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feu de l'expérience, ou le soleil, qui en a fait un charbon. Ce serait, dans cette dernière supposition, celui de la lumière, dont l'or, d'un autre côté, semble être une concrétion. Ce qu'il y a de certain, c'est que le soleil ne forme l'un et l'autre que dans la zone torride, comme on le voit par les latitudes des mines d'or et de diamants. S'il se trouve de l'or hors des tropiques, c'est que la mine qui le fournit y a été renfermée autrefois, comme je l'ai prouvé, d'un autre côté, par les fossiles des végétaux et des animaux torridiens qui sont dans leur voisinage. Il y a des mines d'or en Sibérie; mais il y a aussi beaucoup de débris de palmiers, de squelettes et de dents d'éléphants. Quant aux diamants, je n'ai pas ouï dire qu'on en eût encore trouvé dans les zones tempérées ou glaciales, peutêtre faute de les y avoir cherchés. Un diamant brut ne se découvre pas comme l'or par son éclat, car il ne ressemble qu'à un grain de sel; mais il a ceci de commun avec l'or, qu'il est le plus pesant de tous les cailloux non métallisés, comme l'or est le plus lourd des métaux.

Si donc la terre, sous l'influence la plus active du soleil, sert de matrice à l'or, pourquoi les végétaux et les animaux qui pompent ses rayons et combinent en leur propre substance leurs particules ignées ne renfermeraient-ils pas aussi des parcelles d'or, comme ils en contiennent de fer? Il est très-remarquable que la couleur jaune, indicatrice de l'or dans les pierres, se manifeste dans la plupart des germes des semences, et surtout dans cette poussière jaune des anthères qui féconde leurs fleurs. Presque toutes les anthères des fleurs sont jaunes, et elles sont placées au foyer d'un réverbère formé par des pétales, dont les courbes réfléchissent sur ces parties masculines toutes les influences des rayons du soleil. Au contraire, les stigmates ou ouvertures du pistil qui en sont les parties féminines sont blancs, et semblent établir par leurs couleurs d'autres rapports avec les influences des rayons de la lune. Les fleurs de quelques plantes paraissent phosphoriques la nuit, entre autres la capucine. Enfin, lorsque les végétaux viennent à se décomposer, les feux dont ils s'étaient imbibés semblent s'en dégager en partie et apparaissent en lueurs bleuâtres : telles sont celles des bois pourris.

Les mêmes effets de la lumière et de l'électricité peuvent se reconnaître dans les animaux. Leur cerveau et leurs nerfs, qui sont en quelque sorte leurs premiers germes, sont d'un blanc mêlé de jaune. Leurs nerfs sont, comme les fils d'or et d'argent, de puissants conducteurs de l'électricité.

OEUVRES POSTHUMES.

Celui qui aboutit à leurs yeux les rend quelquefois étincelants dans les transports de l'amour ou de la colère. Enfin, dans la dissolution des animaux, les particules de la lumière qui entraient dans leur composition se manifestent souvent en lueurs phosphoriques, surtout dans les poissons marins, parceque la mer est le grand réceptacle des éléments. Elle est si imprégnée de celui du feu entre les tropiques, qu'elle en paraît la nuit toute lumineuse; mais lorsqu'elle flue de la zone torride vers notre pôle pendant notre hiver, non seulement elle en adoucit la rigueur sur nos côtes, en attiédissant leur atmosphère par sa chaleur, mais elle est peutêtre, par ses émanations phosphoriques et ses ondulations, la cause de ces aurores boréales ondoyantes qui, l'hiver, éclairent les nuits des contrées septentrionales, et qui n'y apparaissent qu'après l'équinoxe d'automne, époque de sa révolution du midi au nord. Non seulement l'attraction, le magnétisme, l'électricité et la lumière sont dans les métaux, les végétaux et les animaux; mais le feu lui-même qui les produit y est en nature et dans un état de repos que le mouvement manifeste. Les physiciens suédois viennent de produire, par le simple frottement de deux plaques de fer, une chaleur qui fait bouillir de l'eau dans un vase, sans que ces deux plaques s'usent sensiblement. C'est un nouveau moyen de se chauffer. Nous ne pouvons pas douter que le bois ne contienne beaucoup de feu, puisqu'il en fournit sans cesse à nos foyers.

