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facultés, leur tempérament, la nature de leurs territoires et leur situation géographique. Le Nord envoie ses produits au Midi, qui correspond avec l'Ouest et nourrit les régions de l'Est. Partout, grâce à la séparation des travaux, l'échange s'établit et s'accroît, et plus le progrès de la science se fait sentir, plus la fraternité se fonde entre les peuples, plus les frontières s'abaissent et plus les intérêts se mêlent.

L'humanité entière produit pour chacun de ses membres, comme chacun de ses membres travaille et produit pour elle. Tandis qu'un individu, dans le cercle de son intelligence, de ses moyens et de ses forces, apporte sa part modeste à la richesse de l'humanité, cent mille autres, répartis sur les points du globe les plus éloignés et les plus opposés, concentrent tous leurs efforts pour satisfaire à ses besoins et à ses caprices. C'est pour lui que le sel qui assaisonne les aliments est extrait des profondeurs de l'Océan, que les Antilles fournissent le sucre, que le café vient de la Martinique ou du Brésil, que le paysan chinois récolte le thé ou que les Moluques, dans l'océan Indien, expédient les épices.

C'est ainsi que la division du travail, tout en facilitant et en étendant considérablement la production, contribue à développer le sentiment de la sociabilité dont elle est l'expression la plus. nette et la plus franche.

Le capital.

Sa formation.

V

Capital fixe et capital circulant.

Capitalistes et capitaux. Utilité du capital.

Les premiers

Pro

- Ce que produisent cinquante centimes.
Les équitables pionniers de Rochdale.

mille francs.
dige des petits capitaux.

De tous les mots de la langue française, il n'en est peut-être pas de plus simple, de plus facile à expliquer et à comprendre que celui de capital, et il n'en est pas un seul sur lequel on ait échafaudé plus d'erreurs grossières ou d'utopies dangereuses.

Grâce aux déclarations des prétendus défenseurs du droit de l'ouvrier, le capital est représenté à certaines classes de la société comme un épouvantail, comme un obstacle à tout progrès social et matériel.

<< Le capital nous écrase », entendez-vous crier autour de vous; « l'infâme capital est la cause de la misère », répète-t-on sans cesse ; et s'il vous prenait fantaisie de demander aux insensés ou aux demi-savants qui se font l'écho de ces sottes paroles, de les expliquer, bien certainement ils ne pourraient le faire et resteraient confondus.

Qu'est-ce donc alors que le capital, et comment se forme-t-il? Le capital, c'est tout ce qui sert à produire : c'est la bêche du jardinier, la machine de l'industriel, les granges, les charrettes et les che

vaux du fermier; ce sont les outils du maçon, les aiguilles et le fil du tailleur; c'est encore, cher lecteur, la plume dont je me sers pour converser avec vous; c'est, en un mot, l'instrument avec lequel nous pouvons nous livrer à une occupation productive de salaires ou de revenus. Plus les instruments sont nombreux et d'une valeur élevée, plus le capital est puissant et plus il peut produire.

Mais ce capital, ces instruments et ces valeurs qui le composent n'ont pas toujours existé; il a fallu, pour les acquérir, se donner de la peine, s'imposer des efforts, et cette acquisition n'a pu se faire que par le travail.

Nous pouvons donc dire que l'origine du capital est le travail. C'est, en effet, avec du travail accumulé, économisé, que le capital se forme et devient propre à la production.

Pour tout réduire à un seul terme, LE CAPITAL N'EST AUTRE CHOSE QUE DU TRAVAIL ACCUMULÉ.

Supposez deux ouvriers doués de la même activité et de la même intelligence; confiez-leur le même travail et attribuez-leur le même salaire, 3 francs par jour. L'un d'eux, rangé, économe, consommera 2 fr. 50 pour sa subsistance et son entretien et mettra de côté 50 centimes, tandis que son compagnon, imprévoyant et léger, dépensera au jour le jour le montant de sa solde. Or l'épargne de l'ouvrier économe, accumulée avec un soin et une régularité extrêmes, s'élèvera, à la fin d'une année, à la somme d'environ 200 francs, et formera ce que nous appelons un capital. A

l'aide de ce capital, accru par de nouvelles économies, l'ouvrier pourra, au bout d'un temps déterminé, acquérir les moyens de s'établir, de travailler pour son compte, pendant que son camarade, toujours sans ressources et sans avances, sera contraint de rester peut-être toujours simple ouvrier.

Le capital se présente sous deux formes, quoique, dans les deux cas, il puisse s'évaluer en argent. Il y a le capital fixe et le capital de circulation.

Le capital fixe se compose d'objets qui ne se reproduisent ni en nature ni en argent, par l'effet de l'industrie; tandis que le capital de circulation, au contraire, se reproduit sous une forme quelconque.

Prenons par exemple un cultivateur fermier. Son capital fixe comprend ses champs, ses prés, des faux, des faucilles pour couper les foins et les céréales, des charrettes et des chevaux pour enlever les produits, des greniers, des granges, des étables, enfin des bâtiments en rapport avec l'étendue de l'exploitation. Tout cela forme pour ainsi dire l'instrument principal avec lequel il est possible au fermier de travailler et de produire.

Mais ce capital ne lui suffit pas; il lui faut des semences qui se reproduiront, des bestiaux qu'il engraissera et revendra sur les marchés, des provisions pour nourrir ses domestiques et des avances de fonds pour payer leur salaire. Cette nouvelle série de valeurs compose ce que nous appelons

le capital de circulation, parce qu'il se reproduit, soit sous sa forme primitive, soit sous une nouvelle forme, en donnant à son propriétaire un bénéfice. Qu'est-ce, en effet, que le grain qu'il récolte, si ce n'est la représentation de la semence qu'il a jetée dans ses sillons, du salaire et des aliments qu'il a donnés à ses serviteurs, du foin dont il a nourri ses chevaux?

Tout ouvrier qui travaille pour son propre compte, tout industriel qui monte une manufacture, possèdent nécessairement un capital sous ces deux formes. Pour un menuisier, le capital fixe est représenté par sa boutique, son établi et ses instruments de travail, tandis que les planches. dont il fait provision composent son capital circulant. Le capital fixe du manufacturier, sont l'usine et les machines à vapeur; le capital circulant, ce sont les matières premières qu'il emploie et l'argent nécessaire à la paye des ouvriers.

ce

Mais alors, me direz-vous, le plus modeste artisan qui possède un coin de terre ou même seulement ses outils est donc un capitaliste?

Certainement, puisque le capital est le résultat de l'accumulation du travail, et que, pour acheter les instruments qui lui sont nécessaires, cet artisan a dû économiser une certaine somme sur son salaire.

Cependant, ajouterez-vous, quand on parle des capitaux, il semble qu'on entende toujours parler de l'argent.

Cela tient absolument à ce qu'on apprécie mieux

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