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Le terreau fournit surtout de l'acide carbonique, des sels et une matière organique azotée.

Des matières végétales et animales en suspension dans l'atmosphère, qui se déposent sur les plantes, peuvent contribuer à leur développement. Mais l'eau et l'acide carbonique provenant de l'atmosphère et du sol sont la source principale de l'oxygène, de l'hydrogène et du carbone qui constituent la plus grande partie de la matière organique du végétal.

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Avant Théodore de Saussure, on s'était occupé des cendres des végétaux, mais principalement au point de vue de la nitrification et des engrais en France et en Angleterre2, on avait reconnu que les plantes herbacées sèches donnent, à poids égal, plus de cendres que les plantes ligneuses; mais à Théodore de Saussure revient le mérite d'avoir entrepris une série d'analyses de cendres végétales pour en coordonner les résultats relativement à la végétation, d'avoir décrit ses procédés et d'être arrivé à quelques conclusions générales exactes que nous allons

exposer.

Théodore de Saussure, en constatant que les plantes herbacées renferment plus de cendre que les plantes ligneuses, en attribue la cause à la transpiration plus grande dans les premières que dans les secondes. Dès lors, la succion des plantes herbacées étant, d'après Hales, plus grande que celle des plantes ligneuses, les premières doivent renfermer plus de matières salines, puisque celles-ci ne pénètrent, pour ainsi dire, que par les racines dans les plantes.

Les organes qui transpirent le moins contiennent moins de cendres que les autres. Ainsi les fruits en contiennent moins que les feuilles, le bois moins que l'aubier.

L'eau, en enlevant des sels solubles aux végétaux, diminue ainsi la quantité de sels qu'ils auraient donnée. C'est pourquoi les bois flottés donnent moins de potasse que les bois non flottés.

Théodore de Saussure a bien distingué les divers sels qui constituent essentiellement les cendres des végétaux. Ce sont des sels à base de potasse et de soude, des phosphates de chaux et de magnésie, des sels à base de chaux dont l'acide est détruit par la chaleur. Il y a, de plus, de la silice, des oxydes de fer et de manganèse.

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Il a parfaitement vu que la matière des cendres provient du sol, particulièrement du terreau, et qu'une très-faible quantité vient de l'atmosphère; mais aucun de leurs principes n'est un produit de la végétation, comme Lampadius et quelques auteurs l'ont prétendu.

Conformément à cette manière de voir, la nature du sol a une grande influence sur la proportion et la nature des cendres.

Par exemple, des fèves semées dans du gravier et arrosées avec de l'eau distillée ont donné des plantes dont la cendre s'élevait à 0,039 du poids des plantes séchées; des fèves semées dans des capsules de verre pleines de gravier et placées sur la terre en rase compagne, arrosées avec de l'eau de pluie naturellement ou artificiellement, ont donné 0,075 de cendre, et des fèves cultivées en pleine terre d'un jardin potager en ont donné jusqu'à 0,120.

Les cendres d'une même plante varient de nature suivant la nature du sol. Ainsi, dans un sol siliceux, une plante donne une cendre contenant proportionnellement plus de silice, relativement à la chaux, qu'elle n'en donne dans un sol calcaire.

Dans la cendre d'une même plante la proportion des sels à base de potasse ou de soude est plus forte dans la plante jeune que dans la plante âgée. Ainsi, la cendre de jeunes plantes de verge d'or, de fève, contient 0,75 de sels à base de potasse; la cendre des jeunes feuilles de chêne, 0,75; celle des jeunes feuilles de noisetier et de peuplier, 0,50. Cette proportion s'affaiblit avec l'âge, les eaux pluviales qui lavent les plantes leur enlèvent des sels solubles.

Si on examine la nature des cendres des diverses parties d'une même plante, on voit que la proportion mutuelle des divers principes constituant la cendre que donne cette plante brûlée intégralement, ne sont pas les mêmes pour ces diverses parties.

Par exemple :

Les sels alcalins sont moins abondants dans la cendre de l'écorce que dans celle de l'aubier et du bois, où la proportion est à peu près la

même.

La cendre des semences contient une proportion plus forte de sels alcalins que la cendre du reste de la plante.

Les phosphates terreux, les plus abondants principes des cendres, après les sels à base de potasse ou de soude, dans la jeune plante herbacée en voie d'accroissement, présentent des résultats analogues à ceux de ces derniers sels.

Les cendres des jeunes feuilles renferment plus de ces phosphates que celles des feuilles adultes.

Les eaux pluviales enlèvent les phosphates terreux à la plante vivante dont elles lavent la surface.

La cendre de l'écorce contient moins de phosphates terreux que celle de l'aubier, et celle-ci en contient plus que celle du bois.

L'auteur signale la présence du phosphate de potasse dans les semences et l'absence de la chaux carbonatée ou caustique dans leurs cendres, tandis qu'à l'époque de la maturation les cendres des tiges présentent le résultat inverse.

La découverte du phosphore dans les semences remonte jusqu'à la découverte de ce corps. Albinus en parle; Hoffmann, dans ses notes des œuvres de Potter, fait mention du phosphore que les semences de moutarde, de rue et de roquette, donnent à la distillation; Pott, dans des remarques sur la Chimie de Boerhaave, dit qu'il en est de même du froment, du seigle et d'autres graines; enfin Margraff confirme ces résultats par ses propres expériences.

