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vre son goût pour la vie militaire. La fidélité et le dévouement de don Juan envers le roi, à l'occasion des démêlés célèbres de celui-ci avec son fils don Carlos (voy.), fut une des causes de la condescendance avec laquelle Philippe céda au penchant de son frère. Il l'envoya, en 1570, à Grenade, où les Maures s'étaient révoltés et où don Juan, malgré son extrême jeunesse, montra une énergie et des talents militaires dignes d'un plus vaste théâtre.

Ce théâtre ne lui manqua pas. L'année suivante, il fut nommé généralissime de la ligue nouvelle formée contre les Turcs, et reçut le commandement des flottes combinées d'Espagne, de Rome et de Venise. Ce fut à la tête de cette armée navale qu'il remporta (1571) la fameuse victoire de Lépante (voy.) et sauva la chrétienté de la domination des Osmanlis, qui étaient à cette époque la terreur de l'Europe: aussi la chrétienté fut-elle unanime dans les louanges prodigieuses qu'elle accorda au jeune héros. Fuit homo missus a Deo cui nomen erat Joannes, s'écria-t-on de toutes parts, en lui appliquant un verset de l'Évangile.

Don Juan savoura avec délices les éloges qu'on lui prodiguait, et son ambition grandit avec sa gloire: arrivé si haut à 26 ans, il lui sembla possible de s'élever encore davantage. Son but était de conquérir un royaume qui fût à lui, et de se rendre indépendant, sans toutefois se révolter contre son frère. Ce noble cœur se sentait mal à l'aise au milieu des intrigues cauteleuses de la politique espagnole; mais ce n'était qu'à force de services rendus à l'Espagne et à la chrétienté qu'il voulait mériter et obtenir une couronne. Chargé par son frère de conquérir Tunis, don Juan se rendit maître de cette ville et des ports environnants. L'idée de fonder sur les ruines de Carthage un royaume nouveau, qui pût servir de boulevard à la chrétienté, sourit à son imagination chevaleresque. A sa prière, le pape demanda au roi d'Espagne la permission de proclamer don Juan roi de Tunis; mais le naturel ombrageux de Philippe l'emporta cette fois sur son affection pour son frère il refusa, et, peu de temps après, Tunis retomba au pouvoir des Turcs.

Cette déception fut cruelle pour don Juan, mais ne le découragea point. Son idée fixe, on peut le dire, était de combattre les infidèles, et il fit tout ce qu'il put pour déterminer le conseil d'état d'Espagne à entreprendre une expédition vigoureuse contre les Turcs et à les chasser pour toujours de l'Europe. Ses efforts furent vains. « Une des principales tendances de la politique européenne, dit M. Ranke*, a toujours été de sauver les Turcs. » Le conseil ne fit à ses observations que des réponses évasives. Don Juan vit bientôt qu'il fallait renoncer à ce rêve de sa jeunesse, et le héros de Lépante, sous peine de rester dans l'inaction, dut tourner ses armes contre des chrétiens.

Les Pays-Bas venaient de commencer la lutte héroïque qui les affranchit du joug espagnol. Ni les cruautés et les talents militaires d'un duc d'Albe, ni les artifices et les feintes douceurs d'un Requesens, n'avaient pu réduire les provinces confédérées sous l'autorité de Philippe II, qu'elles ne reconnaissaient plus que pour la forme. Dou Juan fut envoyé dans les Pays-Bas pour les pacifier et les faire rentrer dans la foi catholique. En combattant l'hérésie, il lui semblait défendre encore la cause de la chrétienté. Les Néerlandais accueillirent d'abord favorablement le fils de l'empereur dont ils vénéraient la mémoire. Il entra à Luxembourg le 4 novembre 1576, le jour même du pillage d'Anvers par les troupes royales, dont il blâma ouvertement les affreux excès. Cependant il ne put faire son entrée à Bruxelles comme gouverneur qu'après avoir renvoyé du pays les troupes espagnoles odieuses aux habitants. Ce fut à Bruxelles qu'il publia l'Édit perpétuel, ou traité de paix avec les provinces, que les États de Hollande et de Zélande, fidèles à la cause de Guillaume de Nassau, refusèrent seuls d'accepter. Mais la tâche que don Juan avait entreprise était au-dessus des forces humaines. Il ne pouvait y avoir ni paix ni

(*) Fürsten und Volker von Sud Europa im XVI und XVII Jahrhundert, livre dont l'Histoire de la papauté pendant le XVIe et XVIIe siècle devait être la traduction. Voy. ce que nous en avoDS dit T. XIV, p. 490.

