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en Occident, on ne gagnerait rien par cette évasion; car on fait que, quand une comète se trouve dans la région de Mars, de Jupiter, de Saturne, elle va incomparablement plus vite que Mars, que Jupiter, que Saturne; donc elle ne peut être emportée par la même couche du fluide, qui eft fuppofé emporter ces planètes; donc ces tourbillons n'exiftent pas.

VI. Si ces fluides exiftaient, un petit espace de temps fuffirait pour détruire tout mouvement dans ces aftres. Newton a démontré que tout corps qui se meut uniformément dans un fluide de même denfité, perd la moitié de fon mouvement après avoir parcouru trois de fes diamètres. Cela eft fans aucune réplique.

VII. Supposé encore, ce qui eft impoffible, que ces planètes puffent être mues dans ces tourbillons imaginaires, elles ne pourraient fe mouvoir que circulairement, puifque ces tourbillons à égales diftances du centre feraient également denses; mais les planètes fe meuvent dans des ellipfes; donc elles ne peuvent être portées par des tourbillons ; donc, &c.

VIII. La terre a fon orbite, qu'elle parcourt entre celui de Vénus et celui de Mars: tous ces orbites font elliptiques, et ont le foleil pour centre: or, quand Mars et Vénus et la Terre font plus près l'un de l'autre, alors la matière du torrent prétendu qui emporte la terre ferait beaucoup plus refferrée : cette matière fubtile devrait précipiter fon cours comme un fleuve rétréci dans fes bords, ou coulant fous les arches d'un pont: alors ce fluide devrait emporter la terre d'une rapidité bien plus grande qu'en toute autre position; mais au contraire, c'eft dans ce temps-là même que le mouvement de la terre eft plus ralenti.

IX. Parmi des démonftrations plus recherchées, qui anéantiffent les tourbillons, nous choifirons celle-ci. Par une des grandes lois de Kepler, toute planète décrit des aires égales en temps égaux par une autre loi non moins sûre, chaque planète fait fa révolution autour du foleil en telle forte que, fi, par exemple, fa moyenne distance au foleil eft dix, prenez le cube de ce nombre, ce qui fera mille, et le temps de la révolution de cette planète autour du foleil fera proportionnel à la racine quarrée de ce nombre mille. Or, s'il y avait des couches de matière qui portaffent les planètes, ces couches ne pourraient suivre ces lois; car il faudrait que les vîteffes de ces torrens fuffent à la fois réciproquement proportionnelles à leurs diftances au foleil, et aux racines quarrées de ces diftances, ce qui eft incompatible.

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X. Pour comble enfin, tout le monde voit ce qui arriverait à deux fluides circulant l'un dans l'autre ils fe confondraient néceffairement, et formeraient le chaos au lieu de le débrouiller. Cela feul aurait jeté sur le systême cartéfien un ridicule qui l'eût accablé fi le goût de la nouveauté, et le peu d'ufage où l'on était alors d'examiner, n'avaient prévalu.

Il faut prouver à préfent que le plein, dans lequel ces tourbillons font fuppofés fe mouvoir, eft auffi impoffible que ces tourbillons.

1. Un feul rayon de lumière, qui ne pèse pas à beaucoup près la cent millième partie d'un grain, ou plutôt qui ne pèse point du tout, aurait à déranger tout l'univers s'il avait à s'ouvrir un chemin jusqu'à nous à travers un espace immense, dont chaque point réfifterait par luimême, et par toute la ligne dont il ferait preffé.

