M. BALIVEAU. Il faudra commencer par savoir où le prendre. Dans son lit. M. FRANCALEU. M. BALIVEAU. C'est bien dit, s'il vous plaît de s'y rendre. Mais son hôte ne sait ce qu'il est devenu. M. FRANCALEU. On saura bien l'avoir après l'ordre obtenu. M. BALIVEAU. Je vais donc m'enfoncer dans cette solitude; (Il s'éloigne.) SCENE II. M. FRANCALEU, LISETTE. M. FRANCALEU. Moi, je fais l'oncle, et toi, Lisette, es-tu contente? Le modèle est parfait. LISETTE. N'en soyez pas en peine. Je veux lui ressembler au point qu'on s'y méprenne. Enfin, je veux si bien représenter l'idole, Et, comme en un miroir, s'y voyant traits pour traits, Que l'insipidité l'en dégoûte à jamais. Car, monsieur, excusez, mais vous et votre femme, Vous avez fait un corps où je veux mettre une âme. M. FRANCALEU. L'indolence en effet laisse tout ignorer; Ma fille est riche et belle. En un mot, je la donne LISETTE. Pas même le poëte? M. FRANCALEU. Au contraire, c'est lui Que je préférerois à tout autre aujourd'hui. 18c siècle. M. FRANCALEU. Eh bien! j'en ai de reste. J'aurai fait un heureux : c'est passe-temps céleste. LISETTE. Je vois dans ce choix libre un contre-temps à craindre, Qui rendroit votre fille extrêmement à plaindre. Eh quel? M. FRANCALEU. LISETTE. C'est que son choix pourroit tomber très-bien Sur tel qui, sur une autre, auroit fixé le sien; pour SCENE III. DORANTE, dans le fond, écoutant, sans être vu que de Lisette; M. FRANCALEU, LISETTE. M. FRANCALEU, sans voir Dorante. Tu parles juste. Aussi j'ai pris soin de savoir LISETTE. Et celle du jeune homme à qui l'on donne un rôle, La savez-vous? W. FRANCALEU. On dit à propos que le drôle... LISETTE. Je vous en avertis; il est fort amoureux. M. FRANCALEU. J'y cours tout de ce pas, tu peux en être sûre, SCENE IV. DORANTE, LISETTE. DORANTE. JE ne t'interromps point. LISETTE. Bien malgré vous, je gage. DORANTE. Nou: j'écoute, j'admire, et je me tais... Courage! LISETTE. Vous vous trouverez bien de n'avoir pas parlé. DORANTE. En effet, me voilà joliment installé. LISETTE. Installé? Tout des mieux ; j'en réponds. DORANTE. Quelle audace! Quoi! tu peux sans rougir me regarder en face? LISETTE. Pourquoi donc, s'il vous plaît, baisserois-je les yeux? DORANTE. Après l'exclusion qu'on me donne en ces lieux? LISETTE. Eh! c'est le coup de maître. DORANTE. Il est bon là! LISETTE. Sans doute. Ne décidons jamais où nous ne voyons goutte. DORANTE. De grâce, fais-moi voir... LISETTE. Oh! qui va rondement Ne daigne pas entrer en éclaircissement. DORANTE. Je n'en demande plus. Ma perte étoit jurée. Vous ne croyez donc pas que l'intérêt me guide? |