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Et je me trompe fort, ou vous n'aimez que l'eau
Que boivent à longs traits les nouf doctes pucelles.
Vous le voyez, j'ai beau chercher,

Tourner, approfondir, passer d'un Saint à l'autre,
Vous n'avez rien du tout, soit dit sans vous fâcher,
Du précurseur, n'y de l'apôtre.
J'enrage cependant avec mon bel esprit.

Aussi pourquoi faut-il, tourné comme vous êtes,
Porter un nom qui ne fournit

Rien d'agréable à dire aux plus savans poëtes;
Et sur qui, si j'osois en croire mon dépit,
Je reviendrois aux épithètes?

Demeurez en d'accord; ce n'est pas sans raison,
Que de votre nom éffrayée,
Je me suis d'abord écriée :
Que dirai-je sur un tel nom?

J'ai prévu l'embarras. Quand je fais quelque ouvrage,
Je tâte toujours le terrain.

Ah! que maudit soit le parrain

Qui vous alla donner ce beau nom en partage!
Il étoit sans doute en courroux,
Et vouloit vous faire une injure:

Fut-il jamais un nom d'un plus mauvais augure?
Croyez-moi, débaptisez-vous.

Deshoulières.

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§ 130. 4. A Mde. Lullin, en lui envoyant un bouquet le
9 janvier, 1759, jour auquel elle avoit cent ans accomplis.

Nos grands pères vous virent belle:
Par votre esprit, vous plaisez à cent ans;
Vous méritez d'épouser Fontenelle,

Et d'être sa veuve long-temps.

Voltaire.

§ 131. 5. A Mde. la Maréchale de Villars, en lui envoyant la
Henriade.

Quand vous m'aimiez, mes vers étoient aimables :
Je chantois dignement vos graces, vos vertus;
Cet ouvrage naquit dans des temps favorables;
Il eût été parfait, mais vous ne m'aimez plus.

Le même.

§ 132. 6. Sur deux danseuses célèbres.

Ah! Camargo, que vous êtes brillante !
Mais que Sallé, grands dieux! est ravissante!
Que vos pas sont légers, et que les siens sont doux!
Elle est inimitable, et vous êtes nouvelle;

Les Nymphes sautent comme vous,

Et les Grâces dansent comme elle.

Le même.

§ 133. 7. A Mde. la Duchesse de Bouillon.

Deux Bouillons tour à tour ont brillé dans le monde ;
Par la beauté, le caprice et l'esprit ;
Mais la première eût crevé de dépit,

Si par malheur elle eút vu la seconde.

Le même.

§ 134. 8. A Mde. la Duchesse d'Aiguillon, en lui envoyant
l'histoire de Charles XII, et la Henriade.

Deux héros différens, l'un superbe et sauvage,
L'autre toujours aimable, et toujours amoureux,
A l'immortalité prétendent tous les deux ;
Mais pour être immortel il faut votre suffrage.
Ah! si, sous tous les deux, vous eussiez vu le jour,
Plus justement leur gloire eút été célébrée :
Henri quatre pour vous auroit quitté d'Etrée,
Et Charles douze auroit connu l'amour.

§ 135. EPIGRAMMES 1. Contre un avocat.

On m'a volé: j'en demande raison
A mon voisin, et je l'ai mis en cause
Pour trois chevreaux et non pour autre
chose.

Il ne s'agit de fer ni de poison;

Et toi tu viens, d'une voix emphatique,
Parler ici de la guerre Punique,

Et d'Annibal et de nos vieux héros,
Des triumvirs, de leurs combats funestes.
T. III. p. 4.

Le même.

Eh! laisse là tes grands mots, tes grands
gestes:
Ami, de grâce, un mot de mes chevreaux.
Martial, traduct. de la Harpe.

$136. 2. Sur Didon.

Pauvre Didon, où t'a réduite
De tes maris le triste sort?
L'un en mourant cause ta fuite
L'autre en fuyant, cause ta mort.
Traduction d'un anonyme.

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§ 140. 6. L'origine des sifflets.

Ces jours passés, chez un vieil histrion,
Un chroniqueur émut la question,
Quand dans Paris commença la méthode
De ces sifflets qui sont tant à la mode.
Ce fut, dit l'un, aux pièces de Boyer.
Gens pour Pradon voulurent parier.
Non, dit l'acteur, je sais toute l'histoire,
Que par degrés je vais vous débrouiller.
Boyer apprit au parterre à bâiller.
Quant à Eradon, si j'ai bonne mémoire,
Pommes sur lui volèrent largement;
Mais quand sifflets prirent commencement,
C'est, (j'y jouois, j'en suis témoin fidèle)
C'est à PAspar du sieur de Fontenelle.
Le même.

