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"blir de nouvelles loix, il n'y en avoit déjas que trop, mais pour examiner & abolircelles qui fe trouveroient contraires au bien de la République. Il n'encouroit pas la peine capitale portée par ces loix, parce qu'il n'en demandoit pas actuellement l'abolition, mais qu'on nommât des Commiffaires pour en faire l'examen. Il laissoit feulement entrevoir la néceffité qu'il y avoit d'abolir une loi qui faifoit gémir les plus zélés citoyens, & les réduifoit à l'alterna--tive, ou de fe perdre eux-mêmes par unconfeil fidéle & courageux, ou de laiffer périr leur patrie par un filence timide & prévaricateur.

Il paroît que ces remontrances n'eurent: pas le fuccès qu'elles méritoient, puisque dans l'Olynthienne fuivante, qui dans l'ar rangement ordinaire eft la premiere, l'Orateur fe vit obligé de revenir encore à la. charge fur la diffipation des deniers militaires. Olynthe, vivement preffée par Philippe, & jufqu'alors mal fecourue par la milice vénale d'Athénes, demanda par une troifieme ambaffade, des troupes compo~ fées, non de mercénaires & d'étrangers comme auparavant, mais de vrais Athéniens, animés d'une fincere ardeur pour l'intérêt & de leur propre gloire, & de la caufe commune. Sur les vives inftances de Démofthéne, les Athéniens envoyerent. une feconde fois Charès avec un fecours de dix-fept galéres, de deux mille hommes de pied, & de trois cens Cavaliers,

tous citoyens d'Athénes, tels qu'Olynthe

P. 450-451

les defiroit. Philippe l'année fuivante, s'empara AN. M. 3656d'Olynthe. Le fecours & les efforts d'A- Av. J.C.348. Diod. L. 15 thénes ne purent la défendre contre fes ennemis doineftiques. Car deux de fes citoyens, Euthycrate & Lafthéne, qui étoient les premiers de la ville, & actuellement en Charge, la trahirent. Ainfi il entra par la breche que fes largeffes avoient faite. Il faccage cette malheureufe ville, enchaîne une partie des habitans, vend l'autre, & ne diftingue les traîtres que par le fouverain mépris qu'il leur témoigne. Philippe aimoit la trahison & n'aimoit pas les traîtres. Et quelle foi peut-on avoir à des gens qui en manquent pour leur patrie ? Tout, jufqu'au fimple foldat de l'armée Macédonienne, fit honte à Eutycrate & à Lasthéne de leur perfidie. Ils en demande- Plut. in rent juftice à Philippe, qui les paya de Apoph. p. cette ironie plus fanglante que l'injure même: Ne prenez pas garde à ce que difent des hommes groffiers, qui nomment chaque chofs par fon nom.

178.

Diod. lib.

La prife de cette ville lui caufa une grande joie. C'étoit une des places les plus importantes pour lui, & dont les forces pouvoient le plus balancer fa puiffance. Elle avoit, quelques années auparavant, réfifté pendant affez long-temps aux forces 15. p. 34 de la Macédoine & de Lacédémone, jointes enfemble: & Philippè l'avoit enlevée prefque fans aucune résistance ou du

AN.M. 3657.

moins fans beaucoup de perte.

Il donna des fpectacles, & fit célébrer des Jeux publics, avec une magnificence extraordinaire. Il les accompagna de repas & de feftins, où il fe rendoit populaire & combloit tous les conviés de prefens & de marques d'amitié.

S. IV.

Philippe fe déclare pour ceux de Thebes com tre les Phocéens, & commence ainfi à prendre part à la guerre facrée. Il endort les Athéniens par une fauffe paix & de fauffes promeffes, malgré les remontrances de Démofthene. Il s'empare des Thermopy

les

réduit les Phocéens, & termine la guerre facrée. Il eft admis dans le Confeit Amphictyonique.

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LES Thébains, hors d'état de terminer Av.J.C.347• par eux-mêmes la guerre qu'ils foutenoient depuis long-temps contre les Phocéens, eurent recours à Philippe. Jufqu'ici, comme nous l'avons déja remarqué, il avoit gardé une espece de neutralité par rapport à la guerre facrée, & il fembloit attendre pour fe déclarer, que les deux partis fe fuffent mutuellement affoiblis par la longueur d'une guerre qui les épuifoit également. Les Thébains pour lors avoient beaucoup rabattu de cette fierté & de ces ambitieufes prétentions que leur avoient inspiré les victoires d'Epaminondas. Auffi-tôt done qu'ils rechercherent l'alliance de Philippe,.

ce Prince résolut d'époufer la querelle de cette République contre les Phocéens. il n'avoit point perdu de vue le projet qu'il avoit formé de fe ménager une entrée dans la Grece pour y dominer. Pour faire réuffir fon deffein, il devoit fe déclarer pour l'un des deux partis qui partageoient alors toute la Grece, ou pour celui des Thébains, ou pour celui des Athéniens & des Spartiates. Il n'étoit pas affez infenfé pour fe flatter que ce dernier parti voulût contribuer à l'introduire dans la Grece. Il ne lui reftoit donc qu'à embraffer le parti des Thébains qui venoient d'eux-mêmes s'offrir à lui, & à qui fa puiffance devenoit néceffaire pour fe foutenir dans la décadence de leurs affaires. Il n'héfita donç point à fe déclarer pour eux. Mais pour donner une couleur avantageuse à fes armes outre la reconnoiffance dont il affectoit de fe piquer pour Thebes où il avoit été élevé, il prétendoit fe faire honneur de fon zele pour le Dieu outragé, & étoit bien aile de fe faire la réputation d'un Prince religieux, qui embraffoit vivement, les intérêts du Dieu & du temple de Delphes, afin de s'attirer par là Teftime & Pamitié des Grecs. Les Politiques font ufage de tout, & cherchent à couvrir les entreprises les plus injuftes du voile de la probité, & quelquefois même de la religion. quoique fouvent, dans le fond ils ne faffent aucun cas ni de l'une ni de l'autre.

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Demofth.

Philippe n'avoit rien plus à cœur que

orat. de falf. de s'affurer des Termopyles qui lui ou legat. vroient un paffage dans la Grece, de s'approprier tout l'honneur de la guerre facrée, de paroître y avoir tranché en maître, & de préfider enfin aux Jeux Pythiques. Il vouloit porter du fecours aux Thé-. bains, & par leur moyen fe rendre maîtrede la Phocide : mais, pour mettre en exécution cette double vue, il falloit en dérober la connoiffance aux Athéniens qui étoient actuellement déclarés contreThebes, & qui depuis long-temps étoient: alliés des Phocéens. Il s'agiffoit donc de leur faire prendre le change, en leur montrant un autre objet : & c'eft à quoi la po litique de Philippe réuffit merveilleufe

iment.

Les Athéniens, qui commençoient à fe laffer d'une guerre qui leur étoit fort oné reufe & peu utile, avoient chargé Ctéfi-: phon & Phrynon de fonder les intentions: de Philippe, & de le preffentir fur la paix.. Ils rapporterent que Philippe ne s'en éloignoit pas, & témoignoit même beaucoup de bonne volonté pour la République. Sur quoi l'on réfolut d'envoyer une ambaffade folemnelle, pour s'inftruire de la vérité plus à fond, & pour avoir les derniers éclairciffemens que demandoit une femblable négociation. Efchine & Démofthéne furent du nombre des dix Ambaffadeurs, qui en ramenerent trois de Philippe, Antipater, Parménion, Eurylochus. Tous dix

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