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AN.M-3574.

doit d'Efculape par éraclide fon pere, & d'Hercule par fa mere Praxitée. Il s'attacha d'abord à l'étude des chofes de la nature; puis à celle du corps humain en particulier. Il eut pour premier maître fon pere même. Il reçut auffi les leçons d'un autre célébre Médecin, nommé Hérodique, dont je viens de parler. Il fe rendit habile dans toutes les parties de la Médecine, & en porta la connoiffance auffi loin qu'elle pouvoit aller pour lors.

J'ai déja dit qu'il étoit né à Cos. Cette Ile étoit confacrée au dieu Efculape, qui y étoit honoré d'un culte particulier. La coutume étoit que tous ceux qui avoient été guéris de quelque maladie, fiffent un Mémoire exact & des fymptômes qui l'avoient accompagnée, & des remédes qui les en avoient délivrés. Hippocrate avoit fait copier tous ces Mémoires, qui ne lui furent pas d'un petit fecours & qui lui tinrent lieu d'une expérience anticipée.

Son extrême habileté parut fur-tout Av.J.C.43. pendant la pefte qui affligea particu liérement la ville d'Athénes & toute l'Attique au commencement de la guerre du Péloponnése. J'ai exposé

Tome III.

"ancienne.

ailleurs quel fut alors fon zêle & fon dévouement pour le falut de fa patrie, de l'Histoire fon noble défintéreffement qui lui fit refufer les offres avantageufes du Roi de Perfe, & les honneurs extraordinaires dont la Gréce crut devoir récompenfer les fervices importans qu'il lui avoit rendus.

On dit que les Abdérites écrivirent à Hippocrate, pour le prier de venir voir Démocrite. Ils le voioient ne fe foucier de rien, rire de tout, dire que l'air étoit plein d'images, fe vanter

faifoit de tems en tems un voiage dans l'efpace immenfe des choses. Regardant tous ces traits comme des fymptômes & des commencemens de folie, ils craignoient qu'il ne devînt tout-à-fait fou, & que fon grand favoir ne lui démontât entiérement la tête. Hippocrate les raffura, & jugea bien autrement qu'eux de l'état de Démocrite. Il n'eft pas für que les Lettres d'Hippocrate, d'où ce fait eft tiré, foient véritablement de lui.

Les Ecrits qu'il a laiffés en grand nombre, ont toujours été regardés, & le font encore, comme ce qu'il y a de plus parfait dans ce genre, & comme devant tenir lieu de fondement & de

bafe à l'étude de la Médecine. Il y a confervé la mémoire d'un événement, qui lui fait encore plus d'honneur que toute fa fcience & toute fon habileté. C'est l'aveu fincére d'une faute qu'il avoit commise en panfant une bleffure de tête car on fait qu'anciennement la Médecine, la Chirurgie, & la Pharmacie, n'étoient point féparées. Il a n'a point rougi de confeffer, aux dépens en quelque forte de fa propre gloire, qu'il s'étoit trompé, de peur que d'autres, après lui, & à fon exemple, ne tombaffent dans la même erreur. De petits efprits, dit Celfe, & d'une habileté médiocre, n'en usent pas de la forte, & ménagent avec bien plus de foin le peu qu'ils ont de réputation, parce qu'ils n'en peuvent rien perdre fans s'appauvrir. Il n'y a que de grands génies, que des hommes riches & opulens, c'eft-à-dire qui fe fentent d'ailleurs un fonds de mé

lominus habitu o, convenit etiam veri erroris confeffio præcipuè in eo minifterio, quod utilitatis caufa pofteris traditur, ne qui de ipiantur eadem ratione qua quis deceptus eft. Celj. lib. 8.

a De futuris fe deceptum effe Hippocrates memoria prodidit, more magnorum virorum, & fiduciam magnarum rerum habenzium. Nam levia ingenia, quia nihil habent, nihil fibi detrahunt. Magno ingenio, multaque nihi-cap. 4.

rite non commun

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capables de faire un tel aveu, & de négliger ces petites pertes, qui ne diminuent rien de leur richeffe & de leur opulence.

Il fait encore un autre aveu, qui marque en lui un caractére admirable de candeur & d'ingénuité. De quarante-deux malades qu'il avoit traités dont il décrit les maladies dans le premier & le troifiéme Livres des Maladies Epidémiques, il avoue qu'il n'y en a eu que dix-fept qu'il ait guéris, & que tous les autres font morts entre fes mains. Dans le fecond des Livres que je viens de citer, il dit, en parlant de certaine efquinancie qui étoit accompagnée de grands accidens, que tous en échapérent. S'ils étoient morts, ajoute-t-il, je le dirois de même.

Dans un autre endroit il fe plaint Lib. de Arte. modeftement de l'injuftice de ceux qui décrioient la Médecine fous le prétexte que l'on meurt fouvent entre les mains des Médecins. Comme fi, dit-il, on ne pouvoit pas imputer la mort du malade à la violence infurmontable de la maladie, auffi bien ou plutôt qu'à la faute du Médecin qui l'a traité.

Il déclare qu'il n'y a point de des- Lib. Prare

ptionum.

honneur pour un Médecin, lorfqu'en certains cas difficiles il eft en peine touchant la maniére dont il fe doit conduire auprès d'un malade, de faire appeller d'autres Médecins, afin d'avifer conjointement avec eux, fur ce qu'il y a à faire pour le bien du malade. Par où l'on voit que les Confultations font d'un ancien ufage.

On reconnoit dans le ferment d'Hippocrate qui fe trouve à la tête de fes Ouvrages le caractére d'un véritablement honnête homme & plein de probité. Il prend les dieux qui préfident à la Médecine à témoin du defir fincére qu'il a de remplir exactement tous les devoirs de fon état. Il fait paroitre une vive & refpectueufe reconnoiffance pour celui qui lui a enfeigné l'Art de la Médecine, & déclare qu'il le regarde toujours comme fon pere, & fes enfans comme fes propres freres, & qu'il fe fera un devoir de les aider en toute occafion, & de fes biens, & de fes confeils. Il proteste que dans le régime de vivre qu'il prefcrira aux malades, il aura grand foin de rechercher tout ce qui pourra leur être utile, & d'éviter tout ce qu'il croira pouvoir leur nuire. Il fe pro

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