2. Soient ces deux corps durs AB; ils fe touchent par une surface, et font fuppofés entourés d'un fluide qui les preffe de tous côtés : or, quand on les fépare, il est clair que la prétendue matière fubtile arrive plus tôt au point A, où on les fépare, qu'au point B. (figure 30) Donc il un moment où B fera vide; donc même dans le systême de la matière subtile, il y a du vide, c'est-à-dire, de l'espace.

y a

3. S'il n'y avait point de vide et d'espace, il n'y aurait point de mouvement, même dans le fyftême de Descartes. Il fuppofe que DIEU créa l'univers plein et confiftant en petits cubes : foit donc un nombre donné de cubes représentant l'univers, fans qu'il y ait entre eux le moindre intervalle : il est évident qu'il faut qu'un d'eux forte de la place qu'il occupait; car, fi chacun refte dans fa place, il n'y a point de mouvement, puifque le mouvement confifte à fortir de fa place, à paffer d'un point de l'espace dans un autre point de l'espace: or qui ne voit que l'un de ces cubes ne peut quitter fa place fans la laisser vide à l'inftant qu'il en fort? car il eft clair que ce cube, en tournant fur lui-même, doit présenter fon angle au cube qui le touche, avant que l'angle foit brifė; donc alors il y a de l'efpace entre ces deux cubes; donc dans le fyftême de Descartes même, il ne peut y avoir de mouvement fans vide. Le plein eft donc une chimère; donc il y a du vide; donc rien ne fe peut faire dans la nature fans vide; donc la pesanteur n'eft pas l'effet d'un prétendu tourbillon imaginé dans le plein. (18)

(18) On ne peut pas regarder comme abfolument rigoureuse la demonstration de l'impoffibilité du plein, parce que le mouvement ferait très-poffible dans un fluide indéfini expansible, dont la densité varierait fuivant une certaine loi, puisque le poids, l'action, la rèsistance d'une

Nous venons de nous apercevoir, par l'expérience dans la machine pneumatique, qu'il faut qu'il y ait une force qui faffe defcendre les corps vers le centre de la terre, c'est-à-dire, qui leur donne la pefanteur, et que cette force doit agir en raifon de la maffe des corps. Il faut maintenant voir quels font les effets de cette force; car, fi nous en découvrons les effets, il eft évident qu'elle exifte. N'allons donc point d'abord imaginer des caufes et faire des hypothèses; c'eft le sûr moyen de s'égarer: fuivons pas à pas ce qui fe paffe réellement dans la nature; nous fommes des voyageurs arrivés à l'embouchure d'un fleuve ; il faut le remonter avant d'imaginer où eft fa fource.

colonne infinie d'un tel fluide pourraient être exprimées par une quantité finie. Il est donc impoffible de rien favoir de précis fur cette queftion, tant que nous ne connaîtrons pas la nature des fluides expanfibles et la cause de l'expanfibilité. On peut dire feulement qu'il nous eft impoffible de concevoir comment la même fubftance peut occuper un espace double de celui qu'elle occupait, fans qu'il fe forme un efpace vide entre fes parties.

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GRAVITATION DÉMONTRÉE PAR LA DÉCOUVERTE
DE NEWTON. HISTOIRE DE CETTE DÉCOUVERte.

QUE LA LUNE PARCOURT SON ORBITE PAR LA
FORCE DE CETTE GRAVITATION.

Hiftoire de la découverte de la gravitation. Procédé de Newton. Théorie tirée de ces découvertes. La même caufe qui fait tomber les corps fur la terre dirige la lune autour de la terre.

TOUT corps defcend d'environ quinze pieds dans la

première feconde, en quelque endroit de la terre qu'il foit placé. Nous voyons que la chute des corps s'accélère en retombant fur notre globe; ils tendent tous évidemment en retombant à peu-près vers le centre de ce globe; n'y a-t-il point quelque puissance qui les attire vers ce centre? Et cette puiffance n'augmente-t-elle pas fa force à mesure que ce centre eft plus près ? Déjà Copernic avait eu quelque faible lueur de cette idée; Kepler l'avait embraffée, mais fans méthode. Le chancelier Bacon dit formellement qu'il eft probable qu'il y ait une attraction des corps au centre de la terre et de ce centre aux corps. Il propofait dans fon excellent livre, Novum fcientiarum organum, qu'on fît des expériences avec des pendules fur les plus hautes tours et aux profondeurs les plus grandes; car, difait-il, fi les mêmes pendules font de plus rapides vibrations au fond d'un puits que fur une tour, il faut conclure que la

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