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Or cette cause inconnue, et qui peut-être eft de la matière électrique, ne peut renvoyer ainfi les rayons, s'ils ne font pas propres à former toujours ces angles, et il n'y a que la figure ronde qui puiffe les former. (8)

Pour la couleur qui réfulte du feu, j'entends du feu pur et fans mélange, cette couleur dépend des rayons différens qui compofent le feu : l'affemblage des fept rayons primordiaux réfléchis donne du blanc; cependant la couleur de la lumière du foleil tire fur le jaune ; et de-là on pourrait croire que le foleil eft un corps folide, dans lequel les rayons jaunes dominent. Il n'eft nullement impoffible que le feu dans d'autres foleils ait d'autres couleurs; et la quantité des rayons rouges ou jaunes dominant dans ce feu élémentaire, pourrait trèsvraisemblablement opérer de nouvelles propriétés dans la matière.

Voilà donc à peu-près un affemblage de propriétés principales qui peuvent servir à donner une faible idée de la nature du feu.

C'eft un élément qui a tous les attributs généraux de la matière, et qui a par-deffus encore le pouvoir d'agir fur toute matière, d'être toujours en mouvement, de fe répandre en tout fens, d'être élastique, de contribuer à l'élafticité des corps, à leur électricité,

(8) Ces idées fur la forme des élémens des corps font un refte de cartéfianifme dont M. de Voltaire n'avait pu fe débarraffer totalement, quoiqu'il en fût alors plus dégagé que la plupart des favans de l'Europe.

La feule manière plaufible d'expliquer les phénomènes de la réflexion des furfaces opaques, eft de les confidérer comme formées de corpufcules transparens, dans lesquels la réflexion fe fait comme dans les fphères transparentes, comme dans les gouttes de l'arc-en-ciel. Mais il reste à expliquer ce dernier phénomène qui semble dépendre de l'attraction, et dont on n'a point donné d'explication précise et calculée.

d'être attiré et d'être repouffé par les corps; enfin c'est le feul qui puiffe nous éclairer et nous échauffer. Et cette propriété de nous donner le fentiment de lumière et de chaleur, n'eft autre chofe qu'une fuite de la proportion établie entre fes mouvemens et nos organes; et il est très-vraisemblable que cette proportion eft néceffaire pour nous caufer ces sentimens : car l'auteur de la nature ne fait rien en vain, et ces rapports admirables de la matière du feu avec nos organes feraient un ouvrage vain, fi dans la conftitution présente des chofes, nous pouvions voir fans yeux et fans lumière, et être échauffés fans feu.

SECONDE PARTIE.

De la propagation du feu.

ON tâchera, dans cette feconde partie, d'expliquer fes

doutes en autant d'articles.

1o. Sur la manière dont nous produisons du feu.

2o. Sur la manière dont le feu agit.

3o. Sur les proportions dans lefquelles le feu embrafe un corps quelconque.

4°. Sur la manière et les proportions dont le feu se communique d'un corps à un autre.

5o. Sur ce qu'on nomme pabulum ignis, et ce qui eft néceffaire pour l'action du feu.

6°. Sur ce qui éteint le feu.

ARTICLE PREMIE R.

Comment produifons-nous le feu?

Les hommes ne peuvent réellement produire du feu,

parce qu'ils ne peuvent rien produire du tout; ils peuvent mêler les espèces des chofes, mais non changer une espèce en une autre. On décèle, on manifefte le feu que la nature a mis dans les corps, on lui donne de nouveaux mouvemens, mais on ne peut produire réellement une étincelle.

Nous ne pouvons développer ce feu élémentaire que par l'un de ces cinq moyens fuivans.

1o. En rendant les rayons du foleil convergens, et les affemblant en affez grand nombre.

2o: En frottant violemment des corps durs.

3o. En expofant tous les corps poffibles au feu tiré de ces corps durs, comme aux charbons ardens, à la flamme, aux étincelles de l'acier, &c.

4°. En mêlant des matières fluides, comme des efpèces d'huiles qui fermentent ensemble avec explosion, et qui s'enflamment.

5o. En compofant des phosphores avec des matières fulfureufes et falines qui s'enflamment à l'air, comme avec du fang, des excrémens, de l'alun, de l'urine, &c. ou bien en fefant de la poudre fulminante, et autres opérations semblables.

Dans toutes ces opérations, il eft aifé de voir qu'on

ne fait autre chofe que d'ajouter un feu nouveau aux corps qui n'en ont point affez, ou de mettre en mouvement une quantité de feu suffisante qui était dans ces corps fans mouvement sensible.

E

ARTICLE II

Comment le feu agit-il?

Le feu étant une fubftance élémentaire répandue dans tous les corps, et jusque dans la glace la plus dure, ne peut agir fur ces corps qu'en agitant leurs parties. Si cette agitation eft modérée, comme celle qu'un air tempéré communique aux végétaux, leurs pores ouverts reçoivent alors l'eau, l'air et la terre qui les entourent, et les quatre élémens unis ensemble étendent le germe de la plante qu'ils nourriffent. Si l'agitation eft trop forte, les parties du végétal défunies font difperfées, et tout peut en être aifément détruit, jusqu'au germe.

par fa maffe et par fa vî-

Ce mouvement qui fait la vie et la deftruction de Le feu agit tout, ne peut, ce me femble, être imprimé aux corps par le feu qu'en vertu de ces deux raisons-ci, ou parce teffe. qu'ils reçoivent une plus grande quantité de feu qu'ils n'en avaient, ou parce que la même quantité eft mise dans un mouvement plus violent; et comme une quantité de feu quelconque appliquée aux corps n'agit que par le mouvement, il eft clair que c'eft le mouvement feul qui échauffe, confume et détruit les corps.

Tous les corps font

Il n'y a aucun corps fur la terre qui ait dans fa maffe également affez de feu pour faire de foi-même un effet fenfible

chauds dans

le même air.

Mais tous les

corps n'ont

fans fermenter avec d'autres corps: voilà pourquoi du marbre et de la laine, du fer et des plumes, du plomb et du coton, de l'huile et de l'eau, du foufre et du fable, de la poudre à canon, appliqués au thermomètre, enfemble ou féparément, ne le font ni hauffer ni baiffer, lorfque ces divers corps ont été expofés long-temps à une égale température d'air, ainfi que le thermomètre.

De grands philosophes infèrent de cette expérience qu'il y a également de feu dans tous les corps; mais on ofe être d'une opinion différente.

1o. Parce que fi cette égale distribution de feu qu'ils pas en eux fuppofent était réelle, la glace factice en aurait autant egalement de que l'alcohol le plus pur.

feu.

2o. Parce que les corps s'enflamment beaucoup plus aifément les uns que les autres; et comme il eft certain que nous mettons plus de feu dans des matières que nous préparons dans de la chaux, par exemple, que dans le mélange d'autres pierres; auffi paraît-il vraifemblable que la nature agit en cela comme nous, et diftribue plus de feu dans du foufre que dans de l'eau. (*)

Il paraît donc très-probable, par toutes les expériences et par le raisonnement, que de deux corps, celui qui s'enflammera le plus vîte à feu égal, contenait dans sa masse plus de substance de feu que l'autre; et qu'ainfi un pied cubique de foufre contient certainement plus de feu qu'un pied cubique de marbre.

Pourquoi donc tous les corps inégalement remplis de feu élémentaire ont-ils cependant un égal degré de chaleur, selon cette expérience faite au thermomètre ?

N'eft-ce pas pour ces raifons-ci? Le feu n'agit dans les (*) Voyez l'article IV de cette feconde partie.

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