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de nom qui l'exprime affez fortement. Ni bienféance, ni fentiment d'honneur, ni crainte des loix, rien ne l'arrétoit. Il comptoit être dans la Sicile, comme dans un pays de conquête. Nulle Statue, foit petite foit grande, pour peu qu'elle fût eftimée & précieufe, n'échapoit à fes mains rapaces. Pour dire tout en un mot, Ciceron a prétend, que la curiofité de Verrès avoit plus couté de dieux à Syracufe, que la victoire de Marcellus ne lui avoit couté d'hommes.

a Sic habetote, plures effe à Syracufanis iftius adventu deos, quàm victoria Marcelli homines defideratos. Ibid. n. 131.

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I

DE LA

PEINTURE.

ARTICLE PREMIER.
De la Peinture en général.

§. I.

Origine de la Peinture.

L en eft de la Peinture comme Plin. lib. de tous les autres Arts, c'est-à-dire 35. cap.1. qu'elle a eu des commencemens très groffiers & très imparfaits. L'ombre d'un homme marquée & circonfcrite par des lignes, y a donné naiffauce auffi bien qu'à la Sculpture. La premiere maniere de peindre tira donc fon origine de l'ombre, & ne confifta qu'en quelques traits, qui, fe multipliant peu à peu, formerent le deffein. On ajouta enfuite la Couleur. Elle fut d'abord unique dans chaque deffein, fans en mêler plufieurs dans la même piece: cette maniere de peindre fut appellée Monochromate c'est-à-dire d'une feule couleur. Enfin, l'Art

l'Art fe perfectionnant de jour en jour, on introduifit le mélange de quatre couleurs feulement: il en fera parlé dans la fuite.

Je n'examine point ici l'antiquité de la Peinture. Les Egyptiens fe vantent d'en avoir été les inventeurs, & cela peut bien être : mais ce ne font point eux qui l'ont mife en honneur & en crédit. Pline, dans le long dé nombrement qu'il fait des habiles Ouvriers en chaque genre & des chef-d'œuvres de l'art, ne nomme pas un feul Egyptien. C'eft donc dans le fein de la Gréce, foit à Corinthe, foit à Sicyone, foit à Athénes, & dans d'autres villes, que la Peinture Plin. ibid.s'eft perfectionnée. On la croit pof térieure à la Sculpture, parce qu'Homere, qui parle fouvent de ftatues, de bas-reliefs, & de gravûres, ne fait mention d'aucun tableau ni d'aucune peinture.

Ces deux Arts ont beaucoup de parties qui leur font communes, mais elles arrivent à leur fin, qui eft l'imitation de la nature, par différens moiens la Sculpture, par le relief de la matiere; la Peinture, par les couleurs fur une fuperficie plate; &

:

Il faut avouer que le cizeau dans les mains d'un homme de génie intéresse prefque autant que le pinceau. Mais fans prétendre régler les rangs entre ces deux Arts, ni donner la préférence à l'un fur l'autre, quelle merveille de voir que la main d'un Artifan, par quelques coups de cizeau, puiffe animer le bronze & le marbre; & qu'en fe jouant fur une toile avec un pinceau & des couleurs, elle imite par des lignes, des jours, & des ombres, tous les objets de la nature? Si a Phidias forme l'image de Jupiter, dit Sénéque, il femble que ce dieu va lancer la foudre: s'il représente Minerve, on diroit qu'elle va parler pour inftruire ceux qui la confiderent, & que cette fage déeffe ne garde le filence que par modeftie. Doux preftige, agréable impofture qui trompe fans induire en erreur, & qui fait illufion aux fens pour éclairer l'efprit!

Tome XI.

F

§. II.

a Non vidit Phidias Jovem, fecft tamen velut tonantem: nec ftetit ante oculos ejus Minerva, dignus tamen illa arte animus, & concepit deos, & exhibuit. Senec. Controv. lib. 5. cap. 34.

Verecundè admodum filent, ut hinc refponfuras paulo minùs voces præftoleris. Lactant.

S. I I.

Des différentes parties de la Peinture. Du Vrai dans la Peinture.

LA PEINTURE eft un Art qui par des lignes & des couleurs repréfente fur une furface égale & unie tous les objets vifibles. L'image qu'elle en fait, foit de plufieurs corps enfemble, ou d'un feul en particulier, s'appelle Tableau; dans lequel il y a trois chofes à confidérer, la COMPOSITION, le DESSEIN, le COLORIS, qui font les trois parties néceffaires pour former un bon Peintre,

I. LA COMPOSITION, qui eft la premiere partie de la Peinture, contient deux chofes, l'Invention, & la Difpofition.

L'Invention eft un choix des objets qui doivent entrer dans la compofition du fujet que le Peintre veut traiter. Elle eft ou hiftorique fimplement, ou allégorique. L'Invention hiftorique eft un choix d'objets qui fimplement par eux-mêmes repré fentent le fujet. Elle ne regarde pas feulement toutes les hiftoires vraies. ou fabuleufes, mais elle comprend

encore

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