Page images
PDF
EPUB

HISTOIRE

ANCIENNE

DES EGYPTIENS,

DES CARTHAGINOIS,
DES ASSYRIENS,
DES BABYLONIENS,
DES MEDES ET DES PERSES,
DES MACEDONIENS,

DES GREC S..

Par M. ROLLIN, ancien Recteur de l'Univer
fité de Paris, Profeffeur d'Eloquence au Collège
Royal, & Affocié à l'Académie Royale des Inf-
criptions & Belles-Lettres.

[blocks in formation]

M. DCC. LXXIII.

Avec Approbation & Privilège du Roi.

[merged small][ocr errors]

SUITE

DU LIVRE

VINGT-TROISIEME.

CHAPITRE PREMIER.

ARTICLE QUATRIEME.
§. I.

Soins préliminaires du Général.

E

[ocr errors]

Our ce que nous avons vu jufqu'ici, la levée des troupes, leur paye, leurs armes, leurs vivres, n'eft, pour ainfi dire, que le méchanifme de la guerre. Il eft d'autres foins encore plus importans qui dépendent de la tête & de l'habileté du Général.

Ceux qui fe font le plus diftingués dans la fcience de l'art militaire, ont toujours cru que le Prince ou le Général doit, avant tout, régler l'état de la guerre, examiner s'il faut attaquer ou fe tenir fur la défenfive, former fon plan pour l'un ou pour l'autre de ces partis, avoir une exacte

connoiffance du pays où il porte fes armes, s'inftruire du nombre & de la qualité des troupes des ennemis, preffentir s'il fe peut leurs deffeins, prendre de loin les mefures capables de les déconcerter, prévoir tous les cas qui peuvent arriver pour s'y préparer, & tenir toutes fes réfolutions li couvertes & fi cachées, que rien n'en échappe & n'en transpire au-dehors. Je ne fais fi jamais le fecret a été gardé plus inEn 1736. violablement qu'il l'a été parmi nous dans la guerre qui vient d'être terminée ; ce qui n'eft pas une médiocre louange pour le Ministère.

Liv. lib. 44. B. 18.

On a vu, dans la guerre contre Philippe, les fages précautions que prit Paul Emile avant que d'entrer en campagne, pour se mettre au fait de tout précautions qui furent la principale caufe de la victoire qu'il remporta fur ce Prince.

C'eft de ces foins préliminaires que dépend le fuccès des entreprises. Voilà par où commença Cyrus, dès qu'il fut arrivé chez Cyaxare fon oncle, qui n'avoit point fongé à prendre aucune de ces me fures.

C'est une chofe admirable de voir les ordres que donne ce même Cyrus avant que de marcher contre l'ennemi, & le détail immenfe où il entre fur tous les befoins de l'armée.

On devoit traverfer pendant quinze jours des pays qui avoient été ravagés, & où l'on ne trouveroit ni vivres ni fourages : ilordonne qu'on en porte pour vingt jours,

[ocr errors]
[ocr errors]

& que les foldats, au lieu de fe charger de bagage, convertiffent ce poids-là en une pareille charge de munition de bouche, fans s'embarraffer de lits ni de couvertures pour le fommeil, dont la fatigue leur tiendra lieu. Ils étoient accoutumés à boire du vin: & de peur que le changement fubit de boiffon ne les rendît malades, il les avertit d'en porter une certaine quantité avec eux, & de s'accoutumer peu-àpeu à s'en paffer entièrement, & à fe contenter d'eau. Il leur recommande auffi de porter des viandes falées, des moulins à bras pour faire du pain, des médicamens pour les malades de mettre dans chaque chariot de bagage une faucille & un hoyau, & fur chaque bête de voiture une hache & une faulx, & d'avoir foin de fe fournir de mille chofes dont on a befoin. Il fe charge de mener avec lui des maréchaux, des cordonniers, & d'autres ouvriers, avec toutes fortes d'outils convenables à leurs métiers. Au refte, dit-il publiquement, tout marchand qui aura foin de faire apporter des vivres dans le camp, fera honoré & récompenfé de moi & de mes amis; & fi quelqu'un même manque d'argent pour faire des provifions, pourvu qu'il me donne des fûretés, & qu'il s'oblige de fuivre l'armée, je l'affilterai de ce que j'aurai. Un tel détail, & j'en ai paffé une partie, n'eft point indigne d'un Général, ni d'un grand Prince tel qu'étoit Cyrus,

« PreviousContinue »