La jeunesse se flatte, et croit tout obtenir : (1) La Fontaine a dit plusieurs fois déjà que l'enfance était sans pitié. Il dit maintenant que la vieillesse est impitoyable. Entre ces deux extrémités, la place qui reste dans la vie pour les sentiments généreux est bien peu de chose. Ne pourrait-on point, en cette occasion et en quelques autres encore, adresser à La Fontaine le même reproche qu'à La Rochefoucauld, c'est-à-dire de faire une trop large part aux sentiments égoïstes et durs? En pays plein de cerfs, un cerf tomba malade. Accourt à son grabat le voir, le secourir, La Parque m'expédie; et finissez vos pleurs. De ce triste devoir tout au long s'acquittèrent, Ce ne fut pas sans boire un coup, A jeûner et mourir de faim. Il en coûte à qui vous réclame, (1) Desmays, l'Ésope françois, 1677, part. 11, fab. v, p. 42, Lokman, fab. 111, la Gazelle, p. 45 de la traduction de M. Marcel, 1803, in-18. (2) Phrase proverbiale, pour dire. Il n'eut plus rien à manger. O temps! o mœurs ! j'ai beau crier, VII. La Chauve-Souris, le Buisson et le Canard (1). Le buisson, le canard, et la chauve-souris, Ils faisaient petite fortune, Vont trafiquer au loin, et font bourse commune. Des registres exacts de mise et de recette. Alla tout emballée au fond des magasins Ou plutôt il n'en poussa point: Le plus petit marchand est savant sur ce point : Les voilà sans crédit, sans argent, sans ressource, (1) Esop, 124, 42, Vespertilio, Rubus, et Mergus. (2) C'est-à-dire prêts à se laisser revêtir du bonnet vert pour éviter la prison. Boileau a dit: Ou que d'un bonnet vert le salutaire affront Sur quoi Boileau a lui-même fait cette remarque: « Du temps que cette satire fut faite, un débiteur insolvable pouvait sortir de prison en faisant cession, c'est-à-dire en souffrant qu'on lui mît en pleine rue un bonnet vert sur le Aucun ne leur ouvrit sa bourse. Et le sort principal, et les gros intérêts, Et le créancier à la porte Dès devant la pointe du jour, N'occupaieni le trio qu'à chercher maint détour Le buisson accrochait les passants à tous coups. Que certains gouffres nous ont prises. Le plongeon sous les eaux s'en allait les chercher. Je connais maint detteur (1), qui n'est ni souris-chauve, Ni buisson, ni canard, ni dans tel cas tombé, Mais simple grand seigneur, qui tous les jours se sauve Par un escalier dérobé. front. Cette coutume, si peu conforme à nos mœurs, d'échapper au châtiment par la honte, nous était venue d'Italie dans le seizième siècle. Voyez Pasquier, Recherches, liv. IV, ch. x. (WALCK.) (1) Vieux mot, remplacé par débiteur. VIII. La Querelle des Chiens et des Chats, et celle des La Discorde a toujours régné dans l'univers; (1) Guill. Haudent, trois cent soixante et six Apologues d'Ésope, etc., traduils nouvellement en rithme françoyse. 1547, in-16, fab. LXI; réimprimée dans Robert, Fables inédites, p. cLxxxIx de l'introduction, De la Guerre des Chiens, des Chats et des Souris. Cette fable n'est pas dans Ésope, et paraît être de l'invention de Guill. Haudent. Notre monde en fournit mille exemples divers : Vous serez étonnés de voir qu'à tous moments Le maître ayant réglé leurs emplois, leurs repas, Enfin elle cessa. Quelque plat de potage, Représenter un tel outrage. J'ai vu des chroniqueurs attribuer le cas Mit en combustion la salle et la cuisine: Chacun se déclara pour son chat, pour son chien. Leur avocat disait qu'il fallait bel et bien Recourir aux arrêts. En vain ils les cherchèrent Autre procès nouveau. Le peuple souriquois (*) (1) L'eau, l'air, la terre, et le feu. (2) Altercation. (3) C'est là, dit Ch. Nodier, un des plus ingénieux néologismes de La Fontaine. Et d'ailleurs en voulant à toute cette race, Les guetta, les prit, fit main basse. Le maître du logis ne s'en trouva que mieux. J'en reviens à mon dire. On ne voit sous les cieux Qui n'ait son opposé c'est la loi de nature. On en vient, sur un rien, plus des trois quarts du temps. Humains, il vous faudrait encore à soixante ans Renvoyer chez les barbacoles (1). (1) Coste explique ce mot de la manière suivante: «Terme plaisantant, burlesque emprunté des Italiens, qui l'ont inventé pour désigner un maître d'école, qui, pour se rendre plus vénérable à ses écoliers, porte une longue barbe, barbam colit.» Cette explication a été répétée par tous les commentateurs de notre poëte. On peut douter qu'elle soit exacte. (WALCK.) IX. Le Loup et le Renard ('. D'où vient que personne en la vie Certain renard voulut, dit-on, (1) Le duc de Bourgogne, Thèmes (manuscrits de la bibliothèque nat no 8511, fol. 30), imprimé dans Robert, Fables inédites, t. II, p. 340. Vulpes pænitens. (2) Qui fit, Mœcenas, ut nemo quam sibi sortem Seu satio dederit, seu fors objecerit illa Contentus vivat, laudet diversa sequentes. (HORACE.) |