trève entre l'inquisition de Philippe II et les Pays-Bas. En vain don Juan s'empara (par une ruse peu honorable, il faut le dire) des forteresses de Namur et de Charleroi; en vain il remporta sur les rebelles la victoire de Gemblours (31 décembre 1577): sa position devint de plus en plus critique, et il ne put se soutenir en Belgique que grâce aux dissensions des provinces entre elles et aux complications amenées par les prétentions de l'archiduc Mathias. Il était d'ailleurs fort mal secondé par Philippe II, dont la défiance, à son égard, ne faisait que croìtre. Cette défiance n'était peut-être pas sans fondement. Don Juan, toujours avide de gloire, avait jeté les yeux sur une autre contrée. Le sort de cette belle reine d'Écosse captive, que ses préjugés catholiques lui montraient reine légitime d'Angleterre, excitait au plus haut degré sa sympathie il conçut le projet de la délivrer et de partager le trône avec elle. Le pape se montra favorable à ce plan. Philippe, d'après les conseils de son ministre Perez, ne s'y opposa pas ouvertement, mais il sut en empêcher l'exécution par des voies détournées. Bientôt, don Juan tomba dans une maladie de langueur étrange, qui le conduisit rapidement au tombeau. Il mourut le 1er octobre 1578. Sa peau s'était roussie comme si elle avait subi l'action du feu. On croit généralement qu'il fut empoisonné. Son corps fut transporté en Espagne et inhumé à l'Escurial.

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Ainsi s'éteignit, à la fleur de l'âge, un des esprits les plus nobles et les plus purs du xvre siècle.

Don Juan fut l'un des capitaines les plus distingués de son temps. Il était franc, humain, généreux. Son ambition fut exagérée peut-être, mais dirigée sans cesse vers un but louable. Il disait souvent qu'il se tuerait s'il voyait quelqu'un aimer la gloire plus que lui. Don Juan se distinguait par sa beauté physique, par l'élégance de sa toilette et de ses manières. <«< Il avait bien aussy, dit Brantôme, bonne et belle grace parmy les dames, desquelles il estoit fort doucement regardé et bien venu. »

Laurent Van der Hammen a écrit en espagnol la vie de don Juan (Madrid,

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1627, in-4o). Brantôme lui a consacré un chapitre de ses Capitaines étrangers. Sa vie a été encore écrite en français par Bruslé de Montpleinchamp (Amst., 1690, in-12), et récemment par M. Alexis Dumesnil (Paris, 1827, in-8°). S-F-D.

JUAN MANUEL (don), voy. EspaGNOLES (lang. et litt.), T. X, p. 30.

JUBA, fils d'Hiempsal, roi de Numidie et d'une partie de la Mauritanie, prit parti pour Pompée contre César, dans la guerre civile, tant par reconnaissance de ce que Pompée avait augmenté les états de son père, que par haine contre Curion, lieutenant de César en Afrique, qui, étant tribun, avait proposé au peuple romain une loi pour confisquer le royaume de Juba. Curion trouva en lui un ennemi très redoutable. Juba vint avec de grandes forces au secours d'Utique, où commandait Varus, mais dont les habitants étaient favorables à César. Curion s'étant avancé avec trop de confiance, fut battu complétement et se fit tuer dans la mêlée (l'an de Rome 703). Juba se montra fort cruel envers les prisonniers. Le petit nombre d'hommes qui échappèrent à cette déroute, surent rembarqués pour la Sicile. Quelques années après, César en personne ayant passé en Afrique, Juha marcha contre lui; mais il fut obligé de retourner sur ses pas pour défendre les frontières de son royaume, aucien ami de Catilina qui commandait une troupe d'aventuriers, et que, sans doute, César avait poussé à cette agression. Quoi qu'il en soit, César put attendre des renforts et consolider sa position en Afrique. Cependant Juba revint au secours de Scipion avec des troupes considérables; mais après plusieurs combats où l'avantage fut disputé vivement avec des résultats divers, une bataille décisive fut livrée près de Thapsus. Scipion et Juba furent vaincus. Le roi de Numidie s'enfuit alors et parvint, en se cachant, à regagner Zama où il avait réuni tout ce qu'il avait de plus précieux; mais les habitants lui en refusèrent l'entrée, sachant bien qu'il les ferait tous périr, jusqu'au dernier, plutôt que de rendre la place à César. Ni menaces ni prières n'ayant pu ébranler les citoyens de Zama, Juba se retira dans sa maison de campagne avec

contre un

quelques cavaliers, parmi lesquels était Pétréius, lieutenant de Pompée; là, ces deux chefs résolurent de se combattre pour se tuer mutuellement, et Juba, après avoir abattu Pétréius, se fit achever par un esclave, l'an 42 avant J.-C.

