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Les Auteurs du fait, dans la Parabole, font des êtres raisonnables, dans la bouche defquels on met une fentence qui renferme une moralité. Les Auteurs du fait, dans l'apologue, font des animaux, des êtres purement intellectuels, des êtres purement matériels, comme l'agneau & le loup, le finge & le renard, l'imagination & le bonheur, l'eau, le feu, le chêne, le roseau, &c. Les Auteurs du fait, dans la fable mixte, font ceux qu'on peut faire agir dans les deux efpeces différentes.

La morálité eft une courte explication de l'allégorie que la fable renferme, & une application de cette allégorie à nos mœurs. La Parabole n'a pas, pour l'ordinaire, de moralité féparée du fait. Elle y eft peu néceffaire pour l'intelligence de la fable, puifque la Parabole renferme prefque toujours une sentence relative aux mœurs & qui s'explique affez d'elle-même. Voyez MoRALITÉ.

On appelle les Paraboles des fables raifonnables; les apologues des fables morales; & la troifieme efpece, qui tient des deux premieres, fe nomme, comme nous l'avons dit, des fables mixtes ou mêlées.

Voici un exemple d'une Parabole, c'eftà-dire, d'une fable raisonnable.

Durapport d'un troupeau, dont il vivoit fans foins, La Fon Se contenta long-tems un voisin d'Amphitrite: taine, Si fa fortune étoit petite,

Elle étoit sûre tout au moins.

A la fin, des thréfors déchargés fur la plage
D. de Litt, T. III, Part. I.

B

Le tenterent fi bien, qu'il vendit fon troupeau;
Trafiqua de l'argent; le mit entier fur l'eau.
Cet argent périt par naufrage.

Son maître fut réduit à garder les brebis ;
Non plus berger en chef, comme il étoit jadis,
Quand fes propres moutons paiffoient fur le ri-

vage.

Celui qui s'étoit vu Coridon ou Tircis,

Fut Pierrot, & rien davantage.

Au bout de quelque tems, il fit quelque profit; Racheta des bêtes à laine;

Et, comme un jour les Vents, retenant leur haleine,

Laifoient paisiblement aborder les vaisseaux : Yous voulez de l'argent, ô mesdames les Eaux ! Dit-il; adreffez-vous, je vous prie, à quelqu'autre ; Ma foi! vous n'aurez pas le nôtre.

De toutes les efpeces de fables, c'est la Parabole qui s'écarte le moins de la vraifemblance; auffi eft-elle bien plus capable de faire fur les efprits toute l'impreffion qu'on fe propofe dans ces fortes d'ouvrages; mais je crois qu'elle exige auffi, de la part du Poëte, plus d'art & plus d'adreffe que les autres especes de fables, pour la rendre intéreffante. Comme le fait de la Parabole n'offre rien à l'efprit d'extraordinaire & de furprenant, il faut que le Poëte, par les charmes de fa narration, fupplée au défaut de l'efpece de merveilleux, dont les autres fables font fufceptibles; qu'il force l'attention par le choix judicieux des circonftances, & qu'il captive le jugement par l'enchaînement du fait avec la moralité. On

trouvera les régles de détail, au mot FA

BLE.

PARADE: efpece de farce qu'il ne faut pourtant pas confondre avec elle, originairement préparée pour amufer le peuple, & qui fouvent fait rire, pour un moment, la meilleure compagnie, dit un Encyclopédifte.

Les perfonnages des Parades d'aujour- Dia. en d'hui, continue le même Auteur, font le cyclop. bon-homme Caffandre, pere, tuteur, ou amant furanné d'Isabelle : le vrai caractere de la charmante Ifabelle eft d'être également foible, fauffe & précieufe; celui du beau Léandre fon amant, eft d'allier le ton grivois d'un foldat, à la fatuité d'un petitmaître. Un Pierrot, quelquefois un Arlequin, & un moucheur de chandelles, achevent de remplir tous les rôles de la Parade, dont le vrai ton eft toujours le plus bas comique.

