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Et c'est le prix qu'il donne au zèle qu'autrefois
On vous vit témoigner en appuyant ses droits1,

1940

Pour montrer que son cœur sait, quand moins on y pense, D'une bonne action verser la récompense,

Que jamais le mérite avec lui ne perd rien,

Et que

mieux que du mal il se souvient du bien.

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était valable ou non; en attendant, sur un ordre du Roi, le scélérat eût été jeté en prison, et bien averti qu'il y resterait jusqu'à ce que, à défaut d'une annulation judiciaire, son désistement eût délié Orgon, Mais, à la fin de sa comédie, Molière a voulu donner aux spectateurs une satisfaction immédiate et complète, et leur faisant accepter, à Louis XIV tout le premier, l'intervention du Roi, il leur fit admettre sans difficulté la fiction qui pour eux avançait seulement l'effet certain d'une toute-puissante volonté.

1. Ses droits menacés au temps des troubles de la Fronde : voyez ci-dessus, p. 409, les vers 181 et 182, et la note 3.

2. Nous avons dit, dans l'Avertissement de ce volume, que M. Despois n'a malheureusement pu rédiger que le commentaire du premier acte du Tartuffe, mais qu'un certain nombre de notes se rapportant à la suite se sont trouvées dans ses papiers. En voici une qu'il avait destinée à cette place, et que nous y conservons, tout en renvoyant et à la note 7, presque immédiatement précédente, de la page 525, et à la Notice (p. 275, 276 et 344-347), où la question du dénouement a été exposée plus en détail : « Si le goût de Louis XIV pour les ballets a trop souvent contribué à détourner Molière de ses grandes œuvres, pour occuper à des divertissements de cour un temps qu'il eût pu mieux employer pour sa gloire, son influence sur le poëte n'a pas en d'ailleurs quelquesuns des inconvénients qu'on a signalés. Par exemple, on a déclaré postiche le /dénouement du Tartuffe; l'éloge du Roi au cinquième acte a semblé amené d'une façon peu naturelle; on ne l'a excusé que par la nécessité d'intéresser aussi l'amour-propre du Roi à la représentation de la pièce. Cette critique n'est a Voyez à la Notice, p. 346, second alinéa.

CLEANTE.

Ah! mon frère, arrêtez,

Et ne descendez point à des indignités;

A son mauvais destin laissez un misérable,

Et ne vous joignez point au remords qui l'accable: 1950
Souhaitez bien plutôt que son cœur en ce jour
Au sein de la vertu fasse un heureux retour,
Qu'il corrige sa vie en détestant son vice
Et puisse du grand Prince adoucir la justice,
Tandis qu'à sa bonté vous irez à genoux
Rendre ce que demande un traitement si doux.

ORGON.

1955

Oui, c'est bien dit: allons à ses pieds avec joie
Nous louer des bontés que son cœur nous déploie.
Puis, acquittés un peu de ce premier devoir,
Aux justes soins d'un autre il nous faudra pourvoir, 1960
Et par un doux hymen couronner en Valère

La flamme d'un amant généreux et sincère.

.

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pas, je crois, bien fondée, et, avec plusieurs bons juges, parmi lesquels j'aime à
nommer mon ami Étienne Arago, si entendu aux choses du théâtre, je pense
qu'il n'était guère possible d'en trouver un autre, et que, la situation étant
donnée, c'était même le seul qui fût vraisemblable historiquement. La dona-
tion faite par Orgon à Tartuffe étant régulière, on ne voit pas trop comment
Orgon s'en tirerait devant les tribunaux, et pour sauver son bien, celui de Cee's
sa famille, comme pour punir Tartuffe, il ne faut pas moins que l'inter-
vention de celui-là seul qui est au-dessus des lois, de Louis XIV. Léga-
lement Tartuffe restait impuni; une lettre de cachet seule en pouvait faire jus-
tice. »

ORGON, à Tartuffe, que l'Exempt emmène.

I.

Hé bien, etc.

SCÈNE DERNIÈRE.

MADAME PERNELLE, ORGON, ELMIRE, MARIANE, CLÉANTE, VALÈRE,

DAMIS, DOrine.

CLEANTE.

Ah! (1734.)

FIN.

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APPENDICE AU TARTUFFE.

LETTRE

SUR LA COMÉDIE

DX

L'IMPOSTEUR.

M DC LXVII'.

AVIS.