Son fils, aussi appelé JUBA, suivit César dans son triomphe. César lui fit donner une éducation digne de son rang. Il servit sous Auguste, qui le maria avec Cléopâtre Séléné, fille d'Antoine et de Cléopâtre, et le rétablit dans ses états. Il écrivit une histoire romaine en grec, ainsi que plusieurs traités sur l'Afrique. Il ne nous reste que quelques fragments des écrits de ce prince instruit, qui mourut l'an 23 ou 24 de J.-C. P. G-Y.

JUBÉ, voy. AMBON. Le nom de jubé donné à cette tribune élevée devant le chœur de certaines églises, vient de ce que le diacre, sous-diacre ou lecteur, avant de commencer ce qu'il y chantait, demandait au célébrant sa bénédiction par ces mots : Jube, Domine, benedicere. On le nomme en latin ambo (d'où nous avons fait ambon), qui vient du grec àvabaíve, parce qu'on monte au jubé par des degrés pratiqués des deux côtés. L. L. JUBILE, institution judaïque, sur laquelle le Lévitique (XXV, 8. 10) s'exprime ainsi : << Tu compteras sept semaines d'années, savoir sept fois sept ans, et les jours de ces sept semaines d'années te reviendront à 49 ans... et vous sanctifierez l'an cinquantième, et vous publierez la liberté par le pays à tous ses habitants. Ce sera pour vous l'année du jubilé, et vous retournerez, chacun en sa possession, et chacun en sa famille. » Le jubilé est ainsi nommé, du mot hébreu iobel, qui signifie la corne de bélier dont on se servait en guise de trompette, pour annoncer l'année sainte. En conséquence de cette loi, tous les 50 ans, les ventes de biens-fonds étaient dissoutes, les héritages devaient retournerà leurs anciens maîtres, et les esclaves être mis en liberté. Cette mesure avait pour but de prévenir l'excessive inégalité des fortunes, d'alléger la servitude, et d'empêcher que le sol ne devint la propriété de quelques familles. En conséquence aussi, le prix des objets vendus était en raison du nombre d'années qui restait à courir jusqu'au jubilé.

Encyclop. d. G. d. M. Tome XV.

A l'imitation du jubilé mosaïque, l'Église romaine institua à son tour des époques jubilaires. Mais il y avait cette différence entre les deux institutions, que chez les juifs, il ne s'agissait que de l'égalité et de la liberté temporelle, tandis que le jubilé des chrétiens se rapporte à la délivrance des âmes asservies par le péché, et à l'égalité de béatitude dont jouiront les élus dans le monde invisible.

Le jubilé des catholiques est une indulgence plénière et extraordinaire, accordée par le pape à l'Église, ou du moins à tous ceux qui visiteront à Rome les églises de Saint-Pierre et de Saint-Paul. Pendant le jubilé, le pape accorde aux confesseurs le pouvoir d'absoudre tous les cas réservés, et de commuer les vœux simples.

Ce fut l'an 1300, que Boniface VIII établit le premier jubilé, en faveur de ceux qui feraient le voyage de Rome et visiteraient l'église des saints-apôtres. Cette année apporta tant de richesses à Rome, que les Allemands l'appelaient l'année d'or. Cette solennité devait revenir tous les siècles; mais dès l'année 1350, Clément VI abrégea ce terme, et voulut qu'elle eût lieu tous les cinquante ans. Dans le même siècle, Urbain V réduisit cette période à 33 ans ; mais en 1449, Nicolas V rétablit le terme de 50 ans. Enfin, Paul II le réduisit à 25 ans, dans l'espoir de jouir de cette foire, l'année 1475; mais il mourut en 1471. Sixte IV confirma cette dernière décision afin que chacun pût jouir de cette grâce une fois en sa vie.

Le jubilé est une indulgence accordée en considération de certaines bonnes œuvres, et pour engager les fidèles à les faire. Pour gagner cette indulgence, la bulle du pape impose des jeunes, des aumônes, des prières, ou des stations. Pendant toute l'année sainte, les autres indulgences demeurent suspendues. Pendant le même temps, les pèlerins de toutes les nations sont logés, nourris et soignés dans les hôpitaux de Rome. Pour faire l'ouverture de l'année jubilaire, le pape va en cérémonie, à Saint-Pierre, ouvrir la porte sainte, qui est murée et qui ne s'ouvre que dans cette circonstance. Il prend un marteau d'argent, et en frappe

