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Il repugnare alla divina voglia :

Stolto, ch'al ciel s'agguaglia, e'n obblio pone,
Come di Dio la deftra irata tuone.

Chiama gli abitator' dell'ombre eterne
Il rauco fuon della tartarea tromba ;
Treman le fpaziofe atre caverne,
E l'aer cieco a quel rumor rimbomba.
Në ftridendo cofi dalle fuperne
Regioni del cielo il folgor piomba,
Nè fi fcoffa già mai trema la terra,
Quand i vapori in fen gravida ferra.
Orrida maeftà nel fero afpetto
Terrore accrefce, e più fuperbo il rende.
Roffeggian gli occhi; e di veneno infetto,
Come infaufta cometa, il guardo fplende.
Gli involve il mento, e fu l'irfuto petto
Ifpida, e folta la gran barba fcende;
Ed in guifa di voragine profonda,
S'apre la bocca d'atro fangue immonda.

Quali i fumi fulfurei, ed infiammati
Efcon di mon Gibello, e'l puzzo, e'l tuono ;
Tal della fera bocca i negri fiati,
Tale il fetore, e le faville fono.
Mentre ei parlava, Cerbero i latrati
Ripreffe, e l'Idra fi fe muta al fuono :
Refto Cocito, e ne tremar' gli abissi,
E in quefti detti il gran rimbombo udiffi.
Tartarei numi, di feder più degni
Là foura il fole, ond'è l'origin voftra,
Che meco già da' più felici regni
Spinfe il gran cafo in questa oribil chiostra ;

Gli antichi altrui fofpetti, e i fieri fdegni
Noti fon troppo, e l'alta impresa noftra
Or colui regge a fuo voler le ftelle,
E noi fiam giudicate alme rubelle.

Ed in vece del di fereno, e puro,
Dell'aureo fol, degli stellati giri,
N'hà qui rinchiufi in quefto abisso ofcuro;
Ne' vol, ch'al primo onor per noi s'afpiri.
E pofcia (ahi quanto a ricordarlo è duro!
Questo è quel, che più inafpra i miei martiri. )
Ne bei feggi celefti hà l'uom chiamato,

L'uom' vile, & di vil fango in terra nato.

Tout le poëme de Milton femble fondé fur ces vers, qu'il a même entièrement traduits. Le Taffe ne s'appefantit point fur les refforts de cette machine, la feule peut-être que l'austérité de fa religion & le fujet d'une croifade duffent lui fournir. Il quitte le diable le plutôt qu'il peut, pour préfenter fon Armide aux lecteurs; l'admirable Armide, digne de l'Alcine de l'Ariofte dont elle eft imitée. Il ne fait point tenir de longs difcours à Belial, à Mammon, à Belzébuth, à Satan.

Il ne fait point bâtir une falle pour les diables; il n'en fait pas des géans pour les transformer en pygmées, afin qu'ils puiffent tenir plus à l'aife dans la falle. Il ne déguise point enfin Satan en cormoran & en crapaud.

Qu'auraient dit les cours & les favans de l'ingénieuse Italie, fi le Taffe, avant d'envoyer l'efprit de ténèbres exciter Hidraot, le père d'Armide, à la vengeance, se fût arrêté aux portes de l'enfer pour s'entretenir avec la Mort & le Péché; fi le Péché lui avait appris qu'il était fa fille, qu'il avait accouché d'elle par la tête;

qu'enfuite il devint amoureux de fa fille; qu'il en eut un enfant qu'on appela la Mort, que la mort (qui est fuppofée masculin) coucha avec le Péché, (qui est fuppofé féminin) & qu'elle lui fit une infinité de ferpens qui rentrent à toute heure dans fes entrailles, & qui en fortent.

De tels rendez-vous, de telles jouiffances font aux yeux des Italiens de finguliers épisodes d'un poëme épique. Le Taffe les a négligés, & il n'a pas eu la délicateffe de transformer Satan en crapaud, pour mieux inftruire Armide.

