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LE CHRISTIANISME ET SES ORIGINES.

- DE LA MORT DE CICERON A CELLE DE SÉNE

QUE, première prrtie, par M. ERNEST HAVET LUMEN.

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- RÉCIT ASTRONOMIQUE D'OUTRE-TERRE, par M. CAMILLE FLAMMARION. UN MARIAGE EN ARMÉNIE, par Mme CAROLINE SuchodolskA. ROSA FERRUCCI, par M. RAOUL LECOEUR.

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DE LA SCIENce politique, par M. E. DE PARIEU, de l'Institut.
LES POÈTES NOUVEAUX.

CHARLES BAUDELAIRE, par M. GEORGES NOEL.

LA DIPLOMATIE FRANÇAISE SOUS LA RÉPUBLIQUE ET LE PREMIER Empire. — MARET, DUC DE BASSANO, 1re partie, par M. le baron ERNOUF.

La CONQUÊTE DE LA TERRE, poésie, par M. CHARLES GRANDSARD.

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REVUE CRITIQUE : I. Gwersiou Breiz Izel, chants populaires de la Basse-Bretagne, recueillis et traduits par M. LUZEL, — II. Le Catholicon de le Jehan Legadeuc par M. E. M. III. Velleda, poême de Mme Auguste Penquer, par M. E.-M. de LYDEN. IV, Histoire politique et littéraire de la Révolution, de M. Reynald, par M. E. de FOREST. — V. Lettres el Souvenirs d'enseignement, d'Eugène Gondar, par M. A. CHASSANG. VI. L'Interné, de M. Jules Janin, par M. Eug. BOULET 55 CHRONIQUE POLITIQUE, histoire de la quinzaine.

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LE CHRISTIANISME ET SES ORIGINES. DE LA MORT DE CICERON A CELLE DE SÉNĖQUE. (2e partie) par M. ERNEST HAVET..

LA MORALE De la Bruyère, par M. LOUIS JEZIERSKI

CUBA SOUS LA DOMINATION ESPAGNOLE, (1r partie,) par le docteur VICTOR DE ROCHAS.

UN MUSULMAN, S'IL VOUS PLAIT. - NOUVELLE, (1re partie), par Mme S. BLANDI... LES FILLES DE LOUIS XV. MESDAMES DE FRANCE (1727-1800) D'APRÈS DES DOCUMENTS INÉDITS, (1re partie), par M. HONORÉ BONHOMME.

LA POLITIQUE DE M. de Beust ET SES DANGERS POUR LA PAIX DE L'EUROPE, par
M. ALPHONSE DE CALONNE.
POESIE: I. La Terre dort.

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II. Deuil.

IV. Plainte de la sacrifiée.

III. Neige blanche des hauts sommets. V. La Prédiction, par C. ROBINOT-BERTRAND. I. Ulrich. II. Les Gluaux, par M. ALEXANDRE MASSÉ.

REVUE MUSICALE, par M. C. ERNOUF. . .

CHRONIQUE POLITIQUE, histoire de la quinzaine
CHRONIQUE FINANCIÈRE, par M.ESMOND DE POZAR

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Paris.

Imprimerie de Dubuisson et Ce, rue Coq-Héron, 5. - .

ATHENAEUM FRANÇAIS

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

DE LA

REVUE CONTEMPORAINE

Bulletin critique

Répertoire universel de bibliographie, par L. TECHENER, t. I.

Ce livre est autre chose et quelque chose de mieux qu'un catalogue de librairie ordinaire. M. L. Techener, qui porte déjà dignement un nom depuis longtemps cher aux amateurs, a entrepris ce répertoire avec la pensée de donner le plan d'une grande bibliothèque, dans laquelle toutes les branches des connaissances humaines seraient représentées par les meilleures éditions des bons ouvrages, dans une condition satisfaisante. Il a voulu aussi, évidemment, réagir contre une tendance fâcheuse qui se manifeste depuis quelques années dans « le petit monde délicat » des bibliomanes, celle de ne plus guère estimer et rechercher, en fait de curiosité, que certaines plaquettes dont la rareté fabuleuse est l'unique mérite, et principalement de ces productions licencieuses du dix-huitième siècle, difficiles à rencontrer et qui mériteraient d'être introuvables.

