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coquilles comme sur de légères pirogues, traversent l'Océan et vont fonder au loin de petites colonies. Il y en a qui s'isolent, sans jamais vouloir souffrir de voisins ; ils répandent des odeurs fétides et portent des poisons: on les croirait destinés à tenir parmi les plantes le rang que les tigres et les reptiles tiennent parmi les animaux. Un plus grand nombre croissent par touffes et se réunissent en société leurs familles répandent l'abondance; de leurs calices s'élèvent des parfums; le miel est au fond de leur coupe, ce sont les abeilles du règne végétal. Voilà sans doute des idées charmantes, des observations pleines de grace et de nouveauté; mais lorsque l'auteur, les ramenant tout à coup aux besoins du genre humain, observe que, parmi cette multitude de plantes, les plus nécessaires, comme le blé et les graminées, ne sont attachées à aucun site, à aucun climat, qu'elles suivent l'homme dans sa marche autour du monde, pénétrent partout où il pénètre, vivent où il vit, on reste frappé de ce grand dessein de la Providence, et l'on aime l'heureux génie qui lui servit d'interprète. Ainsi donc notre domination est assurée, parcequ'elle était prévue, et les propriétés de quelques plantes nous livrent le globe tout entier.

Pour rendre des observations aussi neuves, il fallait une méthode nouvelle. L'auteur créa la sienne, et sa manière fut si vive, si frappante, qu'elle changea les formes de la science, et donna, pour ainsi dire, d'autres yeux aux voyageurs, une autre ame aux naturalistes. S'il décrit un insecte, un quadrupède, un poisson, il sait, par un rapprochement ingénieux avec nos mœurs ou nos usages, en offrir une image agréable à notre mémoire. Par exemple, les plus longues descriptions des entomologistes caractérisent moins bien le monocéros (oryctes nasicornis) que cette seule ligne : « Cet insecte se plaît dans le fumier de ⚫ cheval, et il porte sur sa tèle un soc dont il remue la » terre comme un labourenr. » Souvent aussi ses images tirent leur charme d'un sentiment qu'elles font naitre : c'est la manière de Virgile portée dans l'histoire naturelle. Ainsi, pendant que les botanistes disputent sur la question de savoir si, dans les fleurs où les organes sexuels ont une enveloppe unique, cette partie doit porter le nom de calice ou de corolle, M. de Saint-Pierre, se livrant aux plus aimables observations, remarque d'abord que plus les plantes sont rameuses, plus le calice de leurs fleurs est épais ; qu'il est même quelquefois garni de coussinets et de barbes, pour préserver la fleur du choc que les vents lui font éprouver, et, charmé de cette prévoyance de la nature, il ajoute : « C'est ainsi qu'une mère ⚫ met des bourrelets à la tête de ses enfants lorsqu'ils » sont petits, pour les garantir des accidents et des chu■tes. » Qui ne préférera cette définition du calice, qui en apprend les usages, aux divisions savantes établies par Linnée lui-même, de périanthe, involucre, chaton, spathe, coiffe, volve et gloume? En vérité, l'on ne se doutait guère que de pareils mots sont destinés à peindre les objets les plus délicats de la création.

Sans doute, au milieu des spéculations de Bernardin de Saint-Pierre, il s'est glissé quelques erreurs; mais quel livre en est exempt? Les plus grands génies semblent desfinés à donner l'exemple des plus grands écarts; c'est, avec la douleur, la marque de l'humanité. Nous voyons les systèmes des savants changer avec chaque génération; et, toujours refaits, ils se trouvent au bout de quelques siècles toujours à refaire. Pourquoi donc s'étonner de trouver dans Bernardin de Saint-Pierre ce qui est partout? On lui a reproché de s'égarer dans des idées systématiques; d'inventer des harmonies, des rapprochements, des con

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trastes, qui cependant ne sont pour lui que des effets visibles d'une intelligence invisible. Que n'aurait-on pas dit si on l'avait vu étudiant les rapports qui existent entre les dents, les mamelles ou les extrémités des animaux, y chercher un caractère général, et placer, comme le grand Linnée, dans le même ordre, sur la même ligne, l'homme et la chauve-souris ? Déplorable aveuglement du genie! triste résultat d'une science orgueilleuse ! la création de cet ordre qui porte le nom imposant de primates se trouve dans un livre intitulé: Systema Naturæ, comme si la nature elle-même avait établi ce bizarre rapprochement; comme si les lois de Dieu étaient un système ! Nous le répétons, il y a des fautes dans l'ouvrage de Bernardin de Saint-Pierre, mais il n'y en a point de ce genre. Tout ce qu'on peut demander à un homme qui fait un livre, ce n'est pas d'être exempt d'erreurs, c'est de n'en point commettre de dangereuses. Or, nous osons le demander, estil beaucoup de savants qui puissent dire comme lui : . Quelque hardies que soient mes spéculations, il n'y a ⚫ rien pour les méchants? » S'il ne rapporte pas les œuvres de la nature à une classe, il les rapporte à l'homme, et l'homme à Dieu. C'est un tableau des bienfaits et des merveilles, qui vaut bien un tableau des genres et des espèces. Qu'importe d'ailleurs qu'il n'ait pas toujours expliqué avec le même bonheur les vues de la nature, si l'ensemble de ses recherches nous fait bénir la Providence, et surtout s'il nous fait aimer la vertu? Ce qui nous semble le fruit d'une belle imagination est toujours une vérité que son génie a su rendre plus vive et plus frappante. A chaque page, l'observateur nous étonne par la hardiesse de ses spéculations; l'écrivain par la fraîcheur de ses pensées, la grace de son style, et le moraliste par la profondeur de ses vues et la bonne foi de sa religion. Semblable a un pilote habile, il cesse de côtoyer le rivage pour se diriger vers des mondes inconnus; ses regards abandon. nent la terre, mais il les lève vers le ciel, et c'est là qu'il découvre sa route.

