Ils sont trop verts, dit-il, et bon pour des goujats. Fit-il pas mieux que de se plaindre? Dans une ménagerie De volatiles remplie Vivaient le cygne et l'oison: Celui-là destiné pour les regards au maître; Et vit bien qu'il s'était mépris. Quoi! je mettrais, dit-il, un tel chanteur en soupe! Ainsi, dans les dangers qui nous suivent en croupe, (1) Esop., 288, 74, Cycnus. (2) Un commentateur prétend que galeries dans ce vers est un dérivé du vieux verbe galer qui signifie se réjouir, prendre ses ébats. (3) Plusieurs éditions modernes portent près de. Nous donnons ici le texte des éditions surveillées par La Fontaine lui-même. (4) « Ce n'est pas que tous les cygnes chantent en mourant. Bien que cette tradition soit fort ancienne, on en peut douter sans impiété, aussi bien que de plusieurs autres articles de la croyance des poëtes. D LA FONTAINE. Fragments du Songe de l'aux. Après mille ans et plus de guerre déclarée, Ni d'autre part pour les carnages: Ils ne pouvaient jouir, qu'en tremblant, de leurs biens. La paix se conclut donc: on donne des otages: Les loups, leurs louveteaux ; et les brebis, leurs chiens. L'échange en étant fait aux formes ordinaires (2), Et réglé par des commissaires, Au bout de quelque temps que messieurs les louvats (3) Ils vous prennent le temps que dans la bergerie Étranglent la moitié des agneaux les plus gras, Les chiens, qui, sur leur foi, reposaient sûrement, Cela fut sitôt fait qu'à peine ils le sentirent. Nous pouvons conclure de là Qu'il faut faire aux méchants guerre continuelle. J'en conviens: mais de quoi sert-elle (1) Esop., 211, 241, Lupi et Oves. (2) Dans les formes. Aux formes est pour ès formes, style de pratique. (3) Louvat, lovel, louvel, loviau, louveteau, petit loup. XIV. — Le Lion devenu vieux (1). Le lion, terreur des forêts, Chargé d'ans, et pleurant son antique prouesse, Devenus forts par sa faiblesse, Le cheval s'approchant lui donne un coup de pied; Il attend son destin, sans faire aucunes plaintes; (1) Phædr., I, 21, Leo senex, Aper, Taurus, et Asinus. (1) Esop., 260, 152, Luscinia et Hirundo. Babrius, dans les Fabula Æsopica, édit. Lipsie, 1810, in-8°, p. CLXXXIX, Andóv xai XeλSÓV. Voici la fable de Babrius, traduite par M. Géruzez: « L'hirondelle s'envola loin des champs, et trouva au fond des forêts désertes le rossignol harmonieux qui ne cessait de déplorer la mort de son cher Itys, ravi avant le temps. Salut! sœur bien-aimée, dit l'hirondelle; je te vois aujourd'hui pour la première fois depuis la Thrace. Viens donc aux champs, près de la demeure des hommes; tu auras ta part de nos tentes et de notre amitié; tes chants se feront entendre aux laboureurs et non plus aux animaux sauvages. - Laisse-moi, répondit le rossignol, demeurer parmi ces roches inhabitées; tout séjour, tout commerce avec les hommes rallumerait le souenir de mes anciens malheurs. » Dans un bois où chantait la pauvre Philomèle. Ne quitterez-vous point ce séjour solitaire? Tout au plus à quelque rustique ! Le désert est-il fait pour des talents si beaux? Sans cesse il vous souvient que Térée autrefois, Exerça sa fureur sur vos divins appas. Et c'est le souvenir d'un si cruel outrage Il m'en souvient bien davantage (2). (1) Depuis le temps que vous étiez en Thrace, traduction de l'expression Opáxny de l'auteur grec. (2) Dans une promenade, un jour, Bernardin de Saint-Pierre avait récité à Rousseau les beaux vers de La Fontaine sur Philomèle et Progné; Rousseau fond tout à coup en larmes il apercevait une sorte de ressemblance entre sa propre destinée, glorieuse et infortunée, et celle de cet oiseau qui enchante les bois, où il se cache et fuit les hommes, dont la vue lui rappelle ses maux. D VILLEMAIN. Cours de Littérature française, 3e partie. Tableau du 18. siècle. Paris, 1829, in-8°, page 265. Je ne suis pas de ceux qui disent: Ce n'est rien, Je dis que c'est beaucoup; et ce sexe vaut bien D'une femme qui dans les flots Avait fini ses jours par un sort déplorable. Il arriva que sur les bords Du fleuve auteur de sa disgrâce, S'ils n'avaient de sa femme aperçu nulle trace: Suivez le fil de la rivière. Un autre repartit: Non, ne le suivez pas ; Rebroussez plutôt en arrière. Quelle que soit la pente et l'inclination L'esprit de contradiction L'aura fait flotter d'autre sorte. Cet homme se raillait assez hors de saison. Quant à l'humeur contredisante, (1) Verdizotti, 54, p. 135, édit. 1661, d'un Marito che cercava al contrario del fiume la Moglie affogata. Faern., I, 13, Uxor submersa et Vir. Pogge, Facetia, 1797, t. I, p. 69, et t. II, p. 54-60. La pièce ci-dessus est plutôt une épigramme qu'une fable. Le sujet en a été, du reste, généralement jugé comme assez mal choisi. Cette plaisanterie à propos d'un cadavre pouvait plaire tout au plus au goût grossier du moyen âge. |