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QUATRIÈME PÉRIODE. — Période græco-alexandrine.

(336-146 avant J.-C).

CHAPITRE PREMIER.

COUP D'OEIL GÉNÉRAL SUR CETTE PÉRIODE.

La diffusion de la poésie et la protection qu'elle reçoit des Ptolémées

n'empêchent pas sa décadence.

Homère est l'idole de cette époque.

— Aristarque. Canon des Grammairiens d'Alexandrie.
de Rhodes et son poème des Argonautes.
phron de Chalcis.

Appollonius

Art dramatique. - Lyco

L'histoire ne nous offre peut-être aucun siècle où dominât un désir de connaissances aussi général, où les gens de lettres et les artistes fussent aussi honorés qu'ils l'étaient alors parmi les Grecs. Les rois bons ou mauvais, les hommes vertueux ou dissolus, les gens riches, les villes malgré leur décadence, recherchaient les arts avec empressement, soit comme ornement de la vie, soit comme instrument de volupté et d'oubli.

Nous n'avons plus à nous occuper seulement d'Athènes; il faut porter notre attention sur cette foule d'Etats qui se formèrent sur les débris de l'empire macédonien.

La protection généreuse des Ptolémées appela à leur cour tout ce qui avait une réputation méritée; et Alexandrie devint alors le centre des relations qui se nouèrent entre les nouveaux Etats, entre l'Orient et l'Occident. Les rois de Pergame ne favorisèrent pas moins les lettres, et rivalisèrent avec les Ptolémées pour acquérir, à un prix élevé, les tableaux, les livres, les écri

vains; et comme les Ptolémées empêchaient l'exportation du papyrus, on inventa à Pergame le papier de peau, qui reçut le nom de parchemin.

Mais s'il fut un temps pour prouver avec évidence que la faveur des princes ne suffit pas à produire des merveilles, ce fut celui dont nous parlons; car il ne vit naître que des fruits avortés, des travaux d'école, des efforts d'érudition; rien qui indique le génie et la spontanéité. De la création qui avait cessé, on passa aux analyses et aux préceptes; on se mit à faire beaucoup, faute de pouvoir faire bien on visa au style sans défaut; mais il resta sans beauté. On sut justifier par l'exemple et par l'autorité chaque pas qu'on faisait, au lieu de se faire pardonner des incorrections par la vigueur de la pensée.

La liberté avait péri en Grèce; et, dans les lieux mêmes où les formes s'en étaient conservées, l'esprit n'était plus inspiré par le mouvement de la vie publique, par les grands intérêts de la nationalité, par les luttes magnanimes contre les envahisseurs de la patrie. La comédie était enchaînée, l'éloquence réduite au silence ou aux fleurs de rhétorique, la poésie appelée à endormir les sujets et à flatter les rois. D'un côté, la corruption allait augmentant, sans se voiler même de formes élégantes; et Athènes, Tarente, Milet, Antioche, étaient le théâtre d'excès sur lesquels il nous faut tirer un voile: il en était de même des villes achéennes, et pis encore des capitales de royaumes. D'un autre côté, la guerre était continuelle et acharnée; chaque nouvel avénement au pouvoir procédait d'un assassinat nouveau; les parricides et les incestes étaient pour ainsi dire des événements journaliers.

Le zèle même des rois d'Egypte et de Pergame à ramasser partout des livres, n'était pas tant l'effet d'un désir éclairé de faciliter les moyens d'étude, qu'un luxe et une rivalité d'amour propre de leur part. Les auteurs n'étaient pas classés dans leur bibliothèque d'après le mérite de l'ouvrage, ou en raison de la matière traitée, mais d'après leur rareté ; et les livres venus par mer étaient placés dans une armoire à part. Cette manie était poussée au point que la cupidité faisait contrefaire beaucoup de manuscrits, et que l'on ne pouvait plus reconnaître ceux qui

étaient authentiques : puis les gens de lettres, se proposant pour but dans leurs travaux d'obtenir un emploi dans le musée ou dans la bibliothèque, manquaient de naturel, de vigueur, de liberté, d'inspiration. Le nombre des critiques augmenta, comme il arrive quand il y a disette d'invention: et ces gens là savaient tous rendre compte de la moindre tournure de phrase, mieux que n'eussent pu le faire Thucydide et Aristophane: mais le raisonnement perdait son énergie, l'imagination s'égarait étrangement, c'était un grand mérite que d'accumuler des autorités, souvent encore en les falsifiant.