Nous parlerons peu du style des Études; les éloges à ce sujet sont épuisés. Mais comment ne remarquerions-nous pas l'adresse singulière avec laquelle l'auteur sait fondre à propos dans son livre des morceaux de Virgile et de Plutarque, de manière à ce qu'ils ne forment qu'une seule pièce avec sa pensée ? D'abord il dispose ses tableaux, il en prépare les plans, et puis tout à coup il les éclaire par une ciation, avec un art semblable à celui des grands peintres, qui jettent sur leur composition un rayon de lumière pour en relever les effets. Mais le but de M. de SaintPierre n'est pas seulement de s'enrichir de ces beautés antiques ; il veut encore nous faire entrevoir dans les auteurs cités un sentiment exquis, une pensée profonde qui nous auraient échappé. Il nous apprend à lire Plutarque et Virgile ses citations sont de véritables découvertes. Voilà, nous osons le dire, les seules obligations qu'il ait aux anciens; car ce n'est pas dans les livres qu'il étudie la nature, mais dans la nature elle mème: aussi se rapprochet-il souvent de ces génies créateurs, qui n'avaient pas d'autre modèle. Voyez comme les petites circonstances sont pour lui l'origine des plus touchantes observations. Il ne faut ni machine, ni creuset, ni compas pour vérifier ses expériences; il suffit de regarder autour de soi. Les vaius systèmes de la science lui apprennent à se méfier des savants; mais il converse avec les gens simples, s'arrête dans les champs, entre dans les cabanes, interroge les vieillards, s'instruit avec un enfant, et raconte naïvement ce qu'il vient d'apprendre avec eux. On voit qu'il aime à surprendre le peuple au milieu de son travail et de ses

jeux, à épier ses vertus et à les peindre; et cette multitude | de petites scènes donnent un charme inexprimable à son ouvrage. Ses personnages savent tout ce que les savants ignorent : c'est une autre expérience, une autre sagesse. Souvent au milieu des incertitudes de la science les observations d'un simple villageois nous éclairent, et des vérités inconnues aux académies s'échappent de la bouche d'un berger.

C'est ainsi qu'en écrivant sur les sciences naturelles, comme Aristote, Pline et Sénèque, Bernardin de SaintPierre est resté original. Essayons de découvrir ce qu'il doit aux modernes. Cet examen nous servira peut-être à montrer le but et le résultat de ses ouvrages. C'est un point de vue qui nous semble avoir échappé à tous ses critiques.

Parmi les écrivains du siècle, Buffon et J.-J. Rousseau se présentent les premiers. Buffon ne peut offrir aucun point de comparaison. Trop souvent il suit les traces de Pline sa force est en lui-même ; il explique l'univers d'après les lois de sa physique, et les lois de la Providence lui restent inconnues. Son style, plein de pompe et d'harmonie, manque de nuances, de sensibilité et de douceur: tandis que celui de Bernardin de Saint-Pierre, simple comme la nature, semble destiné à la peindre dans sa grace et dans sa sublimité. D'ailleurs toute la force de l'auteur des Études vient de sa conviction: c'est parcequ'il y a un Dieu qu'il est éloquent. Sa foi est dans tout ce qu'il écrit, et ce seul trait prouve, selon nous, que Buffon ne fut ni son maître, ni son modèle. Reste donc J.-J. Rousseau, auquel on l'a souvent comparé, peut-être parcequ'il fut son ami et que leurs destinées furent presque semblables.