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Lisant ses vers audacieux,
Faits pour les habitans des cieux,
Ouvrir une bouche effroyable,
S'agiter, se tordre les mains;
Il me semble en lui voir le diable,
Que Dieu force à louer les Saints.
Le même.
12. L'Amateur d'Horloges.

§ 146.

Sans cesse autour de six pendules,

De deux montres, de trois cadrans,
Lubin, depuis trente et quatre ans,
Occupe ses soins ridicules.
Mais à ce métier, s'il vous plaît,
A-t-il acquis quelque science?

Sans doute; et c'est l'homme de France
Qui sait le mieux l'heure qu'il est.
Le même.

§ 147. 13. Sur le Germanicus de Pradon.

Que je plains le destin du grand Germanicus!
Quel fut le prix de ses rares vertus !
Persécuté par le cruel Tibère,
Empoisonné par le traître Pison,

Il ne lui restoit plus, pour dernière misère,
Que d'être chanté par Pradon.

Racine.

§ 148. 14. Sur le Sésostris de Longepierre.

Ce fameux conquérant, ce vaillant Sésostris,
Qui jadis en Egypte, au gré des destinées,
Vêquit de si longues années,

N'a vécu qu'un jour à Paris.

§ 149. 15. Sur Andromaque.

Le vraisemblable est peu dans cette pièce,
Si l'on en croit et d'Olonne et Créqui.
Créqui dit que Pyrrhus aime trop sa maîtresse;
D'Olonne qu'Andromaque aime trop son mari.

§ 150. 16. Contre Perrault.

Le même.

Le même.

Oui, j'ai dit dans mes vers qu'un célébre assassin,
Laissant de Galien la science infertile,

D'ignorant médecin devint maçon habile:
Mais de parler de vous je n'eus jamais dessein,
Perrault; ma muse est trop correcte.

Vous êtes, je l'avoue, ignorant médecin,
Mais non pas habile architecte.

§ 151. 17. Contre Cotin.

A quoi bon tant d'efforts, de larmes et de cris,
Colin, pour faire ôter ton nom de mes ouvrages?
Si tu veux du public éviter les outrages,
Fais effacer ton nom de tes propres écrits.

Boileau.

Le même.

§ 152. 18. Sur ce qu'on avoit lu à l'académie des vers
contre Homère et contre Virgile.

Clio vint l'autre jour se plaindre au dieu des vers
Qu'en certain lieu de l'univers

On traitoit d'auteurs froids, de poëtes stériles,
Les Homères et les Virgiles.

Cela ne sauroit être, on s'est moqué de vous,
Reprit Apollon en courroux:

Où peut-on avoir dit une telle infamie?

Est-ce chez les Hurons, chez les Topinambous?
C'est à Paris. C'est donc dans l'hôpital des fous ?
Non, c'est au Louvre, en pleine Académie.

Le même.

§ 153. 19. A Perrault, sur les livres qu'il a faits contre

les anciens.

Pour quelque vain discours sottement avancé
Contre Homère, Platon, Cicéron ou Virgile,
Caligula partout fut traité d'insensé,

Néron de furieux, Adrien d'imbécille.

Vous donc qui, dans la même erreur, Avec plus d'ignorance et non moins de fureur, Attaquez ces héros de la Grèce et de Rome,

Perrault, fussiez-vous empereur,

Comment voulez-vous qu'on vous nomme?

§ 154. 20. Sur le même sujet.

Le même.

D'ou vient que Cicéron, Platon, Virgile, Homère,
Et tous ces grands auteurs que l'univers révère,
Traduits dans vos écrits nous paroissent si sots?
Perrault, c'est qu'en prêtant à ces esprits sublimes
Vos façons de parler, vos bassesses, vos rimes,
Vous les faites tous des Perraults.

La

§ 155. 21. Au même.

Ton oncle, dis-tu, l'assassin
M'a guéri d'une maladie:

preuve qu'il ne fut jamais mon médecin,

C'est que je suis encore en vie.

Le même.

Le même.

§ 156. 22. Au même.

Le bruit court que Bacchus, Junon, Jupiter, Mars,
Apollon le dieu des beaux arts,

Les Ris mêmes, les Jeux, les Grâces et leur mère,
Et tous les dieux enfans d'Homère,
Résolus de venger leur père,
Jettent déjà sur vous de dangereux regards.
Perrault, craignez enfin quelque triste aventure,
Comment soutiendrez-vous un choc si violent?
Il est vrai, Visé vous assure

Que vous avez pour vous Mercure;
Mais c'est le Mercure galant.

Le même,

§ 157. 23. Aux auteurs du journal de Trévoux.

Mes révérends Pères en Dieu,

Et mes confrères en satire,

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