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Le Phérécratien, spondée, dactyle et spondée; sept syllabes aussi;

L'Adonique, dactyle et spondée ou trochée; cinq syl

labes.

CHAPITRE V.

DES DIFFÉRENTES FORMES DE VERS FRANÇAIS ET DES RÈGLES A OBSERVER DANS LE COMPTE DE LEURS SYLLABES.

La langue française, comme toutes les autres langues dérivées du latin, l'italien, le provençal, l'espagnol et le portugais, ne comprenant, à part un petit nombre d'exceptions, que des syllabes d'une quantité douteuse, les vers n'ont pu y être distingués que par le nombre des syllabes dont ils sont formés.

Nous avons dans notre langue des vers qui mesurent depuis une jusqu'à douze syllabes. Il en a été fait même de plus longs encore que ceux-ci, de treize et quatorze syllabes et même davantage; mais ce n'a été que des essais qui n'ont pas eu de suite et qui n'en pouvaient avoir, ainsi que nous le montrerons plus loin.

Toutefois il y a, dans le compte des syllabes des vers français, diverses particularités à observer.

10 Rappelons d'abord, pour la meilleure intelligence de ce qui va suivre, que chaque mot de notre langue, et ce fait d'ailleurs ne lui est pas particulier, comporte une accentuation, c'est-à-dire que, parmi les syllabes dont il est composé, il s'en trouve une sur laquelle, en le pronon

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çant, il se fait une certaine élévation de la voix. Cet accent, tout à fait indépendant de la quantité des syllabes, et qui n'a rien de commun avec les accents orthographiques, porte sur l'avant-dernière syllabe dans les mots terminés par une syllabe n'ayant d'autre voyelle réelle qu'un e muet. Dans tous les autres mots il porte sur la dernière syllabe. Ces syllabes accentuées sont dites syllabes toniques; les autres, syllabes atones. - Or, quand le dernier mot du vers se termine par une syllabe atone, c'est-à-dire ici dans la composition de laquelle il n'entre pas d'autre voyelle réelle que l'e muet, cette syllabe ne compte pas, de sorte que le vers de douze syllabes se trouve alors en réalité en avoir treize, celui de onze, douze, et ainsi de suite. Il en est ainsi, soit que l'e muet termine le mot, ou bien qu'il soit suivi d'un s, comme dans un certain nombre de substantifs et d'adjectifs pluriels, ainsi qu'à la seconde personne du singulier de divers temps de verbes, ou encore qu'il soit suivi des consonnes nt, ainsi que cela se voit dans les verbes, à la troisième personne du pluriel de quelques temps. Dans ces différents cas, la syllabe terminale se prononçant d'une seule émission de voix avec la syllabe qui la précède, il est rationnel qu'on ne la fasse pas entrer dans le compte des syllabes du vers. On appelle vers féminins ceux qui se terminent ainsi par une syllabe atone, quoique le mot dont cette syllabe fait partie puisse très-bien être un mot masculin, et on appelle vers masculins ceux qui se terminent par une syllabe tonique, même quand le mot est féminin. Il est à propos de faire remarquer que les syllabes

1. On dit voyelle réelle, en vue des mots où l'e muet est précédé d'un u qui ne se prononce pas, et sert seulement de signe orthographique pour accompagner le q ou donner un son dur au g, comme dans casque, époque, relique, vague, barque, fatigue, égiogue.

en aie, ée, eue, ie, oie, oue, uie, ue', soit au singulier, soit au pluriel, sont considérées dans les vers comme formant deux syllabes, quoique dans le langage courant, elles ne comportent qu'une seule émission de voix. Ainsi les mots futaie-s, ondée-s, bleue-s, génie-s, courroie-s, échoue-s, appuie-s, statue-s, donnent en fins de vers des terminaisons féminines, et les vers terminés par des mots de cette sorte sont des vers féminins. Il n'y a d'exception que pour la terminaison aient de la troisième personne plurielle de l'imparfait de l'indicatif et du conditionnel des verbes, laquelle est considérée comme masculine. Cette anomalie ne peut provenir de ce que l'e muet qui se trouve dans la dernière syllabe de ces mots ne se prononce pas, car il en est de même dans tous les mots en aie, ée, eue, etc., comme ceux que nous avons cités précédemment. Nous verrons plus loin quelle a pu être la raison de la différence qu'on y a faite.

2° Lorsqu'un mot, se trouvant dans l'intérieur d'un vers, est terminé par un e muet et qu'il tombe sur un mot commençant par une voyelle ou par un h muet, il y a élision, c'est-à-dire que, la dernière syllabe du premier mot se prononçant d'une même émission de voix avec la première syllabe du second mot, les deux ensemble ne comptent que pour une seule syllabe. Il n'en est pas de même lorsque la syllabe en e muet est mise au pluriel (avec s ou nt), ou lorsqu'elle tombe sur un mot commençant par une con

1. Il faut toutefois excepter, pour cette dernière terminaison, les cas où l'u, se trouvant précédé d'un q, ou placé après un g pour lui donner le son dur, ne sonne pas dans la prononciation. Ainsi, dans les mots bague, plaque, bègue, grecque, digue, musique, vogue, époque, etc., gue et que ne forment qu'une syllabe. Aigüe, ambigüe, cigüe, contigüe, exigue, sont des exceptions à cette exception: güe y est dissyllabe, ainsi que l'indique e tréma.

sonne; dans ces deux cas elle compte pour la mesure du vers et doit être prononcée en le lisant.

CHAPITRE VI.

DES ASSEMBLAGES DES VOYELLES, MONOSYLLABES,
DISSYLLABES OU DOUTEUX.

On sait qu'il y a dans notre langue beaucoup de mots où il se trouve deux, trois et parfois même jusqu'à quatre voyelles à la suite les unes des autres. La plupart du temps, dans le langage ordinaire, ces voyelles prononcées d'une seule émission de voix, sont comprises dans la même syllabe, tandis que, dans les vers, elles devront former deux et même trois syllabes. Il y aura aussi des cas où deux ou trois voyelles consécutives étant réellement diphthongues ou triphthongues, c'est-à-dire ne pouvant pas se séparer dans la prononciation, ne donneront lieu qu'à une seule syllabe. Enfin il y en a qui sont douteuses, c'est-à-dire qu'on peut à volonté les réunir ou les séparer, en faire une ou deux syllabes. De tout cela il est essentiel, on le conçoit, pour la mesure des vers, de pouvoir faire la distinction. Nous donnons donc ici la liste, par ordre alphabétique, de toutes les réunions de voyelles qui, dans les mots de notre langue, peuvent donner lieu à quelque incertitude. Nous nous abstiendrons seulement d'y comprendre cellesci aie, ée, eue, ie, oie, oue, ue, uie, dont il a déjà été question; elles feront l'objet d'une observation particulière.

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AÉ, à la fin des mots toujours dissyllabe. Exemples :

Aglaé, Danaé, Pasiphaé, et autres noms propres tirés du grec; dissyllabe aussi dans l'intérieur des mots, empruntés tous à des langues étrangères. Ex.: Ma-estro.

AEL, dissyllabe; ne se trouve qu'à la fin de noms. propres venus de l'hébreu ou de l'arabe, et qui sont des composés de EL, Dieu. Ex.: Israël, Ismaël, Raphaël, Azraël. AEN, diphthongue dans Caen (ville de France) qui se prononce Can; dissyllabe dans Jaën (ville d'Asie).

AI, toujours diphthongue, soit à la fin, soit à l'intérieur, soit au commencement des mots, excepté dans le verbe Hair, dans quelques mots hébreux ou étrangers, comme : Abigail, Caiphe, Sinaï, Bidpaï, Taïti, Caïman, et divers noms de femme venus du grec : Anaïs, Athénaïs, Zénaïde. AIN, toujours diphthongue, excepté dans Caïn et Tubal

caïn.

AO, diphthongue dans Saône (rivière) qui se prononce Sône; dissyllabe dans les autres mots, tous d'origine étrangère, comme Bilba-o, Caca-o, Ma-ori.

AON, diphthongue dans Faon, Laon (ville de France), Paon, Taon, qui se prononcent Fan, Lan, etc., dissyllabe dans Lyca-on, Macha-on, Pha-on, Phara-on, Cra-on, et autres noms propres, ainsi que dans Pa-onneau (petit paon). AOU, diphthongue dans Août qui se prononce Oût; dissyllabe dans A-oûter.

AU, toujours diphthongue, excepté dans Esaü et Saül. AY, toujours dissyllabe sans aucune exception. Ex.: Pays, Paysan,Effrayer, Effrayant, qui se prononcent Pai-is, Pai-i-san, Effrai-ier, Effrai-iant.

EA, dissyllabe dans Gréa, Agréa, Maugréa, Créa et les composés, ainsi que dans quelques noms propres tirés du grec Léa, Rhéa; diphthongue dans tous les autres cas. Ex. Nagea, Logea, Plongea, Jugea.

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