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glorieuse balafre', reçue sur le champ de bataille, ne témoignait-elle pas de sa vaillance? Il était même de sang royal de complaisants historiens avaient découvert qu'il descendait de Charlemagne !

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Henri III n'était pas un obstacle. Qui empêcherait de le détrôner, d'enfermer dans un couvent ce roi dégénéré et fainéant, «< comme Pépin, l'ancêtre des Guises, fit à Childéric ? » Mme de Montpensier, la sœur du Balafré, montrait avec complaisance des ciseaux d'or qu'elle portait suspendus à sa ceinture. Elle les destinait à donner au roi débonnaire sa troisième couronne, celle de moine, après celles de Pologne et de France!

4. La sainte Ligue. Les catholiques unissent toutes leurs forces pour mener à bien leur dessein. Une vaste association se forme, la sainte Ligue. Dans toutes les villes, seigneurs et bourgeois catholiques en font partie. Les ligueurs se proposent d'éloigner du trône le protestant Henri de Navarre. Mais leur désir le plus ardent est de renverser le descendant déshonoré des Valois, d'appeler à la royauté l'héritier des carolingiens, l'homme qu'ils chérissent, Henri de Guise. Ils sont sûrs du succès. N'ont-ils pas avec eux le pape qui excommunie le roi de Navarre et les armées du roi d'Espagne?

4. La guerre des Trois Henri. Bataille de Coutras (1587). Succès de Henri de Guise. La situation de Henri III était critique; il était abandonné de tous. Il fallait se démettre ou se soumettre. Le roi avili préfère l'humiliation. Il recherche l'alliance de ses pires ennemis, les ligueurs. Avec eux, il marche contre les protestants.

L'armée royale, commandée par un favori, le duc de Joyeuse, est « toute brillante de clinquants, d'écharpes en broderies, de casaques de velours ». Elle est complète

1. Balafre, longue coupure cicatrisée faite, particulièrement sur le visage, par une arme tranchante.

2. Clinquants, ornements qui brillent et qui n'ont aucune valeur.

ment défaite à Coutras1 par les vaillants soldats de Henri de Navarre,« n'ayant que des armes grises, sans ornements, de grands collets de buffles et des habits de fatigue2 ».

La même année, Henri de Guise remporte à Auneau3 et à Vimory deux victoires décisives sur les protestants allemands. Les deux adversaires de Henri III étaient victorieux, lui seul était battu.

5. Journée des Barricades (1588).— Les Parisiens, ligueurs acharnés, reçurent avec mépris le roi vaincu. Partout sur son passage furent proférés les cris de « Vive Guise! ». Son heureux rival vint le braver dans Paris. Le Balafré sollicite la permission d'entrer dans la capitale; elle lui est refusée; il la prend ; il désobéit. Le peuple en délire poursuit Henri de Guise de ses acclamations; des hommes, des femmes se jettent à ses pieds, embrassent ses vêtements. Plein d'audace, il vient au Louvre mème imposer ses conditions. Le roi de France boit jusqu'à la lie le calice de l'humiliation 5.

Tant de jactance fait sortir Henri III de sa torpeur. Il tente un coup de force. Des Suisses sont mandés à Paris; ces étrangers sont prêts à réduire par les armes les séditieux, à jeter Guise en prison.

Mais le peuple se révolte. A tous les coins de rues, les chaînes sont tendues: des barricades s'élèvent jusqu'en face du Louvre; les Suisses sont désarmés. Henri III est à la merci de son rival. La fuite seule, une fuite honteuse, le soustrait au sort qui l'attend.

6. Les États généraux de Blois. Assassinat de Henri de Guise (1588). S'échappant presque seul pendant la nuit, Henri III avait quitté Paris en maudissant sa capitale révoltée. Il avait juré de n'y rentrer que

1. Coutras, ville du département de la Gironde.

2. Expressions de Péréfixe, historien de l'époque de Louis XIV. 3. Auneau, village du département d'Eure-et-Loir.

4. Vimory, village du département du Loiret.

5. Boire le calice jusqu'à la lie, boire jusqu'à ce qu'on trouve les résidus au fond du verre; souffrir quelque chose de pénible, de douloureux.

victorieux et par la brèche. Qu'il fallut en rabattre de ces beaux projets de vengeance! Trop faible, que pouvait-il faire? Pour la seconde fois, il dut se soumettre, accepter de ses ennemis la convocation des états généraux à Blois. Mais les députés sont tous des ligueurs, partisans acharnés de Henri de Guise. Tous veulent la déchéance, l'abdication.

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Henri III prit alors la plus criminelle des résolutions : le roi de France ne recula pas devant un assassinat !