Toujours ferme dans ses principes, il fut éprouvé, et non avili, par ses passions. On s'étonne encore de la folie qui le conduit aux extremités de l'Europe pour y fonder une république ; mais on l'admire lorsqu'il refuse de se prèter à des projets ambitieux qui pouvaient le placer près du trône, et lorsqu'à la suite de ses refus on le voit rentrer en France, n'emportant de ses courses aventureuses que des regrets et des souvenirs. Sa confiance en Dieu s'accrut par le malheur, et l'abandon des hommes lui apprit à bénir la Providence, qui ne l'abandonnait pas. Eufin, quoique devoré d'ambition, il ignora toute sa vie l'art de composer avec sa conscience pour arriver à la fortune, et celui de s'avilir pour arriver au pouvoir. Telles furent les destinées de ces deux grands écrivains.

Lorsqu'ils se rencontrèrent, Jean-Jacques vivait seul et gémissait d'être devenu célèbre; Bernardin de Saint-Pierre ne l'était point encore, mais il brùlait de le devenir. L'amour de la solitude et de la nature les réunit, et, dans les douces relations qui s'établirent entre eux, ils furent toujours d'accord sur les grands principes de la morale, et toujours divisés sur les opinions purement humaines. Bernardin de Saint-Pierre admirait l'éclat et la force entraînante des écrits de Jean-Jacques, mais il condamnait ses paradoxes, et l'on peut dire qu'il ne cessa de les combattre. L'un débuta dans la carrière par attaquer les sciences, qui dépravent l'homme, et par médire des lettres, dont il faisait souvent un si sublime usage. L'autre, applaudissant aux découvertes du génie, montre que tous les maux viennent de notre orgueil, et que la véritable science ne peut être dangereuse, puisqu'elle est l'histoire des bienfaits de la nature.Jean-Jacques Rousseau ne veut pas qu'on parle de Dieu à son élève avant l'âge de quatorze ans ; Bernardin de Saint-Pierre dit que rien n'est plus agréable à la Divinité que les prémices d'un cœur que les passions n'ont

tat sauvage, et, pour lui rendre son innocence, le dépouille de son génie ; l'autre cherche les moyens d'assurer notre repos dans l'état de société, et ne veut nous dépouiller que de nos erreurs. Selon Rousseau, tout dégénère entre les mains de l'homme: la nature n'a songé qu'au bonheur des individus, elle n'a rien fait pour les nations. Bernardin de Saint-Pierre nous montre,au contraire, les plantes et les

Tous deux nés dans une condition moyenne, et tous deux sans fortune, ils errèrent longtemps par le monde, et n'écrivirent que vers l'âge de quarante ans, lorsque l'ex-point encore flétri. L'un ramène fièrement l'homme à l'épérience et le malheur eurent mûri leurs pensées. Mais le point de départ mit entre eux une grande différence. JeanJacques, n'ayant ni but ni principe arrêté, promena long-❘ temps son oisive jeunesse entre l'opprobre et la misère. | Dénué de toute prévoyance, ne suivant que sa fantaisie, il s'éloigna par une sorte d'instinct de tout ce qui aurait pu élever sa condition en lui imposant quelque gêne. Si la lecture de Plutarque lui fit répandre des pleurs sur d'hé-animaux' se perfectionnant sous la main des peuples. L'exroïques souvenirs, elle ne le sauva pas toujours du vice, et il commit des fautes que la charité seule peut pardonner au repentir. Il aurait voulu être un Romain, et il n'eut pas même la force d'être toujours un honnête homme. D'abord perdu dans les plus basses classes de la société, puis jeté au milieu d'un monde corrompu, il apprit à mépriser les grands et les petits; mais il ne put apprendre à se passer de leur estime. Il crut en Dieu sans y mettre sa confiance, il aima la vertu sans y croire, et la vérité en prétant sa voix au mensonge. Malheureux de ne pouvoir accorder ses opinions et sa conduite, il éprouva jusqu'à sa dernière heure qu'il vaudrait mieux n'être pas néque de ne rien attendre de Dieu et de ne pas oser se fier aux hommes. Combien le sort de M. de Saint-Pierre fut différent! Une éducation ambitieuse égara, il est vrai, sa jeunesse; mais ce fut en lui proposant un but sublime et d'honorables travaux. On sent que le desir de s'élever donnait des vertus à son ame et de l'énergie à son caractère. Jeté seul dans le monde, il y commit des étourderies, mais point de fautes que l'honneur pût lui reprocher. Un sentiment vif d'indépendance et de dignité rendit s probité si sûre, qu'un jour il vendit tout ce qu'il possédait, ses meubles, ses habits, son linge, pour acquitter une dette contractée en Pologne.

périence lui apprend que l'homme, réduit à lui-même, est comme un flambeau sans lumière; son génie s'éteint, et tout périt autour de lui. Plus de moissons, plus de fruits savoureux : l'olive reprend son amertume, la pêche devient acide, le grain de blé disparaît dans son épi, il ne nous reste que des glands et des racines; car la nature n'a rien fait pour l'homme seul; elle a attaché notre existence à celle de la société. Enfin Rousseau s'indigne des vices de la civilisation et la rejette, tandis que toutes les pensées de Bernardin de Saint-Pierre tendent à perfectionner les vertus sociales. Tous deux veulent, il est vrai, vivre au sein de la nature, mais le premier dans un désert, et le second dans un village et au milieu de sa famille.

