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DIX-SEPTIÈME SIÈCLE.

Le xvi siècle, qu'on est convenu de désigner sous la dénomination trop générale de Siècle de Louis XIV, se divise en deux parties distinctes. La première comprend le règne de Louis XIII et la régence orageuse d'Anne d'Autriche, et finit au mariage de Louis XIV, vers 1660. Cette époque d'agitation et de troubles n'est guère que la continuation du XVIe siècle; on y voit régner les mêmes désordres dans les mœurs, la même imitation sans intelligence de l'antiquité, de l'Espagne et de l'Italie. De là, dans la littérature, la même licence d'expression, le même pédantisme, les mêmes pointes, les mêmes jeux de mots de l'Italie et cette emphase espagnole qui sont des caractères du siècle précédent, Cependant la langue s'épure, prend une forme constante et reçoit des règles fixes sous les auspices de l'Académie et sous la plume de Voiture, de Balzac et surtout de Descartes et de Corneille.

Mais ce n'est réellement que vers 1660 que commence la période qui porte le nom de Louis XIV. C'est alors qu'on vit éclore les chefs-d'œuvre dans tous les genres, et que la langue acquit ce degré de maturité et de perfection au dela duquel il semble qu'elle ne puisse que s'altérer. La prose, tour à tour vive, incisive, éloquente dans Pascal, mobile, inépuisable en formes et en mouvements dans La Bruyère, noble, harmonieuse dans Fénelon, devient, dans Bossuet, majestueuse comme la langue des prophètes.

BALZAC.

1394-1654.)

Jean-Louis de BALZAC Daquit à Angoulème. Après quelques voyages il se retira dans son château, et consacra son temps à correspondre avec ses amis sur toutes sortes de sujets. Ses Lettres, destinées à la publicité, obtinrent un succès immense et lui valurent le titre de grand épistolier. Aujourd'hui elles ne sont pas plus lues que celles de Voiture. On y remarque les deux défauts les plus opposés au genre épistolaire, l'enflure et l'affectation. Balzac tombe dans ces défauts à force de vouloir être sublime, comme Voiture y tombait en cherchant à être agréable. Mais il ne faut pas oublier que ces deux auteurs écrivirent plus de trente ans avant l'apparition des Lettres provinciales.

Les Discours de Balzac sont bien supérieurs à ses Lettres. Le style y est plus assorti aux pensées et aux sentiments, et s'élève en plus d'un endroit à une véritable éloquence. Balzac, disciple de Malherbe et foriné par ses leçons, opéra dans la prose la réforme que son maître avait faite dans la poésie : il lui donna le premier de la grandeur, de la noblesse, du nombre et de l'harmonie,

Balzac au cardinal de La Valette.

MONSEIGNEUR,

L'espérance qu'on me donne depuis trois mois que vous devez passer tous les jours en ce pays m'a empèché jusqu'ici de vous écrire, et de me servir de ce seul moyen qui me reste de m'approcher de votre personne.

A Rome, vous marcherez sur des pierres qui ont été les dieux de César et de Pompée; vous considérerez les

ruines de ces grands ouvrages dont la vieillesse est encore belle, et vous vous promènerez tous les jours parmi les histoires et les fables; mais ce sont des amusements d'un esprit qui se contente de peu, et non pas les occupations d'un homme qui prend plaisir de naviguer dans l'orage. Quand vous aurez vu le Tibre, au bord duquel les Romains ont fait l'apprentissage de leurs victoires et commencé le long dessein qu'ils n'achevèrent qu'aux extrémités de la terre; quand vous serez monté au Capitole, où ils croyoient que Dieu étoit aussi présent que dans le ciel, et qu'il avoit enfermé le destin de la monarchie universelle; après que vous aurez passé au travers de ce grand espace qui étoit dédié aux plaisirs du peuple, je ne doute point qu'après avoir regardé encore beaucoup d'autres choses, vous ne vous lassiez à la fin du repos et de la tranquillité de Rome.

Il est besoin, pour une infinité de considérations importantes, que vous soyez au premier conclave, et que vous vous trouviez à cette guerre qui ne laisse pas d'ètre grande pour être composée de personnes désarmées. Quelque grand objet que se propose votre ambition, elle ne sauroit rien concevoir de si haut que de donner en même temps un successeur aux consuls, aux empereurs et aux apôtres et d'aller faire de votre bouche celui qui marche sur la tète des rois et qui a la conduite de toutes les âmes.

Attila et les fléaux de Dieu.

Il devoit périr cet homme fatal, il devoit périr, dès le premier jour de sa conduite, par une telle entreprise ;

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