Les Romains n'envoyoient point encore des Preteurs Lucullus. en Grece du temps d: que Damon avoit tués. L'affaire fut portée devant le Gouverneur de Macedoine, car en ce temps-là les Romains n'envoyoient pas encore des Preteurs en Grece. Les Avocats, qui parlerent pour la Ville, en appellerent au tefmoignage de Lucullus. Le Gouverneur lui efcrivit, & Lucullus dans fa refponse ayant attefté la verité du fait, comme il s'eftoit paffé, la Ville gagna par ce moyen fon procés, où il s'agiffoit fon procés fur le de fa ruine totale. Les habitants, fe voyant ga- Lucullus. rantis de ce grand danger, firent faire une fta- Reconnoissance tuë de marbre de Lucullus, & l'éleverent dans de Cheronée pour la place près de celle de Bacchus. Cheronée zazne tesmoignage lui. Beau fentiment Pour nous, quoyqu'éloignés de ces tempslà par plufieurs generations, nous eftimons que le bien fait de ce grand homme s'eftend juf- de Plutarque. qu'à nous qui vivons aujourd'huy, & que nous devons porter noftre part de la reconnoiffance qui lui eft deuë. C'eft pourquoy perfuadés qu'une image qui reprefente les mœurs & les fentiments, eft plus parfaite & plus belle que celle qui ne rend que la forme du corps & les traits du vifage, nous embrafferons dans cette œuvre des vies paralleles, la vie de ce personnage en fuivant tousjours la verité. Car pour lui tef Car pour lui tefmoigner noftre reconnoiffance,] Qui auroit dit à Lucullus que le fervice, ou pluftoft la justice qu'il rendit à la ville de Cheronée en cette occasion, lui vaudroit deux cents Tome IV. ans après une recompenfe aussi Image qui re prefente la vie & les mans plus belle que celle qui ne reprefente que le corps. Plutarque a imité dans ces vies L'adresse d'un pein. tre qui peint une belle perfonne. Les defauts doi vent eftre legere ment exprimés, Loo les beautés rendues dans toute leur ve risé & leur force. moigner noftre reconnoiffance, il fuffit de per bien connu aujourd'huy que par pas affés menagé pour un hom- Nous fommes obligés de les re pluftoft comme des manques de vertu , que comme des vices, & ne pas nous amufer à les reprefenter exactement dans noftre histoire, mais les marquer legerement comme espargnant & refpectant la pauvre Nature humaine, qui ne produit point d'original tout parfait, & qu'on puiffe prendre pour un modelle achevé de beauté, de vertu, & de fagesse. Aprés avoir bien penfé qui je pourrois comparer à Cimon, j'ay trouvé que je devois lui comparer Lucullus. Car ils ont efté tous deux de fe grands Guerriers; ils ont tous deux acquis beaucoup de reputation contre les Barbares; leur gouvernement a efté fort doux ; ils ont appaisé de grandes feditions dans leur Patrie, & l'un & Iautre ont gagné de grandes batailles, & erigé des trophees tres-efclatants. Car parmi les Grecs on ne trouve point de plus grand Capitaine que Cimon, & on n'en voit point parmi garder pluftoft comme des manques de vertu, que comme des vices.] Ce jugement est tres vray & tres jufte, les defauts qu'on trouve dans la vie des grands hommes, font comme ces petites taches qui fe rencontrent quelquefois fur un beau vifage, elles ne le rendent pas laid, mais elles l'empefchent feulement d'eftre d'une beauté parfaite. Ce que Plutarque dit icy des plus grands hommes doit eftre appliqué auffi aux plus beaux ouvrages. Comme efpargnant & respectant la pauvre Nature hunain.] L'é- Conformités qui trouvent entre Cimon Lucullus. les Romains de plus grand que Lucullus. Et if n'y en a pas non plus qui ayent pouffé plus loin leurs victoires, fi on excepte Hercule & Bacchus, & les exploits de Perfée contre les Ethiopiens, les Medes & les Armeniens, & ceux de Jason dans fon voyage de la Colchide. Si tant eft que depuis ce temps immemorial on ait pû conferver jufqu'à nous quelque chofe de la vie de ces deux derniers perfonnages qui merite. qu'on y adjoufte foy. Cimon & Lucullus ont encore cela de commun qu'ils ont tous deux laiffé leurs guerres imparfaites, car ils ont tous deux battu & affoibli leurs adverfaires, mais ils ne les ont pas entierement deffaits ni deftruits. On trouve fur-tout une grande conformité entre eux dans la generofité charmante & dans la courtoifie dont ils ufoient envers les Eftrangers qu'ils recevoient dans leur maison, & dans la magnificence & le luxe de leur defpenfe ordinaire. Nous oublions fans doute quelques autres ressemblances qu'il ne fera pas difficile de raffembler & de recueillir du recit de leurs vies. Origine de Cimon. Cimon eftoit fils de Miltiade & d'Hegefipy Si tant eft que depuis ce temps voit treize cents ans avant N. S. immemorial on ait pû conferver & le fecond fit fon expedition jufqu'à nous. ] Plutarque declare dans la Colchide quatre vingts icy aflez nettement qu'il dou- ans après le temps de Perfée. Ce te qu'on ait confervé quelque n'eft pas l'efloignement de ce memoire des actions de Perice temps immemorial qui en eft cau& de Jafon, dont le premier vi- fe, c'eft le defaut d'hiftoriens.. Thucydide l'hi , torien parent de Cimon. La mort de Thutombeau. foreft folloyée. cydide, & fon le, Thracienne de nation, & fille du Roy Olo- mariée. C'est-à-dire, la efcus. Miltiade pere de Cimon mourut en prison pour une amende qu'il ne put payer. Cimon dans fes premieres années eut une tres-mauvaise reputation, & fut fort diffamé comme un homme tres-diffolu, grand beuveur, jesselse. & entierement semblable à fon Ayeul Cimon, Dans les poemes qu'Archelaus &Melanthius firent en l'honneur de Cinon.] Deux poëtes elegiaques, le premier eftoit de Milet, ou felon d'autres d'Athenes, il eftoit grand Philofophe, & fut maiftre de Socrate, il florissoit Et entierement femblable à fon Cimon fort diffo lu dans fa |