Les indications du nouveau Répertoire pourront ramener dans des voies meilleures ces esprits fourvoyés, en leur remettant en mémoire des ouvrages plus dignes de les intéresser. La partie historique, qui forme à elle seule plus de la moitié de ce gros volume, a été l'objet d'une attention spéciale de la part de M. Techener, et sera fort utile aux esprits sérieux, jaloux d'étudier l'histoire ailleurs que dans les élucubrations modernes. Ils y trouveront l'indication d'une foule de livres

contemporains des événements, livres qu'il n'est pas toujours possible d'acquérir, mais qu'il est indispensable de consulter, si l'on veut se faire une idée juste des hommes et des choses. Les notes jointes aux articles les plus importants ont été rédigées avec une attention particulière. Elles fournissent déjà plusieurs additions et corrections importantes au célèbre Manuel de Brunet, dont ce répertoire deviendra le complément indispensable, s'il continue à être rédigé avec le même soin et dans le même esprit.

DE F.

Authentischer Bericht..... (Rapport authentique et autres documents officiels sur l'assassinat des plénipotentiaires français à Rastadt). Carlsruhe, Bielefeld.

Ce petit volume contient le texte original du rapport des plénipotentiaires allemands sur la catastrophe de Rastadt, document capital, mais depuis longtemps connu en France. On y a joint plusieurs pièces inédites d'un lugubre intérêt, notamment la correspondance de ces mêmes ministres avec le colonel autrichien Barbaczi, les dépositions des postillons qui conduisaient les voitures françaises et le procès-verbal de la levée des cadavres.

Cette publication a été faite dans le but de rétablir la vérité étrangement défigurée par quelques écrivains modernes, qui ont fait revivre, à l'occasion de cet incident, de vieilles et absurdes calomnies. Dernièrement encore, un professeur d'histoire, à Fribourg, s'est avisé d'imputer le meurtre de Roberjot et de Bouvier à des émigrés français ! Les pièces publiées dans la brochure de Carlsruhe confirment pleinement l'opinion qui fait peser sur le gouvernement autrichien la respon

sabilité de cette catastrophe. Ainsi que nous l'avons nous-même dit et démontré dans un livre publié il y a quelques années, « on ne voulait pas assassiner les plénipotentiaires ». L'émissaire du gouvernement autrichien, Thugut, avait seulement envoyé l'ordre d'enlever les papiers de la légation. Son but était de connaître les relations des Français avec la Prusse et les petits princes allemands. L'archiduc Charles s'était d'abord refusé à prêter la main même à de simples voies de fait contre les ministres français pour leur arracher leurs papiers; mais il s'y était décidé sur la présentation de l'ordre venu de Vienne, que lui avait montré le plénipotentiaire autrichien Lehrbach. Celui-ci avait quitté Rastadt dès le 23 avril, mais s'était arrêté à Munich pour y attendre le résultat de cette belle expédition. Quand il apprit enfin ce qui s'était passé, il se récria sur l'extension donnée aux ordres, ajoutant qu'on avait dû dire aux hussards de houspiller seulement les Français, regrettant surtout Roberjot, le seul d'entre eux qui valût quelque chose, etc. Ces détails avaient été communiqués à M. Bignon par le duc de Bassano et celui-ci les tenait de M. de Gravenrenth, commissaire bavarois au quartier général de Napoléon pendant la campagne de Prusse. Ce diplomate occupait, pendant les derniers jours d'avril 1799, dans un hôtel de Munich, un appartement d'où il entendait distinctement tout ce qui se disait dans celui de Lehrbach. Il en rendit compte immédiatement au premier ministre de l'électeur, Montgelas, et en rédigea, sur son ordre, un récit détaillé qui fut déposé dans les archives bavaroises. Ce récit est pleinement confirmé par celui du général Jomini, écrivain des mieux informés. « On devait, dit-il, enlever le caisson de la chancellerie ou étaient les papiers, et, par la même occasion, administrer quelques coups de plats de sabre à deux des envoyés, Bouvier et Debry, pour les punir de Ja hauteur qu'ils avaient mise dans .eurs relations diplomatiques. Roberjot était nominativement excepté... Mais les hussards, ivres pour la plupart, frappèrent les trois envoyés, sans distinction, du tranchant de leurs sabres...

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Ces explications sont définitives, et l'on peut s'étonner que des gens qui se mêlent de professer l'histoire en déclinent l'autorité s'ils ne les ignorent pas. Comme nous l'avons dit ailleurs, « c'est aux auteurs des premiers ordres qu'incombe la responsabilité de tout ce qu'ont fait leurs complices subalternes, de cette combinaison de vol qui tourne au meurtre. » En rapprochant cet événement des violences non moins odieuses exercées en juillet 1793 contre deux autres diplomates, Maret et Sémonville, de la détention illégale de La Fayette et de ses compagnons, on est amené à penser que la haine de la France avait produit, chez les hommes d'Etat autrichiens de ce temps, une véritable oblitération du sens moral. Ils en étaient venus à considérer sans distinction, comme des brigands en dehors du droit des gens tous ceux qui avaient pris part aux bouleversements ou qui servaient à un titre quelconque le gouverne

ment républicain. Cette disposition, manifestée par des actes aussi odieux que ceux qu'on prétendait châtier, a été l'une des causes principales, et, jusqu'à un certain point, l'excuse de la plupart des violences de la Révolution.