Quant aux animaux, leur chaleur manifeste assez le feu qui les anime. L'homme en est le mieux pourvu; sa chaleur naturelle est la même que celle qui fait éclore les œufs des oiseaux; il peut l'augmenter par le simple frottement de ses membres : ils produisent alors de la chaleur, comme les deux plaques de fer de l'expérience suédoise; c'est une preuve de plus des rapports des nerfs avec les métaux. Les uns et les autres sont aussi des conducteurs et des foyers de l'électricité, comme nous le verrons par l'expérience du galvanisme.

Un animal a, avec son ame élémentaire, une ame végétale qui en est très distincte. S'il n'avait qu'une ame élémentaire, elle mettrait son corps en boule par son attraction, ou en aigrette par son électricité, ou en telle autre forme analogue à celle des cristaux ou des pyrites. Mais l'ame végétale a, si j'ose dire, sous ses ordres la première avec toutes ses falcultés mécaniques. Je la compare à un maçon servi par un apprenti qui lui apporte tous les matériaux dont il a besoin, tandis qu'il les dispose par assises et par chaînes pour élever son

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édifice. L'ame végétale organise le corps d'un ani- | sa course journalière et annuelle, déploie en spirale la circonférence de ses deux hémisphères; le soleil l'entoure de ses rayons, comme de fils d'or tendus sur un métier; la lune, semblable à une navette céleste, les croise et les entrelace de ses rayons d'argent. Les végétaux et les animaux éclosent, se développent et se perpétuent par ces harmonies soli-lunaires et luni-solaires: on ne peut en douter; mais comment celles-ci auraient-elles le pouvoir de créer des ames végétales si intelli. gentes, et de les mettre en rapport entre elles et avec les éléments? Comment, d'un autre côté, ces ames, séparées de ces rayons et renfermées dans des corps isolés, auraient-elles le pouvoir de les réparer et de les reproduire? Il faut done admettre nécessairement une ame universelle souverainement puissante et intelligente, qui a créé d'abord et organisé des germes divers pour en composer l'ensemble du monde, et a donné à l'astre du jour et à celui des nuits le pouvoir de les développer par des ames mécaniques; ou, ce qui revient au même, qui a créé des ames végétales pour organiser la matière, et donné au soleil et à la lune de les mettre en activité. Si on peut comparer la faible industrie de l'homme à celle de l'Étre suprême, ces ames mécaniques ou végétales ressemblent à ces machines conçues par un savant artiste, et dont les forces mises en mouvement par l'action du feu, ou par le cours des vents et des ruisseaux, expriment des liqueurs, pulvérisent des grains en farine, scient des planches, frappent même des monnaies avec leurs légendes, sans que ces moteurs si ingénieux aient le sentiment et la connaissance de leurs opérations.

mal ainsi que celui d'un végétal, mais d'une manière plus régulière, et sans contredit beaucoup plus compliquée. Elle le symétrise d'abord dans le sein maternel en deux moitiés parfaitement semblables, et en deux moitiés opposées tout à fait différentes. Après avoir établi ces consonnances et ces contrastes, elle développe et façonne son cerveau, ses nerfs, son cœur, ses veines, ses chairs, ses os, ses entrailles, sans qu'il en sente rien. Venu à la lumière, elle entretient la respiration de son poumon et la circulation de son sang, même pendant son sommeil, sans qu'il s'en mêle en aucune manière. Elle fait de même toutes les fonctions de sa digestion et de sa nourriture, au moyen de ses intestins, qui sont comme autant de racines. S'il vient à être blessé, elle répare ses plaies et les cicatrise en les recouvrant d'une nouvelle peau. Quelquefois elle lui engendre des membres tout entiers quand il les a perdus, comme on le voit dans les crabes, dont les pattes repoussent toutes façonnées, avec leurs articulations et leurs pinces. Elle fabrique de nouveaux bras à ces crustacés, comme aux arbres de nouvelles branches. Que dis-je? elle produit sur les corps des animaux plusieurs espèces de végétaux qui, toutefois, ne fleurissent et ne fructifient point, quoique bien enracinées tels sont les poils, les plumes, les écailles, les ongles, les cornes. Chacune de ces végétations a ses lois particulières : les cornes lisses des boeufs sont permanentes, et les bois fourchus des cerfs tombent tous les ans. Elle varie à l'infini les formes des animaux; cependant elle ne s'écarte jamais des lois des consonnances et des contrastes, qui composent chacun d'eux de deux moitiés égales et de deux moitiés opposées. Il est bien certain que chaque animal a en lui une ame végétale qui s'occupe de tous ces soins. Mais ce qui paraît le plus étonnant, c'est que, pendant qu'elle développe en lui, je suppose, les parties du sexe màle, une autre ame, souvent fort loin de là, fabrique à un animal de la même espèce les parties du sexe femelle; et, comme si elles pouvaient s'entendre, elles leurs donnent un instinct commun pour se rapprocher, et des formes ou des couleurs différentes pour se reconnaître. Les amours des animaux, comme ceux des végétaux, sont réglés sur les diverses périodes du soleil et de la lune. Lorsque la femelle est fécondée, elle reproduit de nouvelles ames. L'amour est une flamme qui, comme celle du feu, se communique et se multiplie sans s'affaiblir. Ce sont les astres des jours et des nuits qui en sont les premiers mobiles. La terre, daus

