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Nous sommes loin de pouvoir compter sur la rédaction prochaine d'un pareil catalogue général pour le département de la Manche. C'est d'autant plus regrettable que M. Husnot le considère comme devant être le plus riche de la Normandie, à cause de sa position géographique. Je n'y connais pour le moment que deux régions où les études bryologiques soient poursuivies : Saint-James, et, encore une fois, les environs de Cherbourg, où M. Corbière, professeur des sciences naturelles, obtient depuis quelques années des résultats d'autant plus remarquables, qu'il opère sur un terrain fouillé plusieurs fois. Le département est donc entamé par ses deux extrémités, mais entre les deux, l'espace est grand. M. Corbière n'avait que trop raison en m'exprimant, dernièrement, le regret que nous ne puissions joindre les deux bouts.

Je ne veux relever dans le catalogue de Saint-James que les deux espèces, non-seulement nouvelles pour le Nord-Ouest, mais encore inattendues dans la position qu'elles occupent.

Le Dicranum subulatum est une espèce alpine qui ne descend guère au-dessous de 1,200 à 1,500 mètres d'altitude. Il y en a une belle station dans une vieille carrière granitique du bois d'Atré, à une altitude inférieure à 100 mètres.

Le Bartramia ithyphylla, qui se trouve en assez notable quantité dans une petite foutelaie en face du même bois d'Atré, est une espèce analogue, avec cette différence qu'elle descend aux altitudes de 700 à 800 mètres, bien supérieures encore à celles de nos collines les plus élevées.

Lorsque la bryologie de la France sera assez connue par la publication de catalogues locaux, il y aura peut-être quelques réserves à faire quant au caractère exclusivement monticole attribué à plusieurs mousses: on peut même constater, dès maintenant, que plusieurs espèces indiquées par M. l'abbé Boulay comme répandues dans presque toutes les montagnes de France» se trouvent couramment dans notre région où il n'y a pas de montagnes.

Pardonnez-moi tous ces détails, arides peut-être, mais non hors de propos, et veuillez croire à mes meilleurs sentiments d'affectueuse sympathie.

Aug. BESNARD.

Je ne suis pas en mesure de vous donner des renseignements analogues sur les Lichens. J'en ai cependant recueilli près de trois cents échantillons qui représentent, soit par les types, soit par leurs variétés, environ cent cinquante des espèces décrites dans l'excellente Flore de M. l'abbé Olivier.

Si les mousses ont leurs difficultés, les Lichens en ont de plus grandes encore, ce sont des plantes inférieures qui manquent de fixité. On a dû rattacher aux types un grand nombre de formes et de variétés. Quelques espèces en ont plus de vingt. De plus, la ténuité des organes essentiels oblige à employer les grossissements et les appareils nécessaires pour les mesurer et les évaluer en millièmes de millimètres. Il faut du temps pour arriver à un classement définitif.

Naples, ce 18 janvier 1886, et Naples, 20 janvier.

Monsieur et ancien Maître,

Je tiens à vous exprimer sans retard ma gratitude pour la grande bienveillance dont vous m'honorez dans le dernier numéro de la Revue, en vous priant de ne pas vous donner l'ennui de me répondre, cette intéressante Revue vous acquittant avec usure envers vos correspondants. Ce numéro 8 me fournit l'occasion de beaucoup causer avec vous, et de vous consacrer une bonne fin de soirée.

Mirande me rappelle de lointains souvenirs et une étymologie d'un genre tout nouveau. Cette terre appartenait à la maison Vivien de la Champagne, dont notre collègue, Mme de Léziart, nous a dépeint les deux derniers représentants avec autant de brio que de fidélité. Vendu nationalement à la Révolution, Mirande fut acheté de seconde ou troisième main sous la Restauration, par M. Elie, capitaine de frégate, oncle de Mme Horeau, décédée à Granville, il y a dix ans, après avoir brillé par sa beauté et ses talents, pendant son premier mariage avec M. Capron, à la cour napolitaine de la reine Caroline Murat. Lorsque le commandant Elie acheta Mirande, ces sortes d'acquêts inspiraient à bon nombre de personnes des inquiétudes de plus d'une sorte, et plusieurs payaient un pot-de-vin aux anciens possesseurs pour obtenir leur ratification. M. Elic offrit 2.000 francs à M. et Mile de la Champagne dans ce but. Ceux-ci lui demandèrent une somme triple, et il passa outre. L'indemnité d'un milliard accordée aux émigrés mit fin à ces inquiétudes pour les biens qui leur avaient été confisqués, de même que le Concordat, si étrangement observé actuellement, avait passé l'éponge sur les acquisitions des biens ecclésiastiques. Mme Elie, néc Céleste Cambernon, décédée dans une grande vieillesse, en octobre 1863, partageait son temps entre Granville et Mirande, où elle donnait, pendant l'été, une ou deux parties de campagne. La très longue table était dressée sous une tonnelle, et les yeux s'emplissaient d'admiration à la vue de la baie du MontSaint-Michel et, je crois, de quarante-deux clochers qu'on découvre de cette hauteur. Je me souviens qu'un jour, il y a plus de quarante ans, Mme Elie, enthousiasmée de l'admiration de ses convives, s'écria Ce n'est pas sans raison que Mirande vient du latin

miranda, et veut dire admirable! Un de ses voisins de campagne du Reverdy, fraiche oasis de verdure, de poiriers et de bois, M. Constant Boisnard, homme de bonne compagnie, toujours prompt à la riposte, lui répliqua aussitôt : « C'est comme de Reverdy, qui vient du latin reverda, et veut dire éméraude.▸ Et tous deux, qui point ne manquaient du don de la parole, de rebattre les mérites de leurs villas respectives, aux applau dissements de l'assistance.