La Parade eft ancienne en France: elle eft née des moralités, des myfteres & des facéties que les éleves de la bazoche, les confreres de la paffion, & la troupe du prince des fots, jouoient dans les carrefours, dans les marchés, & fouvent même dans les cérémonies les plus auguftes, telles que les entrées & les couronnemens..

...

La comédie ayant enfin reçu des loix, de la décence & du goût, la Parade cependant ne fut pas entièrement anéantie: elle ne pouvoit l'être, parce qu'elle porte un caractere de vérité, & qu'elle peint vivement les mœurs du peuple qui s'en amufe; elle fut feulement abandonnée à la populace, & reléguée dans les foires, & fur le

Année

littér. $753.

théatre des charlatans qui jouent souvent des fcènes bouffones, pour attirer un plus grand nombre d'acheteurs.

Quelques Auteurs célébres, & plufieurs perfonnes d'efprit, s'amufent encore quelquefois à compofer de petites piéces dans ce même goût. A force d'imagination & de gaieté, elles faififfent ce ton ridicule : c'eft en philofophes qu'elles ont travaillé à connoître les mœurs & la tournure de l'efprit du peuple; c'est avec vivacité qu'elles le peignent. Malgré le ton qu'il faut toujours affecter dans ces Parades, l'invention y décele fouvent les talens de l'Auteur: une fine plaifanterie se fait fentir au milieu des équivoques & des quolibets; & les graces parent toujours de quelques fleurs le langage de Thalie, & le ridicule déguisement fous lequel elles s'amufent à l'envelopper.

Il ne faut pas confondre la Parade avec les farces: celles-ci font, à la vérité, un affemblage de bouffonneries, d'idées folles & bizarres, qui font rire le peuple, & quelquefois même les honnêtes gens. Par exemple, l'acte, où le Bourgeois gentilhomme eft reçu Mamamouchi, eft une véritable farce; nous en avons mille de cette efpece, qui ne portent aucune atteinte aux mœurs. La Parade, au contraire, ne vit guères que d'équivoques poliçonnes. On appelle proprement Parades ces fcènes ridicules, que, pour faire montre ou parade de leurs talens, représentent au dehors, & gratis, les baladins de nos foires, les danfeurs de corde &c. Ils fe permettent toutes fortes d'indé cences, en geftes & en paroles, pour amu

fer le peuple, & pour l'engager à entrer dans le jeu.

Des gens d'efprit ont faifi le mauvais langage, la fauffe prononciation, le style ridicule de ces acteurs forains, & ont composé des Parades, où, à travers ce jargon, on apperçoit des traits fins contre les ridicules & la critique des mœurs.

On fçait à quoi s'en tenir fur ces fortes de pièces: on les donne, on les entend pour ce qu'elles font, c'eft-à-dire, pour un délaffement des bonnes chofes, qui ne fert qu'à les faire aimer de plus en plus; pour un abus de l'efprit, où l'on ne s'attache qu'à des quolibets qui'faffent rire. Nous ne donnerons point de régles pour ces fortes de drames qui n'en ont d'autre que la liberté & l'incorrection. Il n'appartient qu'à des Auteurs qui ont beaucoup de talent, de fe permettre de pareils délaffemens pour amufer des fociétés domeftiques, & pour fe délaffer eux-mêmes de leurs travaux férieux. Nous exhortons les jeunes gens, qui ont des difpofitions pour le théatre, de ne jamais commencer par s'exercer dans un pareil genre. Dans tous les arts, il faut d'abord commencer par fe former le goût, avant que de travailler dans le grotefque & le bizarre.

PARAGRAPHE, mot dérivé du grec, qui fignifie fection ou divifion de quelque partie d'un ouvrage. Il y a des Auteurs qui divifent leurs ouvrages en livres, les livres en chapitres, les chapitres en Paragraphes, Les titres des Inftitutes & Loix du Code & du Digefte, qui font un peu longues, font

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