L'ame végétale de l'homme réunit et développe dans son corps les plus belles formes, qui ne sont que réparties dans le corps des animaux; elle fixe sa taille et ses forces avec une proportion admirable. Ainsi, en lui faisant occuper le centre de la sphère de leur puissance, elle lui en assure l'empire. C'est ce que nous verrons plus en détail, lorsque nous nous occuperons de l'ensemble du corps de l'homme, aux harmonies humaines.

Après les ames élémentaires et végétales des animaux, qui ne sont que des espèces d'aimants insensibles, nous en distinguons une troisième, qui est l'ame animale: c'est l'ame proprement dite. Elle donne son nom à l'animal, parcequ'elle l'anime; elle seule a le sentiment de son existence et de celle du corps; elle a la conscience de ses organes, dont elle fait usage sans rien comprendre à sa construction; elle est occupée principale

ment du soin de lui fournir des aliments, dont le premier est encore le feu solaire fixe, et combiné, comme nous l'avons vu, avec la substance des végétaux: il passe de là dans la chair des animaux, dont il entretient la vie. Ce feu nourricier s'y fixe encore pour servir, après leur mort, de pâture aux bêtes carnassières. Il ne s'harmonie point ainsi avec la terre, car les animaux n'en font point leur nourriture. Les substances végétales et animales sont les seules qui s'imbibent, comme des éponges, de ce feu alimentaire, auquel l'homme ajoute encore, pour ses besoins, le secours du feu terrestre.

L'ame animale est la seule qui soit susceptible de douleur et de plaisir, par l'entremise des nerfs répandus dans toutes les habitudes du corps, et surtout à la peau. Ce sont eux qui l'avertissent des dangers du corps par le tact; elle ne sent plus rien s'ils viennent à être paralysés. Le foyer de ses sensations est an cœur ; c'est encore là que réside l'instinct avec ses passions, dont la principale est l'amour de soi, qui se décompose dans chaque animal en amour de ses convenances et en haine de ses disconvenances, mobiles de toutes ses actions.

Les ames élémentaires et végétales agissent toutes par des lois communes à tous les animaux; elles sont si semblables dans chacun d'eux, qu'on est tenté de croire que c'est une ame universelle qui forme leur corps, l'entretient et le répare. Ces ames assemblent de la même manière le fœtus du loup et celui de l'agneau dans le sein maternel; elles opèrent aussi également dans leur estomac la circulation du sang, la digestion, la nutrition, quoique l'un soit carnivore et l'autre herbivore; mais l'ame animale est particulière à chacun d'eux, chacune a son instinct qui lui est propre. Celle du loup lui inspire, dès la naissance, le goût de la chair et du sang; et celle de l'agneau, celui des herbes tendres et des ruisseaux limpides. Celle du loup diffère même de celle du chien, quoique leurs corps aient tant de ressemblance. L'instinct du loup l'éloigne de l'homme, et celui du chien l'en rapproche, sans que l'éducation et les habitudes puissent altérer ces différences. Chacun d'eux apporte en naissant son caractère paternel, dont l'empreinte est ineffaçable; leur ame a préexisté à leur corps. Je suis très porté à croire que c'est elle qui le façonne et lui donne sa physionomie; elle imprime à celle du loup des traits féroces, que l'œil attentif de l'homme confond avec ceux du chien de berger, souvent aussi hérissé que le loup; mais l'agneau ne s'y méprend jamais; il distin

| gue, au premier aperçu, au simple flairer, son tyran de son défenseur.