Homère devint l'idole de cette époque, où il fut plutôt adoré que révéré; et l'on se mit à exercer sur ses ouvrages tant d'érudition, que le génie en était étouffé. Démétrius de Phalère composa plusieurs traités sur l'Iliade et l'Odyssée ; Zénodote entreprit d'en fixer la meilleure leçon, d'après les divers exemplaires de la bibliothèque de Ptolémée; puis vinrent les commentaires sur les commentateurs; Ptolémée Evergète lui-même écrivit une dissertation critique sur l'Iliade, et Ptolémée Philopator érigea un temple au chantre d'Achille.

Le grand poète ne manquait pas toutefois de détracteurs; leplus fameux dans le nombre fut Zoïle d'Amphipolis, surnommé le fléau d'Homère. Oser supposer des défauts au chantre d'Achille parut un sacrilége; le vulgaire érudit inventa cent fables sur le compte de Zoïle; et Ptolémée Philadelphe le punit, ainsi qu'Atale 1er punit plus tard Daphidas, coupable du même délit. Excellent moyen de réfutation.

Parmi les commentateurs d'Homère, Aristarque de Samothrace se plaça au premier rang. Il s'appliqua à la correction du texte des deux poèmes, avec le respect qu'on doit aux œuvres des grands hommes; élimina beaucoup de vers interpolés, indiqua des doutes, et n'ajouta du sien que ce qui était strictement nécessaire; encore prit-il soin de le noter de manière à ce qu'on ne pût s'y méprendre. On comptait, tant à Rome qu'à Alexandrie, jusqu'à quarante professeurs ou grammairiens sortis de son école.

Les grammairiens et les rhéteurs, qui avaient besoin de confirmer les préceptes par l'autorité des exemples, n'avaient pas

encore songé à la nécessité de faire un choix parmi les écrivains, pour n'imiter que les modèles jugés parfaits. Ils tiraient les preuves de tous indistinctivement, sans faire aucune différence du degré de considération mérité par chacun d'eux : aussi ne pouvait-on imaginer au hasard une locution vicieuse, à l'appui de laquelle on n'eût à citer un auteur connu. Si tout exemple devait faire règle, il était facile de prévoir que les mauvais écrivains auraient fini par l'emporter sur les bons, par cela précisément qu'ils étaient plus nombreux. Il était donc nécessaire d'opposer une digue à la corruption dont la langue était menacée. Aristophane de Bysance entreprit de choisir avec soin les écrivains dont l'autorité était valable parmi la foule de ceux dont il n'y avait pas à tenir compte; et il établit plusieurs catégories, auxquelles Aristarque donna plus tard la dernière main, La classe principale, qui contenait les modèles en chaque genre, reçut le nom de canon.

Voici, pour les poètes, le canon des grammairiens d'Alexandrie :

Poètes épiques: Homère, Hésiode, Pisandre, Panyasis, An-timiaque.

Poètes ïambiques: Archiloque, Simonide, Hipponax.

Poètes lyriques: Alcman, Alcée, Sapho, Stésichore, Pindare, Bacchylide, Ibycus, Anacréon, Simonide.

Poètes élégiaques: Callinus, Mimnerme, Philetas, Callimaque.

Poètes tragiques: Eschyle, Sophocle, Euripide, Ion, Achéus, Agathon.

Poètes comiques; comédie ancienne : Epicharme, Cratinus, Eupolis, Aristophane, Phérécrate, Platon.

Comédie moyenne : Antiphane, Alexis.

Comédie nouvelle : Ménandre, Pilippide, Diphilus, Philémon, Apollodore.

Si ce canon contribua à la pureté de la langue, la considération attachée aux productions déclarées classiques devint funeste à celles qui furent exclues du premier rang. Elles se trouvèrent dès lors moins recherchées, et les exemplaires en devinrent plus rares. Il en est cependant plusieurs qui pou

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