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C'est dans cette année que Henri VIII se soustrait à la communion romaine, et se déclare chef de l'Église anglicane. Cette révo lution se fit sans le moindre trouble. Il n'en était pas de même en Allemagne. La religion y faisait répandre du sang dans la Westphalie.

Les sacramentaires sont d'abord les plus forts à Munster, et en chassent l'évêque Waldeck; les anabaptistes succèdent aux sacramentaires, et s'emparent de la ville. Cette secte s'étendait alors dans la Frise et dans la Hollande. Un tailleur de Leyde, nommé Jean, va au secours de ses frères avec une troupe de prophètes et d'assassins; il se fait proclamer roi et couronner solennellement à Munster, le 24 juin.

L'évêque Waldeck assiège la ville, aidé des troupes de Cologne et de Clèves: les anabaptistes le comparent à Holoferne, et se croient le peuple de Dieu. Une femme veut imiter Judith, et sort de la ville dans la même intention; mais au lieu de rentrer dans sa Béthulie avec la tête de l'évêque, elle est pendue dans le camp.

(1535) Charles en Espagne se mêlait peu alors des affaires du corps germanique, qui n'était pour lui qu'une source continuelle d'inquiétudes sans aucun avantage; il cherche la gloire d'un autre côté. Trop peu fort en Allemagne pour aller porter la guerre à, Soliman, it veut se venger des Turcs sur le fameux amiral Cheredin-Barberousse, qui

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venait de s'emparer de Tunis et d'en chasser le roi Mulei-Assem. L'Africain détrôné était venu lui proposer de se rendre son tributaire. Il passe en Afrique, au mois d'avril, avec environ vingt-cinq mille hommes, deux cents vaisseaux de transport et cent quinze galères. Le pape Paul III lui avait accordé le dixième des revenus ecclésiastiques dans tous les états de la maison d'Autriche, et c'était beaucoup. Il avait joint neuf galères à la flotte espagnole. Charles en personne va combattre l'armée de Cheredin, très - supérieure à la sienne en nombre, mais mal disciplinée.

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Plusieurs historiens rapportent que Charles, avant la bataille, dit à ses généraux: Les nèfles mûrissent avec la paille: mais la paille de notre lenteur fait pourrir et non pas mûrir les nèfles de la valeur de nos ,,soldats." Les princes ne s'expriment point ainsi. Il faut les faire parler dignement, ou plutôt il ne faut jamais leur faire dire ce qu'ils n'ont point dit. Presque toutes les harangues sont des fictions mêlées à l'histoire.

Charles remporte une victoire complète, et rétablit Mulei-Assem qui lui cède la Goulette avec dix milles d'étendue à la ronde, et se déclare lui et ses successeurs vassal des rois d'Espagne, se soumettant à payer un tribut de vingt mille écus tous les ans.

Charles retourne vainqueur en Sicile et à Naples, menant avec lui tous les esclaves chrétiens qu'il a délivrés. Il leur donne à

tous libéralement de quoi retourner dans leur patrie. Ce furent autant de bouches qui publierent partout ses louanges; jamais il ne jouit d'un si beau triomphe.

Dans ce haut degré de gloire, ayant repoussé Soliman, donné un roi à Tunis, réduit François Ier à n'oser paraître en Italie, il presse Paul III d'assembler un concile. Les plaies faites à l'Eglise romaine augmentaient tous les jours.

Calvin commençait à dominer dans Genève: la secte à laquelle il eut le crédit de donner son nom, se répandait en France; et il était à craindre pour l'Église romaine qu'il ne lui restât que les états de la maison d'Autriche et la Pologne.

Cependant le duc de Milan, François Sforze, meurt sans enfants. Charles - Quint s'empare du duché, comme d'un fief qui lui est dévolu. Sa puissance, ses richesses en augmentent, ses volontés sont des lois dans toute l'Italie; il y est bien plus maître qu'en Allemagne.

Il célèbre dans Naples le mariage de sa fille naturelle Marguerite avec Alexandre de Médicis, le crée duc de Toscane; ces cérémonies se font au milieu des plus brillantes fêtes, qui augmentent encore l'affection des peuples.

(1536) François Ier ne perd point de vue le Milanais, ce tombeau des Français. Il en demande l'investiture au moins pour son second fils Henri. L'empereur ne donne que

des paroles vagues. Il pouvait refuser net

tement.

La maison de Savoie, long-temps attachée à la maison de France, ne l'était plus; tout était à l'empereur; il n'y a point de prince dans l'Europe qui n'ait des prétentions à la charge de ses voisins; le roi de France en avait sur le comté de Nice et sur le marquisat de Saluces. Le roi y envoie une armée, qui s'empare de presque tous les états du duc de Savoie dès qu'elle se montre: ils n'étaient pas alors ce qu'ils sont aujourd'hui.

Le vrai moyen pour avoir et pour garder le Milanais eût été de gårder le Piémont, de le fortifier. La France, maîtresse des Alpes, l'eût été tôt ou tard de la Lom bardie.

Le duc de Savoie va à Naples implorer la protection de l'empereur. Ce prince si puissant n'avait point alors une garde armée en Italie. Ce n'était alors l'usage d'en avoir que pour le besoin, présent; mais il met d'abord les Vénitiens dans son parti; il y met jusqu'aux Suisses, qui rappellent leurs troupes de l'armée française; il augmente bientôt ses forces; il va à Rome en grand appareil. Il y entre en triomphe, mais non pas en maître, ainsi qu'il eût pu y entrer auparavant. Il va au consistoire, et y prend place sur un siège plus bas que celui du Saint-Père. On est étonné d'y entendre un empereur romain victorieux plaider sa cause devant le pape; il y prononce une harangue

contre François ler, comme Cicéron en prononçait contre Antoine. Mais, ce que Cicéron ne faisait pas, il propose de se battre en duel avec le roi de France., Il y avait dans tout cela un mélange des mœurs de l'antiquité avec l'esprit romanesque. Après avoir parlé du duel, il parle du concile.

Le pape Paul III publie la bulle de con

vocation.

Le roi de France avait envoyé assez de troupes pour s'emparer des états du duc de Savoie, alors presque sans défense, mais non assez pour resister à l'armée formidable que l'empereur eut bientôt, et qu'il conduisait avec une foule de grands hommes formés par des victoires en Italie, en Hongrie, en Flandre, en Afrique..

Charles reprend tout le Piémont, excepté Turin. Il entre en Provence avec une armée de cinquante mille hommes. Une flotte de cent quarante vaisseaux, commandée par Doria, borde les côtes Toute la Provence, excepté Marseille, est conquise et ravagée; il pouvait alors faire valoir les anciens droits de l'Empire sur la Provence, sur le Dauphiné, sur l'ancien royaume d'Arles. Il presse la France, à l'autre bout en Picardie: par. une armée d'Allemands qui, sous le comte de Reuss, prend Guise, et s'avance encore plus loin.

François Ier au milieu de ces désastres, perd son dauphin François, qui meurt à Lyon d'une pleurésie. Vingt auteurs préten

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