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bus en parlant de Démocrite, » qu'il » y ait un homme qui fe perfuade, » que de certains corps folides & in

» divifibles fe meuvent d'eux-mêmes » par leur poids naturel, & que de >> leur concours fortuit s'eft fait un » monde d'une fi grande beauté ? Qui» conque croit cela poffible, pour» quoi ne croiroit-il pas que fi l'on »jettoit à terre quantité de caractéres » d'or, ou de quelque matiére que ce » fût, qui repréfentaffent les vingt » & une lettres, ils pourroient tomber » arrangés dans un tel ordre, qu'ils » formeroient lifiblement les Annales » d'Ennius.

*

On peut dire la même chofe de l'Iliade d'Homére. Qui croira, dit M. de Fénelon dans fon admirable Traité de l'Existence de Dieu, que ce poéme fi parfait n'ait jamais été compofé par un effort du génie d'un grand Poéte;& que les caractéres de l'alphabet aiant été jettés en confufion, un coup de pur

*M. le Préfident Bou- lettres A. B. C. D. E F. hier , dans fa favante I K. L. M. N. O. P. R. Differtation, de prifcis S. T. Les cinq autres a. Græcor. & Latin. literis, joutées du tems de Cicé imprimée à la fuite de la ron, étoient, G. Q. V. Palæographie du P. de X. Z. fans compter l'H. Montfaucon, a fait voir qui étoit moins une lettre, que les anciens Romains qu'une marque d'afpira. n'avoient que ces x V I. tion.

hazard, comme un coup de dés, ait raffemblé toutes les lettres précifément dans l'arrangement néceffaire pour décrire dans des vers pleins d'har monie & de variété tant de grands événemens; pour les placer & pour les lier fi bien tous enfemble; pour peindre chaque objet avec tout ce qu'il a de plus gracieux, de plus noble, & de plus touchant; enfin pour faire parler chaque perfonne felon fon caractére, d'une maniére si naïve & fi paffionnée ? Qu'on raisonne & qu'on fubtilife tant qu'on voudra, jamais on ne perfuadera à un homme fenfé que l'Iliade n'ait point d'autre auteur que le hazard. Pourquoi donc cet homme fenfé croira-t-il de l'Univers, fans doute encore plus merveilleux que l'Iliade, ce que fon bon fens ne lui permettra jamais de croire de ce Poéme ?

Voila comme s'expliquoient toutes les fectes les plus célébres. Quelques Philofophes, comme je l'ai dit, mais en très petit nombre, entreprirent de fe diftinguer des autres par des opinions particuliéres fur ce fujet. Livrés aux foibles efforts de la raifon pour approfondir la nature & l'effence de la

Divinité, & pour en expliquer les attributs, & fans doute éblouis de l'état d'un objet dont les yeux humains ne peuvent foutenir la lumiére, ils fe font égarés dans leurs recherches, & ont été conduits d'abord à douter de l'existence de la Divinité, & peu à peu jufqu'à la nier. Mais le peuple, qui n'entroit point dans ces rafinemens & ces fubtilités de la Philofophie, & qui s'en tenoit uniquement à la tradition immémoriale, & à la notion naturelle gravée dans le cœur de tous les hommes, s'éleva fortement contre ces prédicateurs de l'Athéifme, & les traita comme des ennemis du

Lib. 1. n. 63.

genre humain. PROTAGORE aiant commen- De nat.deor. cé un de fes livres de la forte : je ne faurois dire s'il y a des dieux, ni ce que c'eft; les Athéniens le chafférent non feulement de leur ville, mais encore de leur territoire, & firent bru ler publiquement fes ouvrages.

DIAGORE ne s'en tint pas au doute, il nia nettement qu'il y ait des dieux; & c'eft ce qui lui fit donner le furnom d'Athée. Il vivoit en la AN M. 5588. XCIe Olympiade. On prétend qu'un Helych. entêtement d'Auteur une tendreffe

Διαγόρας

'AN. M. 3684. Diog. Laert lib. 2. in Ari

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exceffive pour une production de fon efprit, l'entraîna dans l'impiété. Il avoit appellé en Juftice un Poéte qui lui avoit volé une pièce de vers. Celui-ci jura qu'il ne lui avoit rien dérobé, & peu de tems après publia fous fon propre nom cet ouvrage, qui lui acquit une grande réputation. Diagore voiant dans fon adverfaire le crime non feulement impuni, mais honoré & récompenfé, conclut qu'il n'y avoit point de Providence, point de dieux, & fit des Livres pour le prouver.

Les Athéniens le citérent pour lui faire rendre compte de fon dogme: mais il prit la fuite, fur quoi ils mirent fa tête à prix. Ils firent promettre à fon de trompe un talent (trois mille livres) à quiconque le tueroit, & deux à quiconque l'améneroit vif, & firent graver ce décret fur une co

lonne de cuivre.

THEODORE de Cyréne nioit auffi fans reftriction l'existence des dieux. Il auroit été conduit au Tribunal de l'Aréopage, & puni comme Athée, fi Démétrius de Phalére, qui étoit pour lors tout puiffant à Athénes, n'eût favorifé fon évafion. Sa

morale étoit digne d'un Athée. Il enfeignoit que tout eft indifférent qu'il n'y a rien de fa nature qui foit crime ou vertu. Son impiété lui fit des affaires par tout où il fe trouva, & il fut enfin condanné à s'empoifonner.

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La jufte févérité des Athéniens, qui puniffoient fur cette matiére jufqu'au doute comme on l'a vû dans Protagore, contribua beaucoup à arréter la licence des opinions & le cours de l'impiété. Les Stoïciens toient fi loin fur ce point le respect pour la religion, qu'ils traitoient de criminelle & d'impie la coutume de difputer contre l'existence des dieux, foit qu'on le fît d'une maniére férieufe, ou fimplement par entretien & contre fa pensée.

S. II.

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De la nature de la Divinité. UN DÉTAIL abrégé de toutes les rêveries que les Philofophes ont

a Ex quo equidem exi- | lib. 1. n. 63.

ftimo, tardiores ad hanc b Mala & impia confententiam profitendam fuetudo eft contra deos multos esse factos, quip-difputandi, five animo pè cum pœnam ne dubi-id fit, five fimulatè. Ibid. tatio quidem effugere po-lib. 2, n. 168. tuiffet. Denatur. deorum,

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