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des gamins ou des demi-ouvriers, et les margeurs sont souvent des femmes. Ces demi-ouvriers ne parviennent pas toujours à devenir conducteurs. Ce sont vraiment les parias du métier. Il a même été question de ne plus les admettre comme membres de la section des adhérents (société des apprentis typographes).

A Bruxelles, on compte actuellement environ 2 mille compositeurs typographes, 150 conducteurs et plus de 200 margeurs, margeuses, leveurs de feuilles et pédalistes.

Parmi eux, très peu d'étrangers. Cependant plusieurs Allemands sont occupés comme conducteurs; et leur nombre tend à s'accroître, par suite de l'introduction de machines allemandes dans de nombreux ateliers.

En revanche, beaucoup de provinciaux. La grande moitié des ouvriers typographes de Bruxelles sont originaires de la province; quelques-uns n'habitent même pas l'agglomération : ils font tous les jours la navette.

L'affluence des provinciaux est une vraie calamité pour les ouvriers typographes de Bruxelles et pour leur syndicat.

Tout contribue à attirer à Bruxelles les ouvriers typographes du pays entier : la poussée générale vers les grands centres et vers la capitale du pays; le nombre et l'importance des imprimeries de l'agglomération bruxelloise; enfin, la disproportion excessive entre les salaires de Bruxelles et ceux de la province et l'admirable organisation corporative des typographes bruxellois.

Enfin, dans ces derniers temps, diverses circonstances ont accéléré ce mouvement d'immigration. Par suite de la multiplication extraordinairement

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rapide et de la prospérité inouïe des imprimeries de Bruxelles, les bras manquaient il y a cinq ans. Or, à ce moment même, un établissement très important fut créé et l'on y occupa jusqu'à 250 ouvriers. Les typographes des provinces répondirent en masse à l'offre de travail. Bientôt après, à la suite d'une grève antérieure et d'autres démêlés, de nombreux Anversois vinrent chercher du travail dans la capitale. Enfin, la grande grève de 1900 détermina les patrons qui résistèrent au mouvement à recruter en province un nouveau personnel.

Or, la maison qui provoqua jadis le manque de bras et l'arrivée de nombreux typographes de province n'occupe plus qu'un nombre restreint d'ouvriers; la prospérité extraordinaire et l'activité fébrile des imprimeries ont été suivies d'une forte crise; le chômage sévit partout et, l'emploi de la machine à composer se généralisant de plus en plus, met encore tous les jours des typographes sur le pavé.

On comprend que, dans ces conditions, l'arrivée de nouveaux ouvriers de province soit une calamité. Les chômeurs sont excessivement nombreux. Pour un grand nombre d'entre eux, aucun espoir ne subsiste plus de trouver encore un gagne-pain dans la typographie.

L'engagement des ouvriers se fait d'une manière très simple les patrons qui sont en bons termes avec le syndicat s'adressent à son délégué permanent; celui-ci envoie immédiatement les ouvriers demandés. En règle générale, il y a toujours des ouvriers qui chòment, et ils sont rapidement à la disposition des patrons. De longs pourparlers ne sont pas nécessaires. Comme nous le verrons, le contrat de travail se conclut très simplement.

Si le patron, pour un motif quelconque, ne veut point s'adresser au syndicat, il ne sera jamais en peine de trouver des bras: nous venons de dire pourquoi.

L'ouvrier est assez facilement admis, pourvu qu'il sache bourrer des lignes. Quand il y a beaucoup de besogne, on pourra toujours, dans les grandes maisons, cn tirer parti pendant quelques semaines, quitte à le remercier quand la période de presse sera passée.

Les aptitudes professionnelles de la généralité des ouvriers typographes sont insuffisantes; une grande partie des compositeurs ne savent que bourrer des lignes. C'est surtout l'apprentissage qui fait défaut. L'apprentissage était jadis obligatoire et sévèrement réglementé. Dans la partie historique de ce travail, nous avons détaillé cette réglementation telle qu'elle était en vigueur avant la Révolution française.

Maintenant, nous vivons sous le régime de la liberté du travail. L'apprentissage n'a pas été supprimé, mais il n'y a plus ni obligation, ni réglementation légale en Belgique. Il en est autrement dans beaucoup de pays. En France, la loi du 22 février 1851 a réglementé l'apprentissage, sans toutefois l'imposer. Mais c'est surtout dans les pays germaniques que les mesures législatives sont nombreuses et énergiques : récemment encore, en 1897, l'Allemagne et l'Autriche ont modifié et complété leur Code industriel dans le sens d'une réglementation plus sévère: l'apprentissage y est obligatoire.

A défaut de réglementation légale, nous avons à Bruxelles ce qu'on peut appeler la réglementation syndicale. Elle se résume comme suit :

Conditions d'admission comme apprenti: être àgé d'au moins quatorze ans, habiter l'agglomération,

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