Quant à la raison, à la vérité, a la sagesse, j en vois bien les noms dans les écrits de Rousseau, mais j'en cherche en vain les effets. Malheur à ceux qui lui donnent leur ame! car c'est notre ame qu'il nous demande, et pour la précipiter dans un abîme d'illusions et de contradictions. Ennemi de tout ce qui est, il faut le mettre d'accord avec lui-même avant de s'accorder avec lui; il le faut écouter, non le croire. Si vous êtes sage, songez donc en le lisant aujourd'hui à ce qu'il vous disait hier. Tant de propositions opposées, de paradoxes bizarres,doivent éveiller vos doutes

quelques idées fondamentales qui peuvent servir au bon

et vous avertir du danger. L'écrivain qui vous enflamme pour le mensonge peut vous faire admirer la supério-heur de tous; mais il les trouve en développant des sys

rité de son éloquence; mais il vous prouve en même temps la faiblesse de ses arguments et la nullité de votre raison.

Il est des inspirations presque divines qui ne nous séparent jamais de la vertu et qui sont entendues de tous les hommes. Si Jean-Jacques Rousseau subjugue la raison et la trompe, Bernardin de Saint-Pierre touche le cœur et cherche à l'éclairer. Chaque émotion lui fait découvrir une vérité, chaque objet de la nature un bienfait. Ce n'est pas la parole d'un maître qui vous reproche vos erreurs ; c'est celle d'un ami qui craint lui-même de se tromper, qui vous prévient de son ignorance, qui doute, il est vrai, de la sagesse des philosophes, mais qui doute encore plus de la sienne. Son éloquence est une partie de son ame, elle en a la douceur, elle ne sert qu'à en exprimer les sentiments. Dans la guerre qu'il déclare aux incrédules, son unique but est de les conduire au bonheur : il ne veut pas écraser ses ennemis, il veut les émouvoir et les convaincre. On sent que ce n'est pas pour l'honneur de la victoire qu'il combat, mais qu'il éprouverait une joie infinie s'il ramenait un seul de ses adversaires à la vérité. Il dit : « Etudiez la nature ! aimez les infortunés! adorez la Providence! soyez heureux!»

Jean-Jacques, au contraire, méprise les hommes, que Bernardin de Saint-Pierre veut éclairer : ce qu'il soutient le mieux, c'est l'erreur; ce qu'il redoute le plus, c'est la vérité. La résistance blesse son orgueil; il ne sait rien apprendre d'elle. Il veut étonner, subjuguer, éblouir; l'ironie amère, l'invective éloquente, la véhémence, le mépris, voilà ses armes. Il faut que son adversaire tombe à ses pieds, qu'il reste muet d'admiration, ou qu'il meure de honte. Dans cette lutte il vous repousse, il vous outrage, il vous écrase. Sa parole est un ordre, il faut lui céder ou être bai. Il dit : « Aimez-moi, honorez-moi, croyez en moi, je suis la vérité! »

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Le trait caractéristique de leur génie, c'est que JeanJacques s'isole et rapporte toutes ses spéculations à un seul homme, qui est souvent lui-même, tandis que Ber

nardin de Saint-Pierre étend les siennes à la nature et au genre humain. S'il écrit de l'éducation, ce n'est pas de celle d'un enfant, c'est de celle des peuples; s'il parle de la science, c'est en généralisant ses bienfaits pour le bonheur de tous. Ses vues politiques embrassent le globe entier, qu'il réunit par le commerce, par l'intérêt et par l'amour. Il lui est démontré que les nations sont solidaires, que la sagesse d'une seule pourrait se répandre sur toutes les autres, et que sa patrie doit avoir un jour cette heureuse influence, parcequ'elle règne sur l'Europe, et l'Europe sur le monde. Son livre serait encore utile aux habitants des Indes et de la Chine, à ceux qui errent sur les bords de la Gambie et de l'Amazone. Il n'en est pas de même des ouvrages de Jean-Jacques Rousseau. Comment généraliserez-vous ses idées? Fonderez-vous des peuplades de sauvages et d'ignorants? Un homme peut renoncer aux sciences et se croire sage; mais une nation ne renoncerait pas à ses lumières sans renoncer à sa prospérité. Osez proposer le Contrat Social à une ville plus grande que Genève, et ces lois si savamment méditées ne produiront que d'effroyables révolutions. Donnez à un peuple le plan de l'éducation de l'Émile, et ce beau traité devient illusoire. Jean-Jacques n'a voulu élever qu'un homme, et ce sont des nations que Bernardin de Saint-Pierre voulait former.