Baron ERNOUF.

Rome et les Papes, Etudes historiques, philoso phiques, littéraires et artístiques, par le comte T. DANDOLO, trad. par le vicomte de Richemont, t. I, grand in-8. Paris, Guichardot, 141, rue de Rennes, 1868.

M. le comte Dandolo est peu connu en France, bien qu'il ait composé plusieurs grands ouvrages d'histoire et de philosophie sur l'Italie de tous les temps. Nous voyons avec plaisir paraitre le commencement d'une traduction d'une des œuvres favorites de l'auteur. Ce livre-ci aura cinq volumes. S'il lui est fait un favorable accueil, les autres écrits du comte Dandolo le suivront sans doute de près. Au moment où l'on discute le pouvoir temporel de la papauté, il est utile, équitable même, de donner la parole à ses défenseurs. Du reste, les études variées réunies sous le titre de Rome et les Papes ont été conçues en dehors de toute préoccupation de polémique et écrites sans passion. Elles présentent une suite de tableaux animés, aux chaudes nuances, qui reproduisent fidèlement les transformations successives qui ont fait de la capitale du monde païen le centre de la chrétienté. Le premier volume s'ouvre au temps de la République; la Rome impériale, avec ses monuments et ses institutions apparait ensuite à nos yeux. On assiste, en suivant l'ordre des époques, au martyre des premiers chrétiens, à la vie des catacombes, aux persécutions qui se muitplient.

La lutte de la philosophie contre la foi nouvelle vient à son tour occuper la scène. Les envahissements des barbares succèdent aux disputes, et de la grande confusion qui en est la conséquence se dégage peu à peu une Eglise de plus en plus forte. Nous sommes arrivés à saint Grégoire-le-Grand. De ce pontife jusqu'à l'avènement de Sylvestre II qui vient clore les dix premiers siècles de l'ère chretienne, le comte Dandolo nous montre les efforts tentés par le Saint-Siége pour la conversion des Lombards, des Anglo-Saxons, des Germains, des Slaves. En face de ce travail d'édification, on voit les progrès de l'islamisme propagé par Mahomet et les califes ses successeurs; et déjà la vieille ja lousie qui, dès le IVe siècle, animait l'Eglise d'0rient contre celle de Rome ne faisant que s'accroître, on entrevoit une séparation prochaine des deux Eglises. C'est aussi dans la même periode que, après avoir fondé l'unité religieuse de l'ancien monde romain, les Papes, au milieu de la décadence carlovingienne et de l'anarchie féodale, fundent cette souveraineté temporelle si menacée aujourd'hui,

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Par le talent déployé dans cette portion de l'œuvre, on peut juger de l'intérêt qu'elle est capable de produire en son entier. Le livre du comte Dandolo, grâce à son éloquence, à son impartialité et à sa modération, survivra, croyons-nous, aux écrits inspirés par les événements de notre temps.

C. A.

L'esprit du théâtre ou Pensées choisies des auteurs dramatiques les plus connus, recueillies et annotées par MM. LE POITEVIN DE L'EGREVILLE, SAINT-ALME fils. 1 vol. in-12. Chez Dentu, 1re série.

J'ai toujours admiré les compilateurs sincères et éclairés. Ces bénédictins du résumé littéraire sont pour moi des bibliothèques vivantes, ayant leurs rayons particuliers, leurs compartiments spéciaux, leurs casiers déterminés, comme les bibliothèques de bois, où chacun peut mettre la main, sûr d'y rencontrer ce qu'il cherche. Si jamais Bayle a eu raison quand il a dit : Un bon livre doit tenir lieu de bibliothèque, c'est certes quand il s'agit d'un ouvrage qui écrème tous les ouvrages sur la matière pour en former un tout sommaire et complet. Or tel est le livre de M. Le Poitevin. Qu'a voulu l'auteur? Extraire de tous les auteurs dramatiques les plus connus, tant anciens que modernes, tant nationaux qu'étrangers, les parties les plus saillantes, pour en former un faisceau à la façon des recueils des La Bruyère, des Vauvenargues et des La Rochefoucauld.