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trois coups, en disant : «< Aperite mihi portas justitiæ, etc., » Et l'on démolit la maçonnerie qui bouche la porte. Le pape se met à genoux devant cette porte pendant que les pénitenciers de Saint-Pierre l'arrosent d'eau bénite; ensuite il prend la croix, entonne le Te Deum, et entre dans l'église avec le clergé. Trois cardinaux légats, que le pape a envoyés aux autres portes saintes, les ouvrent avec les mêmes cérémonies ces portes sont aux églises de Saint-Jean-de-Latran, de Saint-Paul et de Sainte-Marie-Majeure. Cette solennité a lieu aux premières vêpres de Noël: le lendemain, le pape donne la bénédiction au peuple, en forme d'indulgence. Lorsque l'année sainte expire, on referme la porte sainte, la veille de Noël. Le pape bénit les pierres et le mortier, pose la première pierre, et y met douze cassettes pleines de médailles d'or et d'argent; la même cérémonie se fait aux trois autres portes saintes.

Autrefois, le jubilé attirait à Rome une prodigieuse affluence de tous les pays de l'Europe. Aujourd'hui, on n'y vient plus guère, dans ce but, que des provinces d'Italie, surtout depuis que les papes étendent l'indulgence du jubilé aux autres pays, et qu'on peut la gagner sans sortir

de chez soi.

En France, au XVIIIe siècle, les progrès de l'esprit incrédule engagèrent le clergé à redoubler d'efforts pour la célébration du jubilé. A l'ouverture de celui de 1751, l'archevêque de Paris, Christophe de Beaumont, lança un mandement foudroyant contre les vices, les crimes, les impiétés, les abominations du siècle; il n'y parlait que du Dieu terrible, auquel il donnait des trésors de colère pour le jour de la vengeance. Le jubilé de 1776 fut marqué à Paris par une recrudescence de dévotion, qui fit rumeur au sein du parti philosophique. Sans parler de l'ode inspirée à Gilbert par ce retour de ferveur, on sait que Mine Geoffrin, qu'on appelait la mère nourrice des philosophes, donna l'exemple de l'assiduité aux églises. Cette réaction contre l'esprit irréligieux des Encyclopédistes était facile à concevoir. Le jubilé de 1801 coincidait avec la réouverture des églises, ordonnée dans les premières années du

consulat : prendre part au culte public, et se conformer aux pratiques du catholicisme, c'était faire acte de protestation contre les excès révolutionnaires. Nul doute que cette disposition d'esprit ne s'associât alors à ce sentiment de lassitude et d'effroi qui, au milieu des grandes calamités, ramène toujours les âmes vers Dieu. La Restauration a vu aussi son jubilé en 1826: le parti-prêtre, à l'apogée de son pouvoir, préparait alors sa loi du sacrilége, dont le rejet fut le signal d'un progrès en sens contraire. Mais si les prédicateurs du jubilé avaient pour eux la faveur du gouvernement, ils ne rencontraient qu'indifférence ou défiance au sein des populations, qui les consondaient avec les missionnaires. A-D.

JUDA, voy. TRIBUS (les douze).

JUDA (ROYAUME DE), voy. Hébreux. JUDAISME, voy. MOSAISME, HéBREUX, Hébraïque (littér.), JUIFS, KABBALE, TALMUD, SYNAGOGUE, RABBIN, etc. JUDAS, voy. MACHABÉES.

JUDAS, surnommé ISCARIOTE, sans doute parce qu'il était originaire de Carioth, ville de Juda. C'est l'apòtre qui eut la lâcheté de trahir le Christ. Judas était le trésorier de la petite association de Jésus et de ses disciples, et portait, comme tel, la bourse commune (Jean, XII, 6; XIII, 29). Saint Jean l'accuse d'être un homme sans honnêteté; il rattache à son avarice le regret que Judas manifesta lorsque Marie répandit du parfum sur le Seigneur, à Béthanie.

Cet homme devait, bientôt après, livrer son maître à ses ennemis. Il alla trouver les principaux sacrificateurs, et s'engagea, moyennant trente deniers d'argent, à le faire tomber entre leurs mains. Néanmoins, Judas prit sa place au milieu des autres apôtres à la Cène, et Jésus, oppressé de tristesse, ayant dit que l'un d'eux le trahirait, Judas osa demander: Maître, est-ce moi? — Tu l'as dit, » lui répondit Jésus. Alors Judas sortit et revint sur la montagne des Olives, suivi de gens armés. Le misérable, s'avançant auprès de son maître, le fit reconnaitre par un baiser qu'il lui donna. La troupe s'empara alors du Christ, et Judas s'éloigna. Mais apprenant bientôt les dangers qui menaçaient le Juste, et comprenant l'énor

