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Enfin, un jour, après de pénibles recherches et d'insupportables souffrances, un heureux parmi ces milliers de pionniers découvre une pierre plus grosse, plus étincelante que les autres, qui le récompense des peines passées et l'aide à affronter l'avenir. Mais que de luttes il faut soutenir, quel esprit de patience et de persévérance il faut posséder dans l'âme pour de si maigres résultats!

Songez, chers lecteurs, que le nombre des diamants capables de procurer une fortune à leur propriétaire est extrêmement restreint; que ces diamants sont connus et ont un nom dans l'histoire. Beaucoup d'entre vous ont sans doute vu, à la grande exposition de 1867, le beau diamant de la couronne de France, acheté au commencement du dix-huitième siècle par le Régent, qui lui a laissé son nom. Ce diamant a coûté 2,250,000 fr. à cette époque, et on estime que son prix a au moins doublé de nos jours. En dehors de cette pierre magnifique, dont le poids est de 236 karats (1), il en existe une pesant 279 harats et demi, appartenant au Grand-Mogol, une de 195 karats en Russie, et une autre de 139 karats en Autriche.

Or, au-dessous de ces merveilles, il est d'autres diamants très-rares, quoique moins brillants,

(1) Le karat pèse 212 milligrammes, et le diamant d'un karat, taillé, vaut environ 250 francs; mais au-dessus de cette grosseur, son prix augmente proportionnellement au carré du poids; ainsi un diamant de 20 karats vaudrait 20 × 20 × 250 francs, c'est-àdire 100,000 fr.

moins lourds et moins parfaits, dont la valeur varie naturellement selon la qualité et le poids, mais qui sont recherchés à des prix élevés, dès qu'ils apparaissent, par les personnes aisées qui relèvent ainsi la richesse d'une parure par l'éclat de leur feu et la limpidité de leur eau.

Croyez-vous que la valeur du diamant serait aussi élevée si on le trouvait disséminé comme les. galets du rivage? Non, car il suffirait de se baisser pour le ramasser et il n'aurait pour ainsi dire pas de prix. C'est donc à sa rareté et à la difficulté qu'on éprouve à se le procurer qu'il doit la haute valeur à laquelle il est taxé.

III

Rapport entre l'offre et la demande.

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Les objets de

fin d'un marché. Une botte d'asperges. consommation pendant le siége de Paris. Des étrennes originales. Prix au moyen âge. Influence de la civilisation. Le rôle des machines dans la détermination des prix. sous Louis XIV. L'abaissement des prix étend la consommation. Le prix et la valeur obéissent aux lois naturelles.

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Le drap

Je vous disais, dans ma dernière causerie, que la valeur des choses et leur prix variaient suivant certaines conditions. Or, la circonstance qui exerce sur les prix le plus d'influence est sans contredit le rapport entre l'offre et la demande; en d'autres termes, un objet coûte plus ou moins cher, selon qu'il est plus ou moins demandé, ou plus ou moins offert.

Une chose est chère quand l'acheteur court après le marchand; elle se cote au contraire à des prix moins élevés quand c'est le marchand qui court après l'acheteur. Toutes les fois que le possesseur d'une marchandise quelconque cherche un acheteur, on dit qu'il y a offre de la marchandise, et toutes les fois qu'un consommateur désire acheter un objet et qu'il le recherche, qu'il y a demande de cet objet.

on dit

Pour mieux vous faire comprendre le sens de cet exposé de principes, permettez-moi de prendre un exemple parmi les actes les plus vulgaires

de la vie, tel que l'acquisition sur le marché des objets de consommation nécessaires à un ménage.

Vous avez tous assisté à l'ouverture d'un marché; vous savez par expérience à quel mouvement, à quel va-et-vient elle donne naissance. Les marchandises sont exposées peu à peu aux regards des acheteurs, et selon qu'elles sont plus ou moins recherchées ou que le nombre des amateurs est plus ou moins considérable, les prix s'établissent.

Supposons que sur ce marché il y ait cent bottes d'asperges réparties entre les mains de dix marchandes de primeurs. Ces asperges sont de même grosseur, de même qualité, de même provenance, et, tout compte fait, chaque botte revient à environ 1 franc, représentant les frais de culture et le prix du transport du lieu de production au lieu de vente.

Afin de faire un bénéfice, les cultivateurs e les marchands fixent le prix de chaque botte à 2 francs. Au début du marché, on s'empresse autour des primeurs et on semble vouloir se les disputer. Aussitôt le cours s'élève et les marchands voulant profiter de l'affluence des demandes deviennent plus exigeants et élèvent leurs prix à 2 fr. 50.

Les premières demandes ont ainsi été plus nombreuses que les offres, et naturellement les prix sont restés élevés; mais à la fin du marché, il reste dix bottes d'asperges non vendues; les acheteurs deviennent plus rares et les vendeurs se voient exposés à remporter leurs marchandises.

Que feront-ils ?

Ils offriront leurs asperges, et, pour allécher le public, ils cèderont à 1 fr. 50, 1 fr. 25 et peutêtre même à 1 franc, les mêmes asperges vendues 2 fr. 50 au début du marché.

D'où vient cette différence? Est-ce que le travail de culture des dernières asperges n'aura pas été le même que pour les premières ? Absolument le même; mais la demande ayant cessé pour faire place à l'offre, le prix a été abaissé et s'est mis au niveau des besoins ou des désirs des acheteurs.

Beaucoup d'entre nous ont été à même de se rendre compte de ce fait économique pendant l'investissement de Paris en 1870.

Au début, les approvisionnements étant considérables dans les magasins, et l'opinion publique, confiante dans la valeur de nos armées, ne voulant pas admettre que le siége pût durer longtemps, les prix des objets de consommation étaient modérés. Mais, lorsque les mois se furent écoulés sans apporter de changements dans la situation; que le pain, d'abondant et de sain qu'il était, fut devenu rare, puis composé d'éléments divers, de paille, de riz, de fèves et même de cendre; que toutes les choses nécessaires à la subsistance eurent disparu peu à peu, les prix s'élevèrent rapidement et atteignirent des proportions pour ainsi dire fabuleuses. Un œuf se payait 2 fr; le beurre, 80 fr. le kilogramme, et quel beurre et nous avons vu acheter la moitié d'un boeuf pour la

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