Un pareil travail ne s'improvise pas. Il faut des années et des années encore pour l'accomplir. « Cependant, à défaut d'invention, dit l'auteur, après avoir avoué que son édifice est construit avec des matériaux qui ne lui appartiennent pas en propre, nous espérons que le public nous tiendra compte de nos efforts. Vingt années ont à peine suffi pour mener à bien un pareil labeur! >> Mais pourquoi ce travail? dira-t-on. Les bibliothèques sont là. « On a calculé, dit l'auteur des Eléments de littérature, qu'à lire quatorze heures par jour, il faudrait huit cents ans pour épuiser ce que la Bibliotheque contient sur l'histoire seulement; cette disproportion désespérante de la durée de la vie avec la quantité de livres, dont chacun peut avoir quelque chose d'intéressant, prouve la nécessité des extraits. >>

Cette citation répond à la question. L'auteur a partagé son travail en quatre séries: 1r série, depuis Périclès jusqu'à François ler; 20, depuis François Ier jusqu'à la mort de Louis XIV; 3o, depuis le règne de Louis XV jusqu'à Napoléon, empereur; 4., depuis l'Empire jusqu'à nos jours. Cette division ne nous paraît pas logique. Elle nous paraft seulement établie, d'après, non pas le caractère de la production littéraire par époque, mais la quantité, la multiplicité de la production. Il est clair

que, dans l'espèce il faut surtout considérer les mœurs littéraires, toujours reflet des mœurs sociales, et que comprendre dans la même série les poètes, les dramaturges de Louis XV et ceux de la Terreur par exemple, c'est commettre forcément de la confusion, même en observant l'ordre chronologique. Quoi qu'il en soit, le travail de M. Le Poitevin est une œuvre colossale. La 1re série seulement est en vente. Elle comprend des prédécesseurs d'Eschyle à Machiavel; chaque extrait est précédé d'une notice biographique, non pas sortie de la plume érudite de M. Le Poitevin, mais empruntée aux meilleurs critiques, et suivi d'une liste bibliographique des ouvrages à consulter sur l'auteur. C'est là un document précieux pour les chercheurs, les travailleurs. Voici maintenant la division et l'ordre des matières de la 1re série: Auteurs dramatiques grecs des VIe, V, IVe IIIe siècles avant Jésus-Christ; auteurs latins: III, II, Ier siècles avant l'ère chrétienne et Ier siècle après Jésus-Christ; auteurs indiens et chinois antérieurs et postérieurs à Jésus-Christ; auteurs grecs, latins, français, italiens, espagnols, portugais, anglais : II, III, IV, XIIe, XIIIe, XV. et XVIe siècles après Jésus-Christ. Vient ensuite un appendice qui contient une liste chronologique des auteurs qui n'ont pas été traduits en français, une bibliographie des ouvrages relatifs au théâtre, une table des pensées, une table des auteurs, une table des matières. Par cette simple nomenclature, on peut apprécier l'importance de ce travail, le plus considerable qui ait été composé sur la matière sans aucun doute et qui fait le plus grand honneur à celui qui l'a conçu et rédigé.

E. M. DE LYDEN.

Etudes sur Molière. Vocabulaire de ses œuvres, avec éclaircissements philologiques et historiques (en allemand), par H. FRITSCHE, professeur à Vehlau. Danzig.

Ce travail dénote des recherches consciencieuses et intelligentes, une connaissance approfondie de la langue française. Il témoigne de la juste importance qu'on attache aujourd'hui en Allemagne à l'œuvre de Molière. L'auteur de ce vocabulaire a mis à profit les meilleurs commentaires français, notamment ceux d'Aimé Martin, d'Auger, de L. Moland, le Lexique de Génin, l'ouvrage estimable de M. Raynaud sur les médecins de Molière, les recherches de M. Soulié, etc. L'introduction qui précède ce vocabulaire est un morceau d'un véritable mérite, instructif même pour des Français. M. Fritsche y fait preuve d'un judicieux éclectisme entre les deux systèmes qui partagent les commentateurs français de Molière. Les uns, comme Grimarest et M. Aimé Martin, veulent voir dang tous les personnages du poète des portraits d'après nature, dont ils cherchent à deviner les originaux à l'aide d'inductions tantôt ingénieuses,