Ce n'est pas qu'il n'y ait dans les ouvrages de Rousseau OEUVRES POSTHUMES.

tèmes qui ne peuvent servir qu'au bonheur d'un seul ; au contraire, c'est toujours en partant d'une idée utile au genre humain que Bernardin de Saint-Pierre nous enrichit d'une multitude d'observations qui peuvent assurer le bonheur de chacun.

Mais un dernier point de comparaison se présente. Tous deux ont beaucoup parlé des femmes; et tous deux, par des moyens opposés, ont captivé leurs suffrages. Rousseau attaque sans cesse leur frivolité, leur inconstance, leur coquetterie; personne n'en a dit plus de mal et n'en a été plus aimé: il les traite de grands enfants, il se plaît à les montrer faibles ; les plus parfaites succombent dans ses écrits. Vainement il emploie des volumes pour former l'épouse d'Emile à quoi bon tant d'apprêts, tant de soins, tant de sollicitudes? le fruit de ce chef-d'œuvre d'éducation est l'infidélité de Sophie. Cependant toutes ses accusations ne peuvent éteindre l'enthousiasme qu'il inspire; les femmes lisent malgré lui au fond de son ame: ce sont les reproches de l'amour, et non de la haine; il les décrie et les adore, il les blâme et les rend aimables, il les accable et les déifie, et, dans ses emportements les plus terribles, on reconnaît le langage d'un amant qui veut, mais en vain, rompre ses chaines. Il est comme ce sauvage qui, voyant du feu pour la première fois, réjoui de sa chaleur et de sa lumière, s'en approcha pour le baiser; mais, en ayant été brùlé, il le maudissait, le priait, l'adorait, ne sachant si c'était un démon ou un dieu.

Bernardin de Saint-Pierre a plus de douceur sans avoir moins de passion. Les femmes apparaissent dans ses écrits telles que nous les voyons dans les rêves de notre adolescence, parées de leur beauté virginale et ne tenant à la terre que par l'amour. C'est sous leur douce influence qu'il voudrait replacer l'homme pour le ramener à la vertu ; il ne voit que leur pureté, il ne peint que leur grace, il n'aime que leur innocence. Rousseau consume notre ame par l'exemple de Julie oubliant tout dans les bras de son amant ; Bernardin de Saint-Pierre nous pénètre d'un sentiment divin en nous offrant la douce image de Virginie. Aucun souffle ne ternit cette fleur délicate, qui répand les parfums du ciel. Elle aime de l'amour des anges, et sa dernière action est sublime; car, au moment où elle peut espérer d'être heureuse, elle donne sa vie pour ne pas manquer à la pudeur. Ainsi les tableaux de Bernardin de Saint Pierre ont toujours quelque chose d'idéal, sans cependant jamais sortir de la nature; il est comme ces statuaires des temps antiques, qui reproduisaient la figure humaine avec des proportions si parfaites, que sous une forme mortelle on reconnaissait une divinité. Rousseau fut donc l'ami et non le maître de l'auteur des Études; et s'il eut plus de talent et d'éloquence, il eut aussi moins de naturel et moins de graces.

Un de ces génies privilégiés que Dieu envoie de temps à autre pour faire entendre sa pensée aux hommes, une de ces intelligences supérieures destinées à offrir à la terre le spectacle des vertus antiques sous l'image touchante de la piété et de l'humilité chrétienne, Fénelon, tel fut, selon nous, le divin modèle que choisit Bernardin de SaintPierre; c'était aussi celui de Jean-Jacques, et l'amour du maître ne fut pas le lien le moins fort de l'affection mutuelle des disciples. Tous deux reconnaissaient la superiorité de Fénelon; et l'on voit assez qu'en parlant de ses écrits ils sont prêts à dire de lui ce que Stace disait de Virgile « Ne cherchons point à l'égaler, contentons» nous de le suivre de loin en baisant ses traces. »

