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Pinutiles des Obfervations fi pénibles & fi fcrupuleufes, qui n'ont pour but que de déterminer la figure de la Terre; & bien des gens croiront peutêtre que ceux qui les ont faites auroient pu s'épargner les peines qu'elles leur ont couté, & qu'on auroit pu donner un objet plus légitime aux dépenfes qu'on y a emploiées. Mais c'eft qu'on ignore la liaifon que des Obfervations de cette nature ont avec la Navigation & les avantages qui en réfulteront en faveur de l'Aftronomie. Cet événement ne fervira pas peu à rehauffer la gloire du régne de Louis XV.

ARTICLE PREMIER.

REFLEXIONS fur l' Aftronomie.

JE NE PUIS terminer l'article de l'Aftronomie fans faire deux Réflexions avec les Auteurs des favans Mémoires de l'Académie des Sciences.

Premiére Réflexion, fur les Satellites de Jupiter.

ON EST PORTÉ affez naturellement, comme je l'ai déja obfervé en parlant de la Géométrie, à regarder

comme inutile, & à méprifer ce qu'on n'entend pas. Nous avons une Lune pour nous éclairer pendant les nuits: que nous importe, dit-on, que Jupiter en ait quatre? (Les Lunes ou les Satellites de Jupiter, c'eft la même chofe.) Pourquoi tant d'Obfervations fi pénibles, tant de calculs fi fatiguans, pour connoître exactement leur cours? Nous n'en ferons pas mieux éclairés, & la Nature qui a mis ces petits Aftres hors de la portée de nos yeux, ne paroit pas les avoir faits pour nous.

En vertu d'un raisonnement fi plau fible, on auroit dû négliger de les ob ferver avec le Télefcope, & de les étudier avec une attention particuliére. Et quelle perte n'auroit-ce point été pour le Public!

La méthode de déterminer les longitudes des lieux de la Terre par le moien des Eclipfes des Satellites de Jupiter, que l'Académie Roiale des Sciences a commencé la premiére de pratiquer, s'étoit trouvée fi exacte qu'on jugea que par ce moien on pourroit entreprendre la correction de toute la Géographie, & faire des Cartes juftes pour l'ufage de la Navigation: ce qu'on n'avoit encore pu faire, par

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ce qu'il n'y avoit eu que les Eclipfes de Lune qui euffent fervi à trouver, mais avec peu de jufteffe, les différences des Longitudes de quelques lieux éloignés. Et ces Eclipfes, qui n'arrivent ordinairement qu'une ou deux fois l'année, font bien plus rares que celles des Satellites de Jupiter, qui ar rivent tout au moins de deux en deux jours, quoiqu'on ne les puiffe pas obferver toutes dans le même lieu, tant à caufe de la différence des heures auxquelles Jupiter n'eft pas toujours fur l'Horifon, qu'à caufe du mauvais tems qui nuit fouvent aux Obfervations.

Cette entreprise de travailler à la perfection de la Géographie d'une maniére nouvelle & plus parfaite que celle qu'on avoit imaginée jufques à - cette heure,étant conforme aux intentions de Sa Majesté dans l'Institution de fon Académie des Sciences, elle ordonna qu'on choisît des perfonnes capables de l'exécuter en divers lieux fuivant les inftructions qui leur seroient données, & qu'on prît les occafions propres pour les envoier en des pays éloignés. L'Hiftoire de ces Voyages eft décrite exactement dans les Mémoires de l'Académie des Scien

ces, & c'eft, ce me femble, un des événemens du Régne de Louis XIV qui lui fera le plus d'honneur dans les fiécles à venir.

Après que Sa Majesté eut été infor mée des Obfervations que Meffieurs de l'Académie des Sciences avoient faites par fon ordre en divers lieux hors du Roiaume, elle leur ordonna de s'appliquer à donner une Carte de toute la France avec la plus grande exactitude qu'il feroit poffible. Cette entreprise avoit été tentée plufieurs fois, & n'avoit pu réuffir faute des moiens que l'on a aujourd'hui,qui font les Horloges à Pendules, & les grandes Lunettes dont on fe fert pour découvrir les Eclipfes des Satellites de Jupiter, qui eft la voie la plus sûre pour déterminer la différence des Méridiens.

N'y eût-il dans toute l'Aftronomie d'autre utilité que celle qui fe tire des Satellites de Jupiter, elle juftifieroit fuffifamment ces calculs immenfes, ces Obfervations fi affidues & fi fcrupuleufes, ce grand appareil d'inftrumens travaillés avec tant de foin, ce Bâtiment fuperbe uniquement élevé pour l'ufage de cette Science. Pour

peu qu'on entende les principes de la Géographie & de la Navigation, on fait que depuis que ces quatre Lunes de Jupiter font connues, elles ont été plus utiles par raport à ces Sciences que notre Lune même; qu'elles fervent & ferviront toujours à faire des Cartes marines infiniment plus juftes que les anciennes, & qui fauveront apparemment la vie à une infinité de Navigateurs.

Seconde Réflexion fur l'étonnant Spectacle que nous préfente l'Aftronomie.

QUAND l'Aftronomie ne feroit pas auffi abfolument néceffaire qu'elle l'est pour la Géographie & pour la Navigation, elle feroit infiniment digne de la curiofité de tous les efprits par le grand & le fuperbe spectacle qu'elle leur préfente. Pour en donner quelque idée, je ne ferai que raporter fimplement ce que les Obfervations des Aftronomes nous ont appris de l’immenfe volume de quelques-uns de ces grands Globes qui roulent fur nos têtes.

On divife les Aftres en Planétes & en Etoiles fixes.

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