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os et des autres parties d'un animal, ne montre point que la nature n'est pas suffisante pour les former, pourvu qu'on suppose que cette nature agit en tout suivant les lois exactes des mécaniques, et que c'est Dieu qui lui a imposé ces lois. En effet, j'ai considéré, non seulement ce que Vésalius et les autres écrivent de l'anatomie, mais aussi plusieurs choses plus particulières que celles qu'ils écrivent, lesquelles j'ai remarquées en faisant moi-même la dissection de divers animaux, c'est un exercice où je me suis souvent occupé depuis onze ans, et je crois qu'il n'y a guère de médecin qui y ait regardé de si près que moi; mais je n'y ai trouvé aucune chose dont je ne pense pouvoir expliquer en particulier la formation par les causes naturelles, tout de même que j'ai expliqué en mes Météores celle d'un grain de sel ou d'une petite étoile de neige; et si j'étois à recommencer mon Monde, où j'ai supposé le corps d'un animal tout formé, et me suis contenté d'en montrer les fonctions, j'entreprendrois d'y mettre aussi les causes de sa formation et de sa naissance. Mais je n'en sais pas encore tant pour cela que je pusse seulement guérir une fièvre car je pense connoître l'animal en général, lequel n'y est nullement sujet, et non pas encore l'homme en particulier, lequel y est sujet.

M. de Beaune me mande qu'il désire voir ces petites observations sur le livre de Galilée que

je vous ai envoyées; et puisque vous lui avez fait voir toute notre dispute de M. N. et de moi, touchant la règle pour les tangentes, je serois bien aise qu'il vît aussi ce que j'en ai une fois écrit à M. Hardy, où j'ai mis la démonstration de cette règle, laquelle M. N. n'a jamais donnée, quoiqu'il l'eût promise, et que nous l'en ayons assez pressé, vous et moi. Vous en aurez aisément une copie de M. Hardy, et je serai bien aise que M. de Beaune juge par là qui c'est qui a le plus contribué à l'invention de cette règle. J'écrirai à Leyde aujourd'hui ou demain pour faire que le Maire vous envoje les livres que vous demandez. Je suis, etc.

A M. DE BEAUNE.

Lettre 71 du tome III.

Du 20 février 1639.

MONSIEUR,

J'ai été extrêmement aise de voir vos notes sur ma Géométrie, et je puis dire avec vérité que je n'y ai pas trouvé un seul mot qui ne soit entièrement selon mon sens; en sorte que j'ai admiré que vous ayez pu reconnoître des choses que je n'y ai (1) Fermat.

mises qu'obscurément, comme en ce qui regarde la généralité de la méthode, et la construction des lieux plans et solides, etc. Et partout je prends garde que vous avez plutôt eu dessein d'excuser mes fautes que de les découvrir; de quoi j'ai véritablement sujet de vous remercier, à cause que c'est un grand témoignage de votre bienveillance: mais je ne vous aurois pas moins remercié si vous les aviez remarquées, à cause de l'utilité que j'en aurois pu retirer. Et afin que vous sachiez que je ne me flatte pas tant que je n'y reconnoisse beaucoup de manquements, je vous en dirai ici quelques uns. Premièrement, au lieu de m'être employé, depuis la page 324 jusques à 334, à construire la question de Pappus et de n'avoir parlé des lieux après cela qu'en forme de corollaire, j'eusse mieux fait d'expliquer par ordre tous les lieux, et de dire ensuite que par ce moyen la question de Pappus étoit con

struite.

De plus j'ai omis le cas où il n'y a point d'yy mais seulement x y, avec quelques autres termes, ce qui donne toujours lieu à l'hyperbole, dont la ligne que j'ai nommée AB est asymptote ou parallèle à l'asymptote. Et en l'équation de la page 325, dont je fais un modèle pour toutes les autres, il n'y a aucun terme qui soit composé de quantités connues, ce qui est bon pour la question de Pappus, à cause qu'il ne s'y en trouve jamais par la fa

çon que je l'ai réduite; mais il y en falloit mettre un, pour ne rien omettre touchant les lieux. Et les deux constructions que j'ai données pour l'hyperbole, p. 330 et 331, se pouvoient expliquer par une seule. Je n'ai point donné l'analyse de ces lieux, mais seulement leur construction, comme j'ai fait aussi de la plupart des règles du troisième livre; et au contraire, pour les tangentes je n'ai donné qu'un simple exemple de l'analyse, pris même d'un biais assez difficile, et j'y ai omis beaucoup de choses qui pouvoient y être ajoutées pour la facilité de la pratique. Toutefois je puis assurer que je n'ai rien omis de tout cela qu'à dessein, excepté le cas de l'asymptote, que j'ai oublié; mais j'avois prévu que certaines gens qui se vantent de savoir tout n'eussent pas manqué de dire que je n'avois rien écrit qu'ils n'aient su auparavant, si je me fusse rendu assez intelligible pour eux; et je n'aurois pas eu le plaisir, que j'ai eu depuis, de voir l'impertinence de leurs objections, outre que ce que j'ai omis ne nuit à personne. Car pour les autres, il leur sera plus profitable de tâcher à l'inventer d'eux-mêmes que de le trouver dans un livre; et pour moi, je ne crains pas que ceux qui s'y entendent m'imputent aucune de ces omissions à ignorance, car j'ai partout eu soin de mettre le plus difficile et de laisser seulement le plus aisé.

Quand on a x2 y, ou x2 y2 dans une équation, le

lieu est d'une ligne du second genre, et j'ai mis en la p. 319 que, lorsque l'équation ne monte que jusques au rectangle des deux quantités indéterminées, c'est-à-dire lorsqu'il n'y a que xy, le lieu est solide; mais que, lorsqu'elle monte à la troisième ou quatrième dimension des deux, ou de l'une, c'està-dire lorsqu'il y a xxy, ou bien x3, etc., le lieu est plus que solide.

Je vous remercie de la proportion des réfractions que vous m'avez envoyée : je ne doute point qu'elle ne soit très exacte, et je fais si peu d'état de celui qui dit avoir fait des expériences qui montrent le contraire, que j'ai seulement honte de notre siècle, de ce que telles gens en trouvent d'autres qui daignent les écouter; mais je ne crois pas qu'il y ait personne que les raisons dont vous le réfutez ne persuadent. Je n'ai rien à dire touchant ce que vous trouvez bon de changer en la machine pour les lunettes, car c'est chose dont vous pouvez mieux juger que moi; mais pour ce qui est de commencer par les lunettes à puce, je crains qu'elles ne fassent pas voir si clairement l'utilité de la figure hyperbolique comme les lunettes de longue vue; car vous savez que pour les verres qu'on met proche de l'œil, il n'importe pas tant que leur figure soit exacte: c'est pourquoi je me persuade que vous recevrez plus de contentement de votre travail si vous commencez par une machine qui puisse avoir

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