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DES

HOMMES ILLUSTRES

DE PLUTARQUE,

REVEUES SUR LES MSS,
E T

TRADUITES EN FRANCOIS,

AVEC

DES REMARQUES HISTORIQUES ET CRITIQUES, & le Supplément des Comparaifons qui ont efté perduës. ON Y A JOINT LES TESTES QUE L'ON A PU TROUVER

ET

Une Table generale des Matieres.

Par M. DACIER, de l'Académie Royale des Inscriptions & Belles
Lettres, Secretaire perpetuel de l'Académie Françoife,
Garde des Livres du Cabinet du Roy.

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Chez

A PARIS,

MICHEL CLOUSIER, Quay de Conty, à la Charité.
NICOLAS GOSSELIN

ET

au Palais, à l'Envie.

ANTOINE URBAIN COUSTELIER › Quay des Augustins.

M. DCCXXI.

AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY.

CAIUS MARIU S

OUS ne fçaurions dire quel eftoit le troifiéme nom de Caïus Marius, non plus que celui de Quintus Sertorius, qui tint long-temps. l'Efpagne, ni celui de Lucius Mummius, qui deftruifit Corinthe. Car le nom d'Achaïcus d'Achéen, qu'on donna à ce dernier, fut un furnom tiré de fa victoire, comme celui d'Africain, qui fut donné à Scipion, & celui de Macedonien, qui fut donné à Metellus. Pofidonius a voulu fe fervir fur tout de cet argument pour refuter ceux qui ont cru que le troiTom. IV.

A

fiéme nom des Romains eftoit leur nom propre, comme Camillus, Marcellus, Caton; car fi cela eftoit, dit-il, il s'enfuivroit de-là que ceux qui n'avoient que deux noms, n'en auroient point eu de propre. Mais Pofidonius ne prend pas garde que par ce raifonnement il fait d'un autre cofté que les femmes font fans nom propre; car il n'y a jamais eu de femme à qui on ait donné le premier des trois noms qu'on donne aux hommes, & que Pofidonius pretend eftre leur veritable nom, & que des deux autres le premier eft le nom commun, le nom de famille, comme les Pompeiens, les Manliens, les Corneliens, car c'est comme on dit les Heraclides, les Pelopides, & que le dernier eft un nom de distinction, un furnom, qui fert comme d'épithete, & qui eft tiré du naturel, des actions, des paffions, des avantures, ou de la figure du

Mais Pofidonius ne prend pas garde que par ce raifonnement.] Pofidonius avoit condamné ceux qui croyoient que le troifiéme nom des Romains, eftoit le nom propre. Et il les avoit condamnez fur cette unique raifon qu'il s'enfuivroit de-là que ceux qui n'avoient que deux noms, n'en avoient point de propre, puifqu'ils n'avoient pas ce troifiéme, qui eftoit feul le nom propre felon leur fentiment. Et Plutarque condamne à fon tour Pofidonius fur ce que fi le premier nom eftoit le nom propre, comme il le fouf

tenoit, les femmes eftoient donc fans nom propre, puifque jamais on n'a donné aux femmes le premier des trois noms qu'on a don né aux hommes. Mais je ne fçay fi cela eft abfolument vray, il me femble avoir veu dans l'antiquité des femmes appellées Caïa, Lucia, Publia, & Valere Maxime dit expreflément, antiquarum mulierum frequenti in ufu prenomina fuerunt, Rutilia, Cefellia Rodocilla, Murrulla, Burra, à colore dicta. Ifta pranomina à viris tracta funt, Ċaia, Lucia. Pu blia, Marea.

corps de ceux auxquels on l'a donné, comme Macrinus, Torquatus, Sylla, car ces furnoms font comme ceux de Mnemon, d'Aigle, de Callinicus. Mais fur cela la diversité de l'usage fourniroit de grands fujets de differtation.

Pour ce qui eft de l'air & de la figure de Marius, nous avons veu de lui à Ravenne dans les Gaules, une ftatuë de marbre, qui reprefente parfaitement tout ce l'on que rapporte de la feverité & de la rudeffe de fes mœurs. Careftant La severité & la né robuste, courageux, & uniquement propre de Marius paroisaux armes, & ayant eu une education plus guer- foit dans ses ftatuëse riere que civile, il apporta dans le commerce

rudeffe des mœurs

des hommes un naturel fauvage & rebours, Son naturel sau& quand il fut en autorité, il le montra tous-vage & rebours. jours intraitable & feroce ; on dit mefine qu'il Il ne voulut jane voulut jamais ni apprendre les lettres Grec- mais apprendre les

Mais fur cela la diverfité de Pufage fourniroit de grands fujets de differtation.] Cela eft certain, car,comme Ruauld le remarque, autre a efté l'ufage des preni rs temps de la Republique, & autre celui des derniers fous les Empereurs. Pofidonius avoit raifon par rapport à fon temps, car alors, dit-il, c'eftoit le premier des trois noms qui eftoit le nom propre : & Plutarque a auffi raifon par rapport au fien, car alors on faifoit le nom propre du troifieme. Cette matiere des noms & furnoms des Romains a efté traitée par de trés-fçavants hommes.

Ceux qui voudront s'enfoncer
dans cette difcution, trés-en-
nuyeufe, & trés-peu utile, n'ont
qu'à lire Sigonius. Robortellus,
Brodæus, Politien & autres. Pour
moy j'ay tousjours creu que des
trois noms Marcus Furius Camil-
lus, le fecond eftoit le nom gene-
ral de la famille, la famille des
Furiens, le premier le non propre
qui diftinguoit les branches &
ceux qui les compofoient, & le
troifiefme eftoit un furnom, &
comme un nom de guerre, qui
enfin devenoit le nom propre,
comme nous le voyons encore
parmi nous.

Lettres Grecques

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