D'où viennent ces haines et ces affections innées? Je n'en sais rien ; je vois bien que les résultats en sont bons, et qu'ils sont relatifs à l'homme. Il est certain que les animaux frugivores et herbivores auraient bientôt dépouillé la terre de tous ses végétaux, si les bêtes de proie n'en arrêtaient la population d'un autre côté, celles-ci, en se multipliant, détruiraient bientôt toutes les espèces animées, si l'homme, à son tour, ne leur servait d'obstacle. Au fond, dans cette lutte meurtrière, on ne peut accuser la nature d'injustice et de cruauté. Quand elle fait manger un animal, elle n'enlève pas, comme un brigand à l'égard d'un autre homme, une vie qui ne lui appartient pas. C'est elle qui a tout donné à tous, elle peut donc tout leur reprendre; elle a tiré du fleuve de la vie une infinité de ruisseaux qu'elle fait circuler sur la terre, elle peut les faire passer les uns dans les autres à son gré. La mort n'est pour chaque animal qu'une modification de son existence, sa vie est transportée de son corps dans celui qui l'a dévoré; cependant l'ame qui l'animait a une autre destinée. L'ame de l'agneau ne passe point dans celle du loup : son sang si doux ne fait qu'accroître la soif cruelle de son tyran. Que deviennent donc à la fin l'ame innocente de l'un, et l'ame féroce de l'autre? Je l'avoue, je ne sais pas plus où elles vont que d'où elles viennent. Cependant, s'il m'est permis, dans un sujet si obscur, de hasarder quelques conjectures, je serais porté à croire à la métempsycose, comme les Indiens. Ces peuples, les plus anciens de la terre, pensent, d'après les traditions de la plus profonde antiquité, que les ames des hommes passent, après la mort, dans le corps des animaux, suivant les passions qui les ont dominés pendant leur vie : celles des cruels, dans les tigres et les lions; des politiques perfides, dans les renards et les serpents; des gourmands, dans les porcs, etc. Il est certain que l'homme réunit en lui les passions de tous les animaux, et que celle qui y devient dominante ou par la nature ou par l'habitude, se manifeste dans sa physionomie par les traits de l'animal qui en est le type. On prétend qu'on peut en reconnaître l'expression en mettant sa main sur sa bouche, et ne laissant apparaître que le front, les yeux et le nez. Jean-Baptiste Porta a tracé des visages qui ont des traits sensibles de bœuf, de tigre, de porc, etc. Mirabeau, un des premiers moteurs de notre révolution, avait dans sa large tête, ses petits yeux et ses mâchoires proéminentes, je ne sais quoi de la hure

d'un sanglier. J'ai vu telle femme à grand nez re- que lui inspire le sentiment d'un Etre suprême, courbé et à petite bouche vermeille, qui ressem- vengeur et rémunérateur. Cet instinct céleste est blait fort bien à une perruche. Enfin, l'homme et la le fondement naturel de toute société humaine. femme sont susceptibles de toutes les passions des Il a aussi des instincts animaux tels sont les symanimaux, de leurs jouissances et de leurs mala-pathies et les antipathies, les goûts et les répudies; le soleil et la lune en développent les diverses périodes.

Enfin, une quatrième ame se manifeste dans les animaux, c'est l'intelligente : c'est celle qui gouverne l'ame animale; elle a en partage l'imagination, le jugement et la mémoire; comme l'autre, l'instinct, la passion et l'action. L'ame intelligente réside dans le cerveau, et l'animale dans le cœur ; chaque espèce d'animal a une portion de l'une et de l'autre, qui lui est particulière et qui la caractérise. La fourmi républicaine, comme l'abeille, aime aussi le miel; mais elle ne s'avise point de le recueillir sur les fleurs et d'en faire des ruches dans ses souterrains; elle ne s'occupe qu'à y ramasser les débris des végétaux et des animaux, pour lesquels la nature l'a destinée. L'ame intelligente de chaque espèce d'animal n'est qu'un rayon particulier de la sphère de l'intelligence commune à tous les animaux, comme son ame animale n'est qu'un rayon de la sphère de leurs passions.

L'homme seul réunit en lui la plénitude de ces deux sphères; il est susceptible de toutes les industries comme de toutes les jouissances on l'appelle par excellence l'animal raisonnable, parceque son esprit est susceptible de concevoir toutes les raisons ou les rapports des êtres; on pourrait le nommer encore par excellence l'animal animé, parceque son cœur est susceptible de toutes les passions des animaux.

gnances pour certains états, qui produisent ou de grands talents ou des non-succès. Ces sentiments sont innés, et l'éducation ne peut les surmonter ; mais celui qui domine tout homme au sein de la nature est le sentiment de son Auteur, et c'est peutêtre à ce sentiment qu'il doit celui de cette sphère universelle d'intelligence qui le rend si supérieur aux autres animaux. Ce qu'il y a de certain, c'est que les plus savants des hommes les Socrate, les Platon, les Newton, ont été aussi les plus religieux. Nous développerons les effets de l'ame céleste aux harmonies humaines.

Résumons ce que nous venons de dire sur les diverses ames et leurs facultés principales. L'ame élémentaire, qui ne paraît être que le feu solaire, produit l'attraction, l'électricité, le magnétisme; l'ame végétale, les formes, les amours, les générations; l'animale, l'instinct, la passion, l'action ; l'intellectuelle, l'imagination, le jugement, la mémoire; la céleste, le sentiment de la vertu, de la gloire, de l'immortalité. Toutes ces ames ont des harmonies avec le soleil.

Mais, me dira-t-on, peut-on supposer ainsi plusieurs ames renfermées dans un seul corps ? Sans doute, comme j'ai supposé et démontré plusieurs couleurs renfermées dans un même rayon de lumière, plusieurs qualités dans le feu, telles que l'attraction, l'électricité; plusieurs airs dans l'atmosphère, plusieurs eaux dans l'Océan, plusieurs matières de différente nature dans le même minéral, plusieurs végétaux, et, qui plus est, de diverses espèces, dans le même végétal, comme dans un arbre greffé. Mais comment des ames si différentes entre elles peuvent-elles agir de concert dans une même action ! Ce qui prouve leur différence, c'est qu'elles ne sont pas toujours d'ac cord. Je vais tâcher de faire comprendre leurs actions et leurs récréations par une comparaison bien simple.

Mais il a une ame bien supérieure aux deux précédentes, c'est une ame céleste. Il est le seul des animaux qui ait le sentiment de la Divinité: c'est là son instinct proprement dit. Celui de chaque être sensible l'attache à un site, à une plante, et celui de l'homme à Dieu. Ce sentiment naît avec lui et étend ses desirs au-delà de son horizon et de sa vie ; il est commun aux peuples sauvages, comme aux peuples civilisés. C'est au sentiment de l'existence d'un Dieu que l'homme doit celui de l'infini, En prenant pour l'un des termes extrêmes de la de l'universalité, de la gloire, de l'immortalité, vie animale le ver de terre tout nu, qui, moins inlequel venant à s'harmonier avec son intelligence, dustrieux que l'huître, n'a pas l'intelligence de lui a fait faire tant de progrès dans les sciences et se revêtir d'une coquille, et en suivant jusqu'à dans les arts, et donne tant d'étendue à ses pas- l'homme qui a inventé tant de sciences et d'arts, sions lorsqu'il se combine avec elles. C'est à cet nous comparerons tous les degrés d'intelligence instinct de la Divinité qu'il doit celui de la vertu, des animaux destinés à voguer sur l'océan de la qui règle ses innombrables desirs vers le bonheur vie, aux diverses embarcations que l'homme a de ses semblables, dans la crainte ou l'espérance | imaginées pour naviguer sur les eaux, depuis le

fronc flottant d'un arbre qui sert au sauvage à tra- | verser une rivière, jusqu'au vaisseau équipé de tous les arts et sciences nautiques, construit pour faire le tour du monde. Nous trouverons dans les intermédiaires la balse, la pirogue, la yole, le canot, la chaloupe, la goëlette, le brigantin, la frégate, et nous arriverons à nos gros vaisseaux de guerre, armés de cent canons et au-delà. Voilà pour les formes des corps des animaux. Quant aux ames et aux facultés qui les animent, nous comparons l'élémentaire aux mineurs, bûcherons, tisserands et cordiers, qui fournissent les premiers matériaux du navire, sans connaître l'usage qu'on en doit faire; l'ame végétale, aux forgerons, charpentiers et calfats, qui les emploient d'après les plans et proportions que leur donne la nature, ce savant ingénieur. Ils sont aussi chargés des réparations, et pour cela ils sont répandus dans tout le corps. L'ame animale, avec ses passions, ressemble à l'équipage, composé de matelots placés chacun à leur poste, et toujours prêts à obéir au maître et au contre-maître qui résident au cœur. L'ame raisonnable, avec ses facultés intellectuelles, placée dans le cerveau étroit des animaux, est comme le pilote et ses aides, dont la cabane est située près du gouvernail et de la boussole. Il dirige la route du vaisseau et commande la manœuvre à l'équipage. L'ame céleste de l'homme, avec ses instincts divers, est dans un cerveau plus spacieux, comme un capitaine dans une chambre de conseil. On peut la comparer à un homme de qualité qui ne connaît rien au vaisseau ni à sa construction; mais il a seul le secret du voyage : son instinct en est la carte. Il donne chaque jour la route au pilote, qui, d'après ses ordres, commande la manœuvre à l'équipage. Veut-il mar cher? les cuisses, les jambes, les pieds et leurs doigts sont en mouvement. Ne veut-il mouvoir que quelques unes de ces parties? elles se remuent et les autres s'arrêtent. Il semble qu'à chaque articulation de la bouche, du genou, du métacarpe, des orteils, il y ait des postes de matelots qui agissent seuls ou tous ensemble, suivant la volonté du capitaine. Celui-ci ignore, au reste, tout ce qui se passe au dedans; il ne s'occupe que du dehors; il a soin seulement que le vaisseau évite les écueils, et qu'il soit d'ailleurs bien approvisionné. Un beau jour il s'avise de faire donner à cet équipage si docile une plus grande quantité de ce feu élémentaire qui les anime; il l'enivre de liqueurs spiritueuses aussitôt le voilà tout en activité et dans un mouvement extraordinaire. Les matelots circulent avec rapidité d'un bout du vaisseau à l'autre,

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n'obéissant plus à la voix de leur pilote. L'ame raisonnable n'a plus d'empire, le vaisseau va tout de travers. Mais c'est bien pis quand l'ame céleste appelle tout son équipage à son conseil; toutes les passions y entrent en foule et s'emparent de ses facultés divines. La cupidité lui dit : C'est à moi qu'appartiennent les jouissances infinies; la haine, à moi les ressentiments immortels; l'ambition, la gloire est mon partage. L'orgueil dit à l'humble vertu Tu n'es qu'une illusion; et, jetant ses yeux égarés vers les cieux : Il n'y a d'autre Dieu que moi dans l'univers. Souvent l'ame raisonnable, séduite par eux, leur applaudit. La mémoire leur cherche des exemples dans le passé, et l'imagination leur trace des plans pour l'avenir; le jugement les sanctionne. C'est ainsi que, dans la révolte d'un équipage, le pilote, le maître et le contre-maître se joignent aux matelots, et renferment le capitaine dans sa chambre; ils laissent aller ensuite le vaisseau au gré des vents. Ils ont bien la route de chaque jour, mais ils n'ont plus celle de tout le voyage; ils finissent par embrasser la piraterie. Tel est l'état d'un homme livré à ses passions. La discorde se met bientôt entre elles : quelquefois l'imagination enlève le timon au jugement; alors l'homme devient fou. Quelquefois l'ame animale et la raisonnable sont paralysées; alors il tombe dans l'état d'imbécillité. Mais, dans ces deux états, l'ame élémentaire et la végétale font toujours bien leurs fonctions; souvent les fous et les imbéciles jouissent d'une santé robuste. Quelquefois celles-ci tombent dans le désordre, comme dans l'état de maladie; cependant les passions conservent leur activité, mais l'ame intellectuelle jouit de toutes ses facultés ; telle était celle de Pascal, dont les idées étaient profondes, quoique son corps fût cacochyme. Quelquefois l'ame céleste est la seule qui leur survive: telle est souvent celle des mourants, qui étonne par des pressentiments et des prédictions. L'ame céleste, prête à quitter la terre, est susceptible des plus sublimes conceptions, comme le soleil qui, à son couchant, brille de tout l'éclat de ses feux. Toutes ces ames peuvent agir ensemble ou séparément : nous en pouvons donc conclure qu'elles sont distinctes les unes des autres.

Ces ames ont précédé les corps. Ce sont elles qui, dans le sein maternel, assemblent leurs parties organiques, leur donnent les formes, les développements et les proportions assignés à chaque espèce par l'Auteur de la nature, et par rapport à l'homme, comme nous le verrons bientôt.

Non seulement les harmonies physiques appar

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