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La lecture de Télémaque inspira le premier ouvrage de | Bernardin de Saint-Pierre, et il ne lui manqua que d'achever l'Arcadie pour mériter une gloire peut-être égale à celle de Fénelon. Il avait à peindre la mème époque et les mêmes malheurs, ceux qui suivirent la prise de Troie, mais il pénétrait chez des peuples à qui ces grands événements étaient restés inconnus, les uns à cause de leur barbarie, les autres à cause de leur innocence, ce qui devait donner une grande nouveauté à son poëme. Les images champêtres de l'Arcadie, le tableau de la Gaule sauvage et de l'Egypte corrompue, lui offraient aussi le moyen de mettre en action toutes les théories qu'on trouve éparses dans le Telemaque sur l'éducation des enfants et le gouvernement des peuples; théorie qu'il développa plus tard dans les Études, comme on peut le voir en rapprochant l'Etude XIV, qui traite de l'éducation nationale, d'un passage du Télémaque sur le même sujet '. Forcé par la mauvaise fortune de renoncr à l'Arcadie, et de cueillir, suivant son expression, le fruit encore vert, il réunit les débris de son poëme pour en composer les Études; mais, en changeant de dessein, il resta disciple fidèle, car ce dernier ouvrage n'est pour ainsi dire que le développement du beau traité de Fénelon sur l'existence de Dieu. L'ame religieuse de Fénelon avait dirigé l'étude de la nature vers son premier principe. Le génie éminemment observateur de Bernardin de Saint-Pierre fut frappé de cette pensée, et il ne tarda pas à reconnaître qu'il y avait plus de véritable savoir dans cet axiome populaire : Dieu n'a rien fait en vain, que dans tous les livres des savants. Voyez en effet combien ce principe s'étend et fructifie sous sa main, comment il conduit l'auteur de découverte en découverte, comment il lui fait en même temps saisir la beauté éternelle des choses les plus communes et l'heureux rapport de toutes ces choses avec Dieu et les hommes. Non seulement il puise dans cette source de vérité, mais encore il enseigne la route à qui sait y puiser : c'est ainsi que son livre nous ouvre un horizon enchanteur, qui n'a d'autres bornes pour le génie que celles de la nature.

Mais ce qui rapproche surtout Bernardin de Saint-Pierre de Fénelon, c'est la douceur de son langage et celle de sa morale. Il avait appris de son maître que la religion vient de la bonté de Dieu, qu'elle est dans le cœur humain, qu'elle naît de la reconnaissance; et le plus bel éloge qu'on puisse faire de ses écrits, celui-là même qu'on donne à ceux de Fénelon, c'est qu'il est impossible de les lire sans éprouver un goût plus vif pour la vertu et un redoublement de confiance en Dieu. Ah! sans doute, en traçant l'apologie du christianisme dans un siècle où l'on n'applaudissait qu'aux blasphèmes de l'athéisme, il sentit toute la dignité de sa mission; aussi fut-il subline,et c'est ainsi qu'il échappa à la condamnation que le siècle menaçait de porter contre lui. Il faut l'entendre parler de cette religion, qui « seule a connu que nos passions infinies étaient » d'institution divine. Elle n'a pas, dit-il, borné dans le » cœur humain l'amour à une femme et à des enfants, > mais elle l'étend à tous les hommes; elle n'y a pas cir» conscrit l'ambition à la gloire d'un parti ou d'une nation, >> mais elle l'a dirigée vers le ciel et l'immortalité; elle a » voulu que nos passions servissent d'ailes à nos vertus. » Bien lom qu'elles nous lient sur la terre pour nous ren» dre malheureux, c'est elle qui rompt les chaînes qui > nous y tiennent captifs. Que de maux elle y a adoucis! » que de larmes elle y a essuyées! que d'espérances elle a

↑ Livre XIV.

2 Etudes de la rature. 1. 1'.

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» fait naître quand il n'y avait plus rien à espérer! que » de repentirs ouverts au crime! que d'appuis donnés à l'innocence! Ah! lorsque ses autels s'élevèrent au milieu de nos forêts ensanglantées par les couteaux des druides, que les opprimés vinrent en foule y chercher des asiles, que des ennemis irréconciliables s'y embrassèrent en pleurant, les tyrans émus sentirent, du haut des tours, tomber les armes de leurs mains; ils n'avaient connu que l'empire de la terreur, et ils voyaient naître celui de la charité. Les amants y accoururent pour y jurer de s'aimer et de s'aimer encore au-delà du tombeau : elle » ne donnait pas un jour à la haine, et elle promettait ⚫ l'éternité aux amours. Ab! si cette religion ne fut faite » que pour le bonheur des misérables, elle fut donc faite » pour celui du genre humain! »

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Ne semble-t-il pas que l'ame du maître ait passé dans celle du disciple? Et comment se refuserait-on à reconnaître l'influence de Fénelon dans un livre qui renferme une multitude de morceaux semblables? Aussi les philosophes ne pardonnèrent à l'auteur ni sa vertu, ni son éloquence, ni sa gloire. Ne pouvant réfuter ses principes, ils essayèrent d'en affaiblir l'effet en publiant que le clergé lui faisait une pension, voulant montrer une ame vénale où l'on voyait une ame religieuse. Il y avait bien quelque chose de vrai dans cette accusation. L'auteur aurait pu obtenir cette pension s'il avait voulu la demander à l'assemblé générale du clergé. On le lui fit même proposer; et, pour lui offrir cette honorable récompense, on ne demandait que son aveu. Mais, loin de le donner, cet aveu, il s'opposa aux démarches de l'archevêque d'Aix, qui jouissait alors d'une puissante influence. « Je ne veux, disait-il, ni qu'on puisse soupçonner ma plume d'être vénale, ni la mettre à la solde d'aucun corps. » Ainsi chaque calomnie dont on a tenté de fiétrir ce grand écrivain nous fera découvrir une action honorable. Que les méchants n'espèrent rien de ce qui nous reste à dire ! Caton, le plus sage des hommes, fut accusé quarante-quatre fois, et ces accusations n'eurent d'autre résultat que de forcer ses ennemis à reconnaître quarante-quatre fois sa vertu.