Cette lettre est composée de deux parties: la première est une relation de la représentation de l'Imposteur2, et la dernière consiste en deux réflexions sur cette comédie. Pour ce qui est de la relation, on a cru qu'il étoit à propos d'avertir ici que l'auteur n'a vu la pièce qu'il rapporte que la seule fois qu'elle a été représentée en public, et sans aucun dessein d'en rien retenir, ne prévoyant pas l'occasion qui l'a engagé à faire ce petit ouvrage : ce qu'on ne dit point pour le louer de bonne mémoire, qui est une qualité pour qui il a tout le mépris imaginable, mais bien pour aller au-devant de ceux qui ne seront pas contents de ce qui est inséré des paroles de la comédie dans cette relation, parce qu'ils voudroient voir la pièce entière, et qui ne seront pas assez raisonnables pour considérer la difficulté qu'il y a eu à en retenir seulement ce qu'on en donne ici. L'auteur s'est contenté, la plupart du temps, de rapporter à peu

1. C'est là tout le titre de cet opuscule; il est, à la fin, daté du 20a août 1667; il n'a pas d'achevé d'imprimer. Dans l'intervalle des dix-huit mois où il dut suffire à la curiosité du public, pendant l'attente du 5 août 1667 au 5 février 1669, ce ne fut pas assez d'une édition; il en parut une seconde en 1668; nous en avons relevé les quelques variantes. M. Taschereau (p. 292 de sa 3o édition) mentionne une dernière réimpression de 1670, portant le titre d'Observations sur la comédie de l'Imposteur. L'édition de 1668 a, comme l'originale, pour titre : Lettre sur la comédie de l'Imposteur. — Voyez à la Notice, p. 328-331.

2. De la première représentation donnée en public, le 5 août 1667.

MOLIÈRE. IV

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près les mêmes mots, et ne se hasarde guère à mettre des vers: il lui étoit bien aisé, s'il eût voulu, de faire autrement, et de mettre 1 tout en vers ce qu'il rapporte, de quoi quelques gens se seroient peut-être mieux accommodés; mais il a cru devoir ce respect au poëte dont il raconte l'ouvrage, quoiqu'il ne l'ait jamais vu que sur le théâtre, de ne point travailler sur sa matière, et de ne se hasarder pas à défigurer ses pensées, en leur donnant peut-être un tour autre que le sien. Si cette retenue et cette sincérité ne produisent pas un effet fort agréable, on espère du moins qu'elles paroîtront estimables à quelques-uns et excusables à tous.

Des deux réflexions qui composent la dernière partie, on n'auroit point vu la plupart de la dernière, et l'auteur n'auroit fait que la proposer sans la prouver, s'il en avoit été cru, parce qu'elle lui semble trop spéculative; mais il n'a pas été le maître : toutefois, comme il se défie extrêmement de la délicatesse des esprits du siècle, qui se rebutent à la moindre apparence de dogme, il n'a pu s'empêcher d'avertir, dans le lieu même, comme on verra, ceux qui n'aiment pas le raisonnement qu'ils n'ont que faire de passer outre. Ce n'est pas qu'il n'ait fait tout ce que la brièveté du temps et ses occupations de devoir lui ont permis, pour donner à son discours l'air le moins contraint, le plus libre et le plus dégagé qu'il a pu; mais, comme il n'est point de genre d'écrire plus difficile que celuilà, il avoue de bonne foi qu'il auroit encore besoin de cinq ou six mois pour mettre ce seul discours du ridicule, non pas dans l'état de perfection dont la matière est capable, mais seulement dans celui qu'il est capable de lui donner.

En général, on prie les lecteurs de considérer la circonspection dont l'auteur a usé dans cette matière, et de remarquer que, dans tout ce petit ouvrage, il ne se trouvera pas qu'il juge en aucune manière de ce qui est en question sur la comédie qui en est le sujet. Car, pour la première partie, ce n'est, comme on a déjà dit, qu'une relation fidèle de la chose, et de ce qui s'en est dit pour et contre par les intelligents; et pour les réflexions qui composent l'autre, il n'y parle que sur des suppositions, qu'il n'examine point. Dans la première, il suppose l'innocence de cette pièce quant au particulier de tout ce qu'elle contient, ce qui est le point de la question, et s'attache simplement à combattre une objection géné rale qu'on a faite sur ce qu'il est parlé de la religion; et dans la dernière, continuant sur la même supposition, il propose une utilité accidentelle qu'il croit qu'on en peut tirer contre la galanterie et les galants, utilité qui assurément est grande, si elle est véritable,

1. Et mettre. (1668.) - 2. Qui n'aiment que le raisonnement. (1668.)

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