Ce que vous dites, Monsieur et respectable ami, des noms individuels des maisons de la colonie anglaise de Dinan, s'applique à l'Italie, à la campagne et même dans les faubourgs des villes, les propriétés portent leur nom. Deux petites plaques de marbre, placées à droite et à gauche de l'entrée principale, indiquent la nature de la propriété et son nom, qui est le plus ordinairement celui du propriétaire: Villa Massimo, — Propriété Ricciardi, — Vigna Pugliese, - Villa Mon Plaisir, etc.

La faculté qu'avait le vieux français de faire des substantifs avec des infinitifs, se retrouve dans la langue italienne, et donne souvent à la phrase plus de souplesse et d'entrain.

L'Italie conserve fidèlement ses traditions, et hier, fète de SaintAntoine, qu'on invoque contre les incendies, des feux brillaient dans toutes les rues, vestiges du paganisme, sanctifiés par le christianisme. Ces feux ont l'avantage de débarrasser les maisons des meubles hors de service. Ils sont le signal de l'ouverture du carnaval, qui sera sans fin cette année, où Pâques arrivera le plus tard possible le 25 avril. Les Anglais ont surnommé l'Italie la nation-carnaval, et, au moins trois fois par semaine, les dimanches, mardis et jeudis, nous allons être assotis de musiques ambulantes, de pétarades et de mascarades, sans préjudice de la baldoria des jours gras.

J'ai rapporté, dans mes premières Feuilles détachées, le fait relatif à Me de Chevetel, p. 228. Elle me l'avait raconté plus d'une fois, et, même après un laps de près de trois quarts de siècle, elle ne pouvait s'empêcher de rire chaque fois qu'elle se souvenait de la déconvenue du Comité révolutionnaire à la vue de la soustraction du corps du délit. C'était un petit billet écrit par sa mère, Mme de Clinchamp, à son fils ainé en surveillance à Granville : • Tâche de rendre sans retard à notre ami Limoëlan le service que le porteur te demandera pour lui. M. Picot de Limoëlan était émigré, et le porteur avait eu la mauvaise fortune de perdre ce billet. Au Comité, Mile Constance prétendit que ce n'était pas l'écriture de sa mère, et à la faveur du débat qui s'éleva à ce

sujet, elle put saisir le billet, le déchirer et l'avaler en un clin d'œil.

Agréez, je vous prie, Monsieur et vieil ami, l'assurance du respect affectueux avec lequel je suis votre tout obéissant serviteur,

Joseph DESCHAMPS DU MANOIR.

La courtoisie empressée, avec laquelle vous m'avez expédié le、 tome VII des Mémoires de notre Academia, veut que je vous transmette sans retard l'expression de ma gratitude et quelques regrets de me rendre ainsi à charge. Ces Mémoires me transportent dans notre cher Avranchin, et la curiosité, qu'avait excitée en moi l'annonce, dans la Revue, de la Chronique d'Avranches, m'a déjà fait lire ce travail. Parlons-en un peu, puisque l'occasion s'en présente. Je suppose, d'après le contexte, qu'il s'agit de la famille Abraham Dubois; mais comme il y a à Avranches plusieurs familles Dubois, il aurait été bon de désigner plus clairement celle qui possédait cette chronique. C'est aussi probablement par distraction que notre savant confrère a écrit, dans son préambule, Duquesnoy et Arthur de la Vilharmois, quand le manuscrit, qui donne l'orthographe exacte de ces noms du Quesnoy et Artur La branche de la Villarmois existe encore. Les du Plessis se sont éteints, ce me semble, avec Mine Malicorne, de Regnéville; mais un rameau doit subsister à la Martinique. Il possédait en 1870 la terre du Plessis, à Saint-Laurent-de-Terregatte, et il la vendit à cette époque. Cette famille se composait alors de deux frères Raoul et Oscar, et de leur mère, née de Fougainville. Il est regrettable que M. le chanoine Pigeon n'ait pas illustré de notes cette publication. L'auteur de cette chronique ne parait pas impartial dans les débats du clergé, et il parle de plusieurs dignitaires ecclésiastiques avec une aigreur qui contraste avec la haute réputation de vertu dont ils jouissent dans les Annales du Diocèse, page 197. En 1635, les religieux bénédictins furent établis à Avranches. Ne sont-ce pas plutôt les religieuses bénédictines de Sainte-Anne? Ce que l'auteur dit contre le titre d'écuyer des Trochon, est fautif et en opposition avec ce qui a trait aux Angot, page 229. Les charges de Sécrétaire du Roi étaient des charges anoblissantes par excellence, et elles conféraient une noblesse absolue et héréditaire. De 1665 à 1672, deux déclarations royales restreignirent leurs privilèges trouvés exorbitants, et statuèrent que la noblesse ne serait transmissible qu'après vingt ans d'exercice, ou si le titulaire mourait en exercice. Or, ce dernier cas se vérifia en M. Trochon de Chesné. La famille Le Mareschal de Changcon (page 211) fut la

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