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tantôt des plus hasardées. Les autres, et notamment L. Moland, dédaignent ces recherches comme inutiles, sinon compromettantes pour la gloire du poète, et n'admettent qu'à contre cœur les ressemblances les plus évidentes. M. Fritsche prouve facilement qu'il y a exagération dans cet idéalisme aussi bien que dans le réalisme de l'école opposée; que Molière, à l'exemple de ses plus illustres prédécesseurs dans l'art comique, s'est plu à reproduire les traits les plus caractéristiques de personnages contemporains; qu'à la vérité, dans plus d'une circonstance, il a composé ses types de traits empruntés à différents modèles, dont la recherche devient dès lors assez aventureuse, mais que souvent aussi il a admis, comme moyen de succès, des ressemblances assez exactes pour que le public ne pût s'y tromper. Au fond, le professeur allemand pencherait plutôt pour les réalistes. « Supposons, dit-il, que Colin eût été de son temps un personnage tout à fait obscur, que ses poésies n'eussent jamais été imprimées, il ne manquerait pas aujourd'hui de savants critiques pour rejeter, comme absolument controuvée, l'assertion que le Trissotin de Moliére n'est autre chose que cet abbé Cotin.

DE F...

Dernières Élégances, par M. Charles CORAN. Paris, Alphonse Lemerre, 1869.

Voici un volume de bons vers, l'œuvre d'un véritable poète, et l'on comprend que M. Lemerre, dont on connaît le commerce familier avec les Muses, l'ait édité avec autant de soin et d'amour. Le titre pourra peut-être sembler un peu ambitieux, au moins en ce qui concerne l'épithète. J'ai dit peut-être; il n'est pas permis de supposer, en effet, que l'auteur a voulu faire entendre que ce serait la sa dernière œuvre poétique, car qui a bu à l'Hippocrene y retournera certainement boire. Les quelques vers de sa dédicace donnent plutôt à penser que le poète a voulu revenir au passé en l'honneur de la belle, aimable et vertueuse dame (rien de Brantôme, assurément?), en souvenir de Jaquelle il écrit. Dans tous les cas, le poète a réussi; il n'est pas une des pièces composant le volume qui ne soit d'une élégance rare et ne réalise completement le titre. Heureusement (j'appuie sur ce mot), M. Charles Coran fait fi de cette mignardise et de cette afféterie qui ont fait la gloire de Doral, Gentil-Bernard, le cardinal de Bernis, l'abbé de Lattaignant, le chevalier de Boufflers, et de tant de poètes élégants du siècle écoulé. Il se rapproche de Parny plus que de tous les autres. Il y`a dans sa manière une énergie et une virilité qui étonnent et séduisent en même temps. On sent le libre penseur sous le poète, et on lui pardonne ses accès de mièvrerie et son anacréontisme, parfois exagéré, en faveur de la façon leste et dégagée dont il traite les fadeurs du mysticisme. Dans une

pièce, ingénieux mais non pas innocent badinage, intitulée les Deux Substances, M. Coran raille fort agréablement le dualisme de l'âme et du corps. Il se représente sortant tout ahuri d'une fort obscure leçon de métaphysique où on lui impose de trouver l'esprit pur et le corps vil. C'est dur!

Au sortir de la leçon,
Triste profit! je suis double;
Je m'eloigne á la façon

D'un couple que le vin trouble,

s'écrie-t-il, et il se rapporte en deux morceaux à sa maîtresse, qui sait bien dissiper son trouble et lui prouver que les deux substances n'en font qu'une. C'est du pur matérialisme, comme on voit; ce qui n'empêche pas M. Coran d'être un poète de la bonne école. Lucrèce l'était bien, dans un autre genre. Il est certaines odes de ce volume que je préfère, n'en déplaise à M. Jules Janin, aux odes si vantées d'Horace; la fine épigramme lancée au Vin de Jurançon vaut les dithyrambes adressés au falerne.

Quel fin portrait du roi soleil que celui compris dans les quelques vers écrits, à Versailles, devant le médaillon de cire de Louis XIV! Et l'Orgie de Roses, et la Pastorale Minaudière, et les Trois Chinois, et l'Art d'aimer, petit poême avec cette épigraphe : Numero Deus impare gaudet! Je n'en finirais pas si je voulais énumerer toutes les perles de cet écrin.

En somme, M. Coran a pris les Grecs pour modėles, comme il le dit avec infiniment d'esprit dans son ode à Boileau. S'il professe une religion, c'est celle de ce peuple aimable et sensuel, profond admirateur de la forme. Je ne saurais, quant à moi, faire un crime à M. Coran de préférer la Vénus de Milo et le Bacchus indien, dans leur superbe nodité, à nos femmes peintes par elles-mêmes et si drôlement fagotées, et à nos cocodes habilles par un Bonne quelconque. De toutes les divinites de l'antique Olympe, celles que préfère M. Coran sont, sans contredit, Vénus et Eros. Aussi, les mères peuvent-elles faire leurs délices de ces petits poèmes, si lestement troussés, mais elles en défendront probablement et soigneusement la lecture à leurs filles.

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