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Depuis ce difcours, il le combla de: toutes fortes d'honneurs pour le mettre en vûe, & le produire en public. Pendant que Perfée étoit dans la Thrace, Philippe vifita plufieurs villes de: Macédoine, & recommanda Antigone aux grands Seigneurs avec beaucoup de zèle & d'affection: &, s'il avoit vécu plus longtems,on ne doutoit point qu'il ne l'eût mis en poffeffion du trône. Etant parti de Démétriade,il s'étoit arrété longtems à Thef falonique; de là il paffa à Amphipolis,où il tomba dans une groffe maladie. On convenoit pourtant qu'il étoit plus malade d'efprit que de corps. Le chagrin lui caufoit une infomnie continuelle, & il s'imaginoit fouvent voir pendant la nuit l'ombre de fon fils, qui lui reprochoit fa mort, & le chargeoit de malédictions. Il expira, en pleurant l'un de fes fils, & pronongant des exécrations contre l'autre.. Antigone auroit pu être mis fur le trône, fi la mort du Roi eût été d'abord rendue publique. Le médecin Calligéne, qui présidoit aux conful tations, n'attendit pas la mort du Roi, & dès les premiers indices qu'il ne pouvoit pas relever de cette maladie,

il dépécha vers Perfée des courriers "qu'il tenoit tout prêts comme ils en étoient convenus enfemble; &, jufqu'à ce qu'il fût venu, il céla la mort du Roi à tous ceux qui étoient hors du Palais. Perfée furprit tout le monde par fa promte arrivée, & fe mit en poffeffion du roiaume qu'il avoit acquis par fon crime.

Son régne fut d'onze années, dont les quatre dernieres furent emploiées dans la guerre contre les Romains, à laquelle il s'étoit préparé depuis qu'il étoit monté fur le trône. Enfin Paul Emile remporta fur lui une célebre victoire, qui mit fin au roiaume de Macédoine. Pour ne point être obligé de couper & d'interrompre le fil de l'hiftoire de Perfée, qui eft prefque entiérement féparée de celle des autres Rois, je différerai d'en parler jufqu'au Livre fuivant, où je la ra porterai toute, entiere & fans interruption.

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§. II.

Mort de Séleucus Philopater, après un régne affez court, & obscur. Son frere Antiochus, furnommé Epiphane, lui fuccéde. Semences de guerre entre les Rois d'Egypte & de Syrie. Antiochus remporte une victoire fur Ptolémée. Le vainqueur se rend maître de l'Egypte, & de la personne même du Roi. Sur le bruit d'une revolte generale, il paffe en Palestine, affiege prend Jérusalem, &y exerce d'horribles cruautés. Les Alexandrins, à la place de Philométor qui étoit entre les mains d'Antiochus, nomment pour roi fon cadet Ptolémée Evergéte, surnommé auffi Phifcon. Antiochus recommence la guerre en Egypte. Les deux freres s'accordent. Il marche vers Alexandrie pour l'affiéger. Popilius, un des Ambassadeurs Romains, Poblige de fortir d'Egypte, & de laiffer les deux frerès en repos.

LE REGNE de Séleucus Philopator en Afie ne fut pas de longue durée, & n'eut rien de mémorable. C'est fous lui qu'arriva l'hiftoire célebre d'Héliodore, raportée dans le fecond li

cab. 3.

vre des Maccabées. La Cité fainte de I MacJérufalem jouiffoit alors d'une paix profonde. La piété & la fermeté du Grand-Prêtre Onias y faifoient obferver les loix de Dieu, & infpiroient aux Rois même & aux Princes idolâtres un grand refpect pour le lieu faint. Ils l'honoroient de riches préfens, & le roi Séleucus dont nous parlons, faifoit fournir, des revenus de fon domaine, tout ce qui étoit néce faire pour le miniftere des facrifices. Mais la perfidie d'un Jif nommé Simon, préposé à la garde du Temple, jetta tout d'un coup la ville dans le trouble. Cet homme, pour le venger de la réfiftance que le Grand-Prêtre Onias apportoit à fes entreprises injuftes, fit dire au Roi, qu'il y avoit dans le Tréfor du Temple des fommes immenfes,qui n'étoient point deftinées à la dépense des facrifices, & qu'il pouvoit s'approprier. Sur cet avis le Roi envoia à Jérufalem Héliodore fon premier Miniftre, avec ordre de faire tranfporter tout cet argent.

Héliodore, après avoir été reçu du Grand Prêtre avec toutes fortes d'honneurs, lui déclara le fujet de .Dd 4 fon

fon voiage, & lui demanda fi l'avis qu'on avoit donné au Roi touchant cet argent étoit véritable. Le GrandPrêtre lui répondit que c'étoient des dépots, & des fommes destinées à la nourriture des veuves & des orphelins, qu'il ne pouvoit absolument en difpofer au préjudice de ceux à qui cet argent appartenoit, & qui avoient cru ne pouvoir mieux l'affurer, qu'en le mettant en dépôt dans un Temple dont la fainteté étoit révérée par toute la terre. Ces fommes confiftoient en quatre cent talens d'argent, (quatre gent mille écus) & en deux cent talens d'or (fix millions.) Le Miniftre du Prince infiftant fur les ordres de la Cour, lui dit nettement qu'il faloit, à quelque prix que ce fût, que cet argent fût porté au Roi.

Le jour pris pour l'enlever, Héliodore vint au Temple dans le def fein d'exécuter fa commiffion. Toute la ville alors fut remplie de trouble & d'effroi. Les Prêtrès revétus de leurs robes facerdotales, fe profternoient au pié de l'autel, conjurant celui qui eft dans le ciel, & qui a fait la loi touchant les dépôts, de conferver ceux qui avoient été confiés à fon

Tem

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