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de famille, aux épouses et aux mères, à l'affection des jeunes citoyens, au courage de tous les Français.

Adresse de la Convention nationale au Peuple Français. 6 fructidor an 3 (23 août 1795.)

FRANÇAIS,

Après de longs orages, vous allez fixer vos destinées en prononçant sur votre constitution.

Depuis long-temps la patrie appelait à grand cris un gouvernement libre, qui trouvât dans la sagesse des principes la garantie de sa durée.

Vos mandataires ont-ils atteint ce but? Ils le croient; ils en ont fortement le désir.

Patriotes de 1789, qui restâtes purs au milieu des écueils révolutionnaires; généreux guerriers, qui versâtes votre sang pour la patrie; citoyens, qui aimez l'ordre et la tranquillité, acceptez-en le gage: il est dans le gouvernement qui vous est offert; lui seul peut, en nous donnant la paix, ramener par degré l'abondance et le bonheur.

Français, citoyens de toutes les professions, de toutes les opinions, ralliez-vous pour l'intérêt de la patrie: surtout ne portez pas de regards rétrogrades vers le point du départ. Des siècles se sont écoulés depuis six ans: et si le peuple fran çais est las de révolution, il ne l'est pas de liberté. Vous souffrez, il est vrai; mais ce n'est pas en faisant des révolutions nouvelles, c'est en finissant celle qui est commencée, que vous trouverez le terme de vos maux.

Non, vous n'imputerez point à la république, qui, jusqu'à ce jour, ne fut pas organisée, des malheurs qui ne sauroient se reproduire sous un gouvernement libre sans licence, et fort sans despotisme.

Peuple souverain, écoute la voix de tes mandataires; le projet de pacte social qu'ils t'offrent leur fut dicté par le désir de ton bonheur.

C'est à toi d'y attacher ton sort; consulte ton intérêt et ta gloire, et la patrie est sauvée (1).

(1) Le 1er vendémiaire an 4, la convention nationale déclara que la constitution était acceptée par le peuple français. Le recensement des votes établit que 1,057,390 citoyens avaient vote pour la constitution, et que 49,977 T'avaient rejetée.

TROIS pouvoirs avaient été créés par la constitution de l'an III, qu'on peut regardér comme une amélioration de celle de 1791. Le conseil des cinq cents, qui dut proposer les lois, le conseil des anciens, auquel fut attribué le droit de les sanctionner ou de les rejeter, et le Directoire exécutif, qui, par ses attributions, put exercer pendant un temps une influence telle, qu'on désigna l'époque de son existence sous le titre de Règne du directoire.

Cet acte avait été immédiatement suivi de deux fois; la loi du 5 fructidor, qui déclarait rééligibles les membres de la convention alors en activité, et celle du 13, portant que les assemblées électorales nommeraient d'abord les deux tiers des membres que chacune d'elles devaient fournir au corps législatif, et qu'elles les choisiraient, soit parmi la députation actuelle de leurs départemens, soit parmi les autres membres de la convention légalement éligibles.

Par ces mesures, le corps législatif, qui allait succéder à la convention, se trouvait composé des deux tiers de ses membrés, et devait prolonger Finfluence de cette assemblée, même après sa dissolution. Tout semblait tendre à ce but, Pour obtenir ce résultat, tout fut mis en usage par des hommes qui ayant goûté du pouvoir, ne pouvaient se résoudre à le laisser échapper de leurs mains.

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Cependant, lassées d'un régime dont elles croyaient avoir droit de se plaindre, les assemblées primaires de Paris se déclarèrent en permanence, et continuèrent leurs séances, malgré l'ordre de se dissoudre, qui leur avait été intimé; les sections initèrent leur exemple, refusèrent de reconnaître les décrets des 5 et 13 fructidor, et le 13 vendémiaire, elles marchèrent en armes sur la convention, qui repoussa la force par la force, et termina enfin sa session quelques jours après, laissant parmi ses actes, des exemples de vastes conceptions et d'idées ridicules, des monumens de génie et d'atrocité.

Le lendemain, le corps législatif se forma en séance générale pour procéder à sa division en deux conseils; et deux jours après furent nommés les cinq directeurs, pris encore parmi les membres de la convention.

L'intelligence ne put exister long-temps entre des corps dont les pouvoirs rivaux devaient nécessairement être en opposition conti

nuelle. D'un autre côté, la guerre au dehors et au dedans, les lois d'exception dont la plupart étaient encore en vigueur, tout concourait à aigrir les esprits. Le parti contre-révolutionnaire devenait tous les jours plus fort: il avait dominé dans plusieurs sessions électorales; et déjà on avait proposé, dans un comité secret des membres des conseils, de dissoudre le directoire.

Enfin, le 18 fructidor (4 septembre 1799) arriva; la scission entre les deux grands pouvoirs de l'Etat avait éclaté; les conseils extraordinairement convoqués s'étaient déclarés en permanence : trois des directeurs prirent enfin une mesure décisive; ils opérèrent un coup d'Etat, et ordonnèrent des proscriptions et des déportations deux membres du directoire, soupçonnés de favoriser le parti royaliste, cinquante-deux membres des conseils, et un grand nombre d'autres individus furent transportès à la Guiane.

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Cependant on vit bientôt que cette mesure, loin d'apporter le calme, n'avait fait, au contraire, qu'accroître les mécontentemens. Des mesures extraordinaires n'amenèrent que le changement de quelques individus dans le directoire, sans le faire changer de principes ni de conduite, et les ressorts de la machine politique continuèrent à se froisser jusqu'à ce que la suite des événemens eut amené un nouvel ordre de choses.

Ce fut le 18 brumaire, que le général Bonaparte, encore tout couvert de la poussière des camps, vint à la face de la France attenter aux droits les plus chers des nations. Le corps législatif est transféré à Saint-Cloud; les cinq cents prêtent, au milieu de l'agitation, un vain serment à la constitution. Bonaparte paraît dans l'assemblée; il veut parler; sa voix est étouffée le tumulte augmente; des grenadiers occupent les portes, et les baïonnettes viennent décider du nouveau mode de gouvernement.

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Les débris de l'assemblée se réunissent sous la présidence d'un frère du général, Lucien : la séance est reprise; le directoire est supprimé et remplacé par une commission consulaire composée de deux ex-directeurs et de Bonaparte lui-même. Un mois après fut publiée la constitution de l'an 3, qui créa le gouvernement consulaire.

'DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE,

DÉCRÉTÉE PAR LES COMMISSIONS LÉGISLATIVES DES DEUX CONSEILS

ET PAR LES CONSULS.

22 frimaire an 8 ( 13 décembre 1799).

TITRE PREMIER.

De l'Exercice des droits de cité.

ART. 1. La république française est une et indivisible. Son territoire européen est distribué en départemens et arrondissemens communaux.

2. Tout homme né et résidant en France, qui, âgé de vingt-un ans accomplis, s'est fait inscrire sur le registre civique de son arrondissement communal, et qui a demeuré depuis pendant un an sur le territoire de la république, est citoyen français.

3. Un étranger devient citoyen français, lorsqu'après avoir atteint l'âge de vingt-un ans accomplis, et avoir déclaré l'intention de se fixer en France, il y a résidé pendant dix années consécutives.

4. La qualité de citoyen français se perd,

Par la naturalisation en pays étranger; par l'acceptation de fonctions ou de pensions offertes par un gouvernement étranger; par l'affiliation à toute corporation étrangère qui supposerait des distinctions de naissance; par la condamnation à des peines afflictives ou infamantes.

5. L'exercice des droits de citoyen français est suspendu par l'état de débiteur failli, ou d'héritier immédiat, détenteur à titre gratuit de la succession totale ou partielle d'un failli; par l'état de domestique à gages, attaché au service de la personne ou du ménage; par l'état d'interdiction judiciaire, d'accusation ou de contumace.

6. Pour exercer les droits de cité dans un arrondissement communal, il faut y avoir acquis domicile par une année de résidence, et ne l'avoir pas perdu par une année d'absence.

TOME 1.

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7. Les citoyens de chaque arrondissement communal désignent par leurs suffrages ceux d'entre eux qu'ils croient les plus propres à gérer les affaires publiques. Il en résulte une liste de confiance, contenant un nombre de noms égal au dixième du nombre des citoyens ayant droit d'y coopérer. C'est dans cette première liste communale que doivent être pris les fonctionnaires publics de l'arrondissement.

8. Les citoyens compris dans les listes communales d'un département, désignent également un dixième d'entre eux. Il en résulte une seconde liste dite départementale, dans laquelle doivent être pris les fonctionnaires publics du dépar

tement.

9. Les citoyens portés dans la liste départementale, désignent pareillement un dixième d'entre eux : il en résulte une troisième liste qui comprend les citoyens de ce département éligibles aux fonctions publiques nationales.

10. Les citoyens ayant droit de coopérer à la formation de l'une des listes mentionnées aux trois articles précédens, sont appelés tous les trois ans à pourvoir au remplacement des inscrits décédés ou absens, pour tout autre cause que l'exercice d'une fonction publique.

11. Ils peuvent, en même temps retirer de la liste les inscrits qu'ils ne jugent pas à propos d'y maintenir, et les remplacer par d'autres citoyens dans lesquels ils ont une plus grande confiance.

12. Nul n'est retiré d'une liste, que par les votes de la majorité absolue des citoyens ayant droit de coopérer à sa formation.

13. On n'est point retiré d'une liste d'éligibles par cela seul qu'on n'est pas maintenu sur une autre liste d'un degré inférieur ou supérieur.

14. L'inscription sur une liste d'éligibles n'est nécessaire qu'à l'égard de celles des fonctions publiques pour lesquelles cette condition est expressément exigée par la constitution ou par la loi. Les listes d'éligibles seront formées pour la première fois dans le cours de l'an 9.

Les citoyens qui seront nommés pour la première formation des autorités constituées, feront partie nécessaire des premières listes d'éligibles,

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