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fouvenez vous feulement qu'il y a dans la vie beaucoup de chofes inuti,, les, & qu'il y en a peu qui menent à une fin folide. Ce n'eft point à moy à déliberer fur le parti que je dois prendre, il n'eft plus temps pour vous qui avez à me furvivre, vous ne fçauriez pefer trop meurement ce que ›, vous devez faire: & ce furent là fes » dernieres paroles.

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Ciceron dans le troifiéme livre: des Tufculánes dit que Theophrafte mourant fe plaignit de la nature, de ce qu'elle avoit accordé aux. Cerfs &. aux Corneilles une vie fi longue & qui leur eft fi inutile, lorfqu'elle n'avoit donné aux hommes qu'une vie tres-courte, bien qu'il leur importe fr fort de vivre long-tems; que fi l'âge. des hommes eût pû s'êtendre à un plus grand nombre d'années, il feroit arrivé que leur vie auroit été cultivée par une doctrine univerfelle, & qu'il n'y auroit eu dans le monde, ny art ny fcience qui n'eût atteint fa perfetion. Et faint Jerôme dans l'endroit déja cité affure que Theophrafte à l'a--ge de cent fept ans, frappé de la ma-ladie dont il mourut, regretta de for

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tir de la vie dans un temps où il ne faifoit que commencer à estre sage. Il avoit coutume de dire qu'il ne faut pas aimer fes amis pour les éprouver, mais les éprouver pour les aimer; que les amis doivent eftre communs entre les freres, comme tout eft commun entre les amis; que l'on devoit plûroft fe fier à un cheval fans frein, qu'à celuy qui parle fans jugement; que la plus forte dépenfe que l'on puiffe faire, eft celle du tems. Il dit un jour à un homme qui fe taifoit à table dans un festin; fi tu es un habile homme, tu as tort de ne pas parler; mais s'il n'eft pas ainfi, tu en fcais beaucoup : voilà quelquesunes de fes maximes.

Mais fi nous parlons de fes ouvrages, ils font infinis, & nous n'apprenons pas que nul ancien ait plus écrit que Theophrafte: Diogene Laêrce fait l'énumeration de plus de deux cens traitez differens, & fur toutes ,& fortes de fujets qu'il a compofez; la plus grande partie s'eft perdue par le malheur des temps, & l'autre fe reduit à vingt traitez qui font recueillis dans le volume de fes œuvres : l'on

y voit neuf livres de l'hiftoire des plantes, fix livres de leurs causes; il a écrit des vents,du feu,des pierres, du miel, des fignes du beau temps, des fignes de la pluye, des fignes de la tempefte, des odeurs, de la fueur, du vertige, de la laffitude, du relâchement des nerfs, de la défaillance, des poiffons qui vivent hors de l'eau, des animaux qui changent de couleur, des animaux qui naiffent fubitement, des animaux fujets à l'envie, des caracteres des mœurs: voilà ce qui nous refte de fes écrits, entre lefquels ce dernier feul dont on donne la traduction, peut répondre non feulement de la beauté de ceux que l'on vient de déduire, mais encore du merite d'un nombre infini d'autres qui ne font point venus juf ques à nous.

Que fi quelques-uns fe refroidiffoient pour cet ouvrage moral par les chofes qu'ils y voyent qui font du temps auquel il a été écrit, & qui ne font point felon leurs moeurs ; que peuvent-ils faire de plus utile & de plus agreable pour eux, que de fe défaire de cette prévention pour leurs.

coûtumes & leurs manieres, qui fans autre difcuffion non feulemét le, leur fait trouver les meilleures de toutes, mais leur fait prefque décider que tout ce qui n'y eft pas conforme eft méprifable, & qui les prive dans la lecture des Livres des Anciens, du plaifir & de l'inftruction qu'ils en doivent attendre.

Nous qui fommes fi modernes ferons anciens dans quelques fiecles : alors l'histoire du nôtre fera goûter à la posterité la venalité des charges c'est-à-dire le pouvoir de proteger l'innocence, de punir le crime, & de faire justice à tout le monde, acheté à deniers comptans comme une metairie; la fplendeur des Partifans,gens fi méprifez chez les Hebreux & chez les Grecs. L'on entendra parler d'une Capitale d'un grand Royaume, où il n'y avoit ni places publiques,ni bains, ni fontaines, ni amphitheatres, ni galeries, ni portiques, ni promenoirs, qui eftoit pourtant une ville merveilleufe: l'on dira que tout le cours de la vie s'y paffoit prefque à fortir de fa maifon, pour aller fe renfermer dans. celle d'un autre: que d'honnêtes fem

mes qui n'étoient ny marchandes, ny hôtelieres avoient leurs maifons ouvertes à ceux qui payoient pour y entrer; que l'on avoit à choifir des dez, des cartes, & de tous les jeux ; que: l'on mangeoit dans ces maifons, & qu'elles étoient commodes à tout: commerce. L'on fçaura que le peuple ne paroiffoit dans la ville que pour y paffer avec précipitation, nul entretien, nulle familiarité; que tout y étoit farouche & comme allarmé par le bruit des chars qu'il falloit éviter, & qui s'abandonnoient au milieu des rues, comme on fait dans une lice pour remporter le prix de la course : L'on apprendra fans étonnement qu'en pleine paix & dans une tranquilité publique, des citoyens en-troient dans les Temples,alloient voir des femmes, ou vifitoient leurs amis avec des armes offenfives, & qu'il n'y avoit prefque perfonne qui n'eût à fon côté de quoy pouvoir d'un feul coup en tuer un autre.Ou fi ceux qui vien

dront aprés nous, rebutez par des

mours fi étranges & fi differentes des leurs, fe dégoûtent par là de nos memoires,de nos poëfies, de notre co

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