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un feul jour; c'étoit alors leur unique inquietude & tout le fujet de leurs diftractions, & fi elles fe trouvoient quelquefois à l'Opera, elles y regrettoient la comedie. Autres temps, autres mœurs. Elles outrent. l'aufterité & la retraite; elles n'ouvrent plus les yeux, qui leur font donnez pour voir, elles ne mettent plus leurs fens à aucun ufage, & chofe incroyable! elles parlent peu; elles penfent encore, & affez bien d'elles-mefmes, comme affez mal des autres; il y a chez elles une émulation de vertu & de reforme qui tienr quelque chofe de la jaloufie; elles ne haiffent pas de primer dans ce nouveau genre de vie, comme elles faifoient dans celuy qu'elles viennent de quitter par politique ou par dégoût; elles fe perdoient gayement par la galanterie, par la bonne chere & par l'ofiveté, & elles fe perdent triftement par la présomption & par

l'envie.

Un homme devot entre dans un lieu faint, perce modeftement la foule, choifit un coin pour fe recueillir, & où perfonne ne voit qu'il s'humi

lie; s'il entend des Courtifans qui parlent, qui rient, & qui font à la Chapelle avec moins de filence que dans l'antichambre, quelque comparaifon qu'il faffe de ces perfonnes avec luy-mefme, il ne les méprise pas, il ne s'en plaint pas ; il prie pour eux.

L'on croit que la devotion de la Cour infpirera enfin la refidence..

ques

C'est une chose délicate à un Prince religieux de reformer la Cour & de la rendre pieufe: inftruit jufoù le Courtisan veut luy plaire, & aux dépens de quoy il feroit fa fortune, il le menage avec prudence, il tolere, il diffimule, de peur de le jetter dans l'hypocrifie ou le facrilege:il attend plus de Dieu & du temps, que de fon zele & de fon induftrie.

¶ L'on a efté loin depuis un fiecle dans les arts & dans les fciences, qui toutes ont efté pouffées à un grand point de raffinement, jufques à celle du falut que l'on a reduite en regle & en methode, & augmentée de tour ce que l'efprit des hommes pouvoit inventer de plus beau & de plus fu

* Fauffe

blime la devotion & la Geometrie ont leurs façons de parler,ou ce qu'on devotion. appelle les termes de l'art ; celuy qui ne les fait pas,n'eft ni devot ni Geomettre les premiers devots, ceux mefmes qui ont efté dirigez par les Apoftres, ignoroient ces termes, fimples gens qui n'avoient que la foy & les œuvres, & qui fe reduifoient à

croire & à bien vivre.

Je ne doute point que la vraye devotion ne foit la fource du repos; elle fait fupporter la vie & rend la mort douce, on n'en tire pas tant de l'hypocrifie.

Chaque heure en foy, comme à noftre égard eft unique; eft-elle écoulée une fois, elle a peri entierement, les millions de fiecles ne la rameneront pas les jours, les mois les années s'enfoncent, & fe perdent fans retour dans l'abîme des temps; le temps mefme fera détruit; ce n'eft qu'un point dans les efpaces immenfes de l'éternité, & il fera effacé: il y a de legeres & frivoles circonftances du temps, qui ne font point ftables, qui paffent, & que j'appelle des modes, la grandeur, la faveur,

les richeffes, la puiffance, l'autorité, l'indépendance, le plaifir, les joyes. la fuperfluité. Que deviendront ces modes, quand le temps mefme aura difparu La vertu feule fi peu à la mode va au delà des temps.

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L y a des gens qui n'ont pas le moyen d'eftre nobles.

Il y en a de tels, que s'ils euffent obtenu fix mois de delay de leurs creanciers, ils étoient nobles *. Quelques autres fe couchent roturiers & fe levent nobles *. Combien de nobles dont le les ainez font roturiers ?

pere &

Tel abandonne fon pere qui eft connu, & dont l'on cite ou le greffe ou la boutique, pour fe retrancher fur fon ayeul, qui mort depuis long. temps eft inconnu. & hors de prife; il montre enfuite un gros revenu, une: grande charge, de belles alliances, & pour eftre noble, il ne luy manque: que des titres.

¶ Rehabilitations mot en ufage dans les Tribunaux, qui a fait vieillir & rendu gothique celuy de lettres de nobleffe, autrefois fi François & fi ufité : le faire rehabiliter fuppofe qu'un homme devenu riche, originairement aft noble, qu'il eft d'une neceffité

** Vete

rans.

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