Le 23 décembre, le duc de Guise fut mandé au château de Blois pour parler au roi dans son cabinet. Il entre dans l'antichambre. Quarante-cinq seigneurs, fidèles compagnons de Henri III, l'attendent. Ils se lèvent et saluent. Le duc soulève la tapisserie qui le sépare du cabinet royal. Tout à coup, il est frappé d'un coup de dague dans le dos. Tous entourent le malheureux sans défense, le

1. Dague, poignard qui se porte suspendu à la ceinture.

poignardent sans pitié ! «< Ha! mes amis! Ha! mes amis ! » tels sont les seuls mots qu'il peut prononcer. Il se débat; il traîne ses ennemis jusqu'au pied du lit du roi ; c'est là qu'il expire!

Henri III se crut vraiment roi. « Je suis redevenu roi de France, dit-il à sa mère, puisque j'ai fait tuer le roi de Paris. » Plus perspicace, la rusée Italienne lui répondit: << Ce n'est pas tout de tailler, mon fils, il faut savoir recoudre. >>

7. Henri III s'allie aux Protestants. Quel parti pouvait-il prendre, en effet? Il était toujours le vaincu; il s'était de plus déshonoré par un assassinat! La rage des catholiques ne connut plus de bornes en apprenant qu'un coup de poignard avait brisé leur idole. Les Parisiens firent des processions avec des chandelles allumées qu'ils éteignaient sous leurs pieds, en criant: « Périsse ainsi le dernier des Valois! » Ce n'était partout qu'imprécations, cris de malédiction! Objet de mépris et de haine pour les catholiques, Henri n'avait plus qu'une ressource : s'allier avec les protestants!

Les deux rois de

8. Mort de Henri III (1589). France et de Navarre vinrent mettre le siège devant Paris. Ils établirent leur quartier général à Saint-Cloud. Mais Henri III devait bien vite recevoir le juste châtiment de son crime.

La ruse la mieux ourdie
Peut nuire à son inventeur;
Et souvent la perfidie

Retourne sur son auteur.

Un moine exalté et fou, Jacques Clément, crut être l'instrument de la vengeance divine en assassinant Henri III. Il vint de Paris à Saint-Cloud, sollicita une audience. C'était le matin; Henri se levait; il reçut le meurtrier dans sa chambre. Le méchant moine s'avança; hypocritement, il présenta une lettre, tandis qu'il tenait caché sous sa longue manche un couteau effilé. Le prince lit le papier;

Jacques Clément profite de ce moment de distraction; il enfonce le couteau dans le ventre du roi qui expire quelques heures après (1er août 1589).

Un meurtre ne s'excuse jamais; mais n'était-ce pas la Providence qui punissait ce roi de France assassin? Heureusement la France, ballottée par la violente tempête des guerres de religion, touche enfin au port. Le sauveur entre en scène : Henri de Navarre, le futur Henri IV, l'espoir des bons Français !

RÉSUMÉ

Henri III (1574-1589) est roi de Pologne au moment où meurt son frère Charles IX. Henri se sauve de Varsovie comme un étourdi.

Les guerres de religion reprennent avec plus de fureur, surtout à la mort du dernier frère de Henri III, le duc d'Alençon (1584). Henri III n'a plus de proche parent. A qui appartiendra la couronne de France ? Les catholiques ne veulent pas du protestant Henri de Navarre. Pour éloigner ce prince du trône, ils forment la sainte ligue.

Henri III est obligé d'accepter l'alliance des ligueurs. Mais son armée est défaite à Coutras, tandis que Henri de Guise est vainqueur des protestants à Auneau et à Vimory. Le roi de France vaincu est bravé dans Paris par le duc de Guise. A la suite de la journée des Barricades, il s'enfuit de la capitale et convoque les États généraux à Blois. Les députés catholiques sont tous partisans de Henri de Guise. Pour se débarrasser de son rival, Henri III le fait assassiner (1588).

Le peuple de Paris est exaspéré; Henri III n'a plus qu'une ressource: s'allier aux protestants. Avec Henri de Navarre, il vient mettre le siège devant Paris; mais il est assassiné à Saint-Cloud par le moine Jacques Clément (1589).

Questions.

1. De qui était fils Henri III et quels étaient ses frères ?

2. Comment Henri III a-t-il abandonné le trône de Pologne ?

3. Quel était le caractère de Henri III?

4. Pourquoi l'année 1584 est-elle

une date importante dans l'histoire des guerres de religion?

5. Quel était le but de la sainte Ligue?

6. Quelle est la bataille perdue par les troupes de Henri III et quelles sont les victoires rem

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