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peuple qui voulût s'arroger la souveraineté nationale, qu'elle disparaisse. >

La société des Amis de la liberté et de l'égalité demande que la Convention s'occupe de donner une constitution à la France.

L'assemblée primaire de Saint-Lô invite la Convention à prononcer la peine de mort contre les provocateurs au meurtre, et à s'environner d'une force départementale.

Marat demande la parole; et, après quelque opposition, elle lui est accordée.

Marat. En dévoilant les complots de la faction Roland, j'ai omis qu'un de leurs grands chevaux de bataille, c'est d'envoyer des modèles d'adresse pour demander l'expulsion de Robespierre, de Billaud de Varennes (Plusieurs voix : De Marat), de Panis, et vous sentez que je ne suis pas oublié. (On rit. ) Les modèles partent du boudoir de la femme Roland. (On rit.) Ils reviendront vous fatiguer et vous enlever des momens que vous pourriez employer utilement pour la chose publique.

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N... Je demande que Marat signe sa dénonciation, et qu'elle soit déposée sur le bureau.

Marat se rend à sa place.

Boyer-Fonfrède. Je demande qu'il soit défendu aux départemens d'envoyer des adresses.

Le rapporteur continue. Les citoyens de Grenoble disent à la Convention qu'il ne s'ensuit pas que Roland ait perdu la confiance de la nation, parce qu'il n'aura plus celle de quelques sections de Paris. Ils rappellent aussi que la souveraineté ne réside point dans une portion du peuple, mais dans la nation entière.

Les Amis de l'égalité de Dijon. « Jugez Louis XVI, prononcez contre lui la peine de mort; il n'y a pas de crime dont il ne se soit rendu coupable; mais soumettez votre jugement à la révision du peuple; vous vous rendrez responsables d'avoir violé ce droit. »

Le ministre des affaires étrangères. Je profite de cette séance extraordinaire pour attirer l'attention de la Convention nationale

sur un objet d'une haute importance, nos rapports politiques et commerciaux avec l'Angleterre.

Ce n'est pas que je puisse aujourd'hui vous apprendre le résultat des dernières démarches que le conseil exécutif a tentées auprès du gouvernement britannique; des vents contraires, de gros temps n'ont point permis cette célérité. Un courrier, parti de Londres le 27, vient de m'informer que le ministre de la république française avait écrit à M. Pitt pour lui demander une entrevue; que déjà il avait fait passer à lord Grenville une note conçue dans l'esprit des instructions du conseil. Sans doute les réponses me parviendront d'ici au 6 janvier, jour fixé pour le rapport général de notre situation intérieure et extérieure, et je pourrai alors lui faire connaître la résolution définitive du cabinet de Saint-James. Je réserve pour cette époque à entrer dans tous les détails des préparatifs hostiles ordonnés par le ministère britannique, et consentis par le parlement; préparatifs dont l'accroissement a été plus rapide à mesure que ce ministère réussissait à égarer ou à intimider l'opinion et les sentimens du peuple anglais; préparatifs qui toutefois ne sont pas encore trop effrayans, si nous considérons que les ordres pour l'armement de treize vaisseaux de ligne n'ont été donnés que depuis quinze jours, si nous songeons à la grande difficulté de compléter l'équipage de ces gros vaisseaux, par le manque de matelots, dont le déficit est estimé de huit mille; si surtout nous savons de notre côté prendre des mesures promptes et vigoureuses. Je réserve enfin pour la même époque à vous entretenir des autres mesures de la malveillance dn ministère britannique; des indécentes diatribes proférées dans les deux chambres du parlement contre la nation française et son gouvernement; de l'arrestation des navires chargés de subsistances, et destinés pour la France, qui n'étaient plus sujets à l'embargo; des manœuvres employées pour altérer notre crédit; enfin, d'un bill proposé à la chambre des communes, tendant à empêcher la circulation de tout billet à ordre, notes, rescriptions ou obligations promissoires, faits sous l'autorité d'un pouvoir quelconque en France.

Mais je ne puis différer plus long-temps à vous informer que, le 26 de ce mois, les deux chambres ont passé une nouvelle loi ou bill concernant les étrangers en Angleterre ; que entre autres dispositions vexatoires que renferme ce bill, il y est dit:

< VIII. Toutes les fois que le roi ordonnera à un étranger de quitter le royaume, il pourra être. arrêté pour désobéissance, sur le warrant d'un juge de paix ou d'un secrétaire d'état, et mis dans la prison du comté sans être admis à caution.

, X. Dans le cas où l'on pourrait prévoir qu'un étranger ne voudrait pas obéir sur-le-champ à un pareil ordre, un des premiers secrétaires d'état pourra expédier un warrant pour mettre un tel étranger dans les mains d'un messager d'état, qui le conduira hors du royaume d'une manière convenable à son (his or her) rang et à sa position ; et si l'étranger alléguait quelque excuse pour ne point se soumettre à un pareil ordre, les lords du conseil privé jugeront la validité.