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mité de son crime, il voulut rendre le prix de sa trahison; repoussé par ceux mêmes dont il s'était rendu le complice, il jeta le prix de son forfait dans le temple, et se pendit. Cet argent servit à acheter le champ d'un potier pour la sépulture des étrangers; car il n'était pas permis de le mettre dans le trésor sacré, « parce que c'était le prix du sang; »> c'est pourquoi ce champ de repos fut appelé Hakel damah, le champ du sang (Matth., XXVII, 3 et suiv.). Saint Pierre (Act., I, 18) diffère de saint Matthieu dans les détails de la mort du traître, et aussi lorsqu'il dit que Judas acquit lui-même un champ du salaire de son crime. Ce qui reste certain, c'est le remords et le honteux suicide de Judas. L. L. JUDE (SAINT), surnommé THADDÉE et LEBBEE (le courageux), l'un des douze apôtres du Christ et l'un des quatre personnages nommés frères de Jésus. La scule circonstance de sa vie dont l'Évangile fasse mention, c'est cette question qu'il adressa au Sauveur dans l'un des entretiens de la Cène (Jean, XIV, 22) : « Seigneur, d'où vient que tu te déclareras à nous et non pas au monde? » Jésus répondit de manière à faire comprendre à ses apôtres qu'il les avait choisis pour faire connaître à tous les paroles de son Père. La tradition n'a rien conservé de bien positif sur saint Jude. On croit qu'il s'occupait des travaux de la campagne avant sa vocation. Jésus-Christ l'aimait tendrement, et il mérita cette affection par la pureté de sa foi. L'apôtre prêcha l'Évangile dans la Judée, la Samarie, l'Idumée, la Syrie et la Mésopotamie, selon Nicéphore, saint Isidore et les Martyrologes. Saint Paulin y ajoute encore la Libye. Selon Fortunat, il aurait passé en Perse, où il aurait reçu la couronne du martyre; suivant quelques auteurs grecs, il serait mort en Arménie percé de flèches, après avoir été attaché à une croix. Les Arméniens l'honorent en effet comme leur apôtre.

L'Epitre de Jude (voy. BIBLE, T. III, p. 460) ressemble beaucoup à la seconde de saint Pierre; mais on ne pourrait dire lequel des deux a copié l'autre. Cette épître ne fut pas d'abord reçue au nombre des écritures authentiques, parce que

le livre apocryphe de Hénoch (voy.) y est cité; mais son antiquité et la pureté de ses doctrines l'ont fait admettre dans le canon, même par les églises protestan

tes.

JUDÉE, voy. PALESTINE.

L. L.

JUDÉE (ARBRE DE), nom que l'on donne au gainier (cercis siliquastrum, L.), genre de plantes de la famille des légumineuses (voy.) que l'on cultive pour l'ornement des jardins. Les Espagnols et les Portugais l'appellent arbre d'amour; le nom de gainier lui vient de la forme de ses gousses, semblables à des gaines de couteau. Ses fleurs, de couleur rouge et d'un pourpre rose éclatant ou quelquefois blanches, paraissent en mars et conservent leur éclat pendant près d'un mois. Elles naissent en grappes ou en faisceaux sur les parties latérales des branches et souvent même sur le tronc de l'arbre, en sorte qu'il en est tout recouvert. Les feuilles de l'arbre, grandes et belles, ne viennent qu'après leur entier épanouissement. Clusius prétend que l'arbre de Judée est le colutea de Théophraste, c'està-dire des Grecs; suivant Ray, ce serait le ceratia.

Z.

JUDICA, nom qu'on a donné au dimanche de la Passion, celui qui précède le dimanche des Rameaux (voy. ce mot et CALENDRIER, T. IV, p. 506), parce que l'introit de la messe (voy.) commence ce jour-là par les paroles du psaume: Judica me, Domine (XLIII, 1). Ce psaume, que le prêtre récite ordinairement avant de monter à l'autel pour offrir le sacrifice de la messe, ne se dit pas aux messes des morts, ni depuis le dimanche de la Passion jusqu'à Pâques, usage fondé sur ce que ce psaume étant destiné à exciter la joie, il a semblé qu'il ne convenait pas de le réciter dans des temps de tristesse. On le disait cependant aux messes des morts avant Pie V. L. L.

JUDICIAIRE (POUVOIR). On nomme ainsi l'autorité revêtue du droit de juger les différends qui s'élèvent entre les particuliers, et de punir les crimes et les délits. C'est ce que Montesquieu appelle la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit civil, par opposition à la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit des gens; toutes deux, avec la

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