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fois ridicule de chercher dans les institutions des anciens, le type des gouvernemens actuels (1).

Chez les nations modernes, au contraire, malgré les différences des mœurs, des usages, du caractère et du degré de civilisation, il existe des rapports tels, que souvent les institutions de l'une peuvent convenir à l'autre, mais toujours avec plus ou moins de modifications. En effet, ce serait une pensée bien fausse et bien dangereuse, de croire que telle ou telle législation politique est absolument applicable à tous les peuples indistinctement en cette matière, plus qu'en aucune autre, peut-être, le vrai et le bien ne sont que relatifs. Il entrait donc dans notre plan, comme nous venons de le dire, de recueillir seulement les actes et lois niques des gouvernemens modernes.

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Cela une fois décidé, une difficulté qu'on n'aperçoit pas d'abord, nous a long-temps arrêtés; c'est le choix à faire dans la législatión de chaque peuple, des lois et des actes qui forment sa constitution.

Qu'est-ce à proprement parler que la constitution? quelles sont les lois qui en font essentiellement partie? quelles sont les lois qu'on doit regarder comme organiques de la constitution? Les publicistes, les jurisconsultes ont laissé des définitions et des classifications plus ou moins propres à nous diriger dans notre choix. Il n'est pas inutile de rappeler celles qui nous ont paru les plus exactes: elles indiqueront la règle que nous avons suivie.

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voirs qui ont lieu dans un Etat, c'est-à-dire la manière dont ils y sont départis, le siége de la souveraineté et la fin que s'y propose la société civile (1). »

« Pour donner la meilleure forme possible à la chose publique, dit Rousseau, il y a diverses relations à considérer; premièrement, l'action du corps entier agissant sur lui-même, c'est-à-dire le rapport du tout au tout, ou du souverain à l'Etat..... Les lois qui règlent ce rapport portent le nom de lois politiques et s'appellent aussi fois fondamentales (2).

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Des jurisconsultes partant de ces principes, ont expliqué avec détail ce qu'on doit regarder comme lois politiques; ils les ont désignées en indiquant les matières qu'elles règlent. Domat (3) est entré à ce sujet dans quelques développemens; et le Répertoire de jurisprudence de Merlin s'exprime en ces termes (4) :

« Le droit public est général ou particulier; le droit publié général est celui qui règle les fondemens de la société civile, commune à plusieurs Etats et les intérêts que ces Etats ont les uns avec les autres. Le droit public particulier est celui qui règle les fondemens de chaque Etat.

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» L'objet du droit public particulier est en général de maintenir la police nécessaire au bon ordre et à la tranquillité de l'Etat, et de procurer ce qui est le plus avantageux à tous les membres de l'Etat, considérés collectivement et séparément.

(1) Aristote-Polit., liv. iv. chap. 1o. Voyez aussi Montesquieu, Esprit des lois, liv. 1er, chap. 3.

(2) Contrat social, liv. 11, chap. 12.

(3) Traité des lois, chap. xi, n° 40.

(4) Répertoire de jurisprudence, au mot Droit.

» Ainsi c'est à lui à régler tout ce qui concerne la Religion.

>> Un des plus grands objets du droit public de chaque Etat, c'est l'administration de la justice; mais tout ce qui y a rapport n'appartient pas également au droit public: il faut, à cet égard, distinguer la forme et le fond, les matières civiles et les matières criminelles.

» La forme de l'administration de la justice est du droit public, en matière civile aussi-bien qu'en matière criminelle; mais en général la disposition des lois au fond pour ce qui touche les particuliers en matière civile est du droit privé.

» Pour ce qui est de la punition des crimes, elle est certainement du droit public.

» Le droit public de chaque Etat a encore pour objet tout ce qui dépend du gouvernement des finances, comme l'assiette, la levée des impositions, etc. (1). »

Sur le passage que nous venons de citer, il importe de remarquer qu'en énumérant les différentes matières qui rentrent dans le domaine du droit public, l'auteur s'est écarté de la définition qu'il avait d'abord donnée; ou que du moins il a omis de faire une distinction importante, entre les lois politiques fondamentales, qui sont les bases de l'organisation politique, et les lois qui règlent cette organisation, et qu'on appelle à juste titre lois organiques, telles sont, par exemple, celles qui règlent les cérémonies publiques, les formes, mais seulement les formes de l'administration et de la justice; cette distinction est établie et développée avec autant de clarté que de précision par un jurisconsulte moderne:

(1) Voyez aussi Encyclopédie méthodique, au mot Droit.

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« Les lois politiques sont celles qui règlent les droits et les obligations dans les rapports de prince à nation, ou de souverain à citoyens et sujets. Les lois politiques fondamentales sont la condition essentielle et respective du pouvoir et de l'obéissance.

Les lois politiques constitutives sont l'ensemble des institutions principales qui forment l'essence d'un gouvernement, son caractère distinctif, ses analogies et ses différences avec tous autres.

» Les lois politiques institutives sont l'ensemble des institutions secondaires ou organiques, plus ou moins nécessaires au maintien et à la perfection des institutions principales.

» Les lois politiques circonstancielles sont l'ensemble des dispositions qui règlent généralement et indéfiniment, eu égard à l'ensemble des besoins et des moyens, tous les modes d'exercice du pouvoir, tous les priviléges de ses agens, tout ce qui importe à la conservation et au maintien du patrimoine public, des établissemens publics et de la police générale ; comme aussi toutes les garanties, tous les moyens de justice, de conservation ou d'indemnité pour les droits privés en souffrance contre les abus du pouvoir; ce sont là proprement les lois administratives (1). »

Dirigés par cette classification lumineuse, après avoir recueilli les lois fondamentales de chaque Etat, nous avons eu soin de réunir les lois organiques, et d'indiquer les dispositions diverses ou qui consacrent quelques règles fondamentales, ou qui modifient sur des points importans l'organisation générale. Ainsi,

(1) Sirey. Recueil gén. des Lois et Arrêts, t. xx, 20 p., p. 78.

pour la France, nous faisons remarquer, par exemple, que, si la procédure par jurés est consacrée en principe par la Charte (art. 65), l'organisation du jury tient au droit public, et nous indiquons les bases de cette organisation. En général, les lois pénales de tous les Etats ont été l'objet d'un examen sérieux; car c'est de la bonté des lois criminelles que dépend principalement la liberté des citoyens (1); et, sous ce titre de lois criminelles, nous comprenons, comme on doit bien croire, non-seulement les lois qui caractérisent les délits et qui déterminent les peines, mais encore celles qui règlent la forme et la composition des tribunaux, et qui garantissent à l'accusé l'exercice de tous ses droits.

On sent que ce n'est qu'avec de longs travaux et de pénibles recherches, que nous sommes parvenus à réunir les élémens de l'ouvrage que nous publions. Nous n'osons nous flatter d'avoir complètement réussi; mais, quel que soit le succès de nos efforts, nous espérons qu'on rendra justice à nos intentions, et qu'on ne confondra pas entièrement cette Collection avec les compilations pour lesquelles on n'a eu à consulter que l'ordre alphabétique et chronologique.

Toutefois, cet ouvrage n'atteindrait pas le véritable but que nous nous sommes proposé, s'il offrait les monumens de la législation, entièrement isolés de l'histoire des peuples. Comme nous l'avons déjà dit, la plupart des historiens, en retraçant les événemens, ont négligé de les montrer dans leurs rapports avec les institutions; ou ils ne l'ont fait que d'une manière insuffisante: cependant, c'est peut-être sous ce point de

(1) Montesquieu, Esprit des lois, liv. xu, chap. a.

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