› XI. Le roi pourra envoyer à tous les étrangers arrivés depuis le 1er janvier 1792 (excepté négocians et domestiques) un ordre de résider dans tel district qu'il plaira à Sa Majesté d'assigner. Ceux qui désobéiront pourront être arrêtés et condamnés à un mois de prison.....

> Tous les étrangers compris dans l'article, et tous ceux qui arriveront, déclareront, au principal magistrat ou au juge de paix de l'endroit, leurs nom, rang, profession, état, leur demeure, le temps de leur séjour dans le pays, le lieu de leur résidence principale. En cas de refus, ils pourront être arrêtés sans être admis à bail. De fausses déclarations seront punies, la première fois, d'un mois de prison; la seconde, de bannissement. Trouvés en Angleterre après un temps déterminé, ils seront transportés pour la vie.

› XVII. Toutes les maisons où résident des étrangers, excepté des négocians et ceux qui ont continuellement résidé en Angleterre deux ans avant le jour de...... 1790, pourront être visitées sur un ordre d'un secrétaire d'état, pour voir s'il n'y a point d'armes cachées. »

T. XXII.

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Ces mesures ne sont pas seulement rigoureuses, injustes, inusitées, contraires à tous les usages reçus entre les nations; elles sont encore, par rapport à nous, en contradiction manifeste avec les égards et la protection des lois que les Français, voyageant en Angleterre, sont en droit d'exiger, en vertu du traité de commerce et de nåvigation conclu, en 1786, entre la France et l'Angleterre. Ce traité porte, art. IV:

Il sera libre aux sujets des états respectifs des deux souve rains d'entrer et d'aller librement et sûrement, sans permission ni sauf-conduit général et spécial, soit par terre ou par mer, et enfin par quelque chemin que ce soit, dans les royaumes, états, provinces, terres, îles, villes, bourgs, places murées ou non, fortifiées ou non fortifiées, ports et domaines de l'un et de l'autre souverain, situés en Europe, et quels qu'ils puissent être, et d'en revenir, d'y séjourner, ou d'y passer, et d'y acheter aussi, et acquérir à leur choix toutes les choses nécessaires pour leur subsistance et pour leur usage; et ils seront traités réciproquement avec toute sorte de bienveillance et de faveur; bien entendu, etc..... ›

Il suffit sans doute d'avoir rapproché ces clauses du bill nouvellement adopté par le parlement britannique, pour vous convaincre que leur exécution, à l'égard des Français, serait une infraction évidente au traité de commerce.

Ce traité a été cependant religieusement observé par les Français, malgré qu'il s'en faille de beaucoup que les avantages en soient réciproques, malgré les plaintes universelles du commerce français dont les intérêts y sont lésés; même dans ces mòmens d'orage et de crises violentes, qui auraient pu justifier des précautions extraordinaires, nous avons usé, envers les Anglais résidant en France, de ménagemens extrêmes, que quelquesuns d'entre eux n'ont pas toujours mérités. Ainsi, ce ne sera point à la nation française que les Anglais devront s'en prendre, s'il arrive que nous soyons forcés à regarder comme non-avenu un traité qui n'a pas peu servi à accroître la prospérité de leur

commerce.

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Le conseil exécutif a cru devoir user encore d'une dernière précaution pour mettre mieux en évidence la conduite du cabinet de Saint-James à notre égard, et donner aux Anglais une nouvelle preuve des regrets que nous éprouvons en voyant s'affaiblir les liaisons d'amitié qui ont subsisté jusqu'à présent entre les deux peuples; il s'est borné, en conséquence, à arrêter:

1° Que le ministre de la république française à Londres serait chargé de présenter une note au ministère britannique, par laquelle il demanderait à ce ministère, au nom de la république française, une réponse claire, prompte et catégorique, pour savoir si, sous la détermination générique d'étranger que porte le nouveau bill, le parlement et le gouvernement de la GrandeBretagne entendaient aussi comprendre les Français;

2° Que, dans le cas d'une réponse affirmative, ou si dans le terme de trois jours il n'en reçoit aucune, il serait autorisé à déclarer que la république française ne peut considérer cette conduite que comme une infraction manifeste au traité de commerce conclu en 1786; qu'en conséquence elle cesse de se croire ellemême obligée par ce traité, et qu'elle le regarde dès lors comme rompu et annulé.

Boyer-Fonfrède. Sans doute les mesures prises par le ministre doivent être approuvées ; mais il en est d'autres qu'il ne faut pas oublier de prendre, je veux parler de ce qui est relatif à nos ports. Je demande qu'après que vous aurez prononcé sur le sort de Louis, vous envoyiez des commissaires visiter l'état de nos 'ports.

Rabaut-Saint-Étienne. Nous devons prendre toutes les précautions que la prudence dicte. Je demande que les comités de marine et diplomatique vous fassent après-demain un rapport sur notre situation à l'égard de l'Angleterre.

Billaud-Varennes. J'ai été surpris de ne pas trouver parmi les mesures qu'on vous a proposées celle d'une adresse au peuple anglais, qui nous avait été annoncée. Tout le monde connaît la situation de ce peuple : il est notre ami; il ne peut y avoir de mesure plus sage que cette adresse: c'est un appel au peuple,

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