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d'une vie sereine aura plus fait pour eux que tel zélateur inquiet, troublé de mille soucis, empressé au salut des autres au point qu'il ne prend pas le temps de rentrer en lui-même et de pacifier son âme en réglant le désordre de ses penchants. Ordonnons notre existence selon la raison; éclairons-la des lumières supérieures de l'esprit; faisons régner dans l'orbite de notre vie la loi de gravitation morale, puis tendons la main à nos frères pour les aider dans une tâche pareille. Si chacun observait ce précepte et s'appliquait de toutes ses facultés à l'humble accomplissement d'une œuvre bien simple en apparence, on verrait de proche en proche, sans aucune de ces secousses violentes si redoutées des hommes du pouvoir, la justice s'établir dans les murs; les mœurs finiraient par l'imposer aux lois; l'exemple d'un peuple libre, fort et heureux, serait donné au monde.

CHAPITRE XIII.

RELATIONS D'INFÉRIORITÉ.

DEVOIR DE FILIALITÉ Morale ou de DÉFÉRENCE.

Ce que les disciples doivent à leurs maitres, c'est seulement une sorte de foi provisoire, une simple suspension de jugement; mais ils ne lui doivent jamais un entier renoncement à leur libertté, ni une perpétuelle servitude d'esprit.

BACON.

Faites-vous semblables à l'un de ceux-là. disait à ses disciples, en leur montrant les petits enfants pressés autour de lui, le suave et doux révélateur qui mourut sur la croix. Une soumission reconnaissante, un amour intellectuel qui s'attache moins à l'individu qu'à

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la lumière de sa parole, une déférence qui n'a rien de servile parce qu'elle s'accorde à la dignité de l'âme et non aux dignités conventionnelles de la société, tel est à peu près le seul devoir des inférieurs envers les supérieurs dans le règne de la liberté. Et encore suppose-t-il au moins une vague conscience du bien et du mal. Sans cette conscience nul devoir (6). Le devoir naît de la connaissance et s'y proportionne; plus elle est étendue, plus il s'accroît. Pour les enfants, pour les hommes sans culture, pour les pauvres d'esprit en un mot, il est simple, facile, tout intérieur. On pourrait le réduire à la bonne volonté de connaître la justice, au respect de ceux qui l'enseignent et la pratiquent.

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Et ils le suivaient dit l'évangile. Que pouvait faire de plus, en effet, la foule ignorante et grossière que de pressentir la vérité dans la bouche de Jésus et de s'attacher, attentive et pieuse, à ses pas pour la recueillir?

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CHAPITRE XIV.

RAPPORTS DE L'HOMME

AVEC LA NATURE INFÉRIEURE.

L'existence physique et morale de l'uni-
vers, quelle qu'en soit la cause première,
tend vers nne direction constante et détermi-
née, malgré l'influence des causes passagères
qui la dérangent; et l'homme en se confor-
mant à cette direction suprême et innée, au
lieu de s'unir aux causes perturbatrices, au
nombre desquelles il ne se range que trop
souvent, surtout dans l'ordre moral, peut de-
venir, dans ses propres mains, un moyen
énergique de développement et de perfection-
nement général. »
CABANIS.

Quelque effort que puisse faire l'homme pour s'isoler et abstraire sa personnalité de l'ensemble des êtres, il est incessamment rappelé au sentiment des lois qui l'y rattachent, et ramené,

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par la force muette des choses, dans le cercle éternellement mouvant de causes et d'effets dont son apparition éphémère sur le globe terrestre n'occupe qu'un point insaisissable. La science, non plus que la philosophie, ne livrent encore jusqu'ici que des conjectures à notre impatience, quand elles tentent d'expliquer le mécanisme universel et le lien mystérieux qui joint le monde moral au monde physique; mais pourtant tout fait pressentir l'unité aux esprits supérieurs. Les recherches individuelles et les observations analytiques sur les lois de modalité qui régissent la substance tendent à se grouper, à s'engrener, et convergent vers une haute synthèse qui sera, selon toute apparence, et comme je le disais plus haut, la religion de l'avenir.

Les destinées du genre humain sont inséparablement liées aux révolutions de la planète qu'il habite; les sociétés se fondent et se développent en majeure partie suivant les nécessités de climat et la configuration du sol*. La vie

M. de Humboldt caractérise ces rapports par le terme expressif d'individualité géographique.

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