Si donc il suffisait de toucher et de convaincre pour faire aimer la vérité, il n'y aurait plus d'incrédules : le livre de Bernardin de Saint-Pierre eùt anéanti l'erreur. Mais la vérité ne fait plus de prodiges: tout ce qu'on peut en attendre, elle le fit alors. On peut dire que ce livre attira à M. de Saint-Pierre les hommages de l'Europe entière. Les hommes les plus savants de France et d'Angleterre lui écrivirent pour le féliciter de ses découvertes, et l'engagèrent à continuer ses sublimes spéculations. Lesgrands, dans l'espoir de tourner au profit de leur plaisir son goût pour la campagne, le pressaient de venir habiter leurs châteaux. Plusieurs mères, touchées de ses idées sur le mariage, lui offrirent la main de leurs filles. Les malheureux, attirés par son épigraphe, venaient à lui avec des passages de son livre, et lui demandaient des secours qu'il était hors d'état de leur donner. D'autres, lui croyant du crédit, le priaient de solliciter pour eux, ou de leur enseigner les moyens d'acquérir sans peine des honneurs et des richesses; mais, voyant qu'il ne voulait leur apprendre qu'à se passer de ces faux biens, ils se retiraient en murmu. rant, et l'accusaient d'égoïsme et d'insensibilité. Enfin on lui écrivait de tous côtés : son temps eût à peine suffì à répondre aux lettres de sollicitations ou de compliments; et, daus l'espace d'un an, il paya pour plus de deux mille francs de ports de lettres. Chacun avait la prétention d'établir avec lui une correspondance réglée, et, lorsqu'il tardait à répondre, on ne manquait pas de lui récrire

pour se plaindre de son impolitesse. Obligé de fermer sa porte, et de laisser à la poste la plupart de ces lettres, il ne tarda pas à éprouver les atteintes de la calomnie. Ce consolateur, ce bienfaiteur des hommes, ne fut plus qu'un | être injuste et bizarre, un hypocrite qui ne se disait l'ami de la nature que pour être plus à son aise l'ennemi de la société. Ses plus zélés partisans se changèrent en cruels détracteurs : les philosophes aidaient à la médisance; et, n'ayant pu en faire un esclave ou un flatteur, ils essayaient d'en faire un paria.

Ces tristes efforts de l'envie et de la sottise ne purent cependant détruire sa tranquillité. « Il me semble, disait quelquefois M. de Saint-Pierre, qu'il y ait en moi plusieurs étages où mon ame habite successivement. J'aime naturellement le fond de la vallée, je m'y repose des maux de la vie; mais, lorsqu'on vient m'y troubler, mon ame s'élève par degrés au dessus de tout ce qui voudrait l'atteindre. Si le malheur augmente, je m'élance au sommet de la montagne, et, loin de la vue des hommes, je me réfugie dans un monde où je ne suis plus en leur pouvoir..

Parmi les lettres qu'on lui adressait de toutes parts, il y en avait de si romanesques, qu'on les croirait l'œuvre de l'imagination. Telle est surtout celle d'une demoiselle de Lausanne, qui, se laissant charmer a la lecture des Études, écrivit aussitôt à l'auteur pour lui proposer sa main. Ce qu'il y a de plus singulier, c'est que sa mère autorisait sa démarche et joignait sa prière à la sienne. Cette demoiselle était jeune, belle et riche: elle le disait naïvement; mais elle était protestante, et ne voulait point épouser un catholique, ce qu'elle disait avec la même naïveté: Je veux, écrivait-elle, avoir un mari qui n'aime que moi, et qui m'aime toujours. Il faut qu'il croie en Dieu, et qu'il le serve à ma manière... Je ne voudrais pas être votre femme, si ce n'était pour faire ensemble notre salut.

Ce dernier sentiment avait quelque chose de délicat, que M. de Saint-Pierre ne manqua pas de remarquer dans sa réponse, mais sans s'expliquer sur l'objet principal. IĮ terminait sa lettre par ces mots : Je pense comme vous ; et, pour aimer, l'éternité ne me parait pas trop longue. Mais, avant tout, il faut se connaitre et se voir dans ce monde.

