa conversation. De retour en France, il fit sa cour à plusieurs grands et surtout au cardinal de Richelieu; mais il n'en obtint rien. Après un séjour de quelques années à Paris, il se retira dans sa patrie, où il grava sur la porte de son cabi net ces vers que tout le monde connoît.

Las d'espérer et de me plaindre
Des muses, des grands et du sort;
C'est ici que j'attends la mort,
Sans la désirer ni la craindre,

Malherbe disoit de lui, qu'il tournoit fort bien un vers, mais que son style manquoit de force; et que Racan avoit de la force,

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