Les pièces entièrement composées en vers de six syllabes sont infiniment moins nombreuses que celles où ils sont annexés à des vers d'autres mesures. Il y a beaucoup de poëtes chez lesquels on ne les trouve employés que de cette dernière façon, et c'est là leur destination la plus naturelle et la plus importante. CHAPITRE XXI. DES VERS DE CINQ SYLLABES Il en est de même du vers de cinq syllabes que de celui de six. Toutefois il est d'un usage beaucoup moins fréquent, et son histoire ne présente pas un intérêt bien vif. Sa mesure étant exactement la même que celle du premier hémistiche de l'hendécasyllabe, et reproduite encore dans le décasyllabe à hémistiches égaux, ses conditions rhythmiques sont déjà connues. Elles se réduisent à une tonique placée soit à la deuxième, soit à la troisième syllabe, partageart le vers en deux mesures de dimension aussi rapprochée que possible. Les vers de cinq syllabes sont rares, surtout dans notre ancienne poésie, et même au XVIe siècle. On compterait les pièces où ils figurent seuls, et celles où ils se trouvent joints à d'autres vers ne sont pas encore communes. Elles ne le sont guère plus dans le XVIIe et le XVIIIe siècel. Les plus connues de celles qui ont paru pendant ces deux périodes sont les Vers allégoriques adressés par Mme Deshoulières à ses enfants: Dans ces prez fleuris et quelques couplets des Cantates de J. B. Rousseau. Dans notre siècle, où toutes les formes de vers ont été mises en œuvre plus ou moins, celle-ci ne pouvait être entièrement négligée. Son emploi était d'ailleurs provoqué par la rénovation du décasyllabe à césure médiane, avec lequel elle s'allie tout naturellement. Quelques exemples pris de différentes époques montreront que, si peu cultivé qu'ait été le vers de cinq syllabes, sa construction a touours été telle en général qu'on vient de l'énoncer. Depuis quarante ans Regner si bon temps Entre toutes gens Et nous secourir A grand mal passé. Si pour peine prendre, Bœufs et brebis vendre, La vie retournée Pour la douce voye, MARTIAL DE Paris. Nombre de gendarmes Mais l'œil de Dieu veille Craintifs le réverent; Qui aussi esperent En sa grand bonté. Que donques nostre ame L'Éternel reclame, S'attendant à luy : Il est nostre adresse, Pavois et appuy. C. MAROT, Psaume XXXII. Si dés mon enfance Le premier de France J'ay Pindarisé, De telle entreprise Heureusement prise Je me voy prisé. Ça, page, ma lyre! Ses languettes d'or; Des beaux vers d'Horace Me plaist bien encor. P. DE RONSARD, Livre II, ode 2. Reprenons la danse, Allons, c'est assez; Prenons quelque treve, Un Roy seul demeure; Il vous faut tout rendre, Qui voulez tout prendre Un grand Capitaine Vous a teracez; Allons, Jean du Mayne, Les Roys sont passez. N. RAPIN, Satyre Ménippée. Telle qu'au matin La gentille Avette, Et de la Nature, Le plus gracieux; Tel, mon cher ABEILLE, Lorsque de retour Vers le mont Permesse Et les sait cueillir Des ans ni de l'âge Ne craint point l'outrage, De ne point vieillir. L'abbé REGNIER-Desmarais. Quand la mer est belle, Yvonne, comme elle, Chante dans son lit; Quand la mer moutonne, Frissonne et pâlit. Alerte et sauvage, Souvent sur la grève Assise elle rêve, L'oreille aux genoux. Sa mère s'alarme Et cache une larme, |