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ses leçons et dans ses ouvrages; il est donc probable qu'il s'est occupé de faire connoître et aimer les vertus avant de ridiculiser les vices, et qu'il n'a point réservé la peinture des premiers pour la fin de sa carrière.

(3) Les manuscrits ne varient point à ce sujet; mais ils paroissent, ainsi que je l'ai déja observé, n'être tous que des copies d'un ancien extrait de l'ouvrage original. Les caractères dont parle ici La Bruyère ont été trouvés depuis dans un manuscrit de Rome; ils ont été insérés dans cette édition, ainsi que d'autres additions trouvées dans le même manuscrit *.

(4) C'est Diogène Laërce qui nous apprend que Ménandre fut disciple de Théophraste: La Bruyère a fait ici un extrait suffisamment étendu de la vie de notre philosophe donnée par Diogène; et nous n'avons point cru qu'il valût la peine d'insérer encore cette vie en totalité, comme on l'a fait dans une autre édition. On sait que Ménandre fut le créateur de ce qu'on a appelé la nouvelle comédie, pour la distinguer de l'ancienne et de la moyenne, qui n'étoient que des satires personnelles assez amères ou des farces plus ou moins grossières. Les anciens disoient de Ménandre qu'on ne savoit pas si c'étoit lui qui avoit imité la nature, ou si la nature l'avoit imité. On trouvera une petite notice sur la vie de cet intéressant auteur, et quelques fragments de ses comédies, dont aucune ne nous est parvenue en entier, à la suite de la traduction de Théophraste par M. Levesque, dans la collection des Moralistes anciens de Didot et de Bure.

Théophraste a écrit un livre sur la comédie, et Athénée nous apprend ** que dans le débit de ses leçons il se rappro

* Voyez la préface, page 1, et la note 1 du chap. 16.

'Liv. I, ch. 38, p. 78 du premier volume de l'édition de mon père.

choit en quelque sorte de l'action théâtrale, en accompagnant ses discours de tous les mouvements et des gestes analogues aux objets dont il parloit. On raconte même que, parlant un jour d'un gourmand, il tira la langue et se lécha les lèvres.

Je suis tenté de croire que les observations de Théophraste sur les caractères dont il entretenoit ses disciples et sans doute aussi ses amis avec tant de vivacité, ont aussi introduit dans la géographie une attention plus scrupuleuse aux mœurs et aux usages des peuples. Nous avons des fragments de deux ouvrages relatifs à cette science, et composés à différentes époques par Dicéarque, condisciple et ami de notre philosophe. Le plus ancien de ces écrits, adressé à Théophraste lui-même, mais probablement avant la composition de ses caractères, ne consiste qu'en vers techniques sur les noms des lieux; tandis que le second contient des observations fort intéressantes sur le caractère et les particularités des différentes peuplades de la Grèce. Ces fragments sont recueillis dans les GEOGRAPHI MINORES de Hudson, qui les a fait précéder d'une dissertation sur les différentes époques auxquelles ces ouvrages paroissent avoir été écrits.

Un autre que Leucippe, philosophe célèbre, et disciple de Zénon. LA BRUYÈRE. Celui dont il est question ici n'est point connu d'ailleurs. D'autres manuscrits de Diogène Laërce l'appellent Alcippe.

(6) « Quis uberior in dicendo Platone? Quis Aristotele ner、 «vosior? Theophrasto dulcior?» Cap. 31.

(7) Dans ses Tusculanes*, Cicéron appelle Théophraste le plus élégant et le plus instruit de tous les philosophes; mais

Liv. V, chap. 9.

ailleurs il lui fait des reproches très graves sur la trop grande importance qu'il accordoit aux richesses et à la magnificence, sur la mollesse de sa doctrine morale, et sur ce qu'il s'est permis de dire que c'est la fortune et non la sagesse qui règle la vie de l'homme *. Il est vrai que Cicéron met la plupart de ces reproches dans la bouche des stoïciens qu'il introduit dans ses dialogues; et d'autres auteurs nous ont conservé dés mots de Théophraste qui contiennent une appréciation très juste des richesses et de la fortune. « À bien les considérer, disoit-il, << selon Plutarque, les richesses ne sont pas même dignes d'envie, puisque Callias et Isménias, les plus riches, l'un des Athéniens, et l'autre des Thébains, étoient obligés, comme << Socrate et Épaminondas, de faire usage des mêmes choses « nécessaires à la vie. » « La vie d'Aristide, dit-il, selon Athénée, étoit plus glorieuse, quoiqu'elle ne fût pas à beaucoup près aussi douce que celle de Smindyride le Sybarite, et de Sardanapale.» « La fortune, lui fait encore dire Plutarque, <«< est la chose du monde sur laquelle on doit compter le moins, puisqu'elle peut renverser un bonheur acquis avec beaucoup