Que n'a-t-on point dit de la guerre des bons & des mauvais anges que Milton a imitée, de la gigantomachie de Claudien? Gabriel confume deux chants entiers à raconter les batailles données dans le ciel contre DIEU même ; & enfuite la création du monde. On s'eft plaint que ce poëme ne foit prefque rempli que d'épisodes; & quels épifodes! c'eft Gabriel & Satan qui fe difent des injures; ce font des anges qui fe font la guerre dans le ciel, & qui la font à DIEU. Il y a dans le ciel des dévots & des espèces d'athées. Abdiel, Ariel, Arioc, Rimiel, combattent Moloch, Belzebuth, Nifroch; on fe donne de grands coups de sabre; on fe jette des montagnes à la tête avec les arbres qu'elles portent, & les neiges qui couvrent leurs cimes, & les rivières qui coulent à leurs pieds. C'eft-là, comme on voit, la belle & fimple nature!

On fe bat dans le ciel à coups de canon; encore cette imagination eft-elle prife de l'Ariofte; mais l'Ariofte femble garder quelque bienséance dans cette invention. Voilà ce qui a dégoûté bien des lecteurs italiens & français. Nous n'avons garde de porter

notre jugement; nous laissons chacun fentir du dégoût ou du plaifir à sa fantaisie.

On peut remarquer ici que la fable de la guerre des géans contre les dieux, femble plus raifonnable que celle des anges, fi le mot de raisonnable peut convenir à de telles fictions. Les géans de la fable étaient fuppofés les enfans du ciel & de la terre, qui redemandaient une partie de leur héritage à des dieux, auxquels ils étaient égaux en force & en puiffance. Ces dieux n'avaient point créé les Titans; ils étaient corporels comme eux. Mais il n'en eft pas ainfi dans notre religion. DIEU est un être pur, infini, toutpuiffant, créateur de toutes chofes, à qui fes créatures n'ont pu faire la guerre ni lancer contre lui des montagnes, ni tirer du canon.

Auffi cette imitation de la guerre des géans, cette fable des anges révoltés contre DIEU même, ne se trouve que dans les livres apocryphes attribués à Enoch, dans le premier fiècle de notre ère vulgaire, livre digne de toute l'extravagance du rabinisme.

Milton a donc décrit cette guerre. Il y a prodigué les peintures les plus hardies. Ici ce font des anges à cheval, & d'autres qu'un coup de fabre coupe en deux, & qui fe rejoignent fur le champ; là c'est la mort qui lève le nez pour renifler l'odeur des cadavres qui n'existent pas encore. Ailleurs elle frappe de fa maffue pétrifique fur le froid & fur le fec. Plus loin, c'est le froid, le chaud, le fec, & l'humide, qui fe disputent l'empire du monde, & qui conduifent en bataille rangée des embryons d'atomes. Les queftions les plus épineufes de la plus rebutante fcolaftique, font traitées en plus de vingt endroits dans les termes même de l'école.

Des diables en enfer s'amusent à disputer sur la grâce, fur le libre arbitre, fur la prédeftination, tandis que d'autres jouent de la flûte.

Au milieu de ces inventions, il foumet fon imagination poëtique, & la reftreint à paraphraser dans deux chants, les premiers chapitres de la Genese.

God faw the light was good.

And light from darkness divided;

Light the day and darkness night he nam'd.
Again God faid: Let be the firmament . . .
And faw that it was good...

C'eft un refpect qu'il montre pour l'ancien teftament, ce fondement de notre religion.

Nous croyons avoir une traduction exacte de Milton, & nous n'en avons point. On a retranché, ou entièrement altéré plus de deux cents pages, qui prouveraient la vérité de ce que j'avance.

En voici un précis que je tire du cinquième chant. Après qu'Adam & Eve ont récité le pfeaume CXLVIII, l'ange Raphaël defcend du ciel fur fes fix ailes, & vient leur rendre vifite; & Eve lui prépare à dîner. "Elle écrafe des grappes de raifin, & en fait du vin "doux qu'on appelle mouft; & de plufieurs graines, » & des doux pignons preffés, elle tempéra de douces " crêmes.... L'ange lui dit, bon jour, & fe fervit de ,, la fainte falutation dont il ufa long-temps après " envers Marie la feconde Eve: Bon jour, mère des ,, hommes, dont le ventre fécond remplira le monde "de plus d'enfans qu'il n'y a de différens fruits des arbres de DIEU entaffés fur ta table. La table était "un gazon & des fiéges de mouffe tout autour, & fur

; fon

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