L'article de la religion n'étant pas réglé, la jeune personne recommença ses sollicitations, en chargeant une de ses amies qui habitait Paris, de faire expliquer M. de SaintPierre. Celle-ci traita la difficulté légèrement comme si rien ne lui eût paru plus naturel. « Vous avez écrit, lui dit-elle, qu'il y avait douze portes au ciel.- Cela est vrai. -Vous avez dit que les oiseaux chantaient leurs hymnes chacun dans leur langage, et que tous ces hymnes étaient agréables au Créateur; ainsi vous vous ferez protestant, et vous épouserez mon amie.-Ah! madame, reprit Bernardia de Saint-Pierre, vous avez beau vouloir me prendre par mes propres paroles, je n'ai jamais dit qu'un rossignol dût chanter comme un merle; je ne changerai donc ni de religion ni de ramage.» La négociation en demeura là. Ce ne fut que plus de quatre ans après, en 1788, que M. de Saint-Pierre donna Paul et Virginie. Ce petit ouvrage était depuis longtemps dans son portefeuille, et le mauvais succès d'une lecture de société avait même failli le lui faire jeter au feu avec tous ses papiers. Nous nous arrêterons un instant sur cette circonstance, qui nous "force de revenir sur nos pas.

Cette lettre contenait un si bel éloge du porteur, qu'elle le fit accueillir avec empressement. Dans la suite, malgré les voyages qui l'éloignèrent et son amour pour la solitude, il continua toujours de voir, de loin en loin, madame Germany, qui l'attirait par les charmes de sa conversation, et par une extreme ressemblance avec la princesse qu'il avait aimée en Pologne. On disait de madame Germany, qui était étrangement bossue, que la nature lui avait donné, avec la tête d'un ange, la langue et la queue d'un serpent: triple allusion qui exprimait fort bien la beauté de ses traits, la difformité de sa taille et la malice de son esprit. Il est vrai que ses railleries, toujours piquantes, auraient pu passer pour des méchancetés; mais M. de Saint-Pierre, en écoutant madame Germany, était si préoccupé du souvenir de la princesse, qu'incapable de voir ses défauts, il louait quelquefois jusqu'à sa bonté. Madame Germany se moquait de son aveuglement, dont elle ne laissait pas d'être charmée. Elle disait de M. de Saint-Pierre: «Si je le laissais faire, il me persuaderait que ma bosse rend ma beauté plus touchante. Mais il faut lui pardonner: il croit ce qu'il dit, et ne flatte que ceux qu'il aime. » Ce dernier trait peint admirablement M. de Saint-Pierre: il n'y a que les femmes qui sachent saisir ainsi les nuances délicates de notre cœur.

Un jour qu'après une assez longue absence il rendait visite à madame Germany, une dame, dont la tournure était plus raide qu'imposante, entra sans se faire annoncer. Elle avait une robe de soie nacarat, les bras et le sein découverts, costume qui n'était d'usage qu'à la cour. « Ma sœur, lui dit madame Germany dès qu'elle fut assise, voilà un philosophe que je vous présente. Il ne ressemble en rien à ceux que vous connaissez; tâchez seulement de l'apprivoiser. Il est plein de mérite, et je me hâte de vous le dire, car il se donne autant de peine à cacher l'esprit qu'il a que d'autres s'en donnent à montrer celui qu'ils n'ont pas. Pendant ce discours, la figure de la dame nacarat n'avait rien perdu de sa dignité. M. de Saint-Pierre, un peu piqué de son air froid et protecteur, fit un profond salut, et se disposait à se retirer, lorsque madame Germany lui rappela qu'il devait diner avec elle. Bientôt on servit, et sa place fut désignée à côté de l'inconnue, à laquelle il trouvait plus de beauté que de physionomie, plus d'apprêt que de grace, plus de prétentions que d'esprit. Elle ne conversait pas, elle discourait, et ses discours ressemblaient à une composition dont les effets sont prévus. Point de finesse dans les aperçus, point de netteté dans l'expression; dans tout ce qu'elle disait, il y avait quelque chose de personnel, et sa conversation était l'expression de sa vanité plutôt que de celle de son esprit. En l'écoutant, on sentait qu'elle voulait être admirée, et l'on cherchait pourquoi. A l'autre bout de la table, il y avait un homme dont les manières étaient lourdes, les traits durs, le regard fixe et l'air préoccupé. Il parlait peu, n'écoutait pas, mangeait beaucoup, et on le servait avec une attention qui ressemblait à du respect. Vers le milieu du dîner, ce personnage demanda du café, en prit une tasse, et sans autre façon il sortit de table avec la dame nacarat, qui pria sa sœur de lui amener M. de Saint-Pierre. Il apprit alors qu'il venait de dîner avec M. et madame Necker. A ce nom il comprit les manières moitié protectrices, moitié dédaigneuses, de ce couple singulier, qui senorgue Ilissait déja du crédit qu'il n'avait pas encore. On sait que M. de Maurepas, séduit par les vues d'économie du financier de Ge

Au moment de son départ de Prusse, le prince Dolgo-nève, fut la première cause de son élévation. M. Necker rouki, ambassadeur de Russie à Berlin, lai remit une lettre pour le banquier Germany, beau-frère de M. Necker.

arriva au ministère en écrasant son protecteur, et l'on peut dater de cette époque funeste les malheurs de la d.

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