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phocle puiserait son inspiration et trouverait des - sympathies. Il est donc à croire qu'une complète renaissance de l'art, à laquelle, pour ma part, je crois fermement, ne peut être, au point où nous en sommes, que la conséquence d'une renaissance politique ou plutôt sociale, encore à l'état de fermentation; mais les efforts du gouvernement n'en doivent pas moins dès aujourd'hui, en considérant l'art comme une partie essentielle de l'instruction publique, lui frayer des voies de plus en plus libres pour le rendre, ainsi que l'éducation, de plus en plus accessible à tous.

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A deux époques à jamais dignes de mémoire, en 89 et en 1830, la France exaltée, on peut véritablement dire inspirée, s'est insurgée contre le droit ancien et a fait triompher la liberté. Depuis lors l'Europe entière, l'Angleterre

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d'autres organes des

exceptée qui accomplit par métamorphoses sociales soumises à d'autres lois et nous considère un peu comme des parvenus dans la science politique, gouvernements et peuples ont les yeux sur nous, épiant avec inquiétude ou espoir le moindre mouvement de cette monarchie démocratique qui demeure encore dans l'esprit de tous, inalgré les faiblesses et les inconséquences qu'on lui reproche, la personnification active, intelligente et forte de la liberté moderne.

Il pourra donc sembler étrange et malsonnant de dire que l'esprit français, dans ce qu'il a de caractéristique, n'est point, à proprement parler, un esprit de liberté. Mobile à l'excès, doué d'une faculté critique incomparable, ardent et téméraire pour peu qu'on l'excite, le Français n'a point d'égal dans l'art de fronder, de harceler, de renverser le pouvoir. Mais s'agit-il d'assurer, dans des institutions durables, l'indépendance conquise, cette mobilité d'enfant, cette ardeur aussi promptement éteinte qu'elle est vite allumée, cet esprit de critique qui dégénère en raillerie, et surtout une vanité outre

cuidante passée dans ses veines avec le sang gaulois (157), forment autant d'obstacles à l'union et à la persistance des volontés nécessaires au maintien des libertés civiles. Rien ne séduit moins ces effervescences un peu fanfaronnes que le modeste concours qu'exige de chaque citoyen la conservation d'un gouvernement libre; rien de plus onéreux pour ce peuple léger, distrait, frivole, que la pratique assidue et sévère de ces droits dont la théorie, prêchée par des bouches éloquentes, le jette en de fiévreuses extases. Chez une nation aussi amoureuse de renommée la seule conscience n'a point de leviers assez forts pour soulever les égoïsmes personnels; il y faut le sentiment de l'honneur qui ne saurait être intéressé dans l'accomplissement obscur d'une tâche commune à tous, dont les résultats sont grands, à la vérité, mais lointains, indirects et d'appréciation difficile. De là une sorte d'indifférence, d'affaissement, succédant à des efforts vigoureux, mais éphémères; de là un relâchement de tous les ressorts de la vie publique tel que l'illégalité s'y glisse sans bruit et sans contrôle, et qu'en ayant soin de

conserver quelques dehors, l'arbitraire s'établit et s'exerce aisément au sein de cette nation devenue insensible, dont les cris d'indépendance tout à l'heure encore ébranlaient le monde.

Notre liberté constitutionnelle est, comparativement au reste de l'Europe, très-apparente; mais examinons-la en soi, nous lui trouverons plus d'éclat que de solidité, plus de surface que de profondeur; elle ne descend pas au delà d'une première et très-mince couche de la société, audessous de laquelle s'étend une zone impénétrable d'ignorance et de misère dont nul de ses rayons n'a traversé encore l'opaque densité. Chose inexplicable! Un des peuples les plus spirituels du monde est aussi celui chez lequel l'instruction est le moins répandue. Une nation favorisée entre toutes, pour qui nulle branche des connaissances humaines n'a manqué de verdir, qui semble avoir reçu du Nord et du Midi, pour les assimiler à son génie propre, les éléments les plus divers de la vie intellectuelle : des Grecs, l'invention et le goût; des Latins, la clarté, la force et la justesse; des Anglais, la profondeur, et des Germains, l'étendue; la

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