On conçoit, d'après la remarque de l'auteur, que, si la proportion des sels alcalins et des phosphates terreux diminue, celle des sels qui donnent par l'incinération de la chaux libre ou carbonatée doit augmenter. Or tel est le résultat de ses analyses.

Les plantes de fève qui conservent leurs sels solubles et les phosphates terreux dans la même proportion, durant leur végétation, donnent la même quantité de chaux libre ou carbonatée aux diverses périodes de leur vie.

L'écorce donne beaucoup plus de chaux carbonatée par l'incinération que l'aubier, et celui-ci en donne moins que le bois.

La plupart des semences communes donnent une cendre qui ne contient que très-peu de chaux.

Enfin, Théodore de Saussure annonce l'existence du carbonate de chaux ou de magnésie dans la graine de quelques lithospermes.

La proportion de la silice augmente avec l'âge des plantes et à mesure que celle des sels alcalins diminue.

Elle existe en proportion notable dans les céréales, et, suivant l'auteur, dans les plantes les plus épuisantes, parce que la silice s'y accumule surtout à l'époque où elles ont perdu de ce qu'elles avaient d'abord puisé dans le sol.

Dans les arbres, Théodore de Saussure a remarqué que les feuilles renferment de la silice surtout en automne, lorsqu'il n'y en a pas ou que très-peu dans l'écorce, l'aubier et le bois.

Les oxydes de fer et de manganèse augmentent dans la plante à me

sure que la végétation avance. Les feuilles en contiennent plus en automne qu'au printemps.

Une conséquence de ce qui précède est que les lavages de la plante doivent augmenter la proportion de la silice et des oxydes de fer et de manganèse, comme ils augmentent la proportion des sels qui, dans l'incinération, se changent en chaux libre ou carbonatée.

Tel est le compte que nous avons voulu rendre des travaux de Théodore de Saussure sur la végétation. Les détails qu'il comprend et les conclusions auxquelles ils conduisent montrent tout ce que la science doit à leur auteur de connaissances positives, et justifient le jugement que nous en avons porté, en datant de leur publication les travaux de précision afférant à l'étude chimique de la végétation. Mais, si ces détails montrent que l'auteur a compris dans son livre tous les éléments que, de son temps, il était possible d'étudier pour connaître la végétation au point de vue chimique, ils prouvent en même temps que les recherches dont nous venons de parler ne présentent aucune découverte capitale, ouvrant des voies nouvelles à l'observation; de là donc la nécessité où nous nous sommes trouvé, pour les louer, d'en montrer le nombre et la variété. Plus tard, nous verrons ce que la science actuelle sera capable d'ajouter aux recherches de Théodore de Saussure, relativement aux méthodes de l'analyse organique élémentaire et de l'analyse organique immédiate, et relativement encore à la précision des appareils qui permettront d'apprécier des différences trop petites pour qu'elles aient pu l'être dans les appareils dont Théodore de Saussure a fait usage.

(La suite à un prochain cahier.)

E. CHEVREUL.

NOUVELLES LITTÉRAIRES.

INSTITUT IMPÉRIAL DE FRANCE.

SÉANCE PUBLIQUE DES CINQ ACADÉMIES.

La séance publique annuelle des cinq Académies de l'Institut a eu lieu le lundi 17 août, sous la présidence de M. le comte de Montalembert, directeur de l'Académie française, assisté de MM. Villemain, Félix Ravaisson, Is. Geoffroy Saint-Hilaire, Hittorff et le comte de Portalis, délégués des Académies française, des inscriptions et belles-lettres, des sciences, des beaux-arts et des sciences morales et politiques.

Le président a prononcé un discours et donné lecture du rapport sur le concours pour le prix de linguistique fondé par M. de Volney.

La commission a décerné ce prix à M. Miklosich pour son ouvrage intitulé Vergleichende Formenlehre der Slavishen Sprachen; Vienne, 1856, un vol. in-4°. Elle a accordé une mention particuliere :

1. A la publication intitulée: Glossarium latinogermanicum media et infimæ ælatis, e codicibus manuscriptis et libris impressis. Francfort, 1857, un vol. in-4°. Cet ouvrage est bien ordonné et atteste une étude approfondie des glossaires imprimés et manuscrits de la langue allemande, depuis les plus anciens monuments de cet idiome jusqu'à la fin du moyen âge;

2 A un Mémoire sur la formation des racines sémitiques, par M. Léon de Rosny, deux cahiers in-4°. Bien que ce mémoire ne résolve pas suffisamment les graves questions qui y sont traitées, la commission croit devoir encourager l'auteur à poursuivre ses recherches;

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3° Au Glossaire historique et comparatif du dialecte néo-latin parlé dans le BasQuercy (département de Tarn-et-Garonne), par M. Mary-Lafond, manuscrit en deux parties in-folio. Dans ce traité, l'auteur ajoute d'utiles développements à ce qu'il a dit dans son Tableau historique et littéraire de la langue parlée dans le midi de la France, ouvrage honorablement distingué dans un précédent concours.

La commission annonce qu'elle accordera, pour le concours de 1858, une médaille d'or de la valeur de 4,200 francs à l'ouvrage de Philologie comparée qui lui en paraîtra le plus digne parmi ceux, tant imprimés que manuscrits, qui lui seront

adressés.

Les mémoires manuscrits et les ouvrages imprimés, pourvu qu'ils aient été pu

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