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figure que celles de l'eau, elles peuvent être plus ou moins aisées à diviser; et voilà tout ce que je trouve à répondre à cet article.

Le troisième est touchant la Dioptrique. Je vous remercie de ce qu'il vous plaît en corriger les fautes, et si vous prenez la peine de les marquer toutes en votre exemplaire, afin de nous l'envoyer en cas que l'on en fasse une seconde impression, vous m'obligerez: car en ce qui est de la langue et de l'orthographe je ne désire rien tant que de suivre l'usage; mais il y a si long-temps que je suis hors de France, que je l'ignore en beaucoup de choses.

Pour les questions que vous dites, à savoir que je pouvois ajouter en mes essais quelle différence de diaphanéité il y a entre les corps durs et les liquides, et pourquoi le fen rougissant un corps diaphane le rend opaque et semblable, ce sont questions de physique qui dépendent entièrement de ce que j'ai mis en mon Monde, et dont je n'ai point voulu parler en ces essais. Je nomme les parties solides de l'air toutes celles qui le composent, pour les distinguer de celles de la matière subtile qui est dans ses pores : car ordinairement, parlant de l'air, on entend tout ce qui remplit l'espace où il est, et ainsi cette matière subtile y est comprise. Si les pores de l'air ou d'un autre corps n'étoient pas remplis de la matière subtile, ou de quelque autre, ils cesseroient d'être, car, selon

moi, un espace sans matière implique contradiction.

Je crois qu'il y a moins de pores dans l'or et dans le plomb que dans le fer. J'ai déjà dit que je conçois les parties de la matière subtile, comme aussi dures et solides que peuvent être des corps de leur grandeur; mais pour celles des corps terrestres, on les peut imaginer plus ou moins dures les unes que les autres, à cause qu'elles peuvent derechef être composées de plusieurs autres parties, et ainsi j'ai dit en mes Météores que les parties de l'eau étoient plus molles et pliantes que celles du sel, p. 188.

Ne craignez pas que je me sois mépris en disant que la première ligne de M. de Beaune est une hyperbole, et sachez que ceux qui l'ont examinée sans le reconnoître se sont grandement mépris, car c'est une chose si claire et si facile, qu'il ne faut point mettre la main à la plume pour le connoître. Per quantitatem inadequate sumptam, j'entends une quantité qui, bien qu'elle ait en effet toutes ses trois dimensions, n'est pas toutefois considérée selon elles.

Ne croyez pas tout ce qu'on vous dit de ces merveilleuses lunettes de Naples, car la plupart des hommes, et principalement les charlatans, tel qu'est sans doute votre N., font toujours les choses qu'ils racontent plus grandes qu'elles ne sont.

Je viens à votre dernière lettre, où vous commencez par ce que vous a écrit M. N'., et j'apprends ici qu'il n'a point du tout entendu ce qu'il pense avoir réfuté en ma Dioptrique; car il dit que mon principal raisonnement est fondé sur une chose qui est entièrement contraire à mon opinion et à ce que j'ai écrit; je m'étonne qu'il se soit si fort laissé préoccuper par sa première imagination, que je n'aie pu lui faire entendre ma pensée par mes réponses; cependant je vous remercie des reproches que vous lui avez faits pour les bruits qu'il a semés; mais je ne lui en veux point de mal, à cause que je vois qu'il n'en a parlé que selon sa créance.

Je suis maintenant trop pressé pour faire aucun calcul, mais je ne crois pas qu'il en faille beaucoup pour examiner la surface des cônes que vous demandez. Pour entendre ce que j'ai dit des verres brûlants, en la Dioptrique, page 119, il faut considérer qu'il vient des rayons formels de chaque point du corps lumineux sur chaque point du verre brûlant, en sorte que ceux qui y viennent parallèles, étant considérés seuls, ne sont à comparaison des autres que comme une superficie à comparaison d'un corps solide. Par exemple si le diamètre du verre FG est aussi grand que celui du soleil CD, ce verre peut bien rassembler en fort

1 Fermat.

peu d'espace les rayons qui viendront parallèles de tous les points du soleil, et un autre verre peut les rendre derechef parallèles, mais le rayon CF n'est rien à comparaison de tous ceux qui viennent vers F, des autres points du soleil, ni DG, à comparaison des autres qui viennent vers G1, etc. Et il est impossible de rassembler tous ces autres avec les parallèles.

Je ne crois pas qu'il y ait même raison de la vitesse des corps qui montent dans l'eau avec leur légèreté dans cette eau, qu'il y a de la vitesse de ceux qui descendent dans l'air avec leur pesanteur dans ce même air, à cause que l'eau et l'air ne sont pas également fluides, cæteris paribus, ainsi que j'ai déjà dit; et la raison qui empêche que ces corps ne montent plus haut que la superficie de l'eau, est qu'étant rares et légers ils retiennent beaucoup moins l'impression du mouvement, que les corps solides et pesants, qui rejaillissent en haut après être tombés contre terre; ce qui est cause aussi que leur vitesse ne s'augmente pas si approchant de la raison doublée, que fait la vitesse des corps qui descendent en l'air. Je vous remercie des soins que vous prenez pour soutenir mon parti, mais je n'ai pas peur qu'aucune personne de jugement se persuade que j'ai emprunté ma Dioptrique

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de Roger Bacon, et encore moins de Fioraventi, qui n'a été qu'un charlatan.

Pour ce que vous me mandez que je devrois ajouter à ma Dioptrique, touchant les lunettes des vieillards, il me semble que j'en ai assez mis la théorie en la page 123, et pour la pratique je la dois laisser aux artisans. Je suis', etc.

A MONSIEUR ***

(Lettre 93 du tome II.)

MONSIEUR,

Vous êtes véritablement l'homme que j'ai souhaité en ma Dioptrique, pour la mettre en exécution, ou plutôt vous en êtes plus capable que je n'eusse osé souhaiter. Les trois arts auxquels vous me mandez vous être exercé sont justement ceux qui y peuvent le plus servir, et pour moi qui n'en ai jamais pratiqué aucun, non plus que si j'étois venu au monde sans mains, je n'ai garde d'être si présomptueux que de prétendre vous enseigner

1 Mon limousin avoit fait écrire une lettre par son beau-père, mais parcequ'elle étoit trop grosse et mal pliée, et qu'elle ne contient que des recommandations à lui et à toutes ses connoissances de Paris, je ne vous l'envoie point, car vous lui pouvez mieux dire cela vous-même, s'il vous plait, quand vous le verrez.

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