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pouvoir mettre dans cette hiftoire toute la clarté que je fouhaiterois.

Après plus de vingt ans de guerre, les principaux Compétiteurs fe trouvant réduits au nombre de quatre, Ptolémée, Caffandre, Séleucus, & Lyfimaque, l'Empire d'Alexandre fe partagea en quatre Roiaumes fixes, felon la prédiction de Daniel, par un Traité folennel & par un accord conclu entre les parties. Trois de ces Roiaumes, favoir l'Egypte, la Macédoine, la Syrie ou l'Afie, auront une fuite de Rois affez claire & dif tinguée. Le quatriéme, qui comprenoit la Thrace, une partie de l'Asie Mineure, & quelques provinces voifines, fouffrira beaucoup de varia, tions.

Comme le roiaume d'Egypte eft celui où il y a eu le moins de changement, parce que Ptolémée, qui y étoit établi fous le nom de Gouverneur à la mort d'Alexandre, s'y conferva toujours dans la fuite, & le laiffa à fa postérité: ce fera celui qui fervira comme de bafe à notre chronologie, & qui fixera nos differentes Epoques.

Ainfi ce VII. Tome, fuppofé que la juste

jufte mesure du Volume le permette, renfermera l'efpace de cent vingt & un ou vingt-deux ans, fous les quatre prémiers Rois d'Egypte: favoir Ptolémée fils de Lagus, qui règna trente huit ans; Ptolémée Philadelphe, qui en règna quarante: Ptolémée Evergéte, dont le règne dura vingt fept ans ; & Ptolémée Philopator, dont le règne fut de dix fept ans,

Pour tâcher de jetter quelque lumiére fur l'hiftoire renfermée dans ce Volume, j'en donnerai ici par avance un abrégé chronologique, qui en renfermera les principaux événemens. Mais auparavant je prie le Lecteur de faire avec moi quelques réflexions, qui n'ont pas échapé à M. Boffuet, Difcours au fujet d'Alexandre. Ce Conquérant, oire Ufur Phif le plus renommé & le plus illuftre niverfelle. qui fut jamais, a été le dernier roi de fa race. La Macédoine, fon ancien roiaume, tenu par ces ancêtres depuis tant de fiécles, fut envahi de tous cotés comme une fucceffion vacante, & après avoir été long-tems la proie du plus fort, il paffa enfin à une autre famille. S'il fût demeuré paisible dans la Macédoine, la grandeur de fon Empire n'auroit pas tenté fes Capitaines,

& il eût pu laiffer à fes enfans le roiaume de fes peres. Mais, parce qu'il n'avoit point mis de bornes à fa puiffance, il fut caufe de la perte de tous les fiens. Nous verrons fa famille entiérement exterminée fans qu'il en refte de traces. Ses conquêtes deviendront une occafion de meurtres & de carnage, & donneront lieu à fes Capitaines de s'entr'égorger les uns les autres. Voila où aboutira cette bravoure d'Alexandre fi vantée,ou, pour parler plus jufte, cette brutalité, qui, fous de beaux noms d'ambition & de gloire, alloit gratuitement ravager les provinces, porter par tout le fer & le feu, & répandre le fang de tant d'hommes qui ne lui avoient fait aucun mal.

Il ne faut pas croire néanmoins que la providence ait abandonné ces événemens au hazard. Comme elle préparoit tout pour la venue prochaine du Meffie, elle a eu foin de réunir toutes les nations qui devoient être les prémières éclairées de l'Evangile, par le lien d'une même langue, qui eft la grecque; & elle les a mifes dans la néceffité d'apprendre cette langue étrangère en les affujétiffant

à

à des maîtres qui n'en parloient point d'autre. Par le commerce de cette langue, devenue la plus vulgaire & la plus générale, Dieu a rendu la prédication des Apôtres plus promte, plus facile & plus uniforme.

On a remarqué encore que le deffein de Dieu, en étendant les conquêtes des Grecs précisément dans les contrées que l'Evangile devoit convertir, à été d'y repandre auparavant la philofophie des Grecs, afin d'hu'manifer l'efprit des peuples barbares; de les acoutumer à rentrer en eux-mêmes par des refléxions; de les rendre attentifs à la diftinction du corps & de l'ame, de la matiére & de l'efprit; de reveiller en eux l'idée de l'immortalité de l'ame, & de la derniére fin de l'homme; de rappeller les prémiers principes de la loi naturelle; de diftinguer le caractère des principales vertus, de donner des règles pour les devoirs de la vie, & d'établir les plus effentiels liens de la focieté, dont les particuliers font les membres. Le Chriftianifme a profité de tous ces préparatifs, & a recueil, li le fruit de toutes ces femences que la Providence avoit jettées de loin A 5 dans

dans les efprits, & que la grace de Jefus-Chrift y a fait germer dans les tems arrétés de toute éternité par les décrets divins.

Quoique Dieu ait tiré pour fon Eglife tous ces avantages des conquêtes des Grecs, il ne les regardoit pas comme moins criminels, ni commemoins puniffables. Ce n'étoit point. fes deffeins éternels de mifericorde qu'ils fe propofaient de fervir, mais leur propre ambition & leur avarice. Sa fageffe & fa puiffance ont tourné à l'exécution de fes décrets leurs injuftes defirs. En effet il eft très remarquable, comme je viens de l'obferver, que prefque tous les proches & tous les Officiers d'Alexandre ont péri miferablement. Dieu a exterminé ces ufurpateurs les uns par les autres, & il s'eft fervi de leur propre miniftère pour les punir réciproquement des rapines, des injuftices, des cruautés commifes contre tant de nations, qui ne les avoient point offenfés, & dont tout le crime avoit été de vouloir demeurer libres, & de ne les point reconnoitre pour maîtres. Victumque ulcifcitur orbem.

§. II. Abré

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