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<< de peine, dans le temps même où l'on se croit le plus à l'abri d'un pareil malheur. »

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(8) Philosophe célèbre qui suivit Alexandre dans son expédition, et devint odieux à ce conquérant par la répugnance qu'il témoigna pour ses mœurs asiatiques. Alexandre le fit traîner prisonnier à la suite de l'armée, et, au rapport de quelques historiens, le fit mettre à la torture et le fit pendre sous prétexte d'une conspiration à laquelle il fut accusé d'avoir pris part **.

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Voyez Acad. Quæst. 1. I, cap. 9, Tusc. V, 9; Offic. II, 16, etc. ** V. Arrien, de Exped. Alex. 1. IV, cap. 14.

(9) Xénocrate succéda dans l'Académie à Pseusippe, neveu de Platon. C'est ce philosophe que Platon ne cessoit d'exhorter à sacrifier aux Graces, parcequ'il manquoit absolument d'agrément dans ses discours et dans ses manières. Il refusa, par la suite, des présents considérables d'Alexandre, en faisant observer aux envoyés chargés de les lui remettre la simplicité de sa manière de vivre. C'est lui aussi que les Athéniens dispensèrent un jour de prêter un serment exigé par les lois, tant ils estimoient son caractère et sa parole.

(10) Cicéron dit, au sujet d'Aristote et de Théophraste * : Ils aimoient une vie douce et tranquille, consacrée à l'observation de la nature et à l'étude; une telle vie leur parut la plus digne du sage, comme ressemblant davantage à celle des dieux **. Mais il paroît que cette douceur approchoit beaucoup de la mollesse, non seulement par les reproches de Cicéron que je viens de citer, et par les paroles de Sénèque***, mais encore par le témoignage de Télès, conservé par Stobée, qui nous apprend que ce philosophe affectoit de n'admettre dans sa familiarité que ceux qui portoient des habits élégants, et des souliers en escarpins et sans clous, qui avoient une suite d'esclaves, et une maison spacieuse employée souvent à donner des repas somptueux, où le pain devoit être exquis, le poisson et les ragoûts choisis, et le vin de la meilleure qualité.

Hermippus, cité par Athénée, dans le passage dont j'ai déja parlé, dit que Théophraste, lorsqu'il donnoit ses leçons, étoit toujours vêtu avec beaucoup de recherche, et qu'ainsi que d'autres philosophes de son temps il attachoit une grande importance à savoir relever sa robe avec grace.

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(11) Il y a deux auteurs du même nom; l'un philosophe cynique, l'autre disciple de Platon. LA BRUYERE. Mais un Ménédème, péripatéticien, seroit trop inconnu pour que cette histoire que raconte Aulu-Gelle *, et que Heumann traite de fable, puisse lui être appliquée. Pour donner à ce récit quelque degré de vraisemblance, il faut lire EUDEME, ainsi que plusieurs savants l'ont proposé. Ce philosophe, né dans l'île de Rhodes, étoit un des disciples les plus distingués d'Aristote, qui lui a adressé un de ses ouvrages sur la morale, à moins que cet ouvrage ne soit d'Eudème lui-même, comme plusieurs savants

l'ont cru.

(12) Après la mort de Théophraste, ils passèrent à Nélée, son disciple, par les successeurs duquel ils furent par la suite enfouis dans un lieu humide, de crainte que les rois de Pergame ne les enlevassent pour leur bibliothèque. On les déterra quelque temps après pour les vendre à Apellicon de Téos; et, après la prise d'Athènes par Sylla, ils furent transportés à Rome par ce dictateur. Ils avoient été fort endommagés dans le souterrain où ils avoient été cachés, et il paroît que les copies qu'on en a tirées n'ont pas été faites avec beaucoup de soin. Cependant je puis assurer ceux qui voudront travailler sur cet auteur que les manuscrits qui nous ont transmis ses ouvrages sont plus importants à consulter que ne l'ont cru jusqu'à présent les éditeurs.

(13) Un autre que le poëte tragique. LA BRUYERE.

(14) On avoit accusé notre philosophe d'athéisme, et nous voyons dans Cicéron *** que les épicuriens lui reprochoient l'in

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