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Ficubert.

Che

Vreau.

ÉPITAPHE de S. PAVIN.

Sous ce tombeau gît Saint-Pavin ;
Donne des larmes à fa fin.
Tu fus de fes amis peut-être :
Pleure ton fort, & le fien.
Tu n'en fus pas? Pleure le tien,
Paffant, d'avoir manqué d'en être.

ÉPITAPHE de M. DE TURENNE.

Turenne a fon tombeau parmi ceux de nos Rois ;
Il obtint cet honneur par fes fameux exploits:
LOUIS voulut ainfi couronner fa vaillance,
Afin d'apprendre aux fiécles à venir,
Qu'il ne met point de différence
porter le fceptre, & le bien foutenir.

Entre

Cette derniere Epitaphe fait autant l'éloge de Louis XIV, que celui de M. de Turenne, & c'eft ce qui la rend encore meilleure. On doit s'attacher, dans une Epitaphe, à donner une idée du caractere de la perfonne qui en eft l'objet; telle eft celle de l'Arétin, par Maynard. La voici :

Le tems, par qui tout fe confume,
Sous cette pierre a mis le corps
De l'Arétin, de qui la plume
Bleffa les vivans & les morts.
Son encre noircit la mémoire
Des Monarques de quî la gloire
Eft vivante après le trépas;
Et s'il n'a pas contre Dieu même
Vomi quelque horrible blafphême,
C'est qu'il ne le connoissoit pas.

Voici l'Epitaphe de Moliere, compoféé par le P. Bouhours. C'eft la meilleure de toutes celles qu'on a confacrées à la mémoire de ce grand homme que le peuple ne voulut pas permettre qu'on enterrât dans l'églife de S. Euftache, la paroiffe:

Tu réformas & la Ville & la Cour;
Mais quelle en fut la récompense !
Les François rougiront un jour
De leur peu de reconnoiffance.
Il leur fallut un Comédien

Qui mit à les polir fa gloire & son étude;
Mais, Moliere, à ta gloire il ne manqueroit rien;
Si, parmi les défauts que tu peignis fi bien,
Tu les avois repris de leur ingratitude.

Les Anglois n'ont mis, fur le tombeau de Driden, que ce mot pour tout éloge;

Dryden.

& les Italiens, fur le tombeau du Taffe, Les os du Taffe.

Il n'y a guère que les hommes de genie qu'il foit sûr de louer ainfi. Parmi les Epitaphes épigrammatiques, les unes ne font que naïves & plaifantes; les autres font mordantes & cruelles. Du nombre des dernieres eft celle-ci de M. Piron, faite par lui-même :

Cy gît Piron, qui ne fut rien,
Pas même Académicien.

Telle eft encore celle de la femme de Boudier, que nous avons citée. Lorfque la plaifanterie ne porte que fur un leger ridicule & qu'elle n'a rien de perfonnel, elle n'est qu'indécente. Mais les Epitaphes infultantes & calomnieufes, telle que la rage en infpire fouvent, font, de tous les genres de fatyre, le plus noir & le plus lâche, Il n'y a rien de plus infâme que la calomnie contre les morts.

ÉPITHALAME : ce mot, qui vient du grec, fignifie un chant nuptial, ou un poëme fait à l'occafion d'un mariage, où l'on chante ordinairement les qualités des nouveaux époux, la douceur & les plaifirs de leur union, & où l'on forme des vœux pour leur bonheur.

M. Souchai a fait un Difcours fur l'Epithalame, qu'on trouve dans le Recueil de l'Académie des belles-lettres : c'est dans cet Ouvrage que nous allons puifer la plus grande partie des réflexions & des préceptes qui compoferont cet article.

L'Epithalame eft une espece de poëfie trèsancienne les Hébreux en connoiffoient l'ufage, dès le tems de David; car les Commentateurs regardent le pfeaume 44 comme un vrai Epithalame. Origene donne auffi ce nom au Cantique des Cantiques.

Cette espece de poefie chez les Grecs, n'étoit, dans fon origine, qu'une fimple acclamation d'Hymen, o Hymenée! Le motif & l'objet de cette acclamation font évidens: chanter Hymen, ô Hymenée ! c'étoit féliciter les époux de leur union, & fouhaiter qu'ils n'euffent qu'un même cœur & qu'un même

efprit, comme ils n'alloient plus avoir qu'une même habitation.

Cette acclamation paffa depuis dans l'Epithalame; & les Poëtes en firent un vers intercalaire, ou une espece de refrain ajusté à la mesure du vers qu'ils avoient choisie: ainfi ce qui étoit le principal, devint comme l'acceffoire, & l'acclamation d'Hymen, 6 Hymenée! ne fervit plus que d'ornement à l'Epithalame. Héfiode eft le premier, chez les Grecs, qui ait fait de l'Epithalame un poëme: il fut depuis imité par Stéfichore, & par Sapho.

L'Epithalame latin eut la même origine que l'Epithalame grec; avec cette différence que l'acclamation des Latins commençoit par Thalaffius! dont voici la véritable ori

gine.

Parmi les Sabines, qu'enleverent les Romains, il y en eut une qui fe faifoit remarquer par fa jeuneffe & par fa grande beauté. Ses raviffeurs craignant avec raifon, dans un tel défordre, qu'on ne leur arrachât un butin fi précieux, s'aviferent de crier qu'ils la conduifoient à Thaliffius, qui étoit un jeune Romain beau, bien fait, vaillant, confidéré de tout le monde, & dont le nom feul imprima tant de refpect, que, loin de fonger à la moindre violence, le peuple accompagna par honneur les raviffeurs, en faifant fans ceffe retentir ce même nom de Thalaffius. Un mariage que le hazard avoit fi bien afforti, ne pouvoit manquer d'être heureux: il le fut; & les Romains employe rent depuis, dans leur acclamation nuptiale, le mot de Thalaffius, comme pour fouhai

ter aux nouveaux époux une femblable def→ tinée.

A cette acclamation, qui étoit encore en ufage du tems de Pompée, fe joignirent dans la fuite, les vers Fefcenniens, vers extrêmement groffiers & obfcènes. Catule, qui prit Sapho pour modele, fut le premier qui réduifit l'Epithalame en poëme: il perfectionna les vers Fefcenniens; mais, s'il les rendit plus chaftes par l'expreffion, ils ne furent peut-être que plus obfcènes par le fens. Stace a fait des Epithalames; mais il ne s'eft permis aucune obfcénité: fes pensées & fes expreffions font toujours pures & toujours mefurées. Claudien n'a pas éte fi retenu : il s'échappe d'une maniere indécente dans l'Epithalame d'Honorius & de Marie. Pour Sidonius, auffi-bien que tous les modernes, comme Buchanan, parmi les Ecoffois; Malherbe, Rouffeau, & quelques autres, parmi nous, excepté Scarron, font irré prochables à cet égard.

Il femble que l'Epithalame, admettant toute la liberté de la poëfie, il ne peut être affujetti à des préceptes. Mais, comment arriver à la perfection de l'art, fans le fecours de l'art même ! Les régles ne font donc pas inutiles. Il faut étudier les modeles: rien n'eft fi avantageux, parce qu'ils renferment toujours les préceptes, & qu'ils en montrent la pratique.

Il eft vrai qu'il n'y a point de régles particulieres, prefcrites pour le genre de cet ouvrage, ni pour le nombre ni la difpofi tion des vers qui doivent y'entrer. Mais comme le fujet, en tout genre de poëfie

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