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vue, que l'histoire mérite le plus d'être étudiée. Ainsi, sur chaque fait, on doit surtout remarquer quelle a été son influence sur la forme du gouvernement, et, réciproquement, en quoi la forme du gouvernement a influé sur les faits; il faut enfin considérer les événemens et les institutions politiques, tour-à-tour comme causes et comme effets, les uns à l'égard des autres. Nous savons d'ailleurs que pour que pour bien apprécier les institutions d'un peuple, il faut connaître leur origine, les modifications successives qu'elles ont éprouvées, les circonstances dans lesquelles elles ont été élevées, et avoir des notions exactes sur les mœurs, les usages, les habitudes et le caractère national de chaque peuple.

Dès-lors, nous avons cherché à retracer, dans des précis historiques, placés en tête de la constitution de chaque peuple, les diverses révolutions qu'ont éprouvées ses lois et la forme de son gouvernement. Ce travail en suppose un autre qui d'ailleurs était indispensable, c'est celui de rechercher et de recueillir les règles fondamentales, les usages constitutifs, consacrés par le temps et les mœurs des peuples, qui ont servi de bases aux lois positives, aux institutions actuelles, et qui même en ont tenu lieu pendant long-temps chez plusieurs nations; usages qui formaient ce qu'on peut appeler la constitution non écrite, et qui étaient en droit politique à peu près ce qu'étaient dans le droit civil nos anciennes coutumes. Pour présenter le résultat de nos recherches sur ce point, d'une manière plus frappante et qui en fit mieux apprécier l'ensemble, nous avons rédigé cette constitution non écrite, en la divisant par articles, en ayant soin d'indiquer toujours un grand nombre d'autorités, et en conservant les ex

pressions consacrées par l'usage, par les lois ou par les

. auteurs anciens.

Jusqu'ici, cette manière de présenter les règles fondamentales de chaque Etat, n'a point encore été employée; elle épargne les recherches; elle donne un résultat positif, et facilite la solution des points controversés, en rapprochant les opinions différentes. Cette partie de : notre travail, mérite peut-être quelque attention; car, ainsi que l'a dit un ancien : « Les lois qui sont imprimées » dans les mœurs du peuple, ont bien plus d'autorité, » et sont d'une tout autre importance que les lois écrites (1). »

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On doit bien croire que nous avons mis un soin particulier à réunir tous les élémens du droit public de notre pays. Nous avons donné au précis historique relatif à la France un peu d'étendue; et cela devait être ainsi, car le reproche adressé par nous aux -historiens en général, s'applique surtout aux historiens français. Nous osons ajouter que nos publicistes ont plutôt écrit des systèmes ingénieux, que montré la vérité sur plusieurs points importans; c'était donc pour nous un devoir de présenter un tableau plus étendu et plus complet des révolutions survenues dans nos institutions politiques, depuis l'origine de la monarchie, jusqu'en 1789, et de bien indiquer l'état des choses, à cette époque si mémorable.

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On a dit que les savantes recherches sur le droit » public ne sont souvent que l'histoire des anciens abus, » et qu'on s'est entété mal à propos, quand on s'est donné

(1) Arist. pol., liv. 1, chap. 17.

» la peine de les trop étudier (1). » Si nous avons bien fait entendre notre pensée, on sentira que ce reproche ne peut nous atteindre. En effet, nous avons voulu présenter l'histoire des anciennes institutions, pour que l'on pût, en les étudiant, et en voyant leurs effets, juger en quoi elles doivent être suivies, modifiées ou détruites. Le publiciste doit connaître les vices et les abus qui se glissent dans le corps politique, comme le médecin doit connaître les maladies qui attaquent le corps humain.

En résumé, l'Ouvrage que nous publions donne aux législateurs et aux publicistes un moyen prompt et facile de bien connaître, de rapprocher et de comparer les institutions politiques de toutes les nations civilisées; il offre à toutes les classes de citoyens l'histoire de leurs libertés et les titres authentiques de leurs droits; enfin, il est en quelque sorte le dépôt des actes sur lesquels est fondée leur existence politique. C'est maintenant à chacun d'apprécier l'intérêt, l'utilité du livre, et les intentions des auteurs.

(1) Traité des intérêts de la France avec ses voisins, par M. le marquis d'Argenson.

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CE titre marque à la fois l'objet et les limites du tableau que nous allons retracer. Il doit rapprocher les points principaux d'une partie de l'histoire nationale, trop négligée sans doute par les nombreux annalistes de nos exploits et de nos calamités. Il doit offrir au coup-d'œil rapide les diverses phases de l'état politique de la monarchie, depuis son établissement jusqu'à la révolution qui l'anéantit. Les discussions, les recherches fastidieuses en seront bannies, et rien ne fera languir la série des faits qui en auront été le résultat. Ces faits seuls, ainsi esquissés, formeront, nous osons le

dire, un travail neuf et d'un haut intérêt pour les Français de notre âge; ils jetteront un nouveau jour sur des principes et des vérités que la passion méconnaît sans cesse ; ils présenteront notre histoire d'un point de vue plus élevé et vraiment digne d'un grand peuple: enfin, ils auront ce grand but d'utilité que la sagesse a proclamé le premier besoin de notre situation, de lier tous les souvenirs à toutes les » espérances, en réunissant les temps anciens et les temps >> modernes (1), et peut-être d'opérer un heureux rapprochement entre des générations ennemies.

»

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§ ler.

Gouvernement de la Gaule romaine.

Il est nécessaire d'ouvrir ce Précis par quelques considérations, d'une part, sur la situation de la Gaule sous la domination romaine, et de l'autre, sur l'état de la fédération des nations germaniques, "connues sous le nom de Francs, avant la conquête du territoire gaulois. On doit sentir que ce fut de la fusion des lois et des institutions de l'une et de l'autre société politique, que naquit le gouvernement de France, comme ce fut le mélange de l'une et de l'autre race qui forma la nation française. Il faut donc considérer ces lois et ces institutions respectives des deux peuples, pour y reconnaître l'origine des premiers établissemens de notre monarchie, et les élémens de sa constitution. On peut même dire que quelques observations nettes et rapides à ce sujet, peuvent seules porter la lumière dans le chaos que présente notre histoire dans les premiers siècles.

Il n'est nullement question ici de suivre les Gaulois dans le cours de la lente métamorphose que leur firent subir les Romains, après avoir conquis leur territoire; il faut voir seulement ce qu'ils étaient vers le temps de la seconde conquête opérée par les nations germaniques; c'est-à-dire